Black Mirror réalise son premier épisode post-apocalyptique (il était temps !) et fait le pari de rendre ce dernier le plus minimaliste et brumeux possible, là où dans une série où chaque univers semble perverti par la technologie, il aurait été facile de prendre une autre voie.

Personnellement j'ai beaucoup aimé ce choix. J'ai l'impression que cet épisode est le vilain petit canard, le "Waldo Moment" de la saison, et pourtant tout comme l'épisode 5 de la saison précédente, lui aussi haï, d'une courte durée et très ancré dans un genre tourné vers l'action (le schéma des saisons 3 et 4 se ressemblent assez il faut croire), j'aurais plutôt tendance à défendre l'épisode.

On comprend assez vite qu'on n'aura pas énormément d'explications sur l'univers, donc l'épisode joue relativement cartes sur table de mon point de vue. C'est du survival sauce Black Mirror et ça ne sera pas plus (connaître la durée de l'épisode avant de se lancer aide pas mal, certes). Ce n'est pas gênant même si du coup il reste un petit côté frustrant à l'ensemble.

Après, si l'épisode n'est pas ultra cohérent sur les capacités de la bête (le couteau encore ça passe, mais le remake de Hunger Games quand elle monte dans son arbre, c'est un peu gros), il comporte tout de même plein de tension et retranscrit parfaitement cette sensation de traque humaine que rien ne peut arrêter.

Le parti-pris visuel m’a aussi plus, à savoir l’aspect noir et blanc. Ça colle parfaitement à l'univers de l'épisode, cela retranscrit ce monde clinique et sans âme, avec technologie impitoyable. Le format retire aussi un côté gore qui aurait pu rendre l'épisode trop malsain sur le plan visuel alors qu'il est plus dans la suggestion.

Et justement c'est aussi ce que j'ai aimé dans l'histoire, que tous les événements soient suggérés. Le symbolisme du meilleur ami de l'homme qui se retourne contre lui est intéressant et on peut remplir les trous par nous-mêmes (qu’il s’agit d’une technologie qui s’est retournée contre nous). Pour moi, établir un lien direct entre un monde apocalyptique et la technologie qui en a été la cause, ça serait briser toute la règle de la série de nous faire réfléchir sur la technologie sans pour autant la réprimer systématiquement. Autrement dit, avec un pitch de post-apocalypse, il aurait été mal vu de trop se plonger dans l'origin-story.

La preuve, j'ai lu que Charlie Brooker a initialement écrit des scènes avec un scientifique qui contrôle le chien à distance en traquant la protagoniste (autrement dit une véritable chasse humaine). Perso ce n'est pas comme ça que j'interprète l'épisode (je préfère ma théorie de "les chiens sont devenus hors de contrôle", mythe ultra classique de la créature qui se rebelle contre son créateur, et le ton noir et blanc rappelle cela pour moi). Bref je suis bien content que ces scènes ont été coupées car je peux du coup interpréter l'épi à ma sauce.

Surtout que les chiens sont, leurs aspects OP mis à part, sans doute la technologie la plus proche et réaliste qu'on ait jamais eu dans la série (avec Nosedive, sans doute). C'est très malin d'avoir juxtaposé l'univers le plus lointain et extrême de la série jusque là (désolé 15 Millions Merits, te voilà détrôné) à la technologie la plus proche de notre époque. Encore une fois tout est dans la suggestion.

Idem, la fin peut avoir l’air un peu cucul, mais cette touche de couleur qui indique une motivation très humaine, personnelle, douce (tout l’inverse du chien mécanique froid), m’a touché et rappelle ce qui est essentiel.

Bref ça a fonctionné sur moi, je peux comprendre que cet épisode puisse laisser de marbre mais on ne peut enlever à la série qu'elle a voulu innover et ça ne peut être qu'encouragé. Sans que ce soit mon préféré pour autant, c’est une entrée louable !