Critique : The Slap 1.08

Le 28 novembre 2011 à 09:41  |  ~ 10 minutes de lecture
Un final intimiste très réussi qui offre le portrait d'un jeune homme en pleine crise d'identité.
Par sephja

Critique : The Slap 1.08

~ 10 minutes de lecture
Un final intimiste très réussi qui offre le portrait d'un jeune homme en pleine crise d'identité.
Par sephja

The Slap - series finale 

Pour Richie, la vie n'est plus la même depuis que Connie a avoué qu'Hector a abusé d'elle sexuellement, entrainant de sa part une fascination malsaine envers cet homme qui incarne une virilité qui le dégoûte et l'obsède. Isolé, coupé de sa seule amie, il s'enfonce dans l'obsession, baladé entre ses deux parents divorcés, incapable de trouver l'équilibre et de chasser de son esprit un trouble qui le mène lentement à se détruire lui-même. 

 

Résumé de la critique 

Une conclusion très  réussie que l'on peut décrire ainsi :

  •  un final intimiste qui fait le choix du singulier contre le pluriel 
  •  un récit sur le désir et les dangers de sa fascination 
  •  la gifle comme un passage à l'acte
  •  un bilan de fin de série

 

 

Un final qui reste dans le registre du portrait

Autant prévenir immédiatement, The Slap risque de décevoir certains en proposant une conclusion singulière à l'image de la série, centrée sur le personnage de Richie, garçon complexé en pleine crise. La gifle n'est plus qu'un lointain souvenir pour tous les personnages, chacun d'entre eux avançant dans son existence vers une nouvelle direction. Placée sous le signe du réalisme, The Slap s'achève par un épisode qui peut paraître mineur, mais apparaît comme cohérent par rapport au reste du show, plaçant l'humain avant la grande histoire.

Certes, l'épisode fournira une conclusion aux différentes storylines par le biais des actes de Richie, mais tout cela reste anecdotique face à l'histoire de ce personnage en souffrance, victime d'un univers qu'il ne comprend pas. Comme un nuage, il reste enfermé dans un univers naif, refusant de participer au monde extérieur pour ne pas se poser la question de sa propre identité. Par son caractère passif et sa tendance à subir sans réagir, il va créer un malaise en début d'épisode, celle d'une histoire à l'arrêt qui refuse de démarrer.

Habitué à vivre dans son cocon, il comprend petit à petit que les actes ont des conséquences et que le moindre de ses actes définit l'image que l'on renvoie aux autres. En envoyant ses messages à Hector, Richie se construit une image de justicier, protégeant sa meilleure amie Connie du danger d'un monde violent et pervers. Enfant d'un divorce baladé entre ses deux parents, il cherche à se construire une image de garçon idéal, à la recherche d'une perfection illusoire, se mentant totalement sur ses vraies motivations.

Au final, la première partie peut sembler décevante, donnant l'impression que la série joue la montre avant un final beaucoup mieux réussi et à l'intensité surprenante. Moins passionnant peut être que d'autres personnages, Richie est surtout le dernier à tourner la page, marquant le soucis de réalisme de scénaristes qui refusent de sur dramatiser. En délaissant volontairement l'intrigue fil rouge, les auteurs de The Slap montrent que le temps est le seul pansement contre certaines blessures, nous poussant à passer simplement à autre chose.

 

Découvrir son vrai visage

Comme à chaque fois, The Slap entame son virage sur un traumatisme, celui de la confrontation avec Hector où ce qui n'était qu'un jeu va prendre des proportions inattendues. Le justicier de Connie perd son masque et comprend qu'il n'est aux yeux du monde qu'un pervers victime certes du mensonge de son amie, mais aussi de ses propres pulsions voyeuristes. Le récit accélère alors brutalement et la vie de Richie bascule dans la honte de soi, tandis que Connie, par son hypocrisie, l'enfonce un peu plus dans le désordre sentimental où il se trouve.

