Critique : Life On Mars (UK) 1.04

Le 02 mai 2011 à 09:32  |  ~ 7 minutes de lecture
Dans ce superbe épisode aux accents freudiens, Sam questionne son sens de l'éthique et son rapport à l'argent. Au programme, des retrouvailles dangereuses, Sam Tyler et les femmes (bis) et un équilibre des pouvoirs personnalisé par Gene Hunt.
Par sephja

Critique : Life On Mars (UK) 1.04

~ 7 minutes de lecture
Dans ce superbe épisode aux accents freudiens, Sam questionne son sens de l'éthique et son rapport à l'argent. Au programme, des retrouvailles dangereuses, Sam Tyler et les femmes (bis) et un équilibre des pouvoirs personnalisé par Gene Hunt.
Par sephja

Pitch pot de vin 

Suite à une bagarre, Sam Tyler met en état d'arrestation un dénommé Edwards, qui se vante de travailler pour Steven Warren, un patron de boîte de nuit qui a su s'acheter les services de la police. Refusant de se laisser corrompre, Sam va se retrouver pris dans une manigance où une jeune danseuse va servir d'appât pour l'obliger à se plier aux règles.

 

Episode superbe au thème quasi freudien

Pour cet épisode, Sam va se retrouver confronté à son propre passé et à sa mère, ce qui va le pousser à devoir s'interroger sur ses propres valeurs. Centré sur Sam avant tout, le récit va s'axer sur une histoire de corruption. Le jeune inspecteur découvre le système d'arrangement qu'a monté Warren avec la police. Pour Sam, qui idéalise depuis son enfance ce travail, il est absolument inenvisageable d'accepter le moindre cadeau et donc de participer à cette spirale mêlant corruption et service rendu. 

Le vrai danger de cet épisode est l'absence durant la moitié de sa durée d'une véritable enquête, poussant l'intrigue à se centrer sur Sam Tyler et ses problèmes d'éthiques. L'irruption au sein du récit de la mère de Sam va alors permettre de clarifier la question de l'origine du sens de la morale et des valeurs du jeune Tyler. Totalement déstabilisé par sa rencontre avec elle, le héros va se montrer à la fois maladroit et passif, subissant une régression potentiellement dangereuse. 

Son refus acharné d'être corrompu n'est en fait que l'expression d'une volonté de plaire à sa propre mère, l'image que l'on a de soi étant liée à cette échelle de valeur qui nous est inculquée dés l'enfance. Sam agit donc de manière inconsciente en se révoltant contre Warren, exprimant son désir d'une justice qui ne tient pas compte de la réalité, son comportement chevaleresque appuyant l'impression que tout cet univers n'est qu'une manifestation de son propre esprit.

Au final, un épisode surprenant, très ambitieux sur le fond, qui trouve la forme assez adéquate pour mettre en avant le syndrome du chevalier blanc de Sam Tyler. Construit sur des bases idéales, le scénario, bien que très classique dans la forme, va se montrer particulièrement généreux en matière d'émotion, Sam se trouvant particulièrement déstabilisé en présence de personnages féminins. 

 

Sam Tyler et les femmes seconde partie

 

Si le commissariat de Hunt est un terrain où Tyler exprime sans problème sa personnalité, il éprouve de plus grande difficulté dés qu'un personnage féminin s'oppose à lui. Jony, une jeune danseuse du club, va se jouer avec facilité de Tyler, montrant l'ampleur de la vulnérabilité de Sam face à une femme qui prend l'apparence d'une victime. Interprétée par l'excellente Kelly Wenham, elle va obliger Sam à remettre en question sa propre conception de la vérité et du mensonge.

Incapable de douter de la parole d'une femme qui pleure, Sam se montre particulièrement naïf, mais aussi irrésistiblement chevaleresque. Sa mère va, elle aussi, se montrer naïve, plus soucieuse de l'éthique que de l'argent, jugeant un geste par sa signification plutôt que sa valeur. Ainsi se définit donc Sam Tyler, à la différence d'un Gene Hunt pour qui une mauvaise action peut toujours être équilibrée par une bonne, à la recherche de l'équilibre des pouvoirs. 

Relégué du rang de confidente à celui de simple collègue, Annie va se montrer bien plus efficace en cessant de s'immiscer dans la vie privée de Tyler et en se montrant plus comme une amie qu'une figure maternelle. Le personnage, toujours affaibli par un début de saison désastreux, retrouve lentement une place dans l'intrigue en prenant ses distances avec le héros. Liz White n'a clairement pas le talent de Kelly Wenham, mais parvient à s'imposer dans cette histoire en faisant culpabiliser Tyler de manière plutôt subtile. 

