Jeux de hasard et réseaux sociaux
Arthur Teller est mort et Martin Bohm découvre sur les caméras de surveillance qu'il a laissé avant de mourir un présent à Jake, un clé avec écrit dessus le nombre 1188. Le même nombre qui va le mener à rencontrer sa fille qui va l'orienter vers un cave où se pratique des tournois de poker clandestin. Pendant ce temps, Nathalie tient quotidiennement un blog sur Internet où elle défend sa foi en l'amour, malgré une rupture sentimentale qu'elle vient de subir.
Résumé de la critique
Un épisode moyen que l'on peut détailler ainsi :
- une mythologie qui peine à redémarrer et inquiète
- la fin de l'effet de surprise
- une gestion de la narration très discutable
- un épisode qui marque un premier coup d'arrêt
Un épisode de transition assez fade
Après un début de saison plutôt réussi, Tim Kring donnait l'impression de maîtriser plutôt bien son sujet, installant un show sans prétention excessive, touchant pour son idéalisme inoffensif grâce à des comédiens très impliqués. Seulement, cet épisode marque un virage inquiétant après la mort inattendue et maladroite d'Arthur Teller, élément de l'intrigue qui va servir de point de départ à cet épisode. Il faut en effet donner du sens à cette participation présentée à la base comme décisive dont l'utilité reste encore à définir, créant pour l'instant un fort déséquilibre à l'intérieur du show.
Danny Glover n'étant plus là pour gérer la mythologie de la saison, c'est Kiefer Sutherland qui se retrouve en première ligne, son histoire devant servir à la gestion du départ d'Arthur et à l'intrigue du jour. Cela va entraîner une certaine fébrilité dans le premier acte, jusqu'à l'apparition convaincante de Catherine Dent en belle-soeur voulant récupérer la garde de Jake. Malheureusement, si quelques bonnes idées viennent sauver l'épisode, l'intrigue autour de Teller va se révéler pour le moins boiteuse avec un virage fantastique étrange et inattendu, loin des habitudes du show.
Pour découvrir les secrets d'Arthur, Martin Bohm va se retrouve embarqué dans une intrigue à base de poker cousue de fil blanc et particulièrement confuse où il va retrouver la trace d'un professeur de mathématiques nommé Logan. Utilisant Jake pour justifier son intérêt, les auteurs le lancent dans une histoire d'amour confuse et sans relief trop prévisible pour créer le moindre effet de surprise. Une histoire peu crédible et mal mise en place, les transitions entre l'intrigue générale et les anecdotes du jour se révélant assez peu soignées.
Assez passable, passant fréquemment du coq à l'âne, ce récit a le mérite d'offrir un nouveau champ d'investigation à Martin Bohm concernant son fils et sa capacité étrange à voir les connexions entre les individus. Mais avec ce changement, Touch marque la fin de la première moitié de saison par l'épuisement du concept de départ, offrant le premier épisode à souligner les limites du show.
Un scénario moins fluide
Habituellement, le show de Tim Kring est une série qui mise sur une structure simple : une mission du jour à remplir pour Martin Bohm et des histoires anecdotiques qui servent à résoudre les entraves se mettant sur la route du héros. Ici, le principe est le même, si ce n'est que la storyline de Nathalie ne sert strictement à rien, hormis défendre une thématique assez flou sur le côté imprévisible du sentiment amoureux. Jeune romantique vulnérable, cette jeune femme déverse sur son blog ses théories sur l'importance des sentiments, affichant sa vie privée sans la moindre pudeur.
Même si cette intrigue parle de l'interconnexion entre les êtres, son utilité dans cet épisode est des plus discutables, coupant le peu de moment où le scénario s'apprête à décoller. La parabole entre les jeux de l'amour et du hasard est totalement déplacée, donnant une vision du sentiment amoureux qui relève plutôt pour Nathalie de l'obsession, celle-ci diffusant sans vergogne sur son blog le message privé d'un parfait inconnu. Un comportement discutable qui connaitra une conclusion plus que grotesque, happy-end détestable qui marque une rupture forte avec l'ambiance de départ liée à la mort de Teller.