Soudain, il passe enfin à l'acte, incapable d'assumer la honte qu'il ressent envers les autres et lui-même, en particulier le petit Hugo. C'est à ce moment que la série montre toute sa force, le jeune garçon créant une nouvelle situation de tension qui aurait mérité une nouvelle claque. Seulement Richie n'a pas la même nature mauvaise que Harry, car il faut avoir une dose de méchanceté forte pour assumer un tel geste d'autorité brutal et d'un profond mépris pour la victime. Incapable de gérer une telle situation, Richie perd petit et choisit alors le passage à l'acte absolu et universel, qui va lui permettre d'enfin se questionner clairement sur sa propre existence. 

C'est en voyant la fin si proche que l'être humain cesse de se mentir et découvre la vérité essentielle : la mort n'est jamais un choix, juste un aveu d'impuissance d'une cruauté monstrueuse envers ceux qui restent. La scène où sa mère le découvre est admirable, moment difficile où Richie voit enfin la vérité qu'il avait perdue de vue, sa solitude n'étant que le fruit de son égoïsme. Connie ne le fuyait pas par honte de lui, mais simplement parce qu'il incarnait ses propres faiblesses, un mensonge qu'elle essayait par tous les moyens de refouler, trahissant du même coup la confiance de son meilleur ami.

La dernière hypocrisie tombe et le temps continue sa route, tout comme le spectateur qui voit dans The Slap l'expression parfaite du passage de l'adolescence à l'âge adulte. Un épisode qui renvoie beaucoup à celui de Connie, peut-être même un peu trop ce qui nuit un peu à l'originalité de l'ensemble, là où la série aurait pu se placer par rapport à Hugo, héros involontaire d'une série qui voit avec tristesse et nostalgie l'enfance prendre fin.

 

 

La question du bien ou du mal 

Maintenant que The Slap s'est achevée, la question du bien et du mal prend un véritable sens, la série ayant explorée les différentes approches autour du geste d'Harry. Une gifle donnée est finalement le signe d'un mélange de peur, de frustration, mais surtout un besoin d'écraser l'autre, d'imposer une autorité par le biais de la violence physique. Une claque est d'abord une agression, créant une brûlure qui ne s'estompera qu'avec le temps, laissant le temps de se poser la question du bien et du mal. 

Certains parleront de gifle éducative, d'autres y verront l'affirmation d'une virilité tandis que d'autres jugeront cet acte comme un aveu d'impuissance particulièrement misérable. En cherchant à être le gentil de l'histoire, Richie a perdu de vue les seules choses qui comptent, ceux qui l'aiment et ont besoin de lui plus qu'il ne le pense, le manque d'affection se muant en frustration puis en perversion. Quel que soit l'angle selon lequel on l'aborde, cette gifle échappe à tout jugement, mais aura permis à Rosie de comprendre que sa place était ailleurs, loin de la mauvaise influence de la ville. 

Plus violente qu'une gifle, la vie est la première à nous asséner des coups du destin qui nous oblige à évoluer dans des directions inattendues, nous forçant à reconstruire notre existence sur de nouvelles bases. Finalement, cette gifle n'est qu'un élément de la vie de Hugo, un souvenir qui servira à construire une personnalité unique, en bien comme en mal. The Slap s'achève ainsi, tandis que ce geste devient un souvenir gênant, celui des erreurs d'un passé que l'on aimerait pouvoir oublier, mais qui reste toujours présent au travers d'objets sur lesquels s'attachent nos souvenirs.  

 

Bilan de série 

Pour clore cette série évènement venue d'Australie, je vais utiliser la première personne qui va prendre en cours de route son sens, même si je suis conscient de l'aspect un peu prétentieux de ce choix. En fait, j'ai choisi de parler de The Slap, car c'est une série qui me touche personnellement, ayant une expérience trop grande à mon goût de ce type de mode d'éducation. Je m'attendais à un discours simpliste sur la dignité humaine, le respect de l'enfant avec une approche bien pensante du danger que représente une baffe dans la structuration d'un enfant. Et bien non, bien au contraire.

Evidemment, je peux témoigner d'expérience de l'inutilité des gifles, celle-ci n'ayant jamais eu pour effet d'apprendre quoi que ce soit, hormis de comprendre les sentiments que ressentaient la personne à mon égard. Avec le recul, on comprend qu'une gifle est une réunion de beaucoup de sentiments, un geste fort qui fait plus mal avec le temps à celui qui donne qu'à celui qui reçoit. C'est ce point qu'explore à merveille The Slap, celui de notre réaction à une agression qui peut, selon le point de vue, paraître méritée. 

