Le faux reboot
Il n’est jamais facile de tenter un comeback, surtout quand on a connu la gloire. Dans le cas d’Heroes Reborn, c’est encore plus particulier : la saison 1 d’Heroes était tout simplement exceptionnelle, un modèle du genre, une bombe à l’époque. Puis la série s’est lamentablement vautrée au fur et à mesure, pour se terminer sur une quatrième saison dans l’indifférence générale.
L’attente vis-à-vis de ce "reboot" (qui n’en est pas du tout un) est assez paradoxale. D’un côté on n’en attend pas grand-chose, on se dit qu’on va nous sortir la même soupe fade que la fin d‘Heroes, qu’on a fait le tour de la question et que finalement on va sûrement s’ennuyer. De l’autre on a cet espoir un peu fou de retrouver les qualités et le plaisir de la première saison de la série mère.
Repompage n°1 : Fringe
Autant le dire tout de suite : il faudra davantage d’épisodes pour savoir si cette suite a un réel intérêt. Car ce double épisode d’introduction suit exactement le même schéma que celui de la série de base : présenter ses personnages et leurs pouvoirs sans réellement montrer de connexions entre eux. À la seule différence près que nous connaissons le contexte puisqu’il s’agit en réalité d’une suite d’Heroes premier du nom.
En effet, l’histoire débute un an après les derniers événements d’Heroes. Le monde connaît l’existence des heroes, communément appelés evos. Le problème est que les evos ne sont pas acceptés par les humains et qu’ils sont même traqués et doivent se cacher ou fuir. La série est donc quelque peu différente du support de base et surtout s’appuie sur ce dernier pour construire son intrigue. Et c’est d’ailleurs l’un des problèmes de ce pilote : si le spectateur ne connaît pas le matériau de base, il risque de ne pas saisir toutes les références et passer à côté de certains éléments, en particulier au niveau de l’intrigue principale (qui se sert du background Primatech).
Plusieurs anciennes têtes connues étaient annoncées dans la série, comme Hiro ou Suresh. Avec du recul, le fait d’avoir très peu de vétérans est une bonne chose pour la série, histoire de ne pas rester dans les vestiges du passé. Mais ce pilote va tout de même choisir de se concentrer sur Noah Bennet, le père de Claire. C’est un choix logique, il a toujours été le fil rouge de l’intrigue et il apparaît comme un guide et un repère pour le spectateur. Il est le personnage qui détient les clés de l’histoire et, astucieusement, les showrunners ont fait en sorte qu’il ne se souvienne de rien, histoire de le mettre au même niveau que le spectateur. Noah Bennet est pour le moment le moteur principal de l’histoire. On sent à travers cette démarche que NBC avance prudemment et n’a plus la fougue d’antan pour tenter des choses.
Repompage n°2 : Breaking Bad
Heroes Reborn, redite de X-Men ?
Outre un fil rouge très mystérieux et le plaisir de revoir les anciens personnages, il était inévitable d’introduire de nouveaux "héros". La galerie proposée est assez conséquente mais manque un peu de panache et de folie. L’autre gros problème est que ces personnages ne servent à rien pour l’intrigue, ils sont présents uniquement pour poser un contexte et une ambiance.
C’est fort dommage, surtout que certains d’entre eux laissent entrevoir un potentiel intéressant. Je pense en particulier à la petite japonaise Miko. Même si pour le moment on ne l’a toujours pas vu, on se doute bien qu’Hiro va être de la partie ; la coïncidence est trop grosse. Mais outre l’envie de revoir l’ami yatta, les showrunners ont fait preuve d’inventivité avec le personnage de Miko : elle a la possibilité d’entrer en mode jeu vidéo en utilisant un sabre. Dit comme ça, cela paraît absurde mais l’originalité est là et peut permettre des choses sympas. Malheureusement le résultat est décevant à cause d’une animation qui laisse à désirer, en particulier au niveau du chara design. Mais cette idée de Dynasty Warriors-like montre que la série peut proposer autre chose qu’une pâle copie de la série originelle. Il y a également l’homme au chapeau qui intrigue pas mal, de par son pouvoir et ses actions.
En revanche, au niveau des autres personnages, rien de bien transcendant. On a droit au lycéen avec un pouvoir godlike qui a des histoires… de lycéen (amourette, rivalité, il se cherche, vous connaissez la chanson), le duo de parents qui a la rage contre les evos et qui veut tous les tuer (les acteurs sont assez mauvais d’ailleurs) ou encore l’evo qui se croit Batman (El Vengador, quel nom de folie !). Bref rien d’incroyable et on a même la sensation que cela fait copie de X-Men, que ce soit au niveau des pouvoirs ou dans le contexte de la série. Noah Bennet est le professeur Xavier, Suresh est présenté comme un Magneto et les evos sont diabolisés par la société…
Je crois que le plus décevant dans ce pilote, c’est l’absence de concept marquant. Souvenez-vous du "Save the Cheerleader, Save the World", ça avait de la gueule non ? Ici, on nous présente une sorte d’aurore boréale qui va changer le monde. Mis à part qu’on se trouve au niveau zéro de l’originalité, ce mystère n’a rien d’accrocheur et ne peut être la locomotive qui tire la série alors qu’elle en a cruellement besoin. Ce défaut est à l’image de la série : pas de prise de risque, concepts et situations vus et revus, manque d’enthousiasme.
Repompage n°3 : Arrow
Finalement Heroes Reborn marche dans les mêmes traces que son prédécesseur : mêmes thématiques, mêmes enjeux (enfin de ce qu’on peut percevoir) et quasiment mêmes personnages (seuls les pouvoirs changent un peu). Le problème est que nous ne sommes plus en 2006 et qu’un tel résultat ne peut fonctionner de nos jours. Cependant, tout n’est pas perdu car le potentiel est là mais avec Tim Kring aux commandes, on sait pertinemment que tout peut partir en vrille très rapidement. Le format de treize épisodes semble être une bonne idée pour ne pas tout gâcher tout de suite.
J’ai aimé :
- La place de Noah Bennet dans l’intrigue
- Les personnages de Miko et de l’homme au chapeau
- Voir que ce n’est pas aussi pourri que ce que l’on pouvait prévoir
Je n’ai pas aimé :
- Le manque total d’inventivité de la part des scénaristes
- Des nouveaux personnages plus spectateurs qu’acteurs
- La fausse promesse de reboot
Ma note : 12/20.
alanparish
