Critique : Breaking Bad 5.03

Le 03 août 2012 à 14:13  |  ~ 9 minutes de lecture
Cette semaine, Breaking Bad fait la part belle au camp « noir » de notre partie d'échec. Point de Hank cette fois-ci, quelque minutes de Marie mais surtout, de grandes discussions pleines de regards qui en disent long pour savoir qui à la plus grosse, sous l'oeil d'un Jesse qui compte les points malgré lui.
Par Scarch

Critique : Breaking Bad 5.03

~ 9 minutes de lecture
Cette semaine, Breaking Bad fait la part belle au camp « noir » de notre partie d'échec. Point de Hank cette fois-ci, quelque minutes de Marie mais surtout, de grandes discussions pleines de regards qui en disent long pour savoir qui à la plus grosse, sous l'oeil d'un Jesse qui compte les points malgré lui.
Par Scarch

Une équipe hors du commun

 

Je ne sais pas vous, mais moi (je vais éviter de m'étendre trop sur ma vie sinon El Piolito va encore être méchant gratuitement), je prends chaque pré-générique comme l'apéritif de l'épisode. Celui qui donne le ton, ou plutôt le goût acide/amère/sucré/salé de ce qui suit. Et chaque semaine, c'est la même chose : une mise en bouche de haut niveau qui force le cuisinier à se montrer à la hauteur pour la suite. Et tout ceci se conclut par un petit digestif souvent si fort qu'il nous permet de digérer toute la substance de l'épisode.

Le troisième opus de cette cinquième saison ne déroge pas à la règle. Le pré-générique - pour une fois assez fade – nous annonce un épisode axé sur le dialogue et l'ascendance psychologique. Le twist final habituel ne souffre d'aucun effet d'annonce mais remplit son rôle : Ne cherchez plus, laissez venir... Breaking Bad nous prend par la main et nous guide dans les méandres de la sournoiserie et de ce que l'être humain produit de plus malsain.

Faisons un tour d'horizon du camp « noir »

Mike, le cavalier, correspond de plus en plus à l'image que je me faisais de lui : il était le chevalier de son maître Gus, obéissant à un certain code d'honneur, franc, droit, intimidant et solide. C'est ainsi que semble fonctionner son monde et cet épisode nous montre ô combien il est différent de celui de Walt. Nous reviendrons sur leur combat de coq plus tard mais il apparaît désormais que si Mike était le fidèle sujet de Gus c'est clairement parce que ce dernier lui a montré sa valeur. Il faudra vraisemblablement bien plus à Walt que son intellect pour s'attirer les services désintéressés (ou pas) de Mike.

Jesse le fou -qui l'est le moins des trois- est pour le moment entièrement sous l'emprise de Walt. Celui-ci lui joue de la harpe dans les oreilles sur une gamme de plus en plus étendue : amitié, dépendance, sentiments, crainte, respect, admiration... Plus dure sera la chute. En me risquant à faire des prédictions sur la suite je dirais qu'en bon fou qu'il est dans cette partie d'échec, il est à la fois la pièce la plus puissante et la plus dangereuse du jeu de Walt. Cinq saisons ont fait de lui un jeune homme disposant d'une certaine sagesse mêlée de naïveté, d'un courage et d'une fidélité inébranlable, et surtout d'une conscience parfaitement soupesée de chacun de ses actes. Il est selon moi le principale maillon de la réaction en chaine qui suivra l'explosion de la bombe à retardement Walt.

Saul la tour est la première ligne de défense de l'équipe. Ses relations lui permettent une approche offensive aussi bien que défensive de son camp. Il est également le joker narratif des épisodes et permet quelques colmatages dans la trame. Il est cependant si bien utilisé que la prestidigitation à ce niveau n'en est même plus.

Cet épisode nous a montré Skyler en reine de Walt. Une pièce aussi fragile que puissante dont le destin est souvent lié à l'issue d'une partie d'échec. Walt l'a parfaitement jouée. Il s'en est servi pour manger une des pièces de Hank, Marie, par un coup d'une telle sournoiserie qu'il ne laisse plus planer aucun doute sur ses intentions. Mais ce « shut up » mérite bien que l'on y consacre un paragraphe, donc j'y reviendrai plus loin.

Walt, le roi donc, perd un peu plus d'humanité à chaque triomphe de son intelligence. Celle-ci gonfle son égo au point que celui-ci a pris la place de sa famille, sa morale et son objectif initial. Il est devenu une machine à fomenter dont la faiblesse réside dans l'affrontement frontal. A l'instar du roi qu'il représente, Walt est incapable de tenir tête à une autre pièce sans avoir l'assurance qu'il soit en sécurité pour le faire, ce qui nous amène à penser qu'il sera incapable de gagner cette partie seul. Et cet épisode est une parfaite représentation du combat pour la place de mâle dominant du groupe ou l'on retrouve le sens de la stratégie de Walter White/Heisenberg.

