La transversalité entre le grand et le petit écran est en train de changer d’angle, je vous le dis, moi, mes braves.
Fut un temps, Hollywood s’était pris de passion à ressusciter et adapter au cinéma quelques séries cultes (Deux Flics à Miami, Chapeau Melon et Bottes de Cuir, Les Mystères de l’Ouest, ou encore Mission Impossible), leur donnant une nouvelle jeunesse (d’ailleurs, la France essaya aussi avec Vidocq et tout le monde en rigole encore). Et même que parfois, les séries étaient transposées à l’écran directement par leurs équipes créatives (Twin Peaks, The X-Files).
Depuis peu, le chemin pris s’est inversé, et dorénavant, ce sont les films qui s’adaptent en séries (Minority Report, L’Arme Fatale, Une Nuit en Enfer, Le Transporteur, Damien ou le prochain Mondwest). Bon, avouons que les résultats sont pour le moment modérément emballants et inoubliables (EUPHÉMISME !!!).
The Exorcist est le nouveau projet de ce type. Tiré d’un livre inspiré d’un fait réel (à ce qu’il paraît), le film de William Friedkin est sorti en 1973 et est devenu le mètre-étalon de l’horreur basée sur les possessions démoniaques et les exorcismes. Et c’est un gros challenge, voire un sacré culot que cette adaptation, car il faudra intéresser avec une histoire assez simple et connue de tous.
Alors ça donne quoi ? Le démon Pazuzu a-t-il réussi son retour ?
The Devil, You + Me
Et bah ma foi, le début est assez efficace, et alors que j’avais beaucoup de réserves sur la pertinence de ce remake, mes doutes ont commencé à douter (c’est dire) avec cette scène d’introduction réussie qui crée une atmosphère angoissante.
Ensuite, le pilote commence à présenter ses personnages, dont Tomas Ortega, un jeune prêtre beau gosse qu’on sent attiré par le péché de chair, le Père Marcus Lang, un prêtre plus vieux et bad ass qui semble l’expert ès exorcisme, puis la famille prochainement victime du Malin. C’est bien torché, les personnages existent en quelques plans et ont du potentiel.
Il y a aussi une bonne idée à propos du père de famille qui avait délaissé celle-ci dans le film : dans cette version, il est présent mais a subi une chose non dite qui lui a fait perdre ses facultés mentales. Donc une nouvelle fois absent, mais par accident, ce coup-ci.
Et avec la cadette (et future possédée) qui se remet difficilement d’un accident de voiture et qui a vu mourir son copain, on a donc une famille en reconstruction sur laquelle le Mal s’apprête à s’abattre.
Donc, un décor, une atmosphère, des personnages plantés efficacement, on ne pouvait rêver de meilleur démarrage. Puis, au milieu de l’épisode, le mot « démon » est lâché et patatra, tout s’effondre.
Devil Inside
De l'œuvre originelle, on se souvient surtout de la deuxième partie. Mais c’est dommage, car son efficacité résidait beaucoup dans la tension créée en début de film. Avec le désarroi d’une mère en perdition totale, incapable de comprendre (et de soigner) le mal qui frappe sa fille, testant la médecine traditionnelle et la science, avant d’accepter le côté surnaturel de la situation et de se tourner vers l’Église. Or, ici, au bout de vingt minutes, c’est la mère elle-même qui va voir Père Tomas pour lui annoncer que sa maison est victime d’un démon et qui va lui demander de l’aide.
Cette précipitation est, selon moi, une mauvaise option, confirmée quelques secondes plus tard par un corbeau en images de synthèse venant s’écraser contre une vitre. Adieu donc le crescendo dans l’angoisse et l’horreur, et bonjour le grand-guignolesque.
Et l’ennui.
La Salsa du Démon
Car, à partir de là, tout est dit. Les personnages ont déjà tout compris (Tomas sera convaincu un peu plus tard, lors d’une scène dans le grenier rappelant Rec), les spectateurs aussi. La série vient de perdre tout intérêt ou suspense, et s’engage dans une longue autoroute aux rebondissements connus de tous.
On peut deviner qu’il y aura des jump scares à foison, que Katerine, la possédée, va se comporter de manière de moins en moins correcte, que les deux prêtres vont s’associer mais connaîtront des doutes, et que quelques seconds rôles vont passer l’arme à gauche.
Plus tard, il y aura les scènes d’exorcisme attendues. Là, je fais un procès d’intention, mais je vois mal comment elles pourront proposer quelque chose de neuf et original, tant ce genre de séquences a déjà été surreprésentées à l’écran (Conjuring, Evil Dead, L’Exorcisme d’Emily Rose, ou Outcast et South of Hell).
Ma main au feu qu’il y aura des crucifix tendus, de l’eau bénite jetée, des voix d’outre-tombe insultantes, des corps contorsionnés, du sang et du vomi.
The Exorcist était une mauvaise idée à la base et logiquement, ça va donner une mauvaise série, du moins dispensable. C’est finalement assez rassurant dans notre monde actuel en manque de repères.
J’ai aimé :
- Les vingt premières minutes où l’espoir était encore de mise.
- Plus besoin de regarder la suite, donc je vais gagner du temps et pouvoir me libérer pour regarder autre chose.
Je n’ai pas aimé :
- Le fait que The Exorcist verse trop vite dans le surnaturel.
- Tout ce temps, cet argent, cette énergie gaspillés dans un projet frileux promis au plantage, plutôt que de tenter de créer quelque chose de neuf…
Ma note : 10/20.
Le Coin du Fan :
Alors, un reboot, ce projet ? Une suite plutôt, car on y fait référence au premier film via une coupure de journal et l’évocation de deux prêtres décédés lors d’une séance d’exorcisme à Georgetown.
Bande-son de l'article :
- The Notwist : The Devil, You + Me.
- INXS : Devil Inside.
- Le Grand Orchestre du Splendid : La Salsa du Démon.
- Et pour mal dormir, la bande-son la plus flippante du monde.