Critique : The Slap 1.05

Le 05 novembre 2011 à 18:16  |  ~ 9 minutes de lecture
Le portrait d'une mère au bout du rouleau et des dangers de vivre dans l'illusion d'un bonheur qui vous détruit lentement.
Par sephja

Critique : The Slap 1.05

~ 9 minutes de lecture
Le portrait d'une mère au bout du rouleau et des dangers de vivre dans l'illusion d'un bonheur qui vous détruit lentement.
Par sephja

La famille comme un refuge 

Rosie reçoit enfin la date pour son procès contre Harry concernant la gifle qu'a reçu le petit Hugo durant le barbecue de l'anniversaire d'Hector. Plus le jour approche et plus elle se sent isolée, la pression de l'audience entraînant une crise au sein de son couple, mais aussi entre elle et ses amies. Seul Samira, une femme qu'elle a seulement rencontré au barbecue, accepte encore de l'aider en acceptant de venir témoigner à son procès. 

 

Résumé de la critique 

Un épisode poignant que l'on peut détailler ainsi : 

  •  le portrait sans concession d'une mère  
  •  un procès comme un retour à la réalité 
  •  la famille comme un refuge, mais aussi comme un mensonge 
  •  une crise sur le point d'exploser

 

 

Rosie et Hugo, les apparences d'une mère idéale 

Pour cet épisode, The Slap va s'orienter sur le procès, maintenant que tous les personnages centraux de l'affaire ont été mis en avant. Le centre de gravité du récit va alors se placer sur Rosie, une femme qui ne vit plus que dans l'optique de cet évènement, continuant de vivre une relation fusionnelle avec Hugo. Aveuglée par son rôle de mère, elle devient inconsciente de la lente descente aux enfers de son mari, l'ombre d'un père qui subit l'influence de sa dépendance pour l'alcool. C'est ce thème qui va organiser tout l'épisode, celui de la famille comme une drogue qui masque une horrible vérité, celle d'un manque d'amour terrifiant. 

Pour comprendre l'épisode, il faut voir qu'aux yeux de Rosie, le monde se divise en deux : l'univers où se trouve Hugo d'une clarté limpide et la réalité trouble où elle semble totalement déboussolée. L'épisode sur ce point ne fait pas le moindre cadeau à son héroïne, Melissa Georges étant absolument remarquable dans ce rôle particulièrement difficile. La première partie de l'épisode parle de l'univers d'Hugo, un enfant capricieux vivant dans une bulle avec sa mère, à l'écart du monde extérieur. 

Rosie aime clairement Hugo, si tant est qu'on considère l'amour non comme un épanouissement mutuel, mais comme un sacrifice d'une mère pour son fils, abandonnant sa vie pour l'autre. Durant vingt minutes, la série nous dresse un portrait parfaitement objectif d'une famille comme une autre, tout en plaçant les éléments nécessaires pour la suite, les preuves du dysfonctionnement de cette famille. Les apparences sont en effet trompeuses et la vérité va frapper l'héroïne de plein fouet, amenant un sens nouveau à ce premier acte et à son comportement. 

La série possède le mérite de s'attaquer au tabou ultime en proposant un portrait de mère d'un réalisme remarquable où la maternité devient un poison qui détruit lentement le corps et la personnalité d'une femme. Finalement, la relation entre Hugo et Rosie n'a rien de fusionnelle, juste l'histoire de deux êtres que le destin a relié, mais qui ne parviennent pas à se connecter malgré les efforts de sa mère.

 

Un procès comme un révélateur cruel 

La scène centrale de l'épisode est le procès de la gifle, Rosie ayant refusée jusqu'au bout de régler cette histoire de manière tacite. La mise en scène se fait brutalement plus froide, isolant Rosie du reste de sa famille, la jeune femme se retrouvant seule dans le box des témoins. Le problème de Rosie vient du fait que, malgré les apparences, elle ne fait pas partie de la famille d'Hector, contrairement à Aisha ou Anouk, comprenant vite qu'elle ne peut donc pas compter sur leur soutien. Isolée, elle s'aperçoit alors que, malgré les apparences et ses efforts pour s'intégrer, elle reste à l'écart de cette entité solidaire qu'est la famille. 

Les témoignages vont être tous les mêmes concernant la gifle, mais l'interprétation des gestes va être au centre des discussions, essayant de comprendre les intentions d'Harry, puis de Hugo. Les parents vont alors se retrouver en première ligne, les avocats du défendant se montrant particulièrement cruels, révélant la vérité que Rosie tentait au mieux de masquer derrière son amour excessif. Couple brisé et impossible, Rosie et Gary sont l'exemple parfait de cet amour qui détruit, une passion morte depuis longtemps maintenu artificiellement en vie comme un mensonge. 

Les hommes peuvent alors juger sans la moindre compassion ce couple dysfonctionnel, avec une brutalité impitoyable tandis que Rosie perd toute consistance à la barre des témoins. En voulant juger Harry, la jeune femme a oublié qu'elle subirait le même regard sur elle, non comme un être humain avec des faiblesses, mais comme une mère, entité sociale à qui aucune faute n'est pardonnée. C'est ici que se noue le drame de Rosie, cette impossibilité à être au niveau de l'image que le monde se fait d'une mère, personnage sacré qui subit par la société une pression terrible. 

Contrairement à la famille de Harry, celle de Rosie tombe en miettes, échouant à créer ce lien du sang indestructible qui relie les autres personnages de The Slap. La vie de Rosie apparaît alors comme une solitude terrible, celle d'une femme coupée du reste du monde qui s'isole tout le long de l'épisode, sombrant sans que rien ne vienne la sauver. 

