La saison 5 de Doctor Who marque un changement de taille : Russell T Davies, à l’origine de la résurrection de la série, laisse la place de gardien du Tardis à Steven Moffat, grand scénariste nous ayant offert quelques-uns des meilleurs scénarios de la nouvelle mouture de la série. Mais avant d’aborder ce changement, passons d’abord les autres en revue.
Géronimo !
L’un des changements de cette cinquième saison est l’arrivée d’un nouveau docteur, le onzième en l’occurrence. David Tennant laisse donc la place à Matt Smith, le plus jeune acteur à incarner le docteur jusqu’à présent.
La première régénération du docteur qui avait vue succéder Tennant à Eccleston m’avait un peu rebutée. Il m’avait fallutplusieurs épisodes pour m’habituer au nouveau docteur, probablement parce que les deux acteurs étaient très différents, à l’instar des deux docteurs qu’ils incarnaient. Celui d’Eccleston était un énervé, toujours excité par la guerre qui venait de prendre fin par son fait, toujours à courir dans tous les sens. Celui de Tennant était beaucoup plus posé, plus calme, plus sentimental. Certes, il courait toujours dans tous les sens, faisaient des trucs un peu barges mais il portait sur lui le poids de ses choix, le fardeau d’avoir éliminé toute son espèce. Tennant incarnait à merveille un docteur hanté par son passé, hanté par la guerre, privilégiant toujours la diplomatie et ne recourant à la force qu’en cas d’absolue nécessité.
En trois saisons et quelques épisodes spéciaux, il s’était ainsi positionné comme l’un des meilleurs docteurs (le meilleur selon certains), superbe dans son incarnation d’un héros tourmenté que n’aurait pas renié Shakespeare. Autant dire que la barre était placée très haut pour son successeur et qu’il allait devoir assurer.
Et bien c’est le cas, Matt Smith se révélant à son tour génialissime dans son rôle du docteur. Moi qui avais un peu peur de la transition (on suivait quand même Tennant depuis pas mal d’épisodes), celle-ci est passée comme une lettre à la poste (quand ils ne sont pas en grève, j’entends). Peut-être que la transition a été facilitée par la plus grande ressemblance entre Tennant et Smith qu’entre Tennant et Eccleston ? Il est vrai qu’au niveau du look, bien que différents, il y a une similitude, de même que l’attitude. Peut-être que tout ces petits détails font que le onzième docteur est plus dans la continuité du dixième qu’il ne l’était du neuvième.
Mais il ne faut pas croire non plus que le nouveau docteur n’est qu’une pâle copie de l’ancien. Le nouveau docteur a laissé au vestiaire tout ce qui le tourmentait, tout ce qui lui pesait. La guerre ne vient plus le hanter et on le sent moins freiné par ses sentiments. À plusieurs reprises, il va même jouer sur le fait qu’il est le dernier de son espèce, n’hésitant pas à plaisanter là où son prédécesseur serait tombé en dépression. Il n’hésite d’ailleurs pas à utiliser des armes, chose à laquelle son prédécesseur répugnait.
Mais ce docteur ci est également plus sombre et Matt Smith fait particulièrement bien ressortir cette part d’ombre, déjà aperçue chez Tennant et Eccleston. À plusieurs reprises nous avons le droit à un docteur particulièrement énervé qui parait même extrêmement dangereux. Là où on avait les saisons précédentes un joyeux trublion que l’on peinait à voir maléfique, cette saison nous offre un docteur beaucoup plus sombre, laissant apparaître le soldat qu’il a été, capable de choses vraiment terribles.
Heureusement, le docteur reste le docteur et garde cette douce folie qui le caractérise. Son goût pour les poissons panés à la crème anglaise est d’ailleurs le parfait exemple de cette douce folie. De même, son obstination à garder un nœud papillon alors qu’il est jeune ou son désir soudain de Fez montre qu’il garde toujours cette part d’enfant qu’il a toujours eu, ce décalage entre la réalité et son petit monde à lui.
Il est d’ailleurs plus décalé que le précédent, puisqu’il semble être beaucoup plus embarrassé en matière d’amour, beaucoup moins au courant. L’exemple le plus flagrant reste son irruption lors de l’enterrement de la vie de garçon de Rory, manquant totalement de subtilité quant à sa relation avec Amy.
