Le péché de luxure et d'orgueil
Après avoir fait fuir l'armée du Roi de France, le Pape Alexandre VI décide de se rendre à Florence voir dans l'anonymat une église dissidente qui prêche contre Rome et son absence de moralité. Pendant ce temps, Cesare est envoyé à Forli pour demander à Catherina Sforza de se rendre au Vatican, le Pape envisageant de l'humilier pour avoir apporté son soutien à l'armée française. Pendant ce temps, Giulia Farnese, Lucrece Borgia et Vanozza Cattaneo continue de mettre le nez dans les pratiques irrégulières des cardinaux.
Résumé de la critique
Un épisode moyen que l'on peut détailler ainsi :
- une confrontation entre Cesare et Catherina assez décevante
- des storylines secondaires mal employées
- un voyage du Pape à Florence intéressant
- une mi-saison mal maîtrisée
Une confrontation inégale
Pour cet épisode, Neil Jordan choisit de couper l'intrigue en deux morceaux très distincts avec d'un côté le voyage diplomatique de Cesare à Forli et de l'autre les tribulations du Pape à Florence. Euphorique après sa victoire dans son affrontement contre l'armée de Charles VIII, celui-ci cherche à mettre au pas tous ses ennemis dont la famille Sforza et le royaume de Florence. Le fils Borgia et Micheletto partent donc rencontrer Catherina, personnage singulier et intéressant incarné par la formidable Gina Mc Kee, laissant entrevoir la possibilité d'un développement autour de la fierté des familles indépendantes du Nord.
Seulement, si l'autorité de cette femme et sa finesse d'esprit a tout pour troubler Cesare, la nature totalement physique de leur relation laisse entrevoir le manque de réflexion des auteurs concernant les motivations réelles de cette héritière. Le but est pour les auteurs de prolonger une guerre qui aura fournit ces meilleurs épisodes à cette saison deux tout en décrivant le péché d'orgueil d'un pape qui veut soumettre sous sa bannière des familles italiennes divisées depuis des siècles. Seulement, le manque de clarté autour de cette négociation et l'absence d'un vrai développement autour des intentions de la famille Sforza donnent un ensemble peu convaincant qui joue la montre et peine à se conclure.
Ce séjour chez les Sforza aurait été l'occasion de laisser paraître un nouvel opposant à l'ascension d'Alexandre VI, remettant en cause sa moralité et son désir d'indépendance. Une soif de liberté qui séduit Cesare et transparaît dans le portrait qu'il est fait de cette femme de tête, insoumise et séductrice, refusant une autorité masculine qu'elle sait parfaitement amadouer. Un affrontement qui sert surtout à montrer les faiblesses du jeune cardinal dès qu'il s'agit des femmes, éprouvant un réel désir pour celle qui cherche à embrasser leur destin malgré les convenances de l'époque.
Une intrigue dotée d'un certain potentiel, mais qui nous offre au final peu de choses à se mettre sous la dent, ne parvenant pas à donner de la clarté aux intentions des forces en présence. Confus et ne menant finalement pas à grand-chose, les scénaristes font revenir Giovanni qui va offrir une conclusion étrange à cet épisode assez mal construit, surtout concernant les storylines secondaires, à peine développées.
Un manque de richesse agaçant
Pendant que Cesare négocie à l'horizontale, Micheletto revient dans son village de naissance, offrant l'occasion de développer un personnage emblématique du show et de donner du sens à sa fascination pour la mort. Son parricide à l'origine de son choix de carrière, mais ce passé est malheureusement à peine évoqué, les auteurs préférant se focaliser sur une homosexualité assez mal amenée, ne servant qu'à expliquer sa fascination pour le corps de ses victimes. Plutôt que de délaisser Cesare pour se concentrer sur son homme de confiance, les auteurs déçoivent en laissant apparaître un manque d'ambition légèrement inquiétant.
Sur le même principe, l'intrigue reliant l'épouse, la maîtresse et la fille du pape Borgia disposait d'un vrai potentiel, les trois femmes cherchant un moyen de pression à utiliser contre les cardinaux. L'occasion d'un voyage moyennement crédible dans un bordel romain, permettant de réutiliser le personnage de Béatrice entraperçu dans l'épisode racontant l'arrivée de Paolo à Rome. Malgré ces quelques évènements, la lenteur de la progression de cette intrigue suffit à constater l'absence de matière d'une seconde saison qui se limite pour l'instant à exploiter les éléments mis en place durant la première, échouant à donner une cohérence à sa progression.
