Dans l'Univers de Westeros, les Dieux occupent une place très importante. Seulement, après la pluie d'épées que furent les deux dernières saisons, regorgeant de batailles, meurtres et bains de sang à tout-va, les personnages avaient peut-être mis leur foi de côté. Tout comme nous, téléspectateurs, avions sans doute un peu oublié. High Sparrow est ainsi là pour nous le rappeler. Et, sans pousser la réflexion jusqu'au bout, il donne à la saison la possibilité de devenir très grande. Voyons pourquoi...
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Cette saison à chaque épisode, c'est la lotterie. On espère tous voir certains personnages sortir. Il y a les fans de Tyrion, ceux de Daenerys, ceux de Bran (qui doivent sacrément se sentir rejetés cette année), etc. En fin de compte, il ne s'agit seulement que du bon-vouloir des scénaristes qui se doivent d'être sélectifs. Seulement, comme on pouvait un peu le voir dans la reprise et surtout dans l'épisode 2, les auteurs y mettent de la bonne volonté pour donner de la consistance aux personnages et aux intrigues. C'est donc sous la forme d'un fil conducteur discret qu'ils donnent une unité à l'épisode et que le sujet de la religion se manifeste.
Il faut quand même dire que cette semaine, certains de leurs choix en matière d'intrigues m'ont paru surprenants, dans le mauvais sens du terme. Et c'est ce qui vaudra à l'épisode une note légèrement inférieure au précédent, en ce qui me concerne. Ne pas avoir montré Dorne et la famille Martell (que l'on attend tous pourtant avec impatience...), ou bien le tandem Jaime/Bronn, dans un épisode consacré à la religion, je peux comprendre. On ne peut pas dire la même chose quant à l'absence totale de Daenerys à Essos ou de Mélisandre au Nord. Difficile aussi d'expliquer la présence de Brienne et Podrick, ou même de Sansa et les Boltons. Leurs intrigues s'inscriraient plus dans un épisode consacré au thème de la loyauté, ou de la revanche. Cet épisode long de 60 minutes aurait dès lors pu être réduit. Il est donc curieux de voir que l'épisode ne traite que ponctuellement du thème qu'il lance dès sa première scène. Tout ça à cause de certaines intrigues un peu à part qui ne sont pas mauvaises du tout mais, qui ne sont pas vraiment à leur place.
Je me retrouve ainsi embêté à la rédaction de cette review, puisque je suis forcé de donner en premier mon ressenti général (qui est largement positif mais qui contient une pointe de déception) alors que je vais ensuite parler de scènes que j'ai beaucoup aimées. Donc, mettons les choses au clair dès maintenant : le paragraphe précédent sera le seul négatif de la critique. Car cet épisode était autrement, vraiment bon. Il confirme la bonne lancée de cette saison et lance des thèmes très intéressants pour la suite. En effet, les scènes ont beau ne pas être toutes reliées au fil rouge (une ou deux relectures de scripts auraient pu faire toute la différence), elles sont pour la plupart très réussies en elles-mêmes.
"I swore a sacred vow at the Godswood." - Jon Snow
Commençons d'abord par cette intrigue au mur qui cette année, me semble passionante. Premièrement, le soin apporté au détail est un délice. Par exemple, l'une des premières actions qu'a dû faire Jon Snow en nouveau commandant de la Garde de Nuit est de nommer Ollie comme son intendant. Ce petit détail en dit long sur la psychologie de Jon. Il fait appel, subtilement (à part une ligne de dialogue, tout s'est passé hors-champs), à notre mémoire de fan. Souvenons-nous des heures de la première saison, lorsque Jon n'était alors lui-même qu'un intendant... Les rappels au passé ne s'arrêtent pas là : outre la mention explicite mais toujours appréciable des origines Starkiennes de Jon, il y a cette (fantastique) scène d'exécution de Janos Slynt à la fin. Celle-ci m'a rappelé les tout débuts de la série : la première apparition de Ned Stark dans le seconde scène du show, lorsque celui-ci a dû décapiter un déserteur. Tout est dans la pose.
