Pitch crime et châtiment
Alors que le Cardinal Della Rovere arrive enfin en France à la rencontre du Roi, le Pape organise le mariage entre Gioffre, son plus jeune fils de treize ans, et une duchesse napolitaine. De son côté, Lucrèce feint de s'occuper de son mari en épouse aimante tout en le trompant avec le palefrenier Paulo.
La tempête approche et les alliances se préparent
Pendant que le pape soigne son alliance avec le Royaume de Naples, le cardinal Della Rovere parvient en France avec l'espoir d'appâter un roi qui va se montrer particulièrement méfiant. Homme bourru et peu enclin à la diplomatie, ce roi de France va se révéler être un homme plus enclin à se battre pour un but que pour une cause. Impuissant devant un homme aussi insensible à la flatterie, Della Rovere va tenter malgré tout de sceller avec la France un pacte, condamnant les royaumes de Milan, Florence, Rome et Naples à un inévitable bain de sang.
Cesare pour sa part va profiter de l'absence du mari d'Ursula Bonadeo pour faire succomber la jeune femme, tout en la tenant dans le silence de son propre crime. Après avoir bénéficié d'une grande exposition, Cesare tout comme Lucrèce vont disparaître légèrement, les évènements importants de cet épisode mettent plutôt en lumière la personnalité obscure Juan Borgia, le jeune homme n'ayant pas de leçons à recevoir en matière d'immoralité.
Construit comme un simple épisode de transition, ce volet des Borgia va largement dépasser mes espérances en produisant de nombreuses scènes remarquables, en particulier entre Juan et son père. Jeremy Irons et David Oakes, jusqu'ici laissés de côté, vont apporter un nouveau souffle à la série, laissant présager d'un avenir dramatique tant les alliances que tissent le pape Borgia semble incapables de contrer la menace qui s'approche.
Si les relations charnelles occupent aussi une place centrale dans l'épisode, elles vont surtout laisser transparaître toute la cruauté et le goût pour la manipulation des Borgia. Même Cesare, malgré ses efforts pour se donner une apparente noblesse, va finalement découvrir qu'il est bien le fils préféré de son père. Le sang des Borgias, ce goût pour la manipulation et l'exploitation du désir des autres au service de sa propre ambition, voilà ce qui coule dans leurs veines à tous.
Le Cardinal Della Rovere, un diplomate d'une autre époque
Opposant convaincu du Pape Borgia, le Cardinal Della Rovere est un comploteur qui, derrière l'illusion d'une foi sans tache d'un simple serviteur de l'Eglise, cache une ambition démesurée. Son avancée dans les différentes provinces d'Italie lui a petit à petit appris un certain sens de la diplomatie, mais dans le seul but de servir ses propres intérêts. Prêt à mettre l'Italie à feu et à sang pour le compte de sa seule ambition, le cardinal pert lentement de sa superbe, tandis que sa tunique s'obscurcit petit à petit.
Colm Feore est simplement formidable tout comme le surprenant Michel Muller qui campe un roi de France convaincant, mélange intriguant de barbarie et de savoir dans la science naissance de la balistique. Confronté à la rugosité de ce roi qui parle sans ambages, l'homme d'Eglise montre combien il a appris à accepter de laisser sa conscience de côté, se rapprochant du même coup de son ennemi le Pape Alexandre VI.
Cette évolution forte du personnage, servi par des dialogues d'une grande finesse, montre combien The Borgia est une série qui a fait l'objet d'un soin particulièrement impressionnant. Moins feuilletonnant, le récit est avant tout porté par deux types d'êtres humains : ceux comme Della Rovere, qui sacrifient leur âme à leur propre cause, et d'autres comme Ursula, qui refusent de fermer les yeux sur la cruauté de leurs actes.
Portrait Borgia numéro 4 : Juan Borgia
Depuis le début de la série, je regrettais que Juan Borgia n'occupe qu'une place assez limitée, les scénaristes préférant mettre sur le devant de la scène le duo formé par Cesare et Lucrece. Derrière son apparence juvénile, Juan va s'avérer être le moins mature mais surtout le plus diabolique des trois, possédant un sens des valeurs particulièrement faussé. Totalement irresponsable, Juan Borgia s'avère être un fieffé opportuniste, doté d'un sens de la moralité plus que discutable. Sa défiance envers sa mère témoigne de la force de sa loyauté envers son père, le jeune soldat portant en lui une cruauté sur laquelle il commence à perdre le contrôle.
Cet épisode nous impose dans toute sa noirceur ce personnage complexe et effrayant, David Oakes usant de tout son talent pour interpréter cet enfant gâté à la fois cruel et inconscient du poids de ses péchés, et doté d'un pouvoir assez limité. La menace à venir risque de renforcer son influence auprès d'un père qui commence à perdre le contrôle sur lui.
Une réalisation sublime
Cet épisode de transition est avant tout porté par une réalisation superbe, chaque plan étant l'objet d'un soin incroyable du point de vue artistique. Très ambitieux, Neil Jordan propose un récit très bien équilibré, fascinant par la splendeur de la photographie, des décors et des costumes. L'arrivée d'Ursula au couvent est un moment remarquable, qui laisse une marque terrible par la force du jeu de la jeune comédienne, portant la marque indélébile des Borgias.
Le casting impeccable, une musique superbe, une ambition surprenante et enthousiasmante, la direction artistique est un vrai régal. Le dernier acte s'annonce passionnant, tandis que la Pape perd de plus en plus de son influence au profit de ses fils.
J'aime :
- une direction artistique impressionnante
- un casting formidable
- la scène magnifique où Lucrèce embrasse son propre reflet
- la musique superbe
Je n'aime pas :
- une légère stagnation de l'intrigue de Lucrèce
Note : 16 / 20
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