Critique : Manhattan 1.01

Le 07 août 2014 à 18:19  |  ~ 7 minutes de lecture
Avec Manhattan, WGN délivre une série historique qui retrace avec justesse une page quasi méconnue de la Seconde Guerre, celle de l'arme nucléaire.
Par arnoglas

Critique : Manhattan 1.01

~ 7 minutes de lecture
Avec Manhattan, WGN délivre une série historique qui retrace avec justesse une page quasi méconnue de la Seconde Guerre, celle de l'arme nucléaire.
Par arnoglas

Cette année, WGN America a choisi de se faire une place dans la création de programmes originaux avec tout d'abord Salem, découverte au printemps dernier. Manhattan est donc le nouveau drama de la petite chaîne où l'action se déroule en 1943 au Nouveau-Mexique dans une ville située au milieu de nulle part. Nous sommes en pleine guerre mondiale, l'Amérique est encore traumatisée par les événements de Pearl Harbor et le gouvernement a mis au point le projet Manhattan, consistant à réunir tous les plus grands scientifiques et intellectuels du pays ainsi que leurs familles dans cet El Dorado créé de toute pièce, afin d'inventer une arme qui pourrait mettre fin au conflit mondial : la bombe atomique.

Créée par Sam Shaw (Masters of Sex), la série propose de suivre la construction de cette arme qui faisait peur à tout le monde à travers le regard des personnes qui en sont à l'origine (et qui ont changé le cours de la Seconde Guerre Mondiale) et celui de leurs proches, qui ont accepté de tout quitter et de les accompagner dans cette aventure. Le spectateur est alors plongé dans un univers où le secret est un art de vivre, où l'armée surveille tout pour que rien de filtre et que personne ne sache ce qui se passe réellement dans cette petite communauté, où la paranoïa est ambiante et où chacun tente de régler ses problèmes et de se construire une nouvelle vie, du moins jusqu'à la fin de la guerre.

 

 

L'histoire d'un secret



La Seconde Guerre Mondiale est un thème fréquent en matière de séries télévisées, nombreuses sont celles qui décrivaient le parcours héroïque et hors du commun des hommes envoyés sur le front pour servir leur pays (The Pacific, Band of Brothers). Manhattan propose de suivre le conflit mondial sous un angle différent. Nous sommes dans les coulisses de la guerre, auprès de ces personnes qui ont participé à la fabrication des armes utilisées lors des combats, précisément à la conception de la toute première bombe nucléaire. La série est donc dotée d'une unité de temps prédéfinie, puisqu'elle débute en juillet 1943, il ne reste plus que deux ans avant les explosions successives d'Hiroshima et Nagasaki : le compte à rebours est lancé.

 

 

Le casting de Manhattan

 


Manhattan joue énormément sur le mystère, les habitants ne doivent pas savoir ce qui se passe réellement ni ce qui se prépare, d'où la présence de soldats chargés de surveiller les moindres faits et gestes de ses savants rassemblés avec femmes et enfants. Aucun d'entre eux n'a le droit de confier à sa famille la nature exacte de ses travaux et tous vivent sous la menace d'une fausse accusation de trahison ou d'opération visant à faire échouer une des plus grandes stratégies militaires des Etats-Unis au profit de l'ennemi. Nous faisons ainsi connaissance avec des personnages obligés de mentir pour éviter toute réprimande de la part de l'armée, tandis que d'autres ont du mal à s'habituer à cette nouvelle vie qui ne ressemble en rien à ce qu'ils avaient connu auparavant.

 


Héros malgré eux

 


Bénéficiant d'une réalisation soignée et de très beaux décors, le pilote de Manhattan créé un sentiment de peur et de tension en faisant évoluer ses héros dans une communauté située en plein désert, loin de tout contact avec la ville, coupés du monde extérieur. Personne ne peut en sortir sans autorisation de l'armée, encore faut-il qu'elle ait suffisamment confiance en eux pour croire que ce ne sont pas des traîtres et qu'ils n'iront pas dévoiler ce secret au-delà des frontières. L'enjeu est de taille pour ces savants et scientifiques car ce sont sur leurs épaules que repose la fin de la guerre. Le but est de concevoir une arme qui pourrait faire peur à l'ennemi et le dissuader de contre-attaquer face à une menace nucléaire encore plus grande et dévastatrice que les atrocités qu'il commet à l'encontre de populations innocentes, les personnages faisant référence à plusieurs reprises au massacre des Juifs par Hitler.

