Critique : Veep 1.04

Le 28 juillet 2012 à 10:59  |  ~ 8 minutes de lecture
Un épisode de relance qui confirme la bonne impression du précédent et se révèle au final vraiment amusant grâce à une séquence de l'hôpital remarquable.
Par sephja

Critique : Veep 1.04

~ 8 minutes de lecture
Un épisode de relance qui confirme la bonne impression du précédent et se révèle au final vraiment amusant grâce à une séquence de l'hôpital remarquable.
Par sephja

Les deux manières de remporter un combat


Selina se prépare à passer dans l'émission « Rencontre avec la presse » et choisit d'envoyer deux membres de son staff à la dédicace du sénateur Chung qui a des vues sur son poste de vice-présidente. Amy charge un membre de l'équipe d'enquêter sur lui, découvrant que celui-ci n'est pas éligible à cause de sa naissance en dehors du sol américain. Une information qu'elle va malheureusement lâcher en off à la fin de son interview, tandis que ses soutiens au Congrès commencent à annoncer leur refus de voter sa réforme du filibuster.

 

Résumé de la critique

Un épisode amusant que l'on peut détailler ainsi :

  •  une intrigue en deux morceaux, alternant gloire et débâcle pour Selina
  •  une femme sans aucune intimité
  •  une histoire d'un cynisme remarquable
  •  un épisode de relance prometteur et malin

 

 

La frontière entre le succès et l'échec

 

Toujours construit sur un rythme dynamique qui ne s'essouffle jamais, Veep va se reposer sur un nouveau personnage, le sénateur Chung, pour amener un concurrent à Selina, mettant la pression sur l'actuelle vice-présidente. Son idée d'emploi propre étant totalement enterré par son association avec les milieux du pétrole, elle ne peut plus compter que sur sa réforme du filibuster pour exister politiquement et sauver la face. Malin, le scénario va la laisser croire à un possible retour en grâce pour mieux lui infliger une nouvelle fois la plus cruelle des désillusions.

Cette structure en deux parties est particulièrement réussie, chaque réussite de la jeune femme se transformant brusquement en désastre sur lequel elle ne dispose pas du moindre contrôle. En effet, la nature de Selina est autant son atout que son défaut, son empathie naturelle la rendant naturellement sympathique, mais entraîne une forte propension à commettre des bourdes désastreuses. Parfaite dans ce rôle épatant, Julia Louis-Dreyfus correspond parfaitement au profil de son personnage, montrant cette remarquable capacité à passer d'un état calme à une panique complète.

Hilarante, la scène de l'hôpital est l'exemple parfait de la force comique du show, la situation dégénérant en quelques secondes d'une séquence très positive pour Selina en une catastrophe médiatique. Remarquable, la comédienne nous fait partager le passage de la vice-présidente Meyers de l'enthousiasme au malaise lorsque les félicitations se transforment en hurlement nationaliste. Série cruelle et cynique, Veep nécessite un temps d'adaptation pleinement récompensé par le niveau de qualité d'une écriture précise et terriblement efficace, petit bijou de comédie ironique et grinçant.

 

Jamais seule

 

Personnage qui sombre fréquemment dans le ridicule, Selina aurait pu être abordé comme un personnage parodique, erreur à laquelle échappe les scénaristes en imposant avec succès un personnage très crédible et d'autant plus attachant. Chaque détail est soigné, les conseillers du vice-président Biden eux-mêmes ayant reconnu la précision de la reconstitution de l'équipe créative de Iannucci, toujours brillant dès qu'il s'agit de partir d'une situation réelle pour installer un décalage comique. En effet, l'humour ravageur des scénaristes s'attaquent avant tout à son équipe de communication, en particulier la première scène hilarante où Anna Chlumsky s'acharne sur le buffet du sénateur.

Toujours autour de Selina, ce groupe n'est pas incompétent, juste pathétique par leurs efforts désespérés de maintenir les apparences, essayant de se coller au maximum à leur candidate pour lui servir de rempart. Seulement, en faisant cela, ils pénètrent fréquemment dans sa sphère privée et remplissent le moindre espace de son bureau, empêchant le moindre moment d'intimité. L'occasion de montrer par instant la Veep en dehors de son travail lors de petites scènes qui laissent voir une autre facette de sa personnalité, à des années-lumière du portrait que les communicants essaient de fabriquer.