"You're as stubborn as your father. And as honorable.
Honor got your father killed."
Cet épisode poursuit donc la thématique lancée dès l'épisode précédent en confrontant le nouveau Lord Commandant aux difficultés que l'exercice du pouvoir implique. Faisant preuve de fair-play et de fine stratégie en nommant son rival Alliser Thorne à un poste qu'il désire, il doit également affirmer son autorité auprès des autres lorsque Janos Slynt lui manque de respect. La scène de décapitation était très puissante (et au passage, est un bon exemple de gore ayant un propos). Il montre également l'évolution du personnage de Snow depuis le début de la série. L'ancien Jon Snow n'aurait jamais pu accomplir un tel acte, l'ancien Jon Snow n'a pas pu tuer une sauvageonne. Mais, l'ancien Jon Snow n'existe plus. En démontre son geste, dans le premier épisode de cette saison, lorsqu'il a achevé Mance Rayder d'une flèche : le Lord Commandant Jon Snow est dur mais juste, dévoué à la Garde et est un homme d'honneur. C'est en fait le même homme que son père. Ajoutons Stannis qui semble avoir un regard protecteur sur Jon, tel un maître et son élève ; on obtient sans doute l'intrigue la plus dense et la plus intéressante de la saison jusque là. Tout cela dans un épisode où il n'y avait même pas Mélisandre, c'est dire si le potentiel global est grand ! Vu que le Mur est pour l'instant la storyline la plus imprévisible de cette année pour l'instant, c'est avec grande impatience que j'attends la suite.
"There is only one god. A girl knows his name, and no man know his gift." - Jaqen H'Gar
L'intrigue d'Arya rectifie également le tir par rapport à la semaine dernière bien qu'elle reste toujours imparfaite. Certains scènes étaient en effet un peu longues et peu pertinentes (la toilette du défunt...). Cependant il y a cette scène où Arya Stark "cesse" d'être Arya Stark et renonce à toute son ancienne vie, au nom de ce qu'elle prétend croire. Elle se sépare des vêtements d'Arya, de la pièce d'Arya... Seulement, au moment de se séparer du dernier souvenir qu'elle possède de son père - son épée Aiguille - elle ne peut se résigner et préfère la cacher. Cette scène nous donne la preuve qu'Arya Stark n'a pas disparu et qu'elle ment, quand elle dit ne vouloir "être personne". Tout est fait sans un mot, tout est lié avec subtilité aux enjeux de la saison. Les sans-visages m'ont toujours intrigués dès leur première apparition. C'est donc un plaisir de découvrir enfin cette communauté sous ses aspects religieux, sans qu'ils perdent de leur mystère, bien au contraire. À ce titre, n'hésitez pas à partager vos interprétations sur la citation que j'ai mise en titre plus haut, tirée de la toute première scène (donnant le ton religieux de l'épisode) et qui est assez mystérieuse...
"A girl wants to serve herself. Here we serve the Many-Faced God."
Le Garde de Nuit, Braavos, voilà les deux intrigues qui m'ont le plus interpellé cette semaine, grâce à deux formidables scènes. J'aurais tout aussi bien pu mentionner la guerre psychologique entre Cersei et Margaery qui continue d'être passionnante. Ou bien l'évolution de la storyline de Sansa - clé du Nord - et la maestria de Petyr Baelish dans le jeu des sept couronnes. Ou bien encore les péripéties de Tyrion et Varys à Volantis, compensant largement l'absence de Daenerys. Les intrigues sont de haute volée dans cet épisode. Mais plus important encore, c'est la perspective qu'offre High Sparrow au futur de la série qui est très attrayante.
