Critique : Fargo 2.01

Le 19 octobre 2015 à 16:20  |  ~ 8 minutes de lecture
Retour de l'anthologie qui avait su surprendre par sa réappropriation du film des frères Coen. Nouveau mystère, nouvelle époque, même réussite ?
Par RasAlGhul

Critique : Fargo 2.01

~ 8 minutes de lecture
Retour de l'anthologie qui avait su surprendre par sa réappropriation du film des frères Coen. Nouveau mystère, nouvelle époque, même réussite ?
Par RasAlGhul

Les anthologies sont un concept particulier. Une nouvelle histoire, de nouveaux personnages et souvent de nouveaux acteurs – sauf toi American Horror Story, je te regarde –, c’est véritablement un nettoyage de printemps qui s’opère à chaque nouvelle saison. Inventer un nouveau récit n’est pas chose aisée, les scénaristes essayant souvent de se reposer sur leurs lauriers – je te regarde à nouveau AHS.

Le syndrome de la deuxième saison est tout aussi dangereux. Un bon nombre de séries, après une exemplaire première saison, faiblissent de manière conséquente en tentant de relancer la machine. Ne vous cachez pas Friday Night Lights et Heroes, tout le monde sait qu’on parle de vous.

Lorsque l’on combine anthologie et deuxième saison, cela peut faire des dégâts. Pour faire dans l'euphémisme, la saison 2 de True Detective a beaucoup fait parler d'elle cette année. N’ayant pas été fan de la saison 1, je ne l’ai pas vue, mais je sais qu’énormément de personnes ne l’ont pas appréciée. Sans doute parce qu’ils attendaient le retour du mec qu’on ne comprend pas quand il parle parce qu’il doit avoir des putains de boules de poils dans la bouche. Ou Matthew McConaughey pour ceux qui possèdent le swag.

 

Lou et son beau-père Hank sur la scène du crime

Regarde comme je suis tout sérieux, moi. Mains sur le pantalon et tout et tout. 

 

Après une première saison ayant permis à Noah Hawley de se faire la main en s’inspirant du film éponyme des frères Coen, Fargo revient donc pour une deuxième saison. La première avait su imposer un style particulier avec sa mise en scène, son décor, ses dialogues et sa musique. Elle étudiait des réflexions extrêmement philosophiques avec en filigrane une présence religieuse. Qu’est-ce que le Mal, nos actions doivent-elles rester impunies, peuvent-elles l’être ? Pour porter ce concept somme toute légèrement casse gueule, elle possédait une excellente bande d’acteurs, avec notamment Martin Freeman (Sherlock) mais surtout un Billy Bob Thornton incroyablement charismatique en incarnation du MAAAAAL.

Fargo va-t-elle éviter la malédiction de la deuxième saison ? Est-ce que la recette va à nouveau fonctionner malgré les changements inhérents au concept de l’anthologie ? Premier aperçu avec Waiting for Dutch.

 

 

Du pur Fargo dans la forme

 

Un bon meurtre bien sanglant

Mais qui c'est qui est beau ? Mais c'est qui ? Mais c'est le meurtre !

 

Dès la scène d’ouverture, pas de doute, on regarde bien Fargo. L’action se passe en 1979 et se base sur le massacre de Sioux Falls, l’histoire racontée la saison dernière par Lou Solverson (alors interprété par Keith Carradine) à sa fille Molly. Jimmy Carter délivre un discours sur une crise de confiance au sein du peuple américain, à une époque où les États-Unis ne vont pas bien. Le désastre de la prise d’otages, l’apparition progressive de la surconsommation, encore et toujours la guerre froide… les Américains avaient bien vécu depuis le début des années 1970. Mais ils ne voulaient pas admettre que, dans cette histoire, c'étaient eux les méchants.

Il règne dès lors une ambiance de déni dans Waiting for Dutch. Chaque personnage cherche à vivre sa propre histoire, être le héros de son destin et non pas le vilain. Tout ce qui se passe lors de ce premier épisode trouve ici une grille de lecture particulière, dans le sens où chaque personnage va ressentir différemment ce qui se passe. En outre, la mise en scène est particulièrement inspirée, les effets de caméra également, même pour un novice comme moi. À cela s'ajoute une bande-son accompagnant particulièrement bien le déroulement des évènements. On est à nouveau happé dans ce monde si particulier.

 

 

Un univers qui met du temps à s’installer. Beaucoup de temps. Trop de temps.

 

Les effets de style sont une chose, mais il faut également étudier le fond. Et là, Waiting for Dutch coince un peu. On est introduit de façon extrêmement didactique à l’ensemble des personnages, et à la fin de l'épisode on n'aura pas avancé d'un pouce. 

