Pitch Gatehouse
Tandis que des proches de Bob Harris se font arrêter, mettant en péril le trafic de Joseph Bede, la pression s'accentue sur le fils de Glickman qui garde secrète la cache de son père. Jay Wratten va tenter en vain de le faire craquer avant de se faire doubler par Gatehouse qui va trouver les bons arguments pour convaincre. Seulement, il ignore que la police possède une photo de lui et commence à se mettre sur sa trace, découvrant au passage les motifs de la libération du fils Wratten.
Une histoire qui n'a pas peur d'évoluer
Loin de se reposer sur ses lauriers, The Shadow Line joue encore sur l'effet de surprise en introduisant de nouveaux personnages, approfondissant un peu maladroitement l'univers autour de Bob Harris. Après avoir donné un désagréable sentiment de dispersion lors des dix premières minutes, le show va vraiment gagner en intensité sans encore parvenir à former un tout cohérent et limpide. Toujours aussi austère et hyper-esthétisé, The Shadow Line s'interdit toute facilité et soumet le spectateur à un final d'une tension extrême où Gatehouse va montrer toute l'étendue de son influence.
En s'intéressant à la vie du journaliste Mc Govern, la série tente de donner une vison globale des forces en présence, la police ne pouvant accéder aux informations sur la libération du père et du fils Wratten. Essayant de développer son aspect politique, l'histoire semble s'orienter de plus en plus sur le personnage de Jay, laissé en retrait le temps d'un épisode. Le rythme va prendre de la vitesse jusqu'à vingt dernières minutes totalement bluffantes, surtout la scène du kidnapping d'une force incroyable.
The Shadow Line désigne le lien, le fil logique qui permet de relier un mort à ses coupables et que les policiers se doivent de démêler. Laissé en arrière, Jonah Gabriel est de plus en plus isolé, perdant petit à petit ses alliés au fur et à mesure de la révélation de ses mensonges. Partie la plus faible de l'épisode, l'intrigue sur Jonah Gabriel semble incapable de trouver le juste équilibre entre le mystère, le mensonge et la vérité. Heureusement, l'excellent Sean Gilder apporte un souffle nouveau au sein du commissariat, imposant un personnage d'une grande force de conviction qui nous fournit un autre regard sur Jai Wratten.
La peur et ses conséquences
Sentiment récurrent qui sert de moyen de pression pour Gatehouse et Jai Wratten, la peur est le principal point commun entre les différents personnages de la série. Prenant des formes aussi variées qu'imprévisibles, les actions de l'un comme l'autre créent des bouleversements, fournissant deux scènes finales magnifiques dont je me garderais de dévoiler le contenu, tant elles sont toutes deux plastiquement superbes. Chaque individu est lié à un secret, et l'information représente au sein de la série un pouvoir infini qui permet de prendre le contrôle et de faire basculer les rapports de force dans un sens ou l'autre.
Pour Joseph Bede, la peur est celle de perdre le contrôle, la police marquant des points en arrêtant des proches de son complice, Bob Harris. La peur est un luxe qu'il ne peut s'offrir, contrairement à Jay Wratten qui craint essentiellement de ne pas être à la hauteur, cherchant toujours à impressionner pour masquer ses propres faiblesses. La mort de son père est un mystère pour lui tout comme l'identité du coupable qu'ils cherchent à démasquer, inconscient qu'ils sont du travail de Gatehouse pour les mettre sur la mauvaise piste.
Pour les policiers, la peur repose surtout sur le comportement étrange de Gabriel et la relation plutôt trouble entre la famille Wratten et le pouvoir. Incapable de trouver le fil qui relie chacun des événements, Jonah et sa collègue Lia Honey vivent dans l'incertitude de pouvoir un jour démêler cet imbroglio. La peur engendre alors une tension forte et une colère peu propice à trouver la sérénité nécessaire pour réussir à séparer les vérités des mensonges.
Seul personnage à ignorer la peur, Mc Govern va découvrir que les menaces ne sont pas toujours des mots en l'air, surtout quand il s'agit de celle du personnage le plus mystérieux de la série : Gatehouse.
Gatehouse, l'homme dans l'ombre
Personnage fascinant et obsédant, il incarne un mélange de mystère et d'imprévisibilité, ses véritables intentions demeurant totalement inconnues de nous. Manipulateur adroit, il s'acharne à garder la police et les trafiquants de Joseph Bede le plus loin possible de la vérité, essayant d'avoir suffisamment de coups d'avances pour pouvoir rester dans l'ombre. Très convaincant dans ses menaces, il possède un réseau d'influence spectaculaire, ce qui laisse deviner des employeurs particulièrement puissants.
Impeccable, monumental, Stephen Rea marque le spectateur de l'empreinte indélébile d'une composition admirable, son personnage amenant les deux scènes sublimes qui clôturent cet épisode. The Shadow Line sans Stephen Rea est tout simplement inenvisageable et tous ceux qui tenteront de découvrir cette série n'oublieront jamais la vision de l'homme au chapeau, à la fois rassurant et malfaisant, une énigme à lui tout seul. Sans nul doute l'un des personnages les plus marquants de l'année.
The Shadow Line est une grande série
A trois épisodes de la fin, force est de constater que, malgré une narration toujours aussi complexe et par moment empesée, la série ne cesse de s'améliorer, proposant une galerie de personnages fascinants et deux scènes finales simplement exceptionnelles du point de vue intensité et de la mise en scène. Essayant de raconter une histoire complexe avec une rigueur totale, voire par moment excessive, Hugo Blick parvient à toujours surprendre et à conserver durant tout l'épisode une grande intensité.
Trop complexe pour une audience grand public, The Shadow Line court un risque permanent, celui de la déception éventuelle devant la tension forte qui règne dans la série et ne retombe jamais. Empreint d'un mystère impossible à percer, le show aura fini par me convaincre, m'obligeant fréquemment à prendre mon mal en patience pour comprendre les tenants et aboutissants de l'histoire. Une fois assimilée, l'intrigue recèle de véritables joyaux, soutenue par un visuel splendide et une photographie limpide.
Alors je prends le risque, quitte à très vite me faire honnir par ceux qui m'auront fait confiance : The Shadow Line est une grande série. A la fois complexe, difficile à appréhender, elle constitue aussi un grand moment pour peu que le spectateur fasse preuve de patience et de compréhension. C'est certes beaucoup demander, mais le jeu en vaut, pour l'instant, vraiment la chandelle.
J'aime :
- sombre, terrifiant, mystérieux à l'image de Gatehouse
- un visuel superbe et des cadrages très soignés
- Stephen Rea génial
- les deux dernières séquences d'un vingtaine de minutes époustouflantes
Je n'aime pas :
- trop exigeant par instant
Note : 16 / 20
Un épisode poignant et superbe qui confirme que The Shadow Line fait partie de ces shows anglais sombres et fascinants comme eux seuls savent les faire. Parfois un rien prétentieuse, la série prend toujours le contre-pied du spectateur et peut agacer autant qu'elle passionne. Comme vous le voyez, j'ai choisi mon camp, à vous de faire l'expérience pour vous confronter à cette série hors norme et mémorable.