Critique : Magic City 1.06

Le 14 mai 2012 à 18:44  |  ~ 9 minutes de lecture
Un épisode impeccable qui permet à Ben Diamond de montrer sa supériorité sur Ike Evans par le biais d'un championnat du monde de boxe proposé par le Miramar.
Par sephja

Critique : Magic City 1.06

~ 9 minutes de lecture
Un épisode impeccable qui permet à Ben Diamond de montrer sa supériorité sur Ike Evans par le biais d'un championnat du monde de boxe proposé par le Miramar.
Par sephja

L'art de remporter une bataille 

 

Un championnat du monde de boxe est organisé au sein du Miramar, l'occasion de gagner beaucoup d'argent grâce au pari clandestin que Ben voudrait voir légaliser dans l'état de Floride. Isaac reçoit justement un des sénateurs qui mènent la croisade contre cette pratique malgré les nombreux pots de vin qu'il reçoit de Diamond par l'intermédiaire d'Evans. Pendant ce temps, Lily découvre sa chambre mise à sac par les hommes de main de son mari, à la recherche de la preuve de son infidélité. 

 

Résumé de la critique 

 

Un épisode impeccable que l'on peut détailler ainsi : 

  •  un scénario qui met adroitement en avant l'opposition Isaac - Ben 
  •  une redistribution des cartes plutôt réussie 
  •  une série qui joue avec tous les codes du thriller 
  •  un épisode très bien construit 

 

 

Un océan bleu azur infesté de requins 

 

Après un épisode qui avait marqué une pause dans la progression du récit, les auteurs de Magic City relance efficacement la mécanique, utilisant l'organisation proche d'un match de boxe pour offrir une confrontation entre Evans et Diamond. Au coeur de cette histoire, l'obsession de Ben pour obtenir la légalisation des jeux d'argent, seule solution pour lui permettre de s'affranchir du Miramar qui lui sert de couverture pour échapper aux attentions du procureur. Obsédé à l'idée que la Floride prenne exemple sur le Nevada, il teste la loyauté de son associé ainsi que sa capacité à plier Ike à sa volonté. 

Les très bonnes scènes entre Jeffrey Dean Morgan et Danny Huston vont servir à faire monter la pression, renversant une première partie de saison qui avait plutôt placé Isaac jusqu'ici en position de force. L'ambiance devient plus tendu, laissant apparaître les failles dans le plan du patron du Miramar pour se débarrasser discrètement de cet associé gênant. Par le biais de cette intrigue, Mitch Glazer prouve l'efficacité de sa création, donnant une récit d'une fluidité assez remarquable en évitant une dispersion des storylines qui handicapait les épisodes précédents. 

Maîtrisant parfaitement la progression du scénario, le créateur de Magic City utilise le match de boxe pour raconter cet affrontement indirect, laissant entrevoir les points forts de chacun des combattants. Ainsi, les scénaristes font apparaître la nature des réseaux de Ben et Isaac, leurs alliés ainsi que leur stratégie pour conserver le contrôle l'un sur l'autre. Evidemment, c'est Diamond qui va prendre lentement le dessus, fermant la porte aux espoirs de son adversaire de gagner son indépendance financière, l'histoire principale prenant des accents plus tragiques alors que le héros sent le piège se refermer sur lui. 

Vainqueur de cette bataille, Diamond s'impose comme le prédateur, Isaac comme la proie tandis que les tentatives du patron du Miramar pour prendre son indépendance et doubler son associé se retournent contre lui. Très bien construit, cet épisode lance de la meilleure façon cette deuxième moitié de saison, laissant apparaître les faiblesses et les forces de chacun des deux adversaires. 

 

L'ombre du démon 

 

Longtemps tenu à l'écart le temps de mettre l'intrigue en place, Ben Diamond vient réinvestir l'hôtel dont il est un client fidèle, goûtant au soleil permanent de la fournaise floridienne. Homme mystérieux au passé trouble, il est l'élément perturbateur du scénario, ses rares ennemis finissant le plus souvent morts sans qu'il exprime la moindre pitié ou le moindre remord. Loin de partager l'ambition d'Isaac d'être un entrepreneur florissant, il incarne une soif de pouvoir inextinguible, voyant cet hôtel comme une simple étape sur la route menant à son empire. 