 

Jesse, Walt, Mike et Saul

 

Le petit travailleur et le grand fainéant.

 

Les dialogues musclés entre Walt et Mike nous rappellent l'histoire de nos civilisations. Les plus forts font les conquêtes pendant que les sournois complotent pour prendre le trône et profiter du résultat. Je ne parlerai pas de la stratégie de Walt dont le capilotractage ne vient que d'une volonté de décider blanc quand tout le monde pense noir. Walt doit assoir son autorité et si cela fonctionne parfaitement sur Jesse, c'est une autre paire de manches concernant Mike. Ce dernier devient inquiétant car il se positionne clairement en tant qu'électron libre, ce qui ne va pas du tout avec l'égo dévorant de Walt. L'étincelle qui mettra le feu aux poudres du feu d'artifice final de la série pourrait bien provenir de là. Ces deux protagonistes ont besoin l'un de l'autre. Malheureusement, l'égo de Walt pourrait bien le faire basculer dans une position désavantageuse à moyen terme car Mike est également l'objet des coups de Hank le roi d'en face.

Pour nous, spectateurs, c'est tout simplement l'extase. Les dialogues sont encore une fois d'une justesse passionnante, le tout servi par une interprétation toujours impeccable. On est, depuis bien six épisodes, dans du très grand Breaking Bad.

De plus, l'épisode nous gratifie une fois de plus de séquences totalement trippantes : la préparation qui fait passer la chimie pour un truc passionnant (et pourtant, je suis fâché avec la chimie depuis que je sais qu'elle utilise un langage très vulgaire où il est question de mole et de masse molaire moléculaire... très vulgaire disais-je), le passage Scarface à plusieurs niveaux de lecture, les dialogues entre Walt et Mike et surtout, le partage du butin.

 

Mais qui a la plus grosse?

- Walt : tu sais comment je fais pour en avoir une de 40 cm?  - Hank : Non?  - Walt : Je la plie en deux.

 

(Shut up ! Shut up ! Shut up !)²

 

Mais alors pourquoi 15 ? D'abord parce que Marie revient et elle était très bien là ou elle était. Non pas qu'elle soit mal interprétée ou inutile, mais elle m'est de plus en plus insupportable. C'est son rôle qui veut ça. Elle révèle le fond de son entourage en les poussant à bout. Sa présence et sa voix stridente font perdre de manière arbitraire un bon point à l'épisode.

Pour continuer et une fois n'est pas coutume, ce sont les femmes qui m'ont déçu cette fois. Skyler est méconnaissable depuis deux épisodes et j'y voyais de la méfiance mêlée d'une certaine peur de l'inconnu Walt. Sa réaction avec Marie m'a davantage fait penser à de la terreur, ce qui m'a laissé un peu perplexe. J'ai eu la sensation – et le debrief de l'épisode avec Taoby m'a montré que j'étais apparemment seul à le penser – qu'Anna Gunn elle-même n'était pas vraiment dans son rôle pour ces « shut up » à répétition. Ce rôle et son interprète m'ont habitué à mieux et en général, ses « séquences émotions » me prennent aux tripes alors que là, j'étais plus proche de la pitié.

J'ai cependant conscience que ce soit voulu mais il me semble qu'une ellipse nous a fait perdre de vue le positionnement de Skyler.

Pour être plus clair, Skyler a traversé fièrement de nombreuses épreuves pendant quatre saisons. Désormais, il semblerait que la terreur que lui inspire Walt soit plus importante que la culpabilité liée à la mort de son ex-amant et cela ne me semble pas correspondre à l'image que j'avais de son personnage. On ne montre plus Skyler la mère, ni Skyler la femme, ni encore Skyler la chef d'entreprise organisée. Pourtant, ces Skyler-là existent forcément et le fait de la montrer avec Marie m'a laissé caresser l'espoir qu'elle était plus qu'un petit être à bout.

Enfin, le dernier bémol concerne la facilité avec laquelle Jesse s'est séparé de ses rêves familiaux. En dix minutes de timer, il est passé du stade d'amoureux désirant fonder une famille à celui d'homme d'affaire froid.

La seule chose qui me ferait pardonner ces précipitations dans la trame (hormis Marie) serait qu'elles aient une bonne raison. J'aimerais que Skyler prépare en secret une riposte et que Jesse ait simplement menti à Walt concernant sa rupture.

J'espère aussi secrètement que Skyler et Walt étaient à eux deux ce qu'était Gus à lui tout seul. En perdant la confiance de sa femme, Walt a ainsi éloigné la prudence de son jeu. La suite nous dira si mon analyse se tient ou pas.