Très humaine et sensible, la série aura proposé le portrait de différents personnages avec une grande finesse et un réalisme indéniable, la mise en scène s'adaptant pour le mieux au personnage mis en avant. Certes, parler huit heures d'une gifle peut sembler ridicule au premier abord, pourtant ce simple geste possède une complexité qui modifie profondément votre rapport aux autres. En se créant un microcosme de personnages très crédibles servis par des acteurs formidables, The Slap fournit une intrigue solide plaçant au centre de son histoire l'être humain et sa complexité. 

Un show intense, dur et très mature qui s'achève par un épisode certes mineur, mais qui clôt cette histoire sur une touche d'optimisme plutôt bienvenue. Une fois confrontée à une telle discorde, l'être humain fait ce qui le définie pour le mieux : il s'adapte, quitte à changer totalement son mode de vie. Et à ce point, c'est une nouvelle histoire qui commence, loin d'une claque dont l'écho finit lentement par s'éteindre, pour ne laisser qu'un lointain souvenir.

 

J'aime : 

  •  une seconde partie vraiment poignante 
  •  la scène du suicide superbe 
  •  la mise en scène impeccable 
  •  les acteurs très bons 

 

Je n'aime pas : 

  •  trop semblable à l'épisode de Connie 

 

Note : 15 / 20 

Un épisode mineur qui permet de clore la série avec intelligence en évitant l'excès de drame pour opter pour une approche délibérément réaliste. Au final, une série superbe qui aura su faire preuve d'une certaine originalité, avec une rigueur de construction et d'écriture indéniable. Une vraie réussite.

 

Bon, je suis pénible, mais je tiens à remercier quelques personnes comme d'habitude : 

  •  Serie All pour m'avoir laissé l'occasion de parler de cette série 
  •  Puck, Captain Free Frag et tous ceux qui souffrent à corriger mes multiples fautes 
  •  Louna69, Mafaldette, Gouloudrioul et CAD pour leur avis très intéressants qui m'ont permis d'être plus objectif
  •  tous ceux qui ont lu ces papiers trop bavards. Désolé


Plus personnellement, tous ceux avec qui j'ai eu de longues conversations pour écrire :

  •  Martine pour l'épisode cinq (merci beaucoup) 
  •  Sandrine pour les épisodes un et deux 
  •  Samy pour les épisodes cinq et six 
  •  Jerome pour l'épisode sept 


Ca s'arrête là. Merci à tous.

L'auteur

Commentaires

Avatar MAFALDETTE
MAFALDETTE
Pas vu encore ce final - la bille que je suis en anglais attend la VOST - mais je ne suis ni surprise ni déçue par la découverte d'un traitement de ce dernier épisode à l'identique des autres. Par contre, vivre cet épisode avec Richie me promet moins d'émotions que celles que j'ai vécues avec Anouk ou Aisha (mes épisodes préférés avec Harry aussi). Car, c'est bien sûr aussi le cas pour toi, outre les acteurs, la réalisation, on est plus ou moins en empathie avec cette série car l'histoire ou plutôt le prisme des personnages sur cette histoire nous renvoie à notre propre histoire. C'est d'ailleurs pour cette raison que, contrairement à mes habitudes, je vais lire le livre après avoir vu l'adaptation . Même si je sais que je prend le risque de lire apparemment une plume plutôt crue,la drogue et le sexe ayant été édulcorés ici.

Avatar sephja
sephja
je confirme l'aspect edulcoré, surtout pour Rosie, mais cela n'est pas trop choquant pour autant. Comme toujours, le roman paraît plus complexe et subtil, mais la légère simplification n'a pas fait de mal à l'histoire. Personnellement, j'ai aimé les deux, mais je ne veux pas faire de comparatif... un livre et une série sont deux médias trop différents. Les scènes dans la deuxième partie sont très riche en émotion quand même, surtout le baiser entre ... et ..., une scène superbe dont je ne veux pas parler pour ne pas spoiler.

Avatar Stean
Stean
Très belle critique, beau travail !

Image The Slap
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