Focus sur Profit

Le 21 octobre 2013 à 14:26  |  ~ 6 minutes de lecture
Après la fin de Dexter, retour sur un héros similaire, injustement oublié de tous : Jim Profit.
Par arnoglas

Focus sur Profit

~ 6 minutes de lecture
Après la fin de Dexter, retour sur un héros similaire, injustement oublié de tous : Jim Profit.
Par arnoglas


Pour la chaîne FOX, les années 1990, c'était Melrose Place, Beverly Hills, The X-Files et Ally McBeal. C'était une période marquée par une avalanche de nombreuses séries dramatiques propulsées au rang de séries cultes qui lui ont permis de s'imposer face aux mastodontes ABC, NBC et CBS. Profit fait partie des programmes lancées par FOX qui en dépit d'un destin bref et cruel a su marquer les esprits de par sa thématique très sombre, son héros dangereux et fascinant et son écriture remarquable.

Nous sommes le 8 avril 1996. Les américains font connaissance avec Jim Profit (Adrian Pasdar, Heroes), jeune cadre dynamique aux ambitions démesurées et véritable psychopathe, qui gravit un à un les échelons au sein de l'entreprise Gracen & Gracen, laissant derrière lui quelques cadavres et familles brisées. Opposé à d'autres employés et à une responsable de la sécurité méfiante et traumatisée par le suicide de son père, il est prêt à tout pour détruire ceux qui se dresseront sur son chemin. N'ayant ni scrupule ni morale, aucune notion du bien et du mal, élevé littéralement dans un carton par un père abusif, il emploie les méthodes les plus extrêmes pour mettre en oeuvre ses objectifs: chantage, mensonge, manipulation, corruption. Une seconde saison était prévue, consacrée à l'ascension de Jim Profit en politique, elle ne verra hélas jamais le jour.

 

Jim Profit

 

Encensée par la critique, Profit a connu un parcours contradictoire. Populaire en Europe, boudée dans son pays d'origine, on considère qu'elle est apparue trop tôt dans l'histoire de la télévision américaine encore fragile et puritaine. La baisse de l'audience après le baiser échangé entre le héros et sa belle-mère dans le pilote est très mal passée aux yeux des téléspectateurs, qui ont échappé à la scène prévue à l'origine dans le scénario original où il était question de sa mère. Retirée de l'antenne après quatre épisodes seulement, il faudra attendre six ans pour qu'elle diffusée dans son intégralité sur le câble américain (huit épisodes au total, dont un de 90 minutes). En France, Canal Jimmy l'exploita en exclusivité mondiale en 1997. La critique US n'y est pour rien : dès le pilote, elle considère Profit comme la série la plus remarquable et innovante depuis Twin Peaks.

Or Profit n'est pas Twin Peaks, ses ambitions ne sont pas les mêmes, notamment si l'on tient compte de la mise en scène, très fidèle à la tradition télévisuelle américaine. S'il faut évaluer la série, ce serait à l'aube de ce qui sera produit dans les années suivantes: Les Sopranos sur HBO, House sur FOX, Breaking Bad sur AMC ou encore Dexter sur Showtime. En comparant Profit à Dexter, deux psychopathes face à face, l'avantage revient à Profit. Bien évidemment, Dexter bénéficie d'une excellente mise en image, beaucoup plus soignée, précise et méticuleuse, mais souffre d'une écriture brouillonne et d'une lenteur souvent désagréable. Construite comme un feuilleton à la frontière du soap familial, aux actions rapides et successives, Profit est un personnage qui s'inscrit dans la durée, un portrait tout en profondeur, plus complexe, qui ne connaît pratiquement aucune limite, les échanges directes avec le spectateur le rendant complice de ses méfaits au détour de répliques désopilantes ("Celui qui croit que tromper autrui est une science se trompe. C'est un art"), Dexter se reposant sur le jeu de Michael C. Hall.

 

La Team Profit

 

Les personnages se rapprochent par leur caractère, mais leurs univers divergent. Dexter est une fiction télévisuelle policière stricte, tandis que Profit est une tragédie moderne, une version d'une figure shakesperienne, celle de Richard III (avouée par les créateurs eux-mêmes). C'est un mélange entre compulsion politique (incarnée par une grande entreprise financière) et critique du système capitaliste, entre costumes et cols blancs, entre golden boys et économie monétaire. La série en profite (ce n'est pas un jeu de mot) pour décrire une société marquée voire envahie par la télévision, cette prison qu'on accepte volontairement, cette prison à laquelle le héros a été confronté dans son enfance passée dans un carton (voir la dernière image du pilote, dérangeante...). C'était sa seule distraction, sa seule figure parentale au profit (ce n'est pas non plus un jeu de mot) d'une mère absente et d'un père négligent qui élevait son fils comme un animal. Profit ne dispose d'ailleurs pas de télévision chez lui.

Surprenante pour son écriture et son interprétation, Profit n'est pas exempte de défauts et a quand même mal vieilli. L'impact de la télévision dans l'éducation du héros (inspirée de faits réels et de la biographie d'un célèbre tueur en série) est un peu trop appuyée et exagérée voire caricaturale. Les animations infographiques (à la pointe de la technologie pour l'époque) peuvent paraître kitch et prêtent à sourire. Sans oublier les décors vides et les costumes qui accusent le coup, mais la série demeure une plongée intéressante dans le milieu de la bourgeoisie et de l'aristocratie. Il suffit juste d'un temps d'adaptation, de se laisser plonger dans le passé, rien que pour apprécier Profit à sa juste valeur, la série ayant eu l'idée ingénieuse de ne pas laisser le spectateur sur sa faim et de donner à son personnage principal un destin digne de ce nom.

 


"Au fur et à mesure que les années passent, quand on a fait à peu près le tour de tout, il n'y a que trois choses qui comptent réellement: votre confiance, votre force de caractère et votre famille. Bonne nuit..." Jim Profit.

L'auteur

Commentaires

Avatar cedric2506
cedric2506
Belle critique ça donne envie de regarder.

Avatar Puck
Puck
Pas oublié, jamais oublié Jim Profit !!! Mais pas revu depuis longtemps : mon coffret est un VHS...

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