En bref, le nouveau docteur est dans la continuité du précédent et Matt Smith a brillamment rempli le défi qui lui était proposé. De ce point de vue là, c’est une complète réussite !
Le Fez, ça claque !
Les compagnons
La cinquième saison, en plus de nous offrir un nouveau docteur, nous offre de nouveaux compagnons. À commencer par le Tardis, qui refait peau neuve ici de manière on ne peut plus réussie. L’ancienne version se contentait de proposer une salle unique, que l’on voyait souvent sous le même angle et qui, même si on l’évoquait, ne laissait pas entrevoir d’autres pièces.
Pour le nouveau Tardis, c’est tout le contraire. Ici, on voit une multitude d’escaliers et de couloirs partir dans tous les sens, laissant imaginer d’innombrables possibilités quant à son contenu. Piscine, sept salles de squash, le Tardis se lâche ici et montre son véritable potentiel : il est vraiment plus grand à l’intérieur qu’à l’extérieur. Il reste en revanche toujours aussi capricieux, bien que l’on apprend au cours de la saison que le docteur fait exprès de laisser le frein à main, parce qu’il trouve que ça sonne mieux.
Mais outre le Tardis, c’est également une nouvelle compagne que le docteur trouve cette saison, Amelia Pond. Incarnée par Karen Gillan, je dois dire que la demoiselle, ayant pour habitude de montrer 90 % de ses longues gambettes à chaque épisode, parvient à procurer immédiatement un sentiment que tout homme reconnaîtra, chose que les précédentes avaient plus de mal à faire.
Mais, l’une de mes craintes était d’avoir une nouvelle Martha : sympathique à regarder (ici très sympathique même) mais un peu vide. D’autant que Karen Gillan succède à Catherine Tate qui nous avait fourni une performance mémorable : là encore, il y avait du challenge. Et bien une nouvelle fois, c’est réussi. Amy est un personnage avec son propre caractère, dans la même veine que Donna, mais ayant des faiblesses différentes.
Sa relation même avec le docteur est également différente. Là où les autres le rencontrait à un moment de leur vie et le suivait derechef, la relation Amy-Docteur est plus profonde et plus dérangeante aussi, dans un sens. Elle rencontre le docteur quand elle était toute petite et finira par attendre son retour pendant de nombreuses années, ne cessant de penser à lui. On lui diagnostiquera ainsi des problèmes liés à un ami imaginaire et elle doutera de ses capacités pendant toute ces années. Elle reporte d’ailleurs son envie du docteur sur Rory, qui se prête d’ailleurs au jeu. Ce n’est pas pour rien si elle choisit un infirmier.
Elle développe ainsi des pulsions sexuelles envers le docteur, qu’elle laissera éclater au grand jour en milieu de saison. Alors, attention sur ce point, Amy n’est pas Rose : ses sentiments envers le docteur sont purement sexuels, pas passionnels. Le retour du docteur l’a plus ou moins perturbée et il va lui falloir du temps pour se calmer et comprendre que c’est Rory qu’elle souhaite, le docteur la considérant toujours comme la petite fille qu’il a rencontrée au tout début. Le duo Gillan-Smith fonctionne particulièrement bien et on sent une grande complicité entre les deux, ce qui renforce la crédibilité du duo et la relation complexe qu’entretiennent les deux personnages.
Seul regret que j’ai à la fin de cette saison par rapport à Amy : la consistance du personnage n’est pas assez développée. Amy est un personnage génial, bien mieux que Martha ou Rose mais elle est en quelque sorte un électron libre. Rose fuyait une mère un peu débile et un copain qui l’était encore plus. Martha fuyait sa famille qui tombait en morceau (et était tombé accessoirement amoureuse du docteur). Donna essayait de trouver une nouvelle vie, plus palpitante que celle qu’elle avait, fuyant là encore ce qu’elle avait connue. Amy, bah rien en fait : elle rencontre le docteur, elle le suit mais il manque tout cet environnement que l’on pouvait observer chez les autres.