Tous ses petits éléments sont autant de signes du malaise qui traverse le show cette année, incapable de donner une direction claire et du sens à ses intrigues secondaires. En roue libre, le scénario mise sur la nudité pour cacher son manque d'inspiration, incapable de faire apparaître la moindre idée forte à l'exception de l'histoire concernant Della Rovere. Un cardinal qui vient sauver un épisode mollasson, commençant à mettre en place son plan pour faire tomber pour de bon Rodrigo Borgia.
Le syndrome de Florence
Heureusement, l'épisode possède une storyline intéressante, grâce à la très bonne prestation de Jeremy Irons et de Colm Feore, concernant le Pape qui voyage à Florence pour tenter de gagner à sa cause les banquiers florentins. L'occasion de revenir sur l'univers de cette ville importante pour l'époque, sur le personnage de Machiavel et l'ordre des Franciscains où Jerome Savonarole continue ses prédications concernant la mort à venir du pape Borgia. Une intrigue anecdotique au premier abord, mais qui permet de montrer un pape soucieux de ses opposants, refusant de vivre cloîtré dans un Vatican où il apparaitrait d'autant plus faible.
De bonnes scènes dans l'ensemble, surtout par le parallèle qu'il construit entre la destinée Della Rovere et celle d'un pape qu'il juge toujours comme un usurpateur, préparant une vengeance des plus cruelles. Par contre, le parallèle avec l'histoire de Cesare est bien moins convaincant, confirmant le manque de ligne directrice de cet épisode. Ainsi, la scène finale spectaculaire qui vient marquer cette mi-saison est assez mal mise en valeur, tandis que le Pape redevient brutalement un homme, seul face à la colère des cieux et à ses propres péchés.
Une mise en valeur regrettable tant la suite de la saison dépend de cet évènement majeur, les auteurs appuyant avec intelligence l'importance de la rupture entre le cardinal Sforza et la famille des Borgia. Ainsi, cette scène de conclusion, qui vient punir l'insolence triomphante du chef de l'Eglise, permet de marquer le virage voulu par les auteurs entre le souverain pontife et son vice-chancelier. Un acte de guerre destructeur, premier élément intéressant de cette saison deux, Ascanio Sforza possédant d'une forte capacité de nuisance par l'influence dont il dispose au sein du concile des cardinaux.
L'arrogance dans la victoire
Avec cet épisode maladroit, The Borgias réussit malgré tout à prendre un virage important, celui de souligner les origines d'un conflit compliqué qui va placer le pape en grande difficulté. Pris dans l'élan de sa victoire sur le roi de France, il commet la faute de vouloir mettre ses ennemis à genoux, oubliant le passif complexe qui lie la famille des Borgia à celle des Sforza. Une progression dans une direction intéressante, mais qui donne ici un épisode inégal à cause de certaines sous-intrigues annexes maladroites et trop anecdotiques.
En conclusion, une mi-saison qui déçoit en partie par la confrontation qu'il propose entre Catherina Sforza et Cesare Borgia, montrant les limites de personnages qui manquent de la profondeur nécessaire pour donner du sens à leur confrontation. De la même manière, les histoires de Lucrece et de Micheletto restent trop superficielles pour convaincre, appuyant l'idée d'une intrigue principale sans ligne directrice claire, progressant par tâtonnement avec une absence de conviction regrettable. Heureusement, la conclusion spectaculaire qui vient marquer cette mi-saison en créant une scission forte et prometteuse à la tête de l'Eglise.
J'aime :
- la scène finale ambitieuse
- la scène entre Della Rovere et Savoranole
- la performance de Jeremy Irons et Colm Feore
Je n'aime pas :
- l'intrigue du Cesare qui peine à prendre du sens
- l'histoire de Micheletto bâclée
- l'intrigue de Lucrece qui manque de crédibilité
Note : 12 / 20
Un épisode inégal, la faute à une confrontation entre Cesare et Catherina Sforza qui n'a pas l'impact espéré et à des intrigues annexes assez mal mises en valeur. Heureusement, la partie consacrée à Rodriguo Borgia s'avère beaucoup plus inspirée, offrant un final spectaculaire où le péché d'orgueil risque de coûter cher au souverain pontife.