Le personnage principal de cette histoire est donc Lou Solverson jeune, joué par Patrick Wilson. Homme droit, marié à une femme atteinte de cancer (Cristin Milioti) et aimant sa fille, il va mener une enquête débutant par trois meurtres dans le diner qu’il reprendra plus tard. Il est assisté par son beau-père Hank (Ted Danson) et ses amis Sonny (Dan Beirne) et Karl (Nick Offerman).

Contrairement à la saison dernière, l’action ne se passe pas uniquement à Fargo. L’importante famille Gerhardt possède son lot d’influence dans toute la région, menée d’une main de fer par le patriarche. Terrassé par une crise cardiaque, il laisse un trône vacant ainsi qu’une femme et trois enfants. Les Gerhardt ayant les deux pieds dans le monde criminel, il n’y a aucun doute sur le fait qu’ils vont avoir leur rôle à jouer dans cette histoire. Ce sera l’occasion de revoir Jeffrey Donovan – à mille lieues de son rôle de beau gosse dans Burn Notice – et Jean Smart.

Mais la plus grande menace est celle que l’on aperçoit à peine en fin d’épisode. Elle vient de Kansas City et l’on ne connaît pas son chef, resté dans l’ombre. Cette sorte d'organisation du mal semble vouloir contrôler l’ensemble de la région et pour cela, ils doivent se débarrasser des Gerhardt. Ce qui promet des montagnes de cadavres en perspective.

 

Ed et Peggy Blomquist, souriant au dîner

Souris, tu vis probablement avec une psychopathe. 

 

La partie la plus intrigante de Waiting for Dutch reste toutefois celle concernant Peggy Blomquist. Kirsten Dunst est parfaite pour ce rôle de femme à l’apparence gentille et naïve, mais qui cache très probablement des myriades de secrets. Jesse Plemons interprète son mari Ed, un homme simple et bon, qui va sans aucun doute se retrouver embarqué dans des aventures plus que dangereuses. On va pas se mentir, ça sent pas bon pour Landry Clarke.

À la différence de la saison précédente – qui avait dévoilé de nombreuses cartes d’entrée de jeu –, la narration de Waiting for Dutch suit le format d’un puzzle. Toutes les pièces sont mises les unes à côté des autres, mais encore dans un ordre dispersé. Tout est suggéré, rien n’est expressément dit, tout est dans la promesse. Et on – puisque on c'est un con – se retrouve ainsi dans le flou complet. Une perspective qui peut se révéler aussi intrigante que décourageante.  

 

Waiting for Dutch possède une narration extrêmement lente. Noah Hawley prend tout son temps pour instaurer sa patte au sein de son nouvel univers, et cela peut être pris comme du génie tout comme quelque chose d’extrêmement frustrant. Et malgré l’arc narratif de Peggy et la promesse d’un bon gros vilain, je ressors bien frustré de mon visionnage.

 

Jimmy Carter lors d'un discours

Moi, Président de la République... Putain Jimmy, tu t'es encore gouré de pays !


J’ai aimé :


  • La scène d’ouverture. C’était magnifique.
  • Les décors.
  • La bande-son.
  • Le travail de caméra.
  • Nick Offerman. Le mec jouerait une sculpture en papier mâché que je l'adorerais quand même.
  • Kirsten Dunst, extrêmement prometteuse en Peggy.
  • Les seuls meurtres qu’il y a sont violents et drôles.

 

Je n’ai pas aimé :


  • Qu’est-ce que c’était lent… On aurait eu le temps de mourir quarante-douze fois.
  • Les personnages ne sont pas encore très bien formés.
  • L’ambiance prend le pas sur le fond.

 

Ma note : 13/20. (Mais paradoxalement je pense que cette saison a le potentiel d’être meilleure que la précédente, déjà très bonne.)

L'auteur

Commentaires

Avatar MembreSupprime2
MembreSupprime2
Excellente critique qui résume parfaitement ma pensée sur cet épisode !

Avatar RasAlGhul
RasAlGhul
Ça c'est grâce à la relecture :D

Avatar MembreSupprime2
MembreSupprime2
^^ Bah non, j'étais complètement d'accord même avant ! :)

Avatar Stean
Stean
Très bonne critique, vraiment ! Mais à mon humble avis si tu as réussi à mettre 15/20 à l'épisode de reprise d'Arrow, ici Fargo méritait un peu plus peut-être.

Avatar RasAlGhul
RasAlGhul
Alors c'est bien que tu me fasses remarquer cela, comme ça je vais pouvoir expliquer un truc :D Je t'explique mon système de notation: je note la série par rapport à elle-même. Pour Fargo, qui a su délivrer de bien plus gros épisodes l'année dernière, cet épisode est un solide 13, dans le sens où c'est bien, mais on est en droit d'attendre davantage de la part de cette série. Pour Arrow pareil. c'est un 15/20, par rapport à ce que la série nous a offert pendant maintenant 3 saisons. C'est un bon (à la limite du très bon) par rapport à ce que la série fait de bien. J'espère avoir été clair =)

Image Fargo
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