Alors, c’est peut-être un premier reproche que je pourrais faire à Moffat par rapport à Davies, ce manque de repères par rapport à Amy. Bon, c’est en partie dû à l’intrigue qui voit ses parents capturés dans une des failles et effacés de la réalité mais du coup, je trouve que le personnage perd un peu en profondeur. Au final, on ne sait pas vraiment d’où elle vient, ce qui la motive… Certes, le personnage de Rory permet de lui donner une attache mais voilà, je trouve qu’il manque une dimension à ce personnage que la fin de saison ne parvient pas à rattraper (ne quittez pas, le final aura son petit paragraphe aussi).
Petite photo histoire de conserver l'attention de certains mâles
Et puisque je parle de Rory, intéressons-nous un peu à lui. Alors, on le sait, les petits amis des compagnes du docteur, ce n’est pas le top. Celui de Donna a essayé de la tuer et la meilleure chose qui soit arrivé à Mickey a été de rester coincé dans une dimension parallèle. Cette fois, pour Rory, c’est différent. Il a été en quelque sorte le substitut du docteur pour Amy : toute la saison, il s’est senti de trop. Ce n’est vraiment que vers la fin qu’il a pu vraiment se rendre compte à quel point il comptait pour Amy.
Le personnage est d’ailleurs beaucoup plus fouillé que les précédents petits amis que l’on a pu rencontrer. Déjà, il s’est documenté par rapport au Tardis : il évoque ainsi une histoire de dimension alternative qui permet au Tardis de paraître plus grand à l’intérieur, théorie que le docteur se dépêche de masquer. Rien que sur ce point, Rory montre qu’il est plus profond qu’un Mickey, plus malin.
Ce qui ne veut pas dire qu’il est toujours bien. Les premières apparitions du personnage au cours de la saison sont plutôt niaises et, pendant l’épisode à Venise, il a tout du boulet de service. Fort heureusement, la fin de saison va lui donner l’occasion de se rattraper et de passer le cap de « substitut du docteur » dans le triangle amoureux Amy-Rory-Docteur.
Niveau interprétation, Arthur Darvill est complètement crédible. Il joue bien l’ahuri amoureux de la belle Amy, mais montre parfois une profonde tristesse. Contrairement à l’acteur qui jouait Mickey, il a beaucoup plus d’expressions et un jeu beaucoup plus fin (ce qui n’est pas vraiment difficile, soit dit en passant). J’avais un peu peur au compagnon mais là encore, ça roule.
Dernier personnage ô combien important dont il faut que je parle : River Song. Déjà vu la saison précédente, le personnage est de retour ici pour quatre épisodes et reste toujours aussi énigmatique. Sa relation avec le docteur est de plus en plus ambigüe et reste l’un des mystères les plus palpitants de la saison.
Alex Kingston incarne encore ici à merveille le personnage et est complètement en harmonie avec Matt Smith et Karen Gillan. Les deux femmes ont ainsi une relation très complice que les deux actrices rendent parfaitement crédible. De même, Smith et Kingston parviennent également, par leur jeu, à extraire toute l’ambigüité de la relation Docteur-River et tout ceci est parfaitement plaisant.
Bref, malgré quelques petits défauts d’écriture, les compagnons sont très réussis et promettent de grands moments avec le Docteur.
La réalisation
Avant de revenir sur la trame de la saison, je pense qu’il est important de parler de la réalisation. Au fil des saisons, la qualité n’a cessé de s’améliorer : meilleure photographie, meilleur effets spéciaux… Il faut dire aussi que la série a progressivement vu son budget grandir : sans atteindre des sommets (ce qui n’est pas plus mal, ça rend les auteurs plus créatifs), on a senti que les moyens avaient considérablement augmenté depuis la première saison.
Mais cette saison est vraiment, je trouve, exceptionnelle. La qualité de l’image est tout bonnement superbe : on est loin de l’épisode pilot avec les mannequins en plastique (que l’on revoit par ailleurs dans le final, dès fois que vous voudriez comparer). Le tout est renforcé par la beauté des décors : que ce soit l’épisode avec les anges ou le final, les décors naturels claquent. Stonehenge, ça envoie du pâté quand même, et pas qu’un peu ! Je n’ai d’ailleurs pas souvenir de beaucoup d’épisodes dans les saisons précédentes tournés dans d’aussi beaux décors naturels : il y a pas à dire, visuellement, ça claque ! On notera également quelques effets de montage bien sympathiques, clins d’œil à Star Wars. De même, les effets spéciaux sont très bien maitrisés et là encore, on en prend plein les mirettes.
