Pitch rupture entre mecs
Jerry doit aller retrouver Joel Hornick, un homme qu'il considère plus comme un casse-pied que comme un véritable ami. A court de mauvaises excuses pour lui échapper, il décide de rompre avec lui une bonne fois pour toutes. Les choses ne se passeront malheureusement pas aussi bien.
Une vraie réussite formelle
Le principal changement de cet épisode consiste à modifier la forme de la série, les séquences de stand-up hachant trop fréquemment le récit durant le pilote. Elles sont ici réduites alors à deux séquences (au début et à la fin) et servent d'introduction et de clôture de l'épisode. Le choix s'avère immédiatement payant : le rythme de l'épisode est largement meilleur, et donne à la série une forme qu'elle gardera jusqu'à sa conclusion, neuf années plus tard.
De plus, la séquence d'introduction (voir photo ci dessus) permet d'éviter les longues séquences explicatives de début d'épisode, Jerry se chargeant sur scène d'en donner le background. Ce système, d'une efficacité remarquable, est un des coups de génie de ce show, une idée formidable qui permet de réduire au maximum les explications et de passer directement à la partie comique.
L'équipe créative a aussi accueilli un nouveau costumier, Charmaine Simons, dont la créativité et la talent donnera, en particulier à Kramer, un look de plus en plus remarquable. Mais je garde la fameuse chemise pirate pour plus tard.
Une histoire amusante, mais un rien décevante
Dans l'épisode, l'ami envahissant de Jerry (Kevin Dunn, très amusant comme toujours) va permettre d'introduire au spectateur un des aspects les plus importants du caractère de Seinfeld : il est méprisant et railleur. Incapable de la moindre empathie avec son "ami", il passe le repas à se moqueur ouvertement de lui, laissant apparaître un trait qui deviendra typique de la série : son mauvais esprit. Les héros de Seinfeld ne sont ni chaleureux, ni partageurs, ce sont des New-Yorkais égoïstes qui tournent en dérision le moindre drame du moment qu'il ne les affecte pas.
Si ce point de l'identité de la série n'est pas encore vraiment développé ici, on le voit apparaître par petites touches, apportant d'ailleurs certaines répliques vraiment amusantes.
Malgré tout, la série n'en est qu'au commencement, et la scène du restaurant entre Jerry et son ami est vraiment trop lente et presque ennuyeuse. Cette séquence n'ose pas jouer assez sur l'absurdité de la situation en insistant sur le caractère lâche de Jerry dans son refus systématique d'accepter de jouer le rôle du méchant.
Et Elaine apparut, dans un éclair de génie
Mais le plus important évènement du show consiste en l'arrivée d'Elaine (Julia Louis-Dreyfus, simplement inégalable), qui surgit de manière spectaculaire, sans la moindre introduction, et crève l'écran tant la comédienne fait preuve d'un talent et d'un sens de la comédie remarquable. Sa première scène où elle avale des bonbons tout en déclarant ne pas avoir faim est la meilleure définition que l'on peut donner du personnage. On ne sait rien d'elle et pourtant elle devient pour le spectateur immédiatement indispensable, tant l'énergie comique qu'elle apporte est irrésistible.
Véritable New-Yorkaise, Elaine possède cette capacité à lancer des phrases qui, à l'époque, étaient tout simplement inimaginables dans la bouche d'une femme. Elaine n'est ni un personnage romantique, ni une femme obsédée par son travail, elle constitue un personnage vraiment unique de l'histoire de la télévision, apportant une réelle modernité à la série.
Si Seinfeld n'a pas encore véritablement vieilli, c'est en grande partie grâce à Julia Louis-Dreyfus qui sera la seule du groupe des quatre à poursuivre une véritable carrière avec Old Christine.
Le duo Georges - Seinfeld, une valeur sûre
Un autre personnage qui confirme l'ampleur de sa force comique, c'est Georges Costanza, le premier de la bande à vraiment assumer son statut de méchant. Héritant d'une storyline embryonnaire, il parvient à amuser par son caractère radin et égoïste, Jason Alexander arrivant parfaitement à rendre attachant ce personnage incroyablement détestable. On en vient à regretter de ne pas plus de scènes avec Georges, tant le personnage semble une source de comédie intarissable.
Par contre, il est regrettable que, devant Georges, l'activité de Jerry se limite à "passer les plats", tant son personnage semble en dessous de la création de Jason Alexander. Il est un peu inquiétant de voir Jerry s'effacer à ce point, car il serait bon de rappeler qu'il est censé être le héros de ce show, pas juste un personnage pivot autour duquel gravite tous les autres.
Un résultat convenable, mais il reste du travail
Aprés seulement deux épisodes, Seinfeld a trouvé sa forme définitive, utilisant superbement les séquences de stand-up pour permettre à la partie comique du show de s'exprimer pleinement. Les personnages sont tous là, mais si Georges et Elaine semblent parfaitement en place, Jerry et Kramer sont encore loin du compte.
En définitive, un épisode sympathique mais un rien frustrant au vu de ce qu'il aurait pu être. L'aspect théâtral des différentes scènes est toujours aussi agréable, mais les deux storylines annexes (Georges et Kramer) manquent de développement, là où l'histoire de Jerry aurait gagné à être raccourcie.
J'ai aimé:
- Julia Louis-Dreyfus, formidable.
- Georges et sa jarre pleine de pièces
- la construction de l'épisode, très réussie
- la direction artistique, largement supérieure au pilote. (surtout les costumes)
Je n'ai pas aimé:
- Kramer, clairement sous-exploité.
- la scène du restaurant, beaucoup trop lente et prévisible.
Note : 12 / 20