 

 

Frank Winter et son mentor

 

 

Animés par un désir de justice envers les victimes et un patriotisme indiscutable, tous ont l'intime conviction que la victoire ne sera pas remportée par les muscles ou les capacités physiques et que la guerre est une question de stratégie et d'intelligence. D'après eux, ils sont les héros de la Seconde Guerre et non pas les hommes envoyés sur le terrain. C'est en construisant des engins puissants et dévastateurs que l'on peut gagner et réduire l'adversaire à néant, le pousser à capituler et ainsi imposer la paix une bonne fois pour toute. Une paix qui ne s'obtiendra que par la destruction, néanmoins. Les scientifiques et le gouvernement ne sont pas dupes, ils sont conscients de la portée de leur projet et quelles conséquences ceci pourrait engendrer dès que la guerre sera terminée. C'est une arme dangereuse et terrifiante qui pourrait se révéler incontrôlable à l'avenir, d'où la référence au Golem en fin d'épisode.

 

 

Chacun chez soi

 

 

Par ailleurs, Manhattan réussit l'exploit de concilier dimension historique et intrigues familiales de chaque personnage. Frank Winter est le meneur de projet obsédé par l'envie de réussir et de mener à bien ses expériences, hanté par les horreurs qui se produisent et les morts qui s'enchaînent jour après jour. Il est prêt à tout pour que tout ceci s'arrête. Sa femme Lisa ne le reconnaît plus et s'interroge constamment sur les raisons pour lesquelles ils ont quitté la ville et sur la nature de ses expériences. Exaspérée par les secrets que lui cache son époux, elle sait que cela sera décisif pour la suite des événements. Charlie Isaacs est un jeune mathématicien promis à un brillant avenir qui se rend compte progressivement de l'ampleur du projet et qui ne supporte plus de mentir à ses proches, c'est pourquoi il finira par mettre sa femme son épouse Abby dans la confidence, ce qui renforce le côté mystérieux de la série.

 

 

Liza Winter

 

 

En effet, dans cette course à l'armement où rien ne doit filtrer, personne n'est irréprochable. Tout le monde peut être considéré comme un espion, les liens familiaux et amicaux sont littéralement détruits pour laisser place à une paranoïa violente et assumée, la présence de l'armée aidant. Quiconque est soupçonné de trahison, quiconque commet une erreur ou un faux pas ne peut ressortir vivant de cette utopie perdue au fin fond des Etats-Unis, le plus important étant de protéger le secret militaire. Le pilote se permet même d'apporter un peu de légèreté histoire de faire oublier la guerre et la gravité de la situation et cela passe par les chansons diffusées à la radio, la fête du 4 juillet avec les feux d'artifice qui rappellent furieusement les coups de feu, les commérages entre voisines et scènes quotidiennes, le tout sous fond d'insouciance et de regret d'une période bénie que les héros tentent de retrouver non sans difficultés.

 

 

Ce premier épisode est donc une très belle introduction pour une série dont le pitch de départ paraissait limité, mais qui réussit à divertir et intriguer ne serait-ce que par ses personnages et leurs intrigues personnelles, ainsi que par son ambiance proche du thriller et du drame familial et le sentiment de nostalgie et d'incertitude en l'avenir qu'il parvient à installer. Une reconstitution historique brillante et captivante.

 

J'aime :

 

  •  L'ambiance paranoïaque
  •  Les personnages sympathiques
  •  La beauté des décors
  •  Une reconstitution impeccable

 

Je n'ai pas aimé :

 

  •  Un pitch assez limité
  •  Un avenir incertain sur la direction à prendre

 

Ma note : 15/20.

L'auteur

Commentaires

Avatar Sheena
Sheena
Bon, après avoir vu le pilot je suis vraiment pas emballée... C'est vrai que les décors sont superbes mais ils sont gâchés par une post-production fumeuse (c'est le cas de le dire, du sable et de la fumée ajoutée partout) En ce qui concerne l'histoire et le pitch, ta critique est bonne, peu de potentiel mais bien exploité. Par contre l'ambiance paranoïaque n'est pas si bien rendu que ça, c'est quand même vite fait et les personnages vont trop vite vers le craquage / la confidence... Pour moi, il manque un petit développement sur les MP et leurs méthodes, il y a les 2 partis "groupes de travail", il en manque un troisième "US army" qui est présent sans l'être vraiment. Tout ça pour dire que je vais quand même voir l'épisode 2, nous ne le rappelons jamais assez, ne jamais juger une série entière à son pilote.

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