Seul gros bémol niveau réalisation : la musique. Et là, je ne sais pas si c’est parce qu’il n’y avait plus de budget ou quoi, mais ça pêche. Le premier épisode est épique, la musique est génialissime. Et puis, il faut attendre le final pour retrouver cette même sensation musicale. Entre les deux, on a souvent une réutilisation massive des mêmes thèmes : certes, ils sont chouettes, mais ça manque de variété. Et pour ceux qui douteraient, je vous invite à regarder la liste des morceaux de la BO de cette saison : retirez toutes les musiques apparaissant dans le premier épisode de la saison et le final et vous verrez qu’il ne vous reste plus grand-chose.
D’ailleurs, cette saison marque également l’apparition de chansons en fond sonore. Et ça, je trouve ça également dommage, l’une des particularités de Doctor Who étant cette musique de Murray Gold particulièrement réussie et qui traduit toujours au plus juste ce qui défile à l’image. Le plus gros affront est visible sur l’épisode avec Van Gogh, dans l’une des scènes finales où Vincent est conduit au musée : une musique de Murray Gold aurait été beaucoup plus poignante que la chanson qui nous a été passée. Dommage que des réductions de budget aient eu lieu de ce côté.
En bref, une réalisation beaucoup plus soignée mais qui a malheureusement un peu sacrifié la musique.
C'est joli la fin du monde, non ?
La saison
Jusque là, la nouvelle saison avait pratiquement tout bon. Malheureusement, elle va pécher au niveau de sa trame scénaristique : rien d’alarmant mais tout de même un peu dérangeant.
Cette saison, Moffat a décidé de donner une tournure beaucoup plus feuilletonnante à la série. Là où Davies se contentait de semer des indices au fur et à mesure des épisodes avant de conclure en apothéose dans un final partant dans tous les sens (avec du bon et du moins bon), Moffat construit ici une trame de fond pour toute la saison, qui aura son rôle à jouer tout du long.
Ainsi, le premier épisode présente de mystérieuses failles, rencontres de deux parties de l’univers ne devant pas se rencontrer. Assez énigmatiques, ces mêmes failles serviront par la suite de moyen de résolution lors du double épisode avec les anges pleureurs : un élément plutôt astucieux qui nous épargne une résolution tirée par les cheveux tout en ancrant l’épisode dans la continuité. Les failles referont une nouvelle fois parler d’elles dans le second double épisode de la saison, faisant disparaître Rory de la réalité et laissant apparaître un morceau du Tardis calciné. Cette fois, leur apparition fait un peu « cheveux sur la soupe » et ne donne juste qu’un moyen de relancer le suspense jusqu’au final. Mais vu la piètre qualité de l’épisode dans lequel ce cliffhanger est inclus, ça passe.
Mais pour les autres épisodes, mon dieu que c’est laid et maladroit. Pourquoi se sentir obligé, en fin d’épisode, de nous faire un gros plan sur une faille, histoire de nous rappeler leur présence ? C’est d’autant plus choquant que, depuis quatre saisons, la trame de fond nous était rappelée de manière subtile. On ne nous faisait pas exprès un gros plan sur le Bad Wolf histoire d’être bien sûr qu’on l’avait vu. On ne nous montrait pas la disparition des planètes en saison 4, alors que c’était le moteur de bons nombres d’épisodes : c’était juste évoqué au détour d’une phrase, ni vu, ni connu.
Et du coup, cette saison paraît encore plus maladroite. J’aime bien le fait d’introduire un côté plus feuilletonant à la série mais pour le coup, c’est un peu raté. Espérons que la saison suivante soit un peu plus réussie de ce côté-là (mais j’ai des doutes après avoir visionné les premiers épisodes). Mais bon, ceci reste du détail, tant que l’épisode est bon.