Sa seule famille se limite à une femme qu'il se plait à exposer sans partager le moindre sentiment pour elle, son absence d'attache lui conférant une dimension mythologique, celui d'un démon invincible. Avide de pouvoir et de sa propre cruauté, il est le cancer du patron du Miramar, une maladie dont il ne peut se défaire, le symbole de la nature ambiguë d'une entreprise qui s'enrichit en exploitant les faiblesses humaines. Si le héros de Magic City était Faust, Ben serait Méphistophélès, détenteur du pouvoir restant dans l'ombre de ce gigantesque complexe hôtelier.  

Redistribuant les cartes à son avantage, Ben Diamond est aussi l'origine de la rupture entre Ike et son fils Danny, refusant de voir son père se soumettre ainsi devant un être aussi méprisable à ses yeux. La scène de la confrontation entre  Isaac et son fils est une vraie réussite, la première où Christian Cooke s'impose vraiment en renvoyant à son père l'image de ses propres défauts. Si Stevie est le fils préféré, se construisant autour de l'admiration pour son père, son frère lui renvoie l'image de ses propres faiblesses, cherchant à construire sa propre vie sur des valeurs de justice et d'honnêteté. 

C'est à cause de sa famille qu'Ike est faible aux yeux de son ennemi, chacun de ses fils servant aux scénaristes pour exposer ses faiblesses. Ressentant le besoin de sauver les femmes qu'il côtoie, dévoré par son désir de respectabilité, il se ment fréquemment à lui-même concernant son ambition, son épouse Vera restant inconsciente de la réalité concernant les pratiques de son mari. Une naïveté touchante et un rien pathétique, celle d'une femme qui croit encore à l'existence d'un paradis, aveugle aux nombreux signes que le monde lui envoie sur la vraie nature de son mari.

 

 

Le monde stérile et brûlant du Miramar

 

Si Magic City s'est donné pendant un temps des faux airs de Mad Men, cet épisode vient marquer une rupture de taille en lançant une intrigue principale qui puise clairement son inspiration dans les codes du thriller. En tenancier d'hôtel à la Humphrey Bogart, Isaac est un vrai personnage de polar, cherchant par l'éclat de sa réussite et la lumière des néons à faire disparaître la face sombre des origines de son pouvoir. Entre la lumière brulante et aveuglante du soleil et les éclairages tamisés du bar de l'hôtel, ce show est un vrai polar américain traditionnel à deux niveaux de lecture, avec ses femmes fatales qui poussent les hommes vers la damnation. 

Profitant d'une équipe créative particulièrement inspirée, Magic City sait offrir un monde où l'illusion de la perfection est presque parfaite, où le péché devient véniel tant qu'il reste confiné à l'intérieur de l'hôtel. Loin du regard de Dieu, Ike Evans construit un univers à l'apparence trompeuse, riche et généreux en apparence, mais froid et stérile en réalité. Un univers qui obéit à ses propres règles, laissant la police impuissante, s'alimentant sur la soif de péché d'une classe politique corrompue et de touristes en quête de débauche, poussés par le désir et la soif d'argent.

Fruit d'un travail remarquable du point de vue de la composition, Magic City trouve son seul point faible dans le personnage du procureur qui peine à exister. La scène du cachet d'aspirine a beau être visuellement très séduisante, le spectateur a du mal à partager les vues d'un homme dont l'utilité se limite à être jusqu'ici un figurant dans l'affrontement entre Ike et Ben. Une faiblesse qui se retrouve dans un personnage de Danny qui peine à s'intégrer dans l'intrigue principale, son poids se limitant à incarner le refus de ce paradis aveuglant du Miramar qui consume ses victimes à petit feu.  

