En faisant le bilan de mon année sérielle, je me suis rendu compte que ça manquait cruellement de séries sympathiques. Des feel good series, qui te mettent un sourire sur le visage, et qui te font te sentir bien après. Grandfathered et Faking It remplissaient ce rôle cette année – et on a bien vu où ça les a menées... –, aux côtés d'une Supergirl qui n'y allait pas avec le dos de la cuillère en la matière.
Et puis arriva dans ma vie une série du nom de Wynonna Earp. Adapatation des comics de Beau Smith, la série raconte les tribulations de Wynonna, héritière d'une malédiction qui commença avec le légendaire Wyatt Earp, son arrière-arrière-grand-père, et qui a tué son père. Elle va dès lors prendre à reculons sa destinée de tueuse de démons/revenants qui peuplent la si bien nommée Purgatory, sa ville d'enfance.
C'est fun, franchement loufoque et résolument féministe, sans aucune honte ni complexe. Résultat : j'attends chaque épisode avec un mélange d'impatience et de joie. Et ça fait du bien !
Voici donc un focus, pour vous donner vous aussi envie de regarder cette super série !
Une héroïne immensément badass… et percluse de défauts
La première grande qualité de Wynonna Earp est son héroïne, interprétée par Melanie Scrofano. Un peu à la manière de Jessica Jones, Wynonna est une femme rongée par ses démons, au sens figuré : la mort de son père la hante depuis son jeune âge, et elle tente d’oublier cela avec de l’alcool, des relations d’un soir et un franc-parler qui cache de grosses faiblesses. Héritant d’une responsabilité qu’elle a d’abord refusé d’endosser, la jeune femme revient dans sa ville natale – la si bien nommée Purgatory – pour tuer tous les démons – au sens littéral cette fois – qui vivent là-bas. Tout cela afin de mettre un terme à la malédiction qui frappe tous les héritiers du nom Earp.
Melanie Scrofano impose dès le pilote sa présence, rendant son personnage instantanément charismatique. C’est elle qui porte la série sur ses épaules, réussissant à délivrer toutes les lignes de dialogues qu’on lui donne, même les moins fines. N’ayant que très peu d’amour pour la bureaucratie et l’autorité, possédant un sens de l’humour bien à elle et étant résolument badass, Wynonna est une héroïne dont il est très divertissant de suivre les aventures.
Un univers BIEN décalé
L’univers de la série se révèle également sympathique ; un peu à la manière de Justified, les scénaristes de Wynonna Earp utilisent une galerie de personnages hauts en couleur, notamment en ce qui concerne les Revenants, les méchants de l’histoire. Le meilleur exemple est leur chef : Bobo, interprété avec joie et démagogie par Michael Eklund, oscille entre la folie et le sadisme, représentant un opposant de taille pour Wynonna. L’ambiance de la série alterne dès lors souvent entre le sérieux et l’absurde, pour des résultats diamétralement opposés.
Le décor naturel de Calgary est pour beaucoup dans la capacité de la série à nous immerger dans son univers. L’ayant très peu utilisé dans le pilote, les scénaristes se rattrapent rapidement, donnant dès lors une toute autre identité visuelle à la série. Parce qu’il faut le dire : cette dernière est très souvent très belle à voir. Les longs plans dans le paysage enneigé contrastent radicalement avec les démons/revenants horrifiques qui le peuplent. D’ailleurs, il y a un côté résolument kitsch à la chasse aux créatures démoniaques ; lorsqu’ils meurent, par le pistolet de Wynonna, ils reviennent en enfer et nous, spectateurs, avons ainsi le droit de voir des flammes les consumer.
Un casting solide
Cela aide Wynonna Earp que son casting soit impeccable. Dominique Provost-Chalkley se montre particulièrement enthousiaste en tant que Waverly, la jeune sœur de Wynonna. Badass à sa manière, la jeune femme se révèle d’une grande aide pour sa sœur. En outre, il est très sympathique d’observer une relation sœur-sœur prendre autant d’importance dans une série. Tim Rozon incarne l’ambigu Doc Holliday, un homme au fort accent et à la moustache majestueuse. Enfin, Shamier Anderson apporte un certain contrepoids à la témérité de Wynonna – ainsi qu’au côté loufoque de la série – en interprétant Dolls, un agent secret appartenant à une unité spéciale qui s’occupe de gérer les démons/revenants.
Les deux personnages les plus intéressants de la série sont Wynonna et sa jeune sœur. Dépeindre une relation entre deux sœurs est un phénomène malheureusement encore assez rare dans le monde des séries, mais Wynonna Earp le réussit particulièrement bien. Cela aide beaucoup que Melanie Scrofano et Dominique Provost-Chalkley se montrent aussi crédibles en jouant les soeurs Earp. Il y a de la jalousie, des sentiments longtemps refoulés, mais surtout une vraie complicité entre les deux jeunes femmes, qui ne sera pas de trop pour combattre toutes les menaces qui tombent sur cette pauvre ville de Purgatory.
Un ton féministe sans complexe
Comme vous avez pu le voir sur l'article des upftonts, CBS a décidé de ne pas développer la série Nancy Drew, adaptée de l'œuvre éponyme. La raison est assez déconcertante : le network juge sa série "too female" pour attirer un large public. C'est également un reproche qui a été longtemps fait à Supergirl – diffusée sur... CBS –, désormais sur la CW, qui n'éprouve, elle, pas trop de mal avec les séries "too female". Ces reproches de la part de CBS n'ayant aucune réelle justification, cela fait d'autant plus du bien de voir une série telle que Wynonna Earp, qui assume à 300% d'être féministe. Avec en outre des scénaristes qui le font avec une certaine finesse, ce qui rend l'ensemble encore plus appréciable.
Comme je l'ai énoncé précédemment, la relation entre Wynonna et Waverly représente l'un des arcs narratifs les plus importants de série. Les scénaristes n'ont aucune honte à mettre leurs personnages féminins en valeur, les rendant bien plus proactifs que leurs compères masculins. À ce sujet, le personnage de Nicole Haught est particulièrement intéressant, représentant au mieux les deux facettes de la série. De son introduction avec autant