Et là, comme à son habitude, Doctor Who nous offre du bon et du (beaucoup) moins bon. Voir que Moffat était devenu showrunner, lui qui avait fourni d’excellents épisodes à la série, me faisait penser que le niveau allait augmenter. Au final, la saison est du même niveau que les autres : il semble que Moffat soit moins à son aise à piloter une saison complète qu’à produire un épisode par saison. Il faut dire que l’exercice est beaucoup plus difficile et le bougre n’est au final qu’un homme ; il ne s’en sort toutefois pas si mal.
Le plus difficile était de lancer tous les changements : nouveau docteur, nouveau tardis, nouveaux compagnons, la tâche était ardue. The Eleventh Hour, premier épisode de la saison, s’en sort avec les honneurs : Moffat est un génie ! Pendant tout l’épisode, on est happé par l’histoire et on en redemande. Malheureusement, le second épisode est d’une autre trempe. Toujours écrit par Moffat, il est nettement inférieur, voir même décevant. Une intrigue gentillette, au final peu développée et qui surtout présente quelques zones d’ombres et des incohérences. Quoi ? Moffat, l’homme derrière Blink laisse des incohérences ? Bah ouais, personne n’est infaillible ! Rien de bien alarmant, mais pour donner un exemple : ils vont lui donner quoi à manger à la baleine maintenant qu’ils ne sacrifient plus les gens pour la nourrir ? Et pourquoi la baleine les bouffait si c’est pour les sauver ? Bref, je n’ai plus trop l’épisode en tête mais il me semble bien qu’il y avait pas mal de trucs mis sous le tapis, ni vus, ni connus…
Le troisième épisode de la saison, écrit par Mark Gatiss (co-créateur de Sherlock avec Moffat et scénariste de The Great Game, meilleur épisode de ladite série à l’heure actuelle) nous sert une histoire de Daleks, qui, comme toute les histoires de Daleks, est vraiment nulle. Le seul intérêt de l’épisode est le fait de le placer en plein Londres pendant la Seconde guerre mondiale (et puis de voir des Daleks Power Rangers aussi). Bref, après un bon départ, la saison s’essouffle, beaucoup trop rapidement à mon goût.
Heureusement, Big M comme l’appelle Gouloudrioul revient aux commandes pour nous servir un très bon double épisode. Il nous ressort ici tous ses ingrédients fétiches pour nous prendre par les bons sentiments : River Song, les anges pleureurs, les mystérieuses failles et un baiser d’Amy et du Docteur. Que du bon pour un bon épisode qui laisse présager que les deux épisodes précédents étaient des accidents.
L’épisode suivant sur Venise permet de faire revenir le personnage de Rory et montre une fois de plus la capacité du Docteur à faire le show. En dehors de ça, l’histoire autour de vampires, pas forcément mauvaise, est ultra classique et sans surprises.
L’épisode d’après, tournant autour du seigneur des rêves, possible part sombre du docteur est beaucoup plus intéressant, sans pour autant être exceptionnel. L’objectif est ici, pour la première fois dans la saison, de véritablement développer les relations entre les personnages. C’est d’autant plus bienvenu que ce sera le seul à vraiment aller de ce côté-là. Le personnage du seigneur des rêves lance également des interrogations : qui est-il ? Qu’est ce que le docteur cache vraiment ? Pas mal d’interrogations qui n’auront pas de réponses pour le moment.
Et puis c’est le drame. Le double épisode suivant (The Hungry Earth/Cold Blood) est râté. Alors qu’il y avait un potentiel énorme autour de cette histoire de premiers habitants de la Terre, l’épisode ne parvient pas à nous le faire ressortir et nous sert au final une intrigue ultra-bateau et ennuyante. Et ce n’est pas forcément le cliff de fin qui permet de remonter le niveau. Reste les maquillages des intra-terrestres, vraiment réussis.
Fort heureusement, cet épisode marque la fin de la débandade et les deux épisodes suivants remontent largement le niveau. Le premier, Vincent and the Doctor est probablement l’épisode le plus réussi de cette saison. C’est incroyable mais le docteur passe au second plan, devenant personnage secondaire derrière Van Gogh. L’épisode, écrit par Richard Curtis (Love Actually, Quatres mariages et un enterrement, …) brosse un portrait si réussi du peintre que l’on a qu’une envie à la fin de l’épisode : en savoir plus sur lui. L’histoire du monstre, très classique, n’est que prétexte à refaire sortir encore plus ce personnage, au détriment du docteur. Franchement, un très très bon épisode : la saison en avait besoin à ce moment là. Et puis Bill Nighy en guest, ça pête !
