Le prix de la méfiance
Une inspection surprise débarque et Lorna en profite pour glisser dans le casier de Marco le journal politiquement engagé qu'il lit en cachette tous les matins. L'ouvrier italien est aussitôt suspecté d'être un traître à la solde des fascistes et licencié, créant une forte émotion au sein de l'usine. Au même moment, une série de vols touche Gladys qui se met en quête de la coupable, aidée par ses collègues de travail Kate et Betty.
Résumé de la critique
Un épisode satisfaisant que l'on peut détailler ainsi :
- une histoire de trahison plutôt touchante pour Lorna
- une intrigue superficielle qui prend des accents tragiques pour Gladys
- un récit qui abandonne l'idéologie au profit des personnages
- un épisode de transition maladroit, mais réussi
La peur de l'ennemi
Loin du front de la guerre, les ouvrières vivent le conflit au travers des quelques informations qui transitent, entre des rumeurs infondées et la peur d'un ennemi invisible. C'est dans ces conditions que Lorna choisit de révéler les lectures secrètes de Marco, terrifiée à l'idée que cet employé soit un agent sous couverture venu pour faire du sabotage. Etant un immigré latin dans un pays très anglo-saxon, le soupçon va rapidement se transformer en accusation, entraînant un licenciement rapide qui va surprendre la jeune femme.
Prise de remords, elle se retrouve face à un cas de conscience complexe, surtout que son patron la charge d'amener son dernier chèque de paye chez sa famille. Une scène poignante et assez touchante où Meg Tilly découvre un univers inconnu à ses yeux, celle d'une famille italienne venue au Canada commencer une nouvelle existence loin du fascisme et de la guerre. Elle comprend que la bonne conscience qu'elle se donne en prétextant avoir agi en citoyenne cache en fait un désir refoulé, celle d'une femme qui se hait pour ses sentiments envers Marco.
Les comédiens font le charme de cette storyline qui cherche à s'éloigner de la guerre pour revenir à une dimension humaine, montrant comment le conflit se répercute aussi sur la société civile. Comme une parenthèse au sein du récit, Bomb Girls choisit de placer sa narration sur un ton plus personnel, se concentrant sur les personnages en préférant les petites histoires à la grande. Très mélodramatique, cet épisode abandonnent les thèmes sur le féminisme et les grandes causes pour se concentrer sur les passions de ce groupe de femmes et de leurs passions.
Montrer les liens entre les personnages
Proposant une intrigue plus feuilletonnante et superficielle en apparence, la série propose une suite d'intrigues aux enjeux assez faibles tournant autour de problème très concret de la vie des héroïnes. Il s'agit d'un épisode de transition qui va servir à lancer des intrigues individuelles, focalisant l'attention sur certains personnages pour lutter contre le risque de dispersion du récit. Ainsi, le scénario va s'attarder en particulier sur Gladys, la fille de bonne famille venue travailler dans l'usine de munitions dans le but de rejeter cet univers bourgeois et protecteur dans lequel elle a grandi.
La storyline part d'un simple vol dans son casier pour mieux rappeler le principe de départ de ce personnage, à savoir raconter l'histoire d'une fille riche venue au milieu de la classe populaire. Cette histoire de vol paraît dans les premiers temps plutôt décevante, avant de sortir de la simple jalousie entre riches et pauvres pour proposer une histoire amusante où la jeune femme va découvrir qui sont ses véritables amies au sein de l'usine. Le trio formé par Jodi Balfour, Charlotte Hegele et Alie Liebert s'impose rapidement, supplantant la notion de classe sociale pour afficher une vision idéalisée de la solidarité féminine.
L'ensemble est léger et sympathique, mais manque un peu d'originalité, servant avant tout à sortir le récit du contexte guerrier pour raconter une amitié singulière entre trois femmes que rien n'aurait dû rapprocher. Assez superficiel durant les trois quarts du temps, l'épisode prend heureusement soin de marquer un virage dramatique dans sa conclusion, l'intrigue du jour servant juste à donner de la crédibilité à cette amitié. Une parenthèse légère, loin de la guerre, qui cherche à mettre en avant l'esprit frondeur et avide de liberté de ses héroïnes.
Un scénario qui manque un peu de subtilité
Même si Bomb Girls possède toujours les qualités de mise en scène et d'interprétation des épisodes précédents, l'intrigue du jour manque de cette dimension politique habituelle sur la guerre et le féminisme, marquant une parenthèse loin de toute politique. Les personnages sont mis en avant avec plus ou moins de réussite, cherchant à rendre attachant la destinée de ses femmes et à proposer un récit à la forme plus mélodramatique. L'exemple de Lorna est le plus flagrant avec une scène de baiser plutôt réussie et touchante, mais gâchée en partie par des effets de style un peu trop naïfs.
Mais durant cet épisode, c'est Kate Andrews qui va se retrouver au centre de toutes les attentions, avec une intrigue sur le thème de la peur de la violence masculine bien mieux maîtrisée. Une thématique très intéressante, où sa relation avec le personnel masculin prend une tournure ambigüe après une scène chantée troublante et assez singulière. Le souvenir de son père violent et l'évocation de son éducation religieuse manque de cette finesse nécessaire pour exploiter parfaitement cette storyline particulièrement prometteuse.
Au final, un épisode qui cherche à se recentrer sur les personnages et perd au passage sa dimension politique et sociologique, offrant un épisode assez superficiel du point de vue des enjeux. Mais c'est un mal nécessaire tant les intrigues personnelles avaient besoin d'être développées, permettant de placer une dramatique assez forte ne reposant pas entièrement sur le contexte guerrier. Une volonté d'approfondir les différents personnages appréciables, permettant d'offrir des intrigues à plusieurs niveaux à une minisérie qui prend lentement des airs de mélodrame.
Un épisode de mi-parcours
Après deux épisodes évoquant la condition des femmes durant la seconde guerre mondiale et la dimension politique de leur accession au statut d'ouvrière, le scénario se recentre sur les individualités, offrant un scénario plus léger et sympathique. A l'image de la storyline de Véra, le temps est à l'attente, réunissant une à une des pilules dans le but de pouvoir faire un choix entre la vie et la mort, plaçant des enjeux importants pour la suite. Un épisode qui permet de délaisser un discours idéologique parfois maladroit pour raconter une histoire profondément mélodramatique, celle d'un groupe de femmes qui prend son destin en main.
En conclusion, un épisode intéressant qui marque la fin de l'étape d'exposition et commence à installer des enjeux concernant les différents personnages. Une intrigue à première vue plus légère, mais qui a le mérite de donner plus d'épaisseur aux personnages en s'intéressant aux connexions entre ses héroïnes. Un récit divertissant, moins fort que les deux précédents, mais qui marque un virage important, développant les différentes histoires qui occuperont les trois épisodes à venir sur un nouveau registre mélodramatique prometteur.
J'aime :
- les comédiennes excellentes
- l'intrigue de Lorna et Marco
- le final au ton particulièrement mélodramatique
- l'intrigue de Véra intéressante ...
Je n'aime pas :
- ... mais mal gérée par un scénario un rien maladroit
- certains effets de mise en scène trop flagrant
Note : 13 / 20
Un épisode de transition qui sert à sortir de la grande histoire pour développer les storylines individuelles qui vont servir de fils directeurs aux trois épisodes à venir. Parfois inégal et balourd, le scénario propose aussi de nombreuses bonnes idées, posant petit à petit des personnages de plus en plus attachants et des enjeux pour la suite particulièrement prometteurs.
sephja
