The Jury Acte III : parole à la défense
Le troisième jour du procès s'ouvre alors que le ministre de l'intérieur propose une modification de la loi concernant l'utilisation de jurés lors des délibérations, prônant de laisser les décisions judiciaires au professionnel. Le procès s'ouvre avec l'interrogatoire du policier chargé de l'affaire, un jeune homme à l'époque qui tenait là sa première grande affaire. L'occasion parfaite pour Emma Watts de mettre en pièce l'accusation en proposant un autre coupable potentiel, créant un début de doute au sein de l'audience.
Résumé de la critique
Un épisode très réussi que l'on peut détailler ainsi :
- des séquences au tribunal toujours aussi intenses
- des mini storylines qui permettent de mieux connaître les jurés
- des jurés tiraillés par des sentiments divers
- trois épisodes qui installent le doute
La difficulté de prouver qu'un homme n'est pas coupable
Pour son troisième épisode, The Jury entre dans le vif du sujet avec la confrontation entre le coupable présumé et son accusateur, un jeune inspecteur ayant connu une ascension fulgurante grâce à cette affaire. L'occasion pour les auteurs d'appuyer sur un fait important d'un procès en révision : il ne s'agit pas de savoir si l'homme est coupable ou innocent, mais bien de trouver un autre suspect capable de remettre en cause l'accusation. Emma Watts va donc appuyer tout son raisonnement sur l'existence d'un autre suspect qui aurait pu commettre les meurtres en lieu et place de Lane.
En me permettant une petite digression, le principe est le même dans la justice française, la libération de Patrick Dills, reposant entre autre sur l'éventuelle culpabilité de Heaulme. Ici, l'avocate de la défense cherche à mettre à mal l'accusation, avant d'envoyer à la barre Lane pour appuyer sa propre version des faits. Remarquable dans cette scène, John Lynch est d'une humanité confondante, la série confirmant le soin apporté à l'écriture et à la mise en scène, donnant une crédibilité forte à cet homme ayant attendu cinq ans l'occasion de se défendre en se montrant à la fois faible et profondément humain.
Pour la première fois, les jurés expriment pour certains leurs sentiments, les auteurs appuyant le choix volontaire qu'ils ont fait le choix de ne suivre parmi les douze jurés que ceux qui font le choix du doute. Les points de vue commencent à se confronter et l'historique de chacun d'entre eux vient jouer un rôle en faveur ou en défaveur de l'accusé. Toujours aussi réussies, ces scènes ont une charge émotionnelle forte, les auteurs se risquant même à un petit faux départ avec le contre-interrogatoire, finalement repoussé au prochain épisode avec une certaine malice.
Assez addictive et prenante, The Jury nous place dans le box avec les autres jurés, partageant avec eux l'indécision d'une culpabilité de moins en moins évidente. Surtout qu'à l'extérieur, des évènements viennent troubler l'objectivité de certains d'entre eux, le procès entraînant des angoisses et des troubles inattendus dans leur existence.
Un ensemble d'intrigues en éventail
Une fois sortie du tribunal, l'intrigue se développe dans plusieurs directions différentes, composant un ensemble de petites histoires volontairement anecdotiques qui font le charme de la série. Comme de petits morceaux de vie, on suit l'histoire de Tahir, un jeune Soudanais qui essaye d'avoir la possibilité d'aller aux Etats-Unis retrouver les personnes de son village réfugiés politiques suite au massacre des siens. L'histoire n'a aucun rapport avec celle de l'accusé en apparence, mais elle raconte la naissance d'une amitié entre lui et Jeffrey Livingston, poussant celui-ci à plus de compassion dans son jugement.
Certains reprocheront l'aspect très anecdotique de ces petites histoires, mais elles ont le mérite de ne pas trop encombrer l'intrigue principale, reprenant souvent les mêmes lieux pour s'inscrire dans une routine. L'épisode se repose alors uniquement sur le talent des comédiens, tout en réservant quelques révélations comme la nature médicale du problème de Rashid. Evidemment, c'est Paul qui va hériter de l'intrigue la plus conséquente, sa storyline s'inscrivant totalement dans le cadre du procès, une femme essayant de profiter de lui pour obtenir des informations.
Succession de morceaux de vie, The Jury est assez riche en contenu, mais peut donner l'impression de ne pas approfondir à fond chacune des storylines. Mais grâce à ce choix narratif, l'ensemble compose un portrait intéressant de notre société moderne, donnant un rythme plutôt rapide à l'épisode en apportant quelques touches d'humour bienvenues, loin de l'atmosphère froide et sentencieuse du tribunal.
La passion contre la raison
Chaque début d'épisode s'amuse à inscrire la série dans un débat bien réel, à savoir la légitimité des jurés dans leur capacité à donner un bon verdict. Entre Rashid qui se sert d'internet comme source d'information et Ann qui est tombée sous le charme de l'accusé, ce groupe est loin d'être irréprochable et de posséder l'objectivité absolue du juré idéal. Défaillant, menteur pour l'une d'entre eux, malade victime du syndrome d'Asperger pour d'autres, ces douze jurés sont tous défaillants et imparfaits, incarnant des êtres incapable de montrer une rigueur de professionnel dans leur jugement.
Pourtant, c'est cette humanité, cette faiblesse qui les rend indispensable, amenant au verdict cette touche d'imprévisibilité qui permet à la machine judiciaire de garder son humanité. En dressant le portrait de ce groupe de jurés, Morgan propose un plaidoyer étonnant contre la justice professionnelle que certains politiques envisagent pour faire baisser les coûts. En ramenant l'accusé du statut de coupable à celui d'être humain, The Jury redonne sa dignité et la chance de se défendre à un accusé qui reste un homme avant tout.
Série judiciaire originale et brillante, The Jury fait plus que raconter une simple histoire passionnante en ancrant totalement le récit dans la réalité. Prônant une justice humaine, elle pose les jurés comme une nécessité dans un monde où le culte de l'objectivité mène à la déshumanisation des débats.
Trois épisodes et le doute s'installe
Après trois épisodes très bien menés, The Jury a réussi à poser tous les éléments nécessaires à la progression efficace du récit, scénario captivant qui nous pousse à prendre parti sur l'affaire en cours. La parade des avocats aura pour l'instant joué le jeu de la défense, mais l'épisode à venir va laisser la parole à l'accusation pour une contre-offensive prometteuse. Bien détaillée et construite avec minutie, ce show est prêt à nous emmener loin pour tous ceux qui oseront se risquer à le découvrir, show singulier définitivement accrocheur.
En conclusion, un épisode captivant qui confirme les qualités du show et offre des scènes d'audience au tribunal toujours aussi intenses. Portée par des acteurs particulièrement convaincants, The Jury est une série profondément humaine qui raconte le voyage de douze inconnus dans le ventre de la machine judiciaire. Un show particulièrement captivant, à tel point qu'il me tarde d'être demain pour commenter l'épisode quatre qui promet une montée en puissance terrible avant le verdict de l'épisode cinq.
J'aime :
- les acteurs excellents, surtout John Lynch
- les scènes au tribunal très intenses
- la réalisation impeccable
- la qualité de l'écriture
Je n'aime pas :
- rien
Note : 15 / 20
Un épisode qui marque un début de montée en puissance de la série, pendant que les jurés se divisent autour du témoignage du coupable présumé. Portée par des comédiens excellents, une série profondément humaine qui nous fait partager l'expérience singulière de ces jurés, conviés à décider de la sincérité d'un homme qui se dit innocent. Intense et assez poignant.