Pitch "Throught a glass, darkly"
Peter Glickman prend contact avec Jonah Gabriel dans le but de lui révéler d'où vient l'argent qu'il a retrouvé dans l'attaché-case de sa penderie. Il lui fournit deux pistes, mais le prévient de la menace que représente le seul homme à tout connaître de la situation, un dénommé Gatehouse. Jonah Gabriel apprend alors par son médecin qu'il est en train de recouvrer la mémoire du moment où l'agent Delaney a été abattu.
Difficile de parler de The Shadow Line sans trop en dire
Sombre, fort et asphyxiant sont les trois adjectifs qui ressortent de cet épisode qui n'aurait pas pu être meilleur, tant la réalisation glaçante et la qualité d'interprétation atteignent des sommets. Mais l'élément le plus impressionnant reste cette capacité à faire de ces défauts des qualités, en donnant une dimension inattendue au personnage de Petra, qui donne un nouveau sens à l'épisode précédent. Jouant avec perpétuellement deux coups d'avance, Hugo Blick signe une oeuvre magnifique, soignée à l'extrême, presque obsédante, dont le spectateur ne sort pas indemne, tout comme les personnages.
La corruption, l'argent et la drogue passent d'un bord à l'autre, témoignant de l'ampleur de l'affaire qui a valu à Jonah Gabriel une balle dans la tête. Sa vie ne tient plus à grand chose quand l'exécuteur Gatehouse se présente chez lui, obligeant Jonah à faire un choix entre Glickman et lui-même. Chaque scène avec Stephen Rea, toujours aussi intense, est un vrai régal, le comédien incarnant avec une maestria incroyable l'un des personnages les plus marquants de l'année, meurtrier impitoyable qui sait toujours trouver les mots justes pour créer le trouble.
Comme une ombre, Gatehouse apporte le drame et la violence, bras armé de puissants qui ont appris à rester tapis, à observer les événements et lorsque cela est nécessaire, à sortir un instant des ténèbres pour exécuter les gêneurs. The Shadow devient alors synonyme de trois choses différentes : celui qu'on ne voit pas, celui qui tait son nom et celui dont on ne se souvient pas. Les ombres sont nombreuses dans cette histoire et la moindre tentative de mettre tout en lumière provoque irrémédiablement l'arrivée du plus impitoyable et froid assassin qui soit : Gatehouse.
Un monument de noirceur
Portant parfaitement son titre, The Shadow Line est éprouvant à regarder, chaque scène entraînant pour Joseph Bede ou Jonah Gabriel un choix terrible dont les implications réelles les dépassent totalement. Simples pions dans cette affaire, ils se démènent mais chacun de leurs actes les rapprochent d'une catastrophe imminente dont aucun de leurs proches ne sortira indemne. Des éléments du scénario que je pensais abandonnés par Hugo Blick ressurgissent brutalement après trois épisodes sous silence pour apporter une dimension supplémentaire à une histoire parfaitement maîtrisée.
The Shadow Line est une série soignée à l'extrême, une pure merveille qu'il serait ridicule de ne pas découvrir tant la force de son impact dépasse largement le cadre d'un simple programme télévisé. Comme une claque monumentale, elle fait écho à des oeuvres comme Rubicon et, au vu du premier épisode, la nouvelle saison de Luther en concevant un intrigue de sept heures absolument prodigieuse. Il ne reste plus qu'à découvrir le final qui devrait se centrer sur un homme qui s'enfonce lentement dans les ténèbres, perdant petit à petit le contrôle de sa destinée : Joseph Bede.
La descente aux enfers d'un homme qui aura vu trop grand
Joseph Bede n'est personne, aux yeux de la police et des trafiquants, juste un exécutant, un homme qui a eu une idée et tente au mieux de la faire fructifier. Utiliser des fleurs pour faire passer la drogue est ingénieux, mais le talent de l'homme n'est pas suffisant pour lui permettre de survivre dans un monde de trahison où il ne possède pas les épaules pour résister. Car Bede n'est ni un gangster, ni un truand, juste l'administrateur d'un trafic dont il ne voit jamais la contenance, espérant ainsi garder ses mains propres jusqu'au bout.
Seulement, alors que le dernier épisode approche, Joseph Bede va être confronté aux conséquences de sa création et se retrouver en pleine lumière, ce qu'il avait réussi à éviter jusque-là. Homme de l'ombre de Glickman, il aura tenté de suppléer son patron, mais va se retrouver contraint d'en payer le seul prix qui compte, celui du sang de ceux qui nous sont chers. Comme dans un drame shakespearien, Bede va être victime de la trahison du fidèle d'entre les fidèles, poussant la série vers une trajectoire encore plus sombre, pour un dernier épisode qui s'annonce abyssal.
Superbe de bout en bout, Christopher Eccleston exprime parfaitement la rage et la colère d'un homme qui perd lentement le contrôle de sa vie. Sa confrontation avec Gatehouse devrait constituer un sommet fulgurant dans une série qui aura excellé dans cet exercice, engendrant dès lors l'une des oeuvres les plus impressionnantes que j'ai pu voir cette année.
J'aime :
- les confrontations avec Stephen Rea, incroyable en Gatehouse
- un polar sombre, viscéral et passionnant.
- une réalisation superbe
- une scène finale superbe, toujours grâce au charisme de Stephen Rea (mais je me répète)
Je n'aime pas :
- franchement, là... Si ! Il ne reste qu'un épisode, ce n'est pas assez
Note : 17 / 20
Série superbe d'une noirceur extrême, The Shadow Line est un bijou immanquable, un chef d'oeuvre porté par des acteurs remarquables. J'insisterai une dernière fois sur la sublime performance de Stephen Rea, mais seul le visionnage vous suffira à comprendre ma fascination pour ce personnage incroyable qu'est Gatehouse. "Human after all" comme le dit si bien Peter Glickman.