Indécrottable chevalier servant, Sam est avant tout le fruit d'une éducation où la morale est prioritaire sur les apparences, où le regard posé par l'autre sur nous est plus douloureux que de simples moqueries. Lorsque Ray Carling insulte Sam, l'inspecteur ne perdra ses moyens qu'une fois que son collègue l'aura regardé dans les yeux, laissant apparaître toute la sincérité de ses propos. 

Ainsi il en va de Sam Tyler, convaincu que le seul équilibre des pouvoirs possible est d'être d'un blanc immaculé, quitte à subir des coups bas et les trahisons pour mieux pouvoir se relever, plus fort encore que précédemment. Un héros, dans la définition la plus noble du terme, un être utopique sorti tout droit des livres d'aventures pour enfant, voilà ce qu'est l'inspecteur Tyler. 

(Petite remarque personnel à Puck, j'en garde encore sous le pied concernant Sam et les femmes, je te rassure)

 

Gene Hunt et l'équilibre des pouvoirs 

Absent du début de l'épisode, Gene va faire un retour fracassant en mettant au grand jour le conflit qu'il y a toujours entre la justice théorique et pratique. Homme de terrain, Hunt essaie de maintenir avant tout un équilibre entre les forces qui tiraillent Manchester afin d'assurer la sécurité de ses concitoyens. A l'opposé des problèmes de moral de Tyler, son seul souci est que le maintien d'un ordre, le sien, quitte à se montrer plus ou moins regardant avec certaines pratiques. 

Moins chevaleresque que Tyler, il connaît ses faiblesses, mais n'est à aucun moment un vendu, jouant perpétuellement sur la nuance pour parvenir à conserver le contrôle. A l'opposé de la tolérance zéro du héros, Hunt croit en l'existence d'un purgatoire entre l'enfer et le paradis, et est parfaitement conscient qu'aucun des deux extrêmes ne lui convient. Porté par un Philip Glenister toujours aussi incroyable, le chef s'avère un observateur assez cynique de la nature humaine, préférant un travail efficace à un travail impeccable. 

L'équilibre des pouvoirs consiste à tenter de toujours sentir les forces en présence et à s'arranger pour que jamais une ne passe au dessus de l'autre (un concept qui me fait toujours penser à Sakharov). Son équilibre nécessite d'être sur le terrain et Gene ne peut être accompli derrière un bureau ou un ordinateur tant ses méthodes nécessitent d'être attentif aux moindres événements qui constituent le quotidien de Manchester. Son ralliement final à la cause de Tyler obéit à cette même logique, Hunt ne pouvant décemment laisser une jeune femme se faire égorger impunément. 

 

Un épisode superbe porté par un grand scénariste 

Si la direction artistique est encore irréprochable (hormis que Mean Streets de Scorsese n'est pas vraiment un film sur la mafia), l'épisode impressionne surtout par la qualité du scénario de Ashley Pharoah qui donne ici toute sa force à une histoire plutôt simple en apparence. En s'appuyant avant tout sur les personnages, les créateurs montrent la supériorité de bâtir une histoire sur des bases solides plutôt que sur un concept spectaculaire. 

Reste une mythologie qui se fait discrète, même si cet épisode est celui de la saison qui me fait le plus penser que tout ceci n'est qu'une construction psychique de Tyler. Le final avec les applaudissements sonne vraiment faux, confirmant que le commissariat entier n'est que la projection de la psyché du héros et de ses démons intérieurs. 

 

J'aime :

  • le scénario d'une grande intelligence 
  • la mise en scène impeccable 
  • John Simm imprégné par son rôle 
  • une approche freudienne de Tyler très réussie
  • Kelly Wenham formidable  

Je n'aime pas : 

  • un final un rien bâclé 
  • une idée de départ pas très originale

Note : 16 / 20

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L'auteur

Commentaires

Avatar Puck
Puck
J'aime bien ces petites remarques dédicacées. Oui, je me doute que tu en gardes sous le pied, même si pour le moment je trouve que ton analyse du syndrome du chevalier blanc colle parfaitement. En revanche, là où je ne suis pas d'accord avec toi, c'est sur Gene Hunt. Il est compromis, vendu un peu. Et surtout il en est parfaitement conscient et pas particulièrement fier. Même s'il estime que c'est le prix à payer pour une certaine tranquillité dans la ville. Enfin, c'est comme ça que j'ai vu les choses sur cet épisode.

Avatar elpiolito
elpiolito
Pas grand chose à ajouter sur ta critique, c'est la même chose pour moi. Je suis d'accord que le final est un peu baclé quand même...

Image Life on Mars
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