Les héros silencieux du quotidien
Jake appelle en pleine nuit son père qui le retrouve seul dans le couloir de l'institut et lui donne un morceau de papier représentant un dragon avec le chiffre 3278 écrit dessus. Au même moment en Afrique du Sud, Grace utilise ce même numéro pour passer son examen afin de se trouver un travail, mais se fait du souci pour son amie Sauda qui vit sous le joug d'un homme violent qui la maltraite. Pendant ce temps, Clea tente d'entrer en vain en communication avec le fils de Martin et découvre son obsession étrange pour la chambre numéro six.
Résumé de la critique
Un épisode correct que l'on peut détailler ainsi :
- une histoire qui cherche à donner du sens à l'activité de Martin Bohm
- une intrigue simplifiée qui permet de développer quelques arcs intéressants
- un final forcée qui ne parvient pas à tisser une vraie toile entre les évènements
- un épisode mineur, mais nécessaire
Le chevalier et l'oracle
Pour ce nouvel épisode, Touch propose une intrigue un peu différente des habitudes du show, optant pour une forme toujours en éventail, mais dont le dernier acte ne va pas essayer d'interconnecter totalement les différentes sous-intrigues du jour. Ainsi, malgré les tentatives pour lier les différentes histoires, elles demeurent assez indépendantes, se focalisant avant tout sur l'histoire de Martin Bohm qui reçoit une nouvelle mission de la part de son fils. Plus haché que d'habitude, le scénario cherche à mettre en avant le caractère altruiste du père de Jake, donnant à sa rencontre avec le prince invisible un aspect légèrement forcé.
L'histoire prend alors un ton plus thématique, cherchant à opposer la quête silencieuse du héros et la soif de reconnaissance d'une vedette au travers d'une histoire de concours de danse anecdotique. Le parallèle se limite à la scène finale où sa connexion avec le reste de l'intrigue paraît assez peu évident, Tim Kring cherchant à montrer sa préférence pour la figure mythique et mystérieuse du héros immortel en opposition à la vedette temporaire. L'intrique met clairement en avant le côté chevaleresque de Kiefer Sutherland, solution facile pour ne plus avoir à justifier l'attention qu'il porte aux histoires des autres, cherchant seulement à soulager la souffrance de son fils.
Le principe de départ reste à la fois ambitieux et bancal, surtout que les auteurs font le choix étrange consistant à faire que le prince invisible partage les mêmes troubles que Jake. Le jeune garçon devient alors une sorte d'oracle et son père un chevalier chargé d'accomplir ses souhaits et de rétablir l'équilibre d'un monde en souffrance, installant un parallèle étrange et amusant avec sa concurrente directe Person of Interest.
Un univers à développer
Le problème de cette opposition voulue par la FOX face à la série de Jonathan Nolan, c'est que Touch a encore tout un univers à développer, ne pouvant pas rivaliser avec la mécanique bien huilée de son concurrent. Conscient de cet état, Tim Kring délaisse son besoin d'interconnecter les intrigues pour commencer à s'intéresser un peu plus au personnage de Clea et d'Arthur. Un mal nécessaire qui vient apporter un peu de matière à une série qui peinait à dépasser le cadre du concept, quitte à sacrifier pour cela une intrigue principale assez squelettique.
Le développement de l'impact d'Arthur dans l'univers de la série est le plus intéressant par son potentiel, laissant entrevoir la possibilité d'une étude comportementale du jeune garçon. Le fait de donner quelques clés permettrait d'éviter ces démarrages maladroits où les auteurs s'épuisent à orienter Martin dans la bonne direction sans que l'influence des auteurs ne soit trop apparente. Diffuser une idée sans trop l'exposer, voilà la tâche impossible que les auteurs de Touch s'infligent à chaque épisode, cherchant à justifier sans expliquer, tâche difficile qui remet chaque semaine en cause la crédibilité de l'ensemble.