La scène où elle essaie de se faire passer pour une fan de football est intéressante, car elle montre comment les communicants empêchent les hommes politiques de montrer leur vrai visage, les contraignant à mentir sur leur existence. Le choix final de construire une alliance avec les républicains extrêmes montrent combien sa parole publique s'est vidée de son sens à force de compromis, passant de la défense de la cause des sans-papiers à l'extrême-droite pour une loi technique sans véritable intérêt.

 

 

Une opinion à vendre

 

Avec cet épisode, les auteurs de Veep lancent un second arc assez prometteur, Selina se retrouvant acculée à chercher ses soutiens parmi les élus républicains les plus conservateurs. Une alliance contre nature qui voit l'ancienne candidate au poste suprême à la recherche d'alliés dans l'échiquier politique, laissant son opinion fluctuer selon la nécessité du moment. Obligée de se positionner à droite contre sa nature, l'héroine de Veep permet de brosser un portrait cynique de la politique actuelle, univers cruel où une simple loi suffit à justifier les pires reniements.

Comédie cruelle sur les dessous du pouvoir, le show de HBO nous permet de voir l'envers et l'endroit de la communication, laissant apparaître des personnages comme Gary qui sont habituellement hors-champ. Dans les coulisses du pouvoir se tiennent ces hommes dévoués en apparence, inutiles en réalité, se battant non pas pour des convictions, mais pour maintenir une aura médiatique à des candidats qui obéissent passivement aux ordres. Le gag de la télécommande, très amusant, est à l'image d'un show qui rit du spectacle des puissants à la minuscule destinée, réduit à ne jamais atteindre un pouvoir qu'il convoite pourtant avec envie.

Derrière les apparences d'une comédie légère, Iannucci nous dépeint un univers cynique et un peu triste, petit jeu d'humiliation et de manipulation symbolisé par Jonah, conseiller à la Maison Blanche insupportable et prétentieux. Un personnage réellement drôle qui aura pris le temps de s'imposer, à l'image de ce show qui sait devenir addictif pour qui prendra le temps de la découvrir.

 

Un vrai feuilleton tragi-comique

 

Série ambitieuse et sympathique, Veep a surtout le mérite d'inscrire chaque épisode dans une continuité, à savoir pour cet épisode les tensions entre le sénateur Doyle et l'équipe de la vice-présidente. L'acte d'exposition est réduit à la seule mise en place du personnage de Chang, évitant ainsi le sentiment de confusion qui handicapait les premiers épisodes, la série progressant à un rythme étonnamment élevé. Le numéro des comédiens est assez épatant, avec des échanges vifs et dynamiques, même si l'épisode connaît quelques mauvaises inspirations comme le face-à-face décevant entre Gary et l'ingénieur du son.

Très amusant, un épisode de Veep qui confirme mon jugement sur ce show, la série se révélant être une comédie amère particulièrement efficace grâce à une extraordinaire Julia Louis-Dreyfus. Cynique, cruel, le show s'impose comme une série très subversive, proposant le portrait d'une femme prête à tous les compromis pour pouvoir exister encore dans l'univers cruel de la politique. Une intrigue qui relance bien la saison, posant la question de savoir jusqu'où Selina est prête à aller pour conserver son poste, laissant enfin voir tout le potentiel d'un show assez jubilatoire.

 

J'aime :

  •  Julia Louis-Dreyfus
  •  la scène de l'hôpital géniale
  •  un environnement très crédible pour une série vraiment addictive

 

Je n'aime pas :

  •  la scène entre Gary et l'ingénieur du son
  •  le démarrage plus lent que d'habitude

 

Note : 13 / 20

Toujours drôle et réjouissant, Veep confirme qu'elle est une comédie assez remarquable, d'une cruauté et d'un cynisme assez irrésistible. Portée par une Julia Louis-Dreyfus formidable, une plongée dans l'envers de la politique américaine qui confirme tout le potentiel entrevu l'épisode précédent et relance intelligemment l'intrigue principale.

L'auteur

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Image Veep
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12.71
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