Hannibal, c'est vraiment bien. J'ai découvert ça il y a peu de temps, alors que la première saison de la série avait déjà été diffusée. Ambitieuse et très stylisée (ce qui peut ne pas plaire à tout le monde), elle n'avait pas perdue de temps en faisant découvrir à Will Graham la véritable identité du docteur Lecteur à la fin de la saison. Il s'agissait donc de bien rebondir afin de retrouver une nouvelle dynamique efficace.
You're the new Will Graham
Cette nouvelle dynamique, les scénaristes sont parvenus à l'instaurer en faisant d'Hannibal Lecteur le remplaçant de Will au sein du FBI, ce dernier étant en prison psychiatrique. Il s'agit là d'une très bonne idée qui permet à la série de garder son aspect procédural, qui quoi qu'on en pense participe largement à l'ambiance de la série et y a sa place. «You're the new Will Graham», phrase que prononce la scientifique asiatique en s'adressant à Hannibal pour lui indiquer la teneur de sa nouvelle relation avec Jack, peut ainsi être appliquée plus largement au nouveau fonctionnement de la série.
En effet, le trio que forment Will, Hannibal et Jack ne cesse d'évoluer dans les relations que chacun entretient avec les autres. Dans cet épisode, Will est clairement au fond du gouffre, seul dans sa lutte contre la vérité, qu'il n'est d'ailleurs même pas sûr de connaître. La seule personne qui lui fait un peu confiance reste Alana Bloom, et encore cette confiance est très nuancée. Hannibal, de son côté, continue d'être fasciné par Will et il est difficile de déterminer ce qu'il pense. Son imprévisibilité présente d'ailleurs un des intérêts majeurs du personnage. Quant à Jack, il fait pour le moment largement plus confiance à Hannibal qu'à Will, cependant on sent que la tendance pourrait s'inverser au fur et à mesure de la saison, ce que vient confirmer la première scène en flashforward de l'épisode.
Cette reprise ne manque ainsi pas de tension, qui se fait quasiment omniprésente même dans les moments censés être plus calmes. Paradoxalement, la respiration se fait lors des quelques passages concernant l'enquête de l'épisode, dont on a déjà vu plus gore mais qui reste au niveau des habitudes de la série. L'enquête n'est d'ailleurs pas des plus passionnantes mais permet de montrer l'expertise de Will en la matière malgré son incarcération et sa folie latente, et a qui plus est le bon goût de ne pas se terminer à la fin de l'épisode. Son rythme et intérêt en auraient été grandement affaiblis.
Au passage, il est vrai qu'on pourrait reprocher une certaine complaisance dans cette façon d'esthétiser la violence et la mort. Cependant, cette fascination dans la mise en scène n'est pas dénuée de sens car elle s'explique directement par la psychologie des personnages. Le gore n'a jamais été aussi beau car Hannibal et par extension Will le considèrent comme beau. La métaphore entre la nourriture et les organes humains n'est pas là pour choquer mais pour montrer toute l'ambiguité du raffinement d'Hannibal.
Symbolisme et psychose
Comme d'habitude avec la série de NBC, l'ambiance de l'épisode est totalement parfaite de bout en bout et prend aux tripes. Grâce à la musique, grâce à l'esthétique, mais aussi grâce aux délires métaphoriques de Will Graham, faisant d'Hannibal non seulement une série sur les serial killers, mais également une série sur la folie dans ce qu'elle a de plus psychotique.
On retrouve notamment la métaphore du chasseur de la proie, qui prend ici plusieurs formes plus ou moins complexes car il faut bien avouer que la relation entre Will et Hannibal n'est pas simple à définir. Will est donc dorénavant emprisonné et étudié par un psychanaliste, prenant ainsi ironiquement la place d'Hannibal Lecteur dans la mémoire collective. La différence étant que cette fois-ci, le spectateur est directement témoin des errances de Will et en sait davantage que les personnages sur ce qu'il se passe. Pendant que celui-ci se fait interroger, nous pouvons voir une de ses rêveries dans laquelle comme il le dit lui-même, il est en train de pêcher. Un prédateur, donc, à première vue. Pourtant, Hannibal reste le principal prédateur en étant représenté tantôt par un cerf tantôt par une forme humanoïde avec des cornes sortant de l'eau, association qui va jusqu'à imprégner le réel de Will lorsque le serial killer vient lui rendre visite.
Mais ce rêve prend par la suite une dimension supplémentaire lorsque la découverte des corps rejetés par le serial killer de l'épisode se fait dans le même décor. Cette sorte de prémonition est d'ailleurs étrange car Will a beau clamer qu'il se sent ancré dans l'esprit d'Hannibal, cela n'a aucun rapport avec les corps découverts un peu plus tard. Concernant son hallucination avec Alana, difficile de trouver une explication métaphorique, en revanche, celle où il est seul dans sa cellule et s'étouffe avec son repas était particulièrement anxiogène. D'ailleurs, la présence de l'oreille pourrait symboliser le fait que personne ne croit en sa version des faits, personne n'est prêt à l'écouter lorsqu'il accuse le docteur Lecteur.
Will Graham est seul dans sa psychose, ou en tout cas, est le seul à pouvoir en sortir. Pendant ce temps-là, Hannibal continue son bout de chemin même si la pression commence à se resserer autour de lui. C'est le cas notamment de sa psychiatre, dont les scènes qu'elle partage avec Hannibal sont savoureuses d'ambiguité et de tension en sous-texte.
J'ai aimé :
- Le fait que l'enquête épisodique ne se finisse pas à cet épisode
- Et puis à peu près tout le reste
Je n'ai pas aimé :
- Ben, pas grand chose...
Ma note : 15/20.