Yep, la ressemblance est frappante !
L’épisode qui suit n’est pas en reste. C’est dingue comment la série parvient à en produire de très réussis avec peu de moyens. Ici, le docteur assure le show à lui seul et Matt Smith montre toute l’étendue de son talent. L’histoire entre le logeur et sa copine est on ne peut plus intéressante et l’épisode, même s’il ne paye pas de mine, se classe aisément parmi les meilleurs de la saison. Reste juste le final à propos des aliens qui fait un peu tâche, laissant un goût d’inachevé (mais on me souffle dans l’oreillette que des réponses seront données en saison 6… mouais…).
En bref, la saison a été, comme toujours, en dents de scie. Les épisodes bons alternent avec des épisodes plus mauvais et le changement de showrunner n’a pas vraiment fait de différence de ce point de vue.
Le final
Pour ceux qui sont arrivés jusqu’ici : bravo, j’ai conscience d’être une vraie pipelette et d’en écrire toujours des tonnes. Mais un bilan, on le fait bien ou pas du tout. Toujours est-il que l’on arrive à la conclusion de la saison, et ça mérite bien sa propre partie.
J’ai cherché pendant un moment les mots pour décrire ce qui clochait dans ce final par rapport aux autres et c’est finalement Aureylien qui l’a décrit le mieux : il n’a pas la rage des autres. Le docteur n’est que gentiment excité, pas de véritables ennemis déclarés : il manque cette folie inhérente aux autres épisodes finaux. On sent ici que Moffat a essayé de produire quelques chose de spectaculaire, dans la veine des autres mais que, malheureusement, l’empilement de scènes toutes plus incongrues les unes que les autres n’est pas son truc.
Alors bon, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit non plus : l’épisode est bon, voir très bon comparé au reste de la saison. Le tournage à Stonehenge ajoute du cachet, les effets spéciaux sont géniaux et l’idée de la boîte de Pandore, prison ultime pour le docteur faites par la plus grande alliance de super-vilains de tous les temps, c’est prenant (manquait plus que The Lord). Ajouté à cela le mystère River Song, un peu de sentimental avec Rory et Amy et un reboot intéressant de toute la saison, l’épisode a tout pour plaire.
Mais plusieurs points sont tout de même gênants au niveau de l’intrigue. Le coup des Romains tout d’abord : pourquoi eux ? Parce que c’était les souvenirs d’Amy ! Pourquoi se casser le cul à aller piocher dans les souvenirs d’Amy pour faire toute la mise en scène alors que cette dernière risque de comprendre la supercherie et tout faire foirer ? Bon, ici c’est River mais voilà quoi, qui dans l’alliance des supers-vilains a pu avoir une idée aussi stupide (je parie sur les Judoons, ils sont un peu con-con quand même) ? Et bien cette idée est tout simplement le seul moyen que Moffat a trouvé pour faire revenir Rory, tout simplement. Alors que les vilains pas beaux auraient pu faire une tout autre mise en scène, ils ont choisis cette solution parce que c’était la seule capable de refaire revenir Rory dans l’intrigue, en se basant sur les souvenirs d’Amy (au passage, si Rory est effacé de la réalité, pourquoi il est encore sur les photos chez Amy ?). Première légère incohérence dans ce final qui nous offre quand même de bonnes séquences émotions, donc faute à demi pardonnée.
Cette année, la convention des supers-vilains a lieu à Stonehenge
Ce qui nous amène à l’autre grosse incohérence, la plus grosse ficelle de tous les temps que M. Moffat devrait avoir honte d’avoir utilisé au point de vouloir se cacher au fond d’une grotte dans la forêt ! Je parle bien entendu de la façon dont le docteur est sauvé : lui-même revient du futur pour influencer sa propre ligne du temps ! C’est une énorme facilité scénaristique que je ne m’attendais pas à voir dans Doctor Who, encore moins dans un épisode de Moffat, si à l’aise avec les histoires de paradoxe. En gros, c’est un peu la porte ouverte à tout : le Docteur à des problèmes, pouf ! Apparition du Docteur du futur qui s’arrange pour l’en sortir : c’est un peu trop facile. Et ça va en partie à l’encontre de tout ce qui nous est dit depuis plusieurs saisons : on ne peut revenir sur notre propre timeline sans influencer la suite. Bref, ce passage m’a donné une grosse migraine pour au final arriver à cette conclusion : énorme ficelle !