 

 

Un troisième acte qui lève le voile des illusions 

Centre de l'histoire de The Slap, la famille apparaît comme une entité complexe, une réunion d'individualités si différentes dont la solidarité reste pourtant sans faille. Le final va montrer à Rosie le vrai visage de la sienne, découvrant avec alors la vérité sur elle-même et le vrai visage d'une destinée ratée. La gifle marque là aussi un retour à la réalité, mais celle-ci paraît alors si sombre, si atroce que le retour à l'illusion devient une nécessité, celle d'un bonheur faux et imaginaire, mais qui constitue notre seul refuge contre le plus terrible des désespoirs.

De son côté, son mari Gary s'enferme dans une autre bulle, celle d'un bistrot où il va se réfugier, subissant l'influence d'une population visiblement machiste pratiquant un racisme du quotidien. Un univers de haine larvée qui agit là aussi comme une famille imaginaire, interférant sur une vie de couple pathétique qui ne repose plus que sur une seule pierre: Hugo. Comme une faiblesse, l'alcool, l'amour, la haine, la passion les ont totalement submergés, détruisant toute notion de raison ou de logique dans leur existence.

En cherchant à punir le coupable de la gifle, Rosie s'est isolée encore un peu plus, marquant l'explosion de la bulle protectrice de sa propre famille. Seulement, la rupture entre le réel et l'illusion est tellement grande dans son cas et sa souffrance de mère impuissante tellement terrible que la négation devient clairement une nécessité. En détruisant un ennemi bien plus faible qu'eux, Harry a engendré le doute chez certains membres de sa propre famille, comme une rupture dont les conséquences ne vont épargner personne.

Du point de vue de Rosie, ce procès n'est qu'une étape dans un cycle destructeur, une parenthèse vite refermée pour masquer une destinée vraiment tragique, celle d'une famille qui n'existe que de manière illusoire, pour offrir un peu de bonheur à un jeune enfant. Du côté d'Hector et sa famille, la faille commence à s'agrandir et les épisodes à venir devrait marquer une rupture conséquente, jusqu'au drame final inévitable.

 

Des failles qui grandissent peu à peu 

Maintenant que l'histoire de la gifle est achevée, The Slap peut s'orienter vers son thème principal au travers de trois épisodes qui vont amener à la destruction totale du lien entre les membres de la famille d'Hector. Plus que le simple geste de la gifle, c'est la remise en cause de leur solidarité et la brutalité du traitement que subit Rosie qui va entrainer une scission profonde dans l'unité familiale. La scission commencera la semaine prochaine avec le patriarche, premier à être bouleversé par la souffrance de Rosie et le cruauté dont ils ont tous fait preuve envers elle.

Maintenant que le procès est fini, cette gifle n'est plus seulement celle de Harry, mais s'est étendu au niveau collectif, entraînant un malaise profond dans le coeur de la famille. En conclusion, un épisode de transition fort, centré sur le portrait d'une mère défaillante, mais aussi sur la cruauté de la famille d'Harry envers elle lors d'un procès brutal qui va laisser des traces. Toujours aussi ambitieuse et forte, The Slap place avec intelligence et subtilité les éléments nécessaires avant un final terrible, qui va faire exploser le tissu familial pour ne laisser que des miettes.

 

J'aime : 

  •  Melissa George et Anthony Hayes, tout deux excellent  
  •  la construction en trois temps brillante 
  •  un récit qui ne prend jamais parti 
  •  une ambition dans la mise en scène qui ne baisse pas d'un ton 
  •  un final terrible, dur et pourtant tellement humain 

 

Je n'aime pas : 

  •  toujours rien

 

Note : 16 / 20 

Avec Rosie, The Slap propose le portrait d'une mère défaillante et avant tout, du mensonge d'une femme qui fit dans une illusion pour masquer une réalité terrible, la souffrance abominable d'une mère qui a perdu le contrôle de son destin. Un épisode dur, qui poursuit le chemin tracé dans les épisodes précédents jusqu'à un final qui s'annonce prometteur.  

L'auteur

Commentaires

Avatar louna69
louna69
J'aime beaucoup lire tes critiques sur la série, elles sont toujours pertinentes et proposent un regard différent sur l'épisode vu, en général, elles me font noter plus que ce que j'avais prévu :)

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sephja
merci beaucoup. Sache que je lis aussi tes commentaires avec attention (comme celui des autres qui suivent la série) et cela me permet d'être moins partial.

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Koss
Deux questions : - C'est la meilleure nouveauté de la rentrée pour toi Sephja ? (vu les notes que tu mets, oui apparemment) - Il y a une saison 2 de prévu ?

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sephja
pas de saison 2 vu que c'est l'adaptation d'un roman. Pour l'avoir lu, la fin ne laissera aucune place à une suite, s'il la respecte. C'est difficile de dire si c'est la meilleure nouveauté car tout dépend ce que le spectateur cherche dans une série. Pour ceux qui désirent quelque chose sortant de l'ordinaire, quelque chose d'intense et d'original, mais avec une fin définitive comme The Shadow Line, cette série est incontestablement un évènement. La meilleure, je n'ai pas tout vu, je trouve Homeland très bon aussi, American Horror History a un vrai style et Revenge est vraiment prenante. En tout cas, elle serait dans le top 5 sachant qu'il reste encore du lourd à venir avec Luck, et quelques autres séries prometteuses. Mais oui, c'est à mon avis incontournable. Après, soit on aime, soit on aime pas...

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sephja
Tiens, pour te répondre Koss, il y a bibouf69 qui n'a pas adhéré à la série... comme quoi la série est loin de faire l'unanimité, évidemment :)

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