 

Un scénario impeccable 

 

Après cinq épisodes de mise en place élégante et réussie, Magic City lance son intrigue principale et nous plonge petit à petit dans un polar fascinant à l'ambiance troublante, teinté d'une noirceur étonnante. Très ambitieuse, la série montre un visage singulier et séducteur, même si certains points restent encore à améliorer, offrant une confrontation réjouissante entre Isaac et Ben. Plus dynamique que les précédents, cet épisode tire parfaitement profit des éléments mis en place durant la première moitié de saison tout en laissant apparaître toute l'ampleur du pouvoir de nuisance de Diamond. 

En conclusion, un épisode très solide, plaisant et dynamique qui installe une ambiance de thriller envoutante et fascinante grâce à des personnages particulièrement bien saisis. Superbe visuellement, très bien interprétée, une intrigue qui confirme tout le potentiel du show, même si certains pans de l'histoire comme celui concernant les fédéraux sont encore mal exploités. Un affrontement de haute volée entre deux hommes que tout oppose, se battant pour le pouvoir d'imposer à Miami leur idée du paradis.

 

J'aime :

  •  l'intrigue très bonne 
  •  les acteurs excellent 
  •  la réalisation de haute volée 
  •  la montée en puissance de Ben Diamond très bien orchestrée 

 

Je n'aime pas : 

  •  la storyline de Danny mal mise en valeur 

 

Note : 15 / 20

Lançant son intrigue pour de bon, Magic City se révèle un polar fascinant servi par un casting impeccable, imposant une identité forte et séduisante. La qualité d'écriture, l'atmosphère fascinante du show fournit un divertissement très intéressant avec une première confrontation entre Ben et Isaac prometteuse.

L'auteur

Commentaires

Avatar Antofisherb
Antofisherb
Excellente critique une fois de plus :) ! Concernant l'aspect "thriller" de la série, à première vue j'aurais plutôt opté pour le "film noir", le thriller possédant un côté suspense qui n'est pas tellement présent dans Magic City je trouve. Mais c'est vrai que par exemple dans l'épisode précédent, la scène dans laquelle Ben regarde sa femme se toucher à travers la vitre fait un clin d'oeil à Basic Instinct (notamment lors d'un certain plan quasiment reproduit à l'identique), qui est clairement un thriller. D'ailleurs, Ben Diamond est juste un des personnages de séries les plus flippants que j'ai jamais vu ! Sinon, après vérification cet épisode n'entame malheureusement pas la deuxième moitié de la saison, puisqu'elle ne comporte que 8 épisodes (comme Boss finalement) et non 10. Dommage donc que la dynamique ne commence qu'à 3 épisodes de la fin, mais bon la série est déjà assurée d'avoir une deuxième saison donc elle avait amplement le temps de le faire. Ceci dit, même si cet épisode hausse le niveau de la série du bon au très bon, je trouve qu'il manque encore quelque chose pour qu'elle fasse parti de mes coups de coeur de l'année. Pourtant la série ne manque pas d'âme, elle a sa propre ambiance malgré un apparent mix entre Mad Men et Boardwalk Empire auquel elle a vite su se détacher. En fait, comme tu l'as si bien fais remarquer, ça se joue sans doute du côté des sotylines de Danny et du procureur. A voir sur la fin de saison...

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sephja
Désolé, c'est imdb qui m'a mal inspiré pour les 10 épisodes. http://www.imdb.com/title/tt1832045/episodes?season=1 Pour moi, l'absence d'un personnage de policier fort fait que j'ai du mal à parler de film noir... peut-être thriller est-il aussi inadéquat... bah, je ne suis pas expert. Merci pour ton commentaire. En effet, Ben Diamond, quel personnage.

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Antofisherb
Ah oui, bizarre pour IMdB, en général ils se trompent pas pourtant. Même wikipédia affiche 8 épisodes^^ Oui c'est vrai que film noir = très souvent policier, j'avais un peu zappé le côté là. Après je sais pas s'il y a parfois des exceptions, mais de mémoire j'en vois pas en tout cas. De tout façon je suis très loin d'être un expert également :) Après tout peut être que Magic City a réussi à mélanger plusieurs genres et est donc difficile à ranger dans un seul, et d'une certaine façon tant mieux :)

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sephja
Je vote pour mélange des genres comme ça tout le monde a raison. :)

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