Critique : The Knick 1.01

Le 22 août 2014 à 15:02  |  ~ 7 minutes de lecture
Un pilote étrange et audacieux sur les débuts de la médecine moderne aux Etats-Unis à l'aube du XXème siècle
Par arnoglas

Critique : The Knick 1.01

~ 7 minutes de lecture
Un pilote étrange et audacieux sur les débuts de la médecine moderne aux Etats-Unis à l'aube du XXème siècle
Par arnoglas

Première série médicale de Cinemax (Banshee, Le Transporteur) et mis en scène par Steven Soderbergh, The Knick suit le quotidien de médecins et infirmières du Knickerbocker Hospital de New York dans les années 1900, à l'époque où les antibiotiques n'existaient pas encore et où les progrès de la médecine afin de sauver le plus de vies possibles étaient encore fragiles. Un pitch accrocheur pour une série qui se veut particulièrement sombre, dans la lignée des productions habituelles de la chaîne. Nous sommes loin des aventures sentimentales de Grey's Anatomy, mais bel et bien dans un univers sinistre : le taux de mortalité est élevé et la moindre maladie peut devenir mortelle.

 

 

La médecine pour les nuls

 

 

Pour son premier épisode, The Knick réussit sans difficultés à plonger le spectateur dans un univers froid rien que par son esthétique, ses décors et sa réalisation menée de main de maître par Soderbergh. La musique, oppressante, y joue également un rôle important, étant composée par Cliff Martinez, déjà à l'origine de la bande-son du film Drive avec Ryan Gosling. Une ambiance angoissante que la série s'efforce de conserver tout au long de ses 56 minutes qui servira aussi à introduire le personnage de John Thackery, chirurgien et nouveau chef du service de chirurgie après le suicide inexpliqué du docteur Christiansen, son ami et supérieur. Retrouvé mort dans son bureau avec une balle dans la tête, il était désespéré de n'avoir pu trouver une solution pour sauver la vie d'une jeune femme enceinte lors de son opération.

 

 

The Knick (1)

 

 

John Thackery est un visionnaire, il veut faire évoluer la médecine et sauver la vie de nombreuses personnes atteintes de maladies ou de blessures graves. Nous sommes dans une période charnière, les hôpitaux n'ont pas encore les matériels suffisants pour maintenir les patients en vie et les opérations sont très risquées, ne réussissant que très rarement. C'est un génie incompris qui veut que les choses avancent et s'amuse à choquer ses collègues venus assister aux opérations, passant son temps libre à concevoir des outils chirurgicaux dans le sous-sol de l'hôpital. Considéré comme fou par certains, adulés par d'autres, il rejette la médecine conventionnelle et veut imposer ses méthodes, même si elles peuvent paraître extrêmes, comme cette scène où il préconise de la cocaïne à un patient ou encore lorsqu'il utilise ses instruments artisanaux au cours d'une intervention pour tester leur efficacité.

 

 

New York New York

 

 

Un des grands atouts de la série est sans conteste ses décors et sa reconstitution du New York de l'année 1900. De ce point de vue, The Knick est irréprochable. La ville est tout d'abord perçue comme un espoir par de nombreuses personnes migrantes venues chercher fortune et vivre le rêve américain. Puis la vérité éclate et c'est un New York sale, délabré et miteux qui est présenté au spectateur. Les populations s'entassent les unes sur les autres, notamment des étrangers, et certains sont vite sujets aux maladies et épidémies qui touchent la plupart d'entre eux et s'accumulent de jour en jour, d'où la présence d'inspecteurs de la santé faisant le tour des maisons pour contrôler l'état de santé des personnes. Ces derniers découvrent par exemple une femme atteinte de tuberculose, entourée de ses enfants et agonisante. Cela rappelle aussi la séparation entre classes aisées et classes moyennes qui n'ont pas tous accès aux soins médicaux.