"The Faith and the Crown are the two pillars that hold up this world. If one collapses, so does the other." - Cersei
Par cette superbe citation, la Reine Mère vient peut-être de nous annoncer ce qu'il se trame cette saison. Je l'espère, en tout cas. Car en effet, si je n'ai pas trouvé en cet épisode suffisamment de choses intéressantes du côté de la religion dans toutes les intrigues, peut-être est-ce car il était destiné à être un avant-propos ? Avec une introduction du superbe Jonathan Pryce dans le rôle de High Sparrow, qui passerait presque inaperçue, tout l'épisode n'était peut-être qu'une refamiliarisation avec l'aspect religieux à Westeros, en prévision de la suite. Déjà que je prenais mon pied avec tous les jeux de pouvoirs et conflits d'intérêts dans l'épisode précédent... Si en plus de cela, ils ajoutent les croyances individuelles dans l'équation, Game of Thrones pourrait se révéler extrêmement intéressante cette année, à défaut de l'avoir été à 100% cette semaine.
"What's the proper way to address you now ? Queen Mother or Dowager Queen ?"
De plus, contrairement à la bouillie indigeste qu'on a avalé ces récentes années, le mélange des intrigues semble plus homogène. Et pas seulement grâce aux quelques thèmes directeurs : la collision des intrigues y est pour beaucoup. L'année dernière, la plupart des storylines étaient hermétiques et indépendantes les unes des autres. L'impression de regarder une série fragmentée en plusieurs mini-séries était donc tenace. C'est ce que je trouve pour expliquer le fait que les parties à King's Landing étaient de loin les plus intéressantes du lot, vu la concentration massive d'acteurs à l'intérieur. Sauf que depuis que Stannis a fait un coucou à Jon Snow, du progrès a été indéniablement fait. Sansa et Baelish rejoignent les Boltons. Varys et Tyrion forment un duo de choc et vont vers l'Est dire bonjour à la mère des Dragons, rencontrant Jorah Mormont au passage. Podrick et Brienne suivent de près leur objectif. La preuve qu'une saison peut parvenir à être très dynamique, sans recourir à de gros événements gores qui agiteront le web et sans presser son rythme.
Ainsi, avec High Sparrow, le ratio de cette année penche désormais vers le positif. Je reste très confiant quant à l'avenir de cette cinquième saison. La volonté de mieux faire est présente. Quelques maladresses mises à part, je ne vois rien qui puisse entâcher le potentiel de montée en puissance de l'histore. Tant de raisons font que cette année, Game of Thrones s'annonce palpitant.
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High Sparrow possédait donc toutes les cartes en main pour nous offrir un prisme peu abordé récemment à Westeros (la place de la foi) tout en continuant à bouger les pièces sur l'échiquier du jeu des trônes. S'il est dommage de constater que certaines intrigues semblent hors-propos, le thème de la Foi reste présent en toile de fond et le jeu du Pouvoir continue à battre son plein. La collision des deux semble être alors la meilleure perspective que le show nous ait offert depuis longtemps.
J'ai aimé :
- Lena Hardey ne cesse de nous donner des excuses pour adorer encore plus son personnage à chaque scène.
- Une superbe intrigue au Mur, qui ne fait pas que promettre de belles choses et qui nous prend déjà aux tripes.
- Le nouveau ton de la série et les changements bénéfiques de direction par rapport à l'année dernière.
- Un super fil conducteur, la foi, qui complétait parfaitement l'épisode précédent centré sur le pouvoir...
Je n'ai pas aimé :
- ... mais seulement survolé dans quelques intrigues, quand le potentiel était bien plus grand et n'a fait que pointer le bout de son nez.
- Une construction moins efficace que la semaine dernière, formant un ensemble de 60 minutes assez destructuré (le fil rouge compense en partie cela).
- Bien qu'intéressantes pour la majorité, les intrigues en nombre massif forcent les scénaristes à faire des choix curieux en matière de showrunning (absence de storylines d'un épisode à un autre, temporalité aléatoire, etc.)
Ma note : 14/20
Bonus :
À la semaine prochaine avec le retour de Koss !