L'explicite et l'implicite
Les intentions de vote dans le conflit entre Pearson et Hardman sont à égalité, poussant Daniel à vouloir nommer discrètement un nouveau partenaire senior en la personne de Louis Litt. Jessica charge alors Harvey d'aller lui tendre la main, afin de gagner son vote et de faire pencher la balance de leur côté. Pendant ce temps, Specter hérite d'une affaire où il doit défendre un journaliste jugé pour diffamation après avoir remis en cause en direct dans son émission l'honn^reteté d'un joueur de base-ball.
Politique et sentiment
Avant-dernier épisode de la saison estivale de Suits, l'occasion pour Jessica et Daniel de tenter un dernier tour de force pour gagner le vote des associés seniors. Mais les camps semblent bien établis et le débat s'est lentement déplacé du champ politique sur le terrain affectif, scellant les décisions de la plupart des partenaires. C'est alors qu'Hardman joue sa dernière carte en offrant une promotion à Louis Litt, espérant gagner ainsi la voix de plus qui lui permettrait de faire la différence.
Seulement, cette promotion opportune va vite être découverte par Donna, engendrant une réaction immédiate de Jessica pour venir entraver les manoeuvres de son adversaire. Dès lors, la plus insignifiante des attentions à l'égard de Louis va prendre un double sens qui plonge Litt dans un certain désarroi, incapable de savoir quel camp serait le plus avantageux pour lui. Cherchant à le convaincre de sa bonne foi, Daniel enrobe cette nomination dans un discours sur le mérite et jour la carte de l'affectif là où Jessica choisit de mettre en avant son autorité.
Seul Harvey fait l'effort de jouer le jeu de la sincérité, révélant à Louis des éléments concernant Hardman qui avaient été mis au secret cinq ans auparavant. Son refus de se placer dans le domaine de l'affectif n'est pas une surprise tant Specter ne sait jouer que franc-jeu, tenant un discours qui laisse entrevoir à Litt la situation instable où il se trouve. Le problème est qu'à la différence de Specter, son souffre-douleur est toujours dans le champ affectif, n'accordant qu'un intérêt mineur à la dimension politique de cette histoire.
Un épisode où Litt doit choisir s'il est prêt à sacrifier sa fierté sur l'autel de l'ambition, offrant l'occasion à Rick Hoffman de jouer avec toute une gamme d'expression, de la joie à la désillusion. L'intégrité devient alors une valeur étrange, celle qui vient s'opposer à l'ambition et vous protège de la cruauté d'un univers où les rêves sont autant de leviers par lequel les puissants manipulent les plus faibles.
Pearson - Hardman, une guerre sans pitié
A l'approche de la mi-saison, les personnages de Suits prennent de gros risques et jouent avec le feu, en particulier Daniel Hardman qui exploite l'ambition d'un homme pour mieux le soumettre. Le simple jeu politique prend alors une tournure très cruelle, transformant le jour de la consécration pour Louis en une humiliation personnelle, celui d'un homme au succès opportuniste. Aux yeux de toute la compagnie, cette promotion apparaît comme un cadeau empoisonné et pose la question de l'intégrité de Litt et de son orgueil.
Le même danger qui oblige Harvey à faire revenir Donna, son absence l'ayant privé de son principal soutien dont il a désormais particulièrement besoin pour réussir à lire le jeu de Hardman. S'il est un avocat de premier plan, il reste un piètre politicien et ne parvient pas à convaincre Litt des vraies intentions de son ennemi, échouant à baisser suffisamment sa garde pour pouvoir se rendre suffisamment crédible. Chez Specter, la camaraderie est un luxe qu'il ne veut pas s'offrir, séparant délibérément sa vie privée de son travail là où Louis ne vit au contraire que pour le cabinet Pearson - Hardman.
La scène où il parle avec ses deux parents est assez amusante, car elle met en évidence combien la vie privée est devenue un luxe dans l'univers hyperconcurrentiel des grands cabinets. Pour ceux qui désirent gravir les marches vers la gloire, le sacrifice est quotidien, avec comme problème majeur la nécessité d'en accepter le prix, comme pour Mike qui n'a plus vraiment le temps de voir sa grand-mère. Une histoire de famille anecdotique au premier coup d'oeil, mais particulièrement réussie, apportant une touche de comédie bienvenue tout en relançant le couple Mike - Rachel.
Pearson - Hardman est un monde dangereux, où les apparences sont toujours trompeuses et où le moindre signe de faiblesse vous condamne définitivement. Un univers impitoyable où personne n'a le droit de baisser sa garde, où la moindre défaite peut sceller une carrière, un monde où les bénéfices ne peuvent être que financiers. Un immeuble dangereux où deux prétendants convoitent le même trône, posant les bases d'un Summer Final qui va forcément laisser des traces.
Une vraie montée en puissance
Avec cet épisode, Aaron Korsh dresse un bilan des forces en présence alors que le jeu des alliances et des petits arrangements est sur le point de s'achever. Le temps de la vérité est venu pour les seniors de Pearson - Hardman, celui du choix de décider de l'avenir de la compagnie, le moment où les employés reçoivent la note des nombreux sacrifices qu'ils ont acceptés de faire. Le final touchant avec Mike donne clairement le ton de l'épisode à venir, montrant la capacité des auteurs de Suits à proposer une vraie mythologie tragique, à la différence de l'année dernière.
Le vrai talent de cet épisode est d'avoir su démarrer avec beaucoup de légèreté, laissant dans un premier temps l'illusion d'une simple intrigue de transition au ton presque parodique. Pourtant, après une séquence Donna - Louis très réussie, Suits change de ton très rapidement avec un premier affrontement entre Jessica et Daniel qui marque une rupture claire et installe une tension qui va aller crescendo tout du long. En effet, cette promotion va faire de Litt le centre de gravité des tensions entre les deux fondateurs du cabinet, une guerre dont il risque de devenir la première victime.
Comme Louis, le spectateur constate combien il est difficile de proposer une démarcation claire entre le bien et le mal dans Suits, chacun des deux camps possédant leurs qualités et leurs défauts. La qualité des dialogues et des comédiens est d'ailleurs à souligner, en particulier les confrontations entre David Constabile et Gina Torres sur fond de guerre froide et de vieilles rancunes. Le début du chaos pour un cabinet au bord de l'implosion où le vainqueur de ce vote sera obligé de régler ses comptes envers ceux qui l'ont défiés.
Et, en parallèle, la tragédie se noue du côté de Mike, loin de la guerre interne qui touche Pearson - Hardman, un drame simple qui rappelle qui vient relativiser toutes ces luttes de pouvoir. Une seul certitude au vu des éléments mis en place en fin d'épisode, le summer final sera un grand moment et ne laissera personne indemne. L'occasion pour Suits de passer à un autre niveau, achevant une première moitié de saison qui aura su confirmer toutes les qualités de la série entrevues l'année passée.
J'aime :
- les confrontations entre Pearson et Hardman
- la scène finale entre David Constabile et Rick Hoffman
- les scènes entre Mike et Rachel
- la réalisation impeccable
Je n'aime pas :
- l'affaire du jour assez anecdotique
Note : 14 / 20
Suits prépare avec élégance son summer finale en proposant un épisode au démarrage certes léger, mais qui monte en puissance jusqu'à un final tragique. Tout est en place pour une conclusion prometteuse d'une des meilleures séries de cet été 2012.