Le final reste tout de même plaisant malgré cela et, si ces petits problèmes avaient été mieux tournés, si on n’avait pas sombré dans de trop grosses facilités parfois, il aurait pu être exceptionnel. Bon, je ne dis pas non plus que les autres n’avaient pas de grosses ficelles : la résolution Bad Wolf qui sortait de nulle part ou la prière au docteur pour le régénérer en saison 3 sont aussi assez faciles mais m’ont moins laissé sur ma faim que cet épisode. D’autant que dans son optique de proposer un caractère feuilletonant à la série, Moffat laisse beaucoup de questions en suspens.
Qui est River Song ? Pourquoi n’a-t-elle pas oublié le docteur ? Qui a fait sauter le Tardis et qu’est ce que le Silence ? Qu’est ce qu’Amy a de particulier par rapport aux autres ? Tout un tas de questions qui, je n’en doute pas, trouveront des réponses par la suite. Mais ce qui me travaille plus, ce sont toutes ces interrogations pour lesquelles (mais je me trompe peut-être), nous n’aurons pas de réponses.
Le Rory qui est ici, en fin d’épisode, est celui de plastique ou le vrai ? Si c’est le vrai, a-t-il les souvenirs de son double (peu probable mais bon) ? Quelle influence cela va-t-il avoir sur le personnage ? Mais c’est surtout le fait qu’Amy retrouve ses parents qui me laisse pantois : vu qu’elle a du être élevée par ses parents, sa vie a forcément du être différente. Pourquoi ais-je donc l’impression que c’est la même ? Est-ce qu’elle serait allée dans le jardin voir le docteur la première fois, si ses parents étaient là ? Et même, est-ce qu’elle aurait réellement choisi Rory comme mari ? Tout au long de la saison, Rory nous a été présenté comme un substitut du docteur pour Amy. Est-ce qu’elle aurait fait les mêmes choix si elle avait été réellement élevée par ses parents ? Bref, quelles sont les conséquences de la fermeture des failles ? Alors certains vont me dire que c’est parce qu’elle a été passagère du Tardis, c’est pour ça qu’elle est restée la même. Moui, mais c’est encore un peu facile et d’ailleurs, toutes ses interrogations rejoignent ce que j’exposais précédemment sur ce personnage : le trop faible développement de son environnement (parents, vie, …). Dommage : même si ces épisodes étaient loin d’être parfaits, Davies proposait toujours des résolutions plus soignés pour ces personnages et chaque action avait une influence sur eux (même sur Martha qui est passé de gentille fille à soldat).
Un final sympathique mais qui accumule de trop grosses ficelles pour être exceptionnel.
Conclusion
Bon, allez, j’ai pas mal critiqué les points noirs de la saison mais les précédentes n’étaient pas exemptes de défauts non plus. Pour sa première saison à la tête de la série, Moffat s’en tire bien, mieux que Davies pour sa première saison. Le plus dur était de réussir à innover tout en gardant une certaine continuité avec les précédentes et de ce point de vue, c’est particulièrement réussi. De même, la qualité de la saison est équivalente aux autres : le bon alterne avec le moins bon. Reste que les acteurs se donnent toujours à 100 %, ce qui aide à faire passer la pilule.
Peut-être que le fait que je reste sur ma faim cette saison provient du changement de rythme : je m’étais habitué à avoir toutes les réponses en fin de saison ; ici ce n’est pas le cas. Peut-être aussi qu’en voyant Moffat à la tête de la série je m’étais, tel le jeune puceau pour sa première fois, mis en tête que ça allait être grandiose alors que ce n’était que bon (ce qui est déjà pas mal). Mais peut-être aussi, pour rester sur cette métaphore, que la qualité va grandement s’améliorer par la suite, le temps que M. Moffat s’échauffe vraiment. Je l’espère en tout cas, même si la série est probablement déjà l’une des meilleures séries de science fiction à l’heure actuelle.