Critique : Twin Peaks 2.01

Le 19 juin 2011 à 20:24  |  ~ 8 minutes de lecture
Episode de reprise surprenant où se succède des moments géniaux, voire surréalistes avec d'autres scènes plus paresseuses et décevantes. Au programme, l'agent Cooper se remet de ses blessures tandis que la ville laisse apparaître les siennes. Beware Of Bad.
Par sephja

Critique : Twin Peaks 2.01

~ 8 minutes de lecture
Episode de reprise surprenant où se succède des moments géniaux, voire surréalistes avec d'autres scènes plus paresseuses et décevantes. Au programme, l'agent Cooper se remet de ses blessures tandis que la ville laisse apparaître les siennes. Beware Of Bad.
Par sephja

Pitch "In this seed is dead indeed"

Alors que l'agent Cooper est laissé pour mort sur le sol de sa chambre, un géant lui apparaît et lui annonce trois prophéties. A l'hôpital, les différents survivants du feu se remettent lentement de leurs blessures, à l'exception de Jacques Renault dont le décès a été déclaré. James Hurley est en prison et fournit à l'agent Cooper la preuve du lien entre Jacoby et le meurtre de Laura Palmer. Le nom d'un mystérieux BOB commence à être évoqué.

 

 

Le mélange des genres poussés à son extrême

Après nous avoir laissé sur tout une série de storyline en suspens, la série a beaucoup à faire et va s'efforcer de redonner une vision d'ensemble assez juste des évènements tout en insérant quelques révélations indispensables. Twin Peaks se constitue d'une galerie de personnages gigantesques et avant tout l'agent Cooper, faisant preuve d'héroïsme en continuant à enquêter contre l'avis du médecin. Pour l'aider, il peut compter sur la police locale, mais aussi le retour de Albert Rosenfield, apportant une pointe d'humour non négligeable. 

Si certains éléments relèvent encore et toujours du soap classique, Lynch se lance aussi avec Donna dans le polar vénéneux, sa scène avec James Hurley étant particulièrement réussie et monumentalement hors de propos. Là est le problème car la qualité de cet épisode vient de la grande liberté créative de la série où les acteurs tentent beaucoup de choses, toute l'équipe semblant particulièrement heureuse de se retrouver. Les auteurs eux mêmes se lâchent beaucoup, alternant les scènes parfaitement réussis avec d'autres mal construites entraînant des problèmes de rythme agaçant.

Malgré tout, la série reste ambitieuse en diable, car si la première saison fut avant tout une mise en place des nombreux éléments de l'intrigue, cette seconde saison doit amener des réponses ce qu'elle fait sans attendre. L'irruption du géant dans la chambre de l'agent Cooper est la preuve que des forces mystérieuses sont à l'action dans la ville, et que la résolution du meurtre de Laura servira uniquement de porte d'entrée vers une menace bien plus terrifiante.  Les dernières images, digne d'un film d'horreur, nous montre le visage impitoyable de Bob, personnage à l'aura mystérieuse et angoissante. 

Difficile de tout dire sur cet épisode tant il regorge d'informations, mais l'enthousiasme de l'équipe créative et des acteurs fait plaisir à voir. Le morceau de chant final du père de Laura, inspiré de la chanson de Judy Garland dans "Summer Stock" traduit cet état d'esprit de bonne humeur alors que la fin du monde approche. Avec un esprit léger et railleur, Twin Peaks nous conte avec enthousiasme une histoire terrifiante, celle d'une force terrible et sauvage qui menace l'équilibre d'une société fragile que la première saison aura su parfaitement décrire.

 

Hank Jennings, l'homme de main

 

Personnage trouble, meurtrier de sang-froid, Hank Jennings ne laisse à aucun moment deviner sa vraie nature, contrairement à Léo Johnson. Adepte du domino (qui sert à indiquer le nombre de personnes qu'il a exécuté), il possède une connexion forte avec Jocelyn Packard, mais aucune avec la mort de Laura Palmer d'où son intégration tardive au sein du récit. Marié à Norma Jennings, il travaille comme serveur la journée pour essayer de se racheter, soignant ainsi pour le mieux sa couverture tandis qu'il accomplit les basses oeuvres de Benjamin Horne. 

