Critique : Terriers 1.04

Le 10 mai 2011 à 16:38  |  ~ 6 minutes de lecture
Episode mythologique, proposant une remise à plat de l'affaire Lindus et montrant les prémices d'une histoire très ambitieuse. Au programme, le choix du récit feuilletonnant, une portrait de l'inspecteur Gustafson et deux hommes à la limite de la ligne rouge.
Par sephja

Critique : Terriers 1.04

~ 6 minutes de lecture
Episode mythologique, proposant une remise à plat de l'affaire Lindus et montrant les prémices d'une histoire très ambitieuse. Au programme, le choix du récit feuilletonnant, une portrait de l'inspecteur Gustafson et deux hommes à la limite de la ligne rouge.
Par sephja

Pitch cocker

Hank et Britt sont contactés par la femme de  Robert Lindus qui leur offre mille dollars s'ils acceptent de venir le voir au parloir de la prison. Heureux de pouvoir se venger de la mort de Mickey, Dolworth accepte et reçoit une proposition alléchante de Lindus : voler un quart de million de dollars lui appartenant contre le nom du véritable meurtrier de son ami.

 

Tout remettre à plat pour un nouveau départ

 

Après deux épisodes où l'affaire Lindus avait de plus en plus le statut d'anecdote, Terriers fait le choix risqué de ne pas attendre et de proposer un vrai épisode mythologique qui va faire progresser le récit dans de multiples directions. Durant tout l'épisode, le scénario va s'avérer surprenant en proposant une évolution totalement inattendue de l'affaire Lindus, Hank et Britt se trouvant soudain blanchis par la victime de leur manipulation. 

Toujours aussi intense, Christopher Cousins (découvert dans Breaking Bad) campe un Robert Lindus fatigué, à bout de nerfs, l'acteur apportant cette intensité qui donne de la crédibilité à l'ensemble. Loin de jouer la sécurité, Terriers prend le risque de proposer une évolution ambitieuse, laissant entrevoir les prémices d'une histoire complexe, digne d'un vrai bon polar américain. 

L'épisode place tranquillement chacun des éléments pour l'avenir de la série, laissant lentement apparaître une autre vérité bien plus prometteuse que la seule affaire Robert Lindus. Pour Hank, il s'agit avant tout de rendre hommage à son meilleur ami, mais surtout de se mettre suffisamment en danger pour ne plus penser à Gretchen. La découverte de la présence de sa soeur (jouée par Karina Logue, la propre soeur de Donal) est le signal flagrant qui indique combien Hank perd lentement le contact avec la réalité. 

Britt va suivre le mouvement, mais sent bien que son ami est en train de plonger lentement, en particulier lors du cambriolage où il semble incapable de se concentrer sur l'instant présent. Assez docile, il se montre peu méfiant envers Hank, dépassant fréquemment les limites de la légalité, inconscient des ennuis qui risquent de s'abattre sur eux. La prophétie énoncée par Gustafson reste d'actualité, mais l'ancien cambrioleur continuer de placer sa loyauté avant tout.

Ambitieux dans la forme, cet épisode nous laisse entrevoir tout le potentiel de Terriers qui, derrière son apparence décontractée, cache une oeuvre tragique et extrêmement pessimiste où le moindre espoir de rédemption est fréquemment balayé d'un revers de main. Tout comme sa soeur, Hank porte les stigmates d'un homme qui perd lentement tout contact avec le réel, se raccrochant à ses enquêtes avec Britt comme à un gilet de sauvetage, quitte à entraîner son collègue vers le fond.

 

Le choix du feuilleton 

Consciente de sa propre ambition, Terriers choisit d'abandonner le standalone pour proposer un récit en forme de feuilleton, profitant parfaitement des nombreux personnages mis en place dans les premiers épisodes. Les auteurs maitrisent parfaitement le récit, dans lequel ils n'ajoutent aucune fioriture, misant, au contraire, sur  le réalisme de chacune des scènes. Refusant de céder au spectaculaire, Terriers semble parfaitement savoir où elle va, l'affaire progressant sur un principe de poupées gigognes vraiment amusant.

Avec une absence totale de considération pour la morale, Terriers va au bout de son concept tandis que Hank réduit lentement la vie de Lindus en miettes. Le dernier geste de l'homme d'affaire, une fuite en avant, sera le symbole de son impuissance face à deux détectives tenaces, refusant obstinément de lâcher prise. Par leur obstination extrême, Hank et Britt pousseront leur victime à bout, jusqu'à une prise de conscience trop tardive.

En laissant le récit progresser épisode par épisode, Ted Griffin fait le choix de s'intéresser plus à la descente aux enfers des héros qu'à leur simple activité de détectives. Les évènements s'accélèrent et Britt va bientôt être obligé de remettre en cause son amitié pour éviter de plonger dans l'océan de problèmes où Hank l'entraîne. Le choix du feuilleton vient parfaitement soutenir le style hyper réaliste du show, l'histoire de deux hommes au bord du gouffre, prêts à sauter... 

 

Inspecteur Gustaffson, la conscience de Hank 

 

Dernier ami de l'ancien flic au sein de la police, Gustafson est un homme intègre qui a appris à se tenir à distance de Dolworth, l'expérience lui ayant appris à prendre le recul nécessaire. Toujours en train de mâchonner son substitut de cigarettes, il parvient ainsi à conserver un calme royal quel que soit la situation. Conscient des évènements troubles qui entourent Hank, Gustafson tient un rôle double par rapport à lui, à la fois ami par nécessité qu'ennemi par sens de la justice.  

Acteur spécialisé dans les rôles virils, Rockmond Dunbar crée ici un personnage subtil, à la fois chaleureux et menaçant. Ses doutes envers Hank font de lui le seul rempart contre la succession de catastrophes engendrées par les deux héros.  

 

Par delà la ligne rouge 

Peu conscient de leurs actes, les deux héros ne s'encombrent pas des questions de morale et ne semblent motivés que par un désir de vengeance qui efface la frontière entre le bien et le mal. Ils n'accomplissent pas la justice, mais détruisent tout sur leur passage, et dépassent fréquemment la ligne rouge, cette limite que notre conscience nous impose et qui nous empêche d'agir de manière inconsidérée. 

Même s'il n'est pas encore totalement de l'autre côté, Hank hésite de moins en moins à franchir la limite, et son comportement est de moins en moins maitrisable. Britt et sa soeur sont les derniers à pouvoir l'empêcher de basculer définitivement dans la dépression et le désir d'autodestruction. 

 

J'aime :

  • une approche feuilletonnante très réussie 
  • un scénario très maîtrisé et imprévisible
  • un style unique, presque néo-réaliste 
  • les acteurs formidables

Je n'aime pas :

  • un premier acte un peu lent 

Note : 15 / 20 

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L'auteur

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