 

 

The Knick (2)

 

 

La série n'hésite donc pas à confronter la réalité de l'époque et la face cachée de la ville, même les personnages ont leur part d'ombre. John Thackery dissimule à tous qu'il est accroc à la cocaïne et aux jolies filles (le pilote s'ouvre sur une scène dans une maison close où le héros est accompagné jusqu'à la sortie en bonne compagnie) jusqu'à ce qu'une des infirmières ne découvre son secret. Les ambulanciers sont grossiers et malpolis, font des paris idiots sur la survie des patients qu'ils accompagnent à l'hôpital, provoquant les nonnes parce qu'elles ont fait voeu de chasteté. Pour autant, celles-ci ne manquent pas de répartie et savent montrer leur superiorité devant ces hommes qui les harcèlent quotidiennement. Puis il y a les directeurs d'hôpitaux et membres d'administration pour qui les patients représentent des enjeux financiers, sans oublier le sujet contreversé de la main d'oeuvre enfantine et la ségrégation.

 

 

Rien n'arrête le progrès

 

 

Le début du XXème siècle est une période d'expérimentation et The Knick insiste beaucoup sur ce point. Pour faire évoluer la médecine et améliorer les soins apportés aux malades, John Thackery et ses collègues voient leurs patients comme des sujets d'étude et même si ces derniers meurent sur la table d'opération, les médecins ne doivent pas rester sur un échec mais se dire qu'ils ont fait tout leur possible et qu'ils ont eu l'occasion d'améliorer leur technique et de perfectionner leur pratique. À ce sujet, le pilote ose tout sans concession, que ce soit les plaies, les blessures et autres cicatrices ou flaques de sang afin d'accentuer le malaise et montrer qu'à cette époque, les moyens et techniques d'opération étaient rudimentaires (voir la scène finale avec l'installation de l'électricité dans l'hôpital). Toute intervention ne se solde pas toujours par une réussite, mais aura eu le mérite de faire avancer les choses et de participer au progrès.

 

 

The Knick (3)

 

 

Tel échec ou telle erreur ne doit pas pour autant décourager le personnel de l'hôpital, qui ne doit montrer aucun signe de faiblesse. C'est un métier qui nécessite des personnes fortes, confiantes et sûres d'elles, elles ne doivent pas hésiter ni perdre leurs moyens devant un patient ou au cours d'une opération. John Thackery en est le parfait exemple, c'est un héros froid, méticuleux et perfectionniste, réprimandant au passage une infirmière qui a commis une négligence. The Knick n'est donc pas une série conventionnelle, elle parvient à se démarquer des autres shows médicaux grâce à une esthétique sombre et troublante, des personnages souvent antipathiques mais bien écrits et intéressants à suivre, un contexte historique difficile et une bande son envoûtante.

 

 

Il s'agit là d'un pilote captivant qui réussit sans difficultés à décrire le quotidien de ce staff de médecins, chirurgiens et infirmières issus de la vieille école mais dont la volonté de sauver des vies est indiscutable.

 


 

J'ai aimé :


  •  Une réalisation impeccable
  •  Un casting irréprochable
  •  Une belle reconstitution
  •  Une sympathique galerie de personnages

 

J'ai moins aimé :


  •  Trop de surenchère dans les effets gores
  •  Un pilote parfois trop long
  •  Certains scènes trop vite expédiées

 

 

Ma note : 14/20.


L'auteur

Commentaires

Avatar Sheena
Sheena
Voilà une série que je vais suivre ! ou du moins un certain temps... L'ambiance, l'époque et les personnages me plaisent bien, après 2 épisodes les mécaniques sont bien en place. Par contre, malgré la très bonne réalisation, j'ai vraiment peur que ça ne soit qu'un Nip-Tuck des temps anciens... Je m’explique : je pense que la série à cause de son pitch très très limité va vite tomber dans du schéma scénaristique basique des séries hospitalières de la mauvaise téloche.... Ou alors, mais ça m'étonnerai, le pitch réducteur va permettre aux scénaristes d'être très libre et d'en faire quelque chose de bien ( /!\ a ne pas partir dans des intrigues mal ficelés et interminables ) Donc à suivre, jusqu'à ce que la vrai nature de la série se révèle. Mais venant de ce réalisateur et de Cinemax je ne m'attend à rien d'exceptionnel. Ceci dit, on est jamais à l'abris d'une bonne surprise...

Avatar nicknackpadiwak
nicknackpadiwak
ah, j'avais pas capté, le coup de l’électricité dans l’hôpital. Je me disais aussi : "pourquoi ils finissent l'épisode sur un mec qui change une ampoule? c'est quoi ce cliff de merde?!"

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