Ici, le personnage du prince invisible va servir à palier cette communication impossible entre Jake et le reste du monde, artifice scénaristique maladroit et à usage unique. Heureusement, le mystère tournant autour de la porte numéro six permet d'insuffler une touche de mystère nécessaire, laissant entrevoir un début de mythologie intéressant bien qu'encore terriblement vague. Un épisode mineur, qui essaie avant tout de donner plus de matière à une série encore à l'état d'ébauche, mais qui commence à se construire une identité intéressante.
L'importance de l'effet de surprise
L'un des principaux soucis de cet épisode va être l'intervention du prince invisible qui est si directive que la suite de l'histoire de Martin Brohm ne parvient pas à surprendre, offrant une progression trop prévisible pour passionner vraiment. Peu de coïncidences troublantes dans cet épisode, juste quelques scènes où les auteurs se limitent à mettre en avant la façon dont les actes d'une personne ont des conséquences qui dépassent le seul champ de la sphère privée. En évitant de forcer le trait, les scénaristes offrent un épisode à minima, mas évitent les erreurs du pilot où l'astuce du four prêtait plus à ricaner qu'autre chose.
Il y a une quête d'universel dans Touch et on apprécierait que certains des personnages secondaires sont réemployés ponctuellement, créant une sensation de continuité qui manque à la série. Maintenant que le héros est posé et sa relation avec son fils établie, la série va devoir trouver les moyens de surprendre, dépasser un format de départ qui montre déjà ses limites et exploiter cette humanité touchante qui ressort de ce projet bancal, mais séduisant. Très fragile, Touch est une série qui va subir le baptême du feu avec les deux épisodes à venir, tous les deux décisifs pour déterminer la capacité du show à décoller pour de bon.
L'interconnexion entre les humains cette semaine n'est qu'artificielle, la technologie ne permettant que de créer une toile virtuelle qui disparait avec la déconnexion. Une minute de gloire pour Thabo qui n'a rien d'héroïque, mais permet pendant quelques secondes d'exister, là où Grace accomplit l'exploit d'affronter un danger bien réel et de se confronter à la menace de la violence masculine, avec le courage de ceux qui ont la foi dans la justesse de leur lutte.
Un virage nécessaire
Si Touch a su imposer un style assez touchant et une ambition singulière dans l'univers des séries actuelles, le choix des auteurs de simplifier la structure du scénario ne surprendra personne. Moins ambitieuse, l'intrigue de cette semaine permet d'installer un début de routine indispensable, le format de départ laissant apparaître les premiers signes de fatigue du concept de départ. Malgré l'aspect simpliste et sans surprise de cette histoire, le choix des auteurs d'approfondir certains personnages secondaires parait encourageant, en espérant que ces nouveaux arcs permettent de donner un second souffle au show de Tim Kring.
En conclusion, un épisode sans grande surprise, prolongement en mode mineur des précédents, mais qui peine à interconnecter les différentes storylines ensemble. Toujours un peu hésitant, le show de Tim Kring ne perd rien de son charme, même si la séquence finale du hurlement souligne l'incapacité des scénaristes à lier toutes ses destinés ensemble. Par contre, la réflexion sur la différence entre l'héroïsme et la célébrité est intéressante, soulignant l'importance du toucher dans un univers où l'interconnexion est devenue virtuelle avant tout.
J'aime :
- un divertissement plaisant et dynamique
- une réflexion intéressante sur la nature d'un héros
- des personnages secondaires qui gagnent en importance
Je n'aime pas :
- une intrigue qui ne parvient pas à connecter toutes ces storylines
- l'histoire prévisible et trop fléchée
- l'histoire de Clea qui peine à se mettre en place
Note : 12 / 20
Un bon divertissement, mais un ton en dessous des précédents à cause d'un scénario sans surprise, installant l'idée d'un héros trop discret, refusant la célébrité éphémère au profit du courage anonyme. Agréable sans être révolutionnaire, Touch garde cette fragilité et ce ton touchant qui fait son charme, même si la fin s'avère assez peu satisfaisante.