Coupant l'intrigue dans son déroulement, cette histoire de blog transporte Touch de la catégorie touchante et sympathique à celui de naïf et clairement démagogue. Une storyline qui revendique la culture du clan, considérant la réalité comme un prolongement direct de l'univers numérique. Une conception naïve assez déplaisante, justifiant une curiosité malsaine par la nécessité de partager avec son clan, offrant une apologie déplaisante de la psychologie de groupe.
L'art difficile de l'enchaînement
Le vrai problème de cet épisode va résider dans les transitions d'une intrigue à l'autre, le temps donné à chacune des storylines étant pour le moins déséquilibré, avec des séquences inutilement longues et d'autres beaucoup trop courtes. La séquence en Australie va se révéler particulièrement décevante par son contenu, cliché et prévisible, mais surtout par son manque de lien avec le reste de l'épisode. Au lieu de chercher l'accord parfait en associant les intrigues jusqu'au climax final, Touch nous raconte trois histoires sans véritable connexion avec un montage particulièrement maladroit.
L'idée de nous montrer Nathalie par le biais des vidéos de son blog est une mauvaise idée, n'installant pas de véritable connexion entre le spectateur et ce personnage. Ne partageant jamais son quotidien, celui-ci n'a aucune raison de l'envisager comme un personnage réel, les auteurs oubliant que le spectateur a besoin pour s'identifier à un narrateur de voir la réalité, mais aussi ce qu'il cherche à cacher. Abrupte et sans finesse, les transitions nous basculent d'une intrigue à l'autre pour empêcher les temps morts, transformant Touch en une série construite sur un montage zapping où chaque temps morts entraîne le passage d'une intrigue à l'autre.
Seulement, à force de vouloir combler les silences, la série oublie de se donner du sens et cette storyline fantastique qui commence à apparaître ne risque pas d'aider à éclaircir les intentions des auteurs. Avoir choisi de tuer Arthur Teller apparaît comme une mauvaise idée et l'absence de signe de deuil chez Bohm cause le sentiment d'un récit finalement assez peu maîtrisé. Un premier accroc dans une saison jusqu'ici efficace, plaçant ce début de seconde partie de saison sous le signe de l'inquiétude.
C'est quoi Touch ?
Au départ, la création de Tim Kring racontait la souffrance du père d'un jeune autiste devant son incapacité à se connecter avec son fils, garçon doté de la capacité à percevoir les connexions entre les différentes destinées. Seulement, ce point de départ, aussi ingénieux soit-il, reste très abstrait et condamnait la série à se répéter, racontant avec une naïveté sympathique combien la collectivité pouvait venir au secours d'une individualité. Seulement, avec la mort d'Arthur, les auteurs modifient la nature première du show et essaie d'introduire un élément fantastique qui vient troubler la perception du spectateur sur la nature de la série.
En conclusion, un épisode assez inquiétant, confirmant la maladresse que représente pour l'instant la mort de Teller dont la disparition sert à marquer un virage vers le fantastique peu convaincant. Les acteurs sont plutôt bons et la scène entre Kiefer Sutherland et Catherine Dent ne suffit pas à masquer les défaillances d'un scénario mal construit. Apologie des réseaux sociaux à peine voilée et de la notion de tribu, la storyline de Nathalie est, par son inutilité, le symbole d'un épisode vain et inquiétant.
J'aime :
- l'arrivée de Catherine Dent et son opposition à Martin Bohm
- la direction artistique plutôt bonne ...
Je n'aime pas :
- le montage qui réutilise plusieurs fois le même plan
- les histoires annexes sans grand intérêt
- l'absence de Danny Glover
- le virage vers une histoire de fantômes peu convaincante