Chris Mulkey est un acteur qui avait déjà une longue liste de rôle à son actif lorsqu'il débarque à Twin Peaks, s'ajoutant à la longue liste des seconds rôles célèbres ayant participé à la série. Toujours actif et spécialiste des second rôles, il aura reçu un prix pour toute sa carrière impressionnante et particulièrement diversifiée. Assez remarquable dans son rôle de tueur en série, son personnage, bien que typiquement lynchien, souffrira de son manque de lien réel avec Bob et le meurtre de Laura Palmer.

 

Pete Martell, un personnage faussement comique 

 

Personnage atypique de la série, Pete Martell est une énigme impénétrable, tant son personnage semble inconscient de ce qui se passe autour de lui. Marié à la manipulatrice Catherine, il traverse la série sans rien voir de ce qui se trame autour de lui, ce qui laisse petit à petit penser qu'il en sait plus que les apparences le laissent croire. Première personne à avoir découvert Laura Palmer, il incarne une normalité et une naïveté qui font de lui le suspect idéal, surtout dans une ville où les apparences sont si trompeuses, et plus que tout car l'acteur en question est Jack Nance. 

Décédé en 1996, Jack Nance est indissociable de David Lynch, devenant au fur et à mesure des années son acteur fétiche de Eraserhead à Lost Highway où il incarnait déjà un être mystérieux du nom de Phil, envoyant des cassettes vidéos étranges à Bill Pullman. S'amusant fréquemment à surjouer la normalité, Jack Nance est un acteur remarquable, le plus Lynchien de tous, impénétrable malgré son apparence totalement inoffensive. Il ne connaîtra malheureusement pas une grande réussite dans sa carrière, mais demeure un acteur culte pour son style si original. 

 

Dans l'ombre des géants

Après une première saison très réussie, Lynch et Frost revienne avec l'intention de surprendre en essayant de créer de nombreuses variations au sein du récit. Malheureusement, si certaines scènes comme celle de l'hôpital sont des vrais bijoux du genre, d'autres trainent en longueur par manque de réel dynamique, la faute à un format de 90 minutes un peu trop gourmand. En essayant de concevoir cet épisode comme un récapitulatif, Lynch se rajoute une difficulté supplémentaire en refusant de se limiter à une simple remise à plat, d'où quelques exagérations d'effet de style un rien déplaisante. 

Le géant qui apparaît donne les clés d'un univers où la normalité n'est qu'une apparence pour cacher la pire des souffrances. Les cheveux de Leland Palmer sont le signe flagrant de l'évolution du show, les failles devenant de plus en plus visibles tandis que Ronette Pulaski sort lentement de son coma. Le traumatisme de la mort de Laura Palmer est passé pour ne laisser qu'une galerie de personnages en pleine mutation, tandis que Twin Peaks subit les assauts d'une force mystérieuse et cruelle qui semble avoir faim de violence. 

Trop lent par moment, l'épisode parvient avec brio à remettre en place tous les éléments de l'intrigue, tout en repassant en revue les liens de chacun des personnages avec l'affaire Palmer. Certains signes sont volontairement cachés (remarquerez-vous que de nombreux objets dessinent les lettres BOB ? Regardez bien les donuts) David Lynch s'amusant beaucoup avec toute cette mythologie qu'il a mis en place. La scène finale donne le coup de départ à une saison où les forces surnaturelles vont lentement prendre le pouvoir et venir déstabiliser cette communauté fragile. 

 

J'aime : 

  •  un épisode qui ose beaucoup avec une insolence rare 
  •  un casting formidable, en particulier Dana Ashbrook et Lara Flynn Boyle 
  •  un récapitulatif qui sait aller au delà d'un simple rappel des faits 
  •  la chevelure blanche de Ray Wise 
  •  la séquence à l'hôpital vraiment brillante mais...

 

Je n'aime pas : 

  •  ...un rythme trop lent dû à un choix de durée de l'épisode maladroit 
  •  certaines scènes pas très inspirées 
  •  quelques problèmes de continuité avec le final de la saison un

 

Note : 14 / 20 

Un épisode qui s'efforce de tout récapituler tout en introduisant les éléments indispensables à la saison deux. Malgré des lenteurs parfois pénibles, le plaisir est toujours intact, David Lynch et Mark Frost s'amusant à multiplier les références avec une certaine jubilation. 

L'auteur

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