 

Skyler craque

 

Bref, maintenant que l'on a fait le tour du camp « noir », j'espère que la suite nous fera visiter l'univers de Hank. A la semaine prochaine, en espérant ne plus voir Marie, tout en restant sur le même ryhtme.

 

Ce que j'ai aimé :

  • Jesse : le Bon
  • Mike : la Brute
  • Walt : le truand.

 

Ce que je n'ai pas aimé :

  • Marie : l'Insupportable
  • Skyler : l'Effacée

 

Note : 15/20

L'auteur

Commentaires

Avatar Taoby
Taoby
Houhouhouhouhouhou la gueule des photos. Houhouhhahahahahahahahahahhahahah ho putain. Hahahhahahahahahaahhaah. J'en ai révé tu l'a fait, sortez vos lunettes de soleil les gars, c'est le retour des photos 365 couleurs de Scarch, hahahhahaha, houhouohuhouhouhouh. Putain quelqu'un à des lunettes 3d à me filer, j'arrive pas a trouver l'angle. Haaaaaaa putain que c'est bon. Bon plus sérieusement, je te trouve vraiment dur concernant Skyler, moi j'ai pas l'impression qu'elle se soit effacé comme ça, depuis Crawl Space la gonzesse est terrifié, depuis qu'elle sait qu'on peut tuer sa famille à n'importe quelle moment, que son mari à fait péter une bombe dans un hosto et que Ted est paralysé ( il n'est pas mort comme tu le dis par contre) Et Jesse on nous a jamais survendu, sa romance avec la petite mexicaine. D'autant que comme tu dis peut être qu'il a menti à Walt. Mais bon merci pour les photos, tu a égayer ma journée, putain. Et comme à a chaque fois tu a choisit une photo avec les trois chauve, c'est limite si on ne sait pas qui est qui. Houhouhouhouhou.

Avatar OSS
OSS
Scarch Fotografien : Deutsche Qualität

Avatar Antofisherb
Antofisherb
Super métaphore filée à propos des échecs, j'ai bien aimé :) Sinon, je comprend pas tout cet acharnement envers Marie. Ok le perso est insupportable et elle était inutile à la saison 4, mais là elle devient un élément important de la relation Walt/Skyler donc je vois franchement pas où est le problème. Et par rapport à la rupture de Jesse avec la mexicaine, c'est vrai qu'elle paraît un peu rapide pour un esprit réfléchi comme Jesse. Mais je pense pas qu'il ai menti à Walt. D'abord parce que lors de sa discussion avec lui, Walt ne lui a pas dit "rompt avec elle" mais "je suis sûr que tu feras le bon choix", en savant bien entendu pertinemment ce que ferait Jesse selon son sérieux habituel. Donc dans la mesure où c'est Jesse qui doit faire un choix, je vois pas pourquoi il lui mentirait. Ah et aussi, perso Walt je le verrais plus en Brute à cause de son esprit sournois et sa volonté de manipuler tout le monde. Il veut devenir Truand mais pour l'instant ça reste Mike, qui est à la fois calme et efficace.

Avatar mista
mista
Ca a l'air sympa ces seances de debrief de l'episode avec Taoby, c'est quand, on peut venir?

Avatar Koss
Koss
"Une pièce aussi fragile que puissante dont le destin est souvent lié à l'issue d'une partie d'échec. " => C'est sympa de filer les métaphores comme ça, avec les échecs depuis 3 critiques, mais encore faudrait-il que cela ait du sens. Alors, récapitulons-nous : - Une reine au échec n'est jamais une pièce fragile, contrairement à ce que tu affirmes. C'est juste la pièce la plus forte du jeu. - "Saul la tour est la première ligne de défense de l'équipe. " => La tour n'est pas ce que tu bouges en premier au échec, mais plus vers le début de fin de partie quand il y a de la place sur l'échiquier. Donc ce n'est pas une "première ligne de défense", mais au contraire, une arrière garde. -"il était le chevalier de son maître Gus, obéissant à un certain code d'honneur, franc, droit, intimidant et solide." => Tout le contraire : le cavalier est une pièce sournoise, qui bouge en premier dans un jeu lorsque l'échiquier est bouché et qui - souvent - se sacrifie en premier. Le début de ma description correspond effectivement à Mike. La suite, beaucoup moins. Cela ne correspond pas en tout à la tienne, Scarch. -"Jesse le fou -qui l'est le moins des trois- est pour le moment entièrement sous l'emprise de Wal". Le fou n'est sous l'emprise de personne. C'est précisément la pièce qui agit seule par excellente ; celle qu'on envoi vite et loin dans les défenses adverses. C'est une pièce, par définition, indépendante. Désolé Scarch, mais ça marche pas ton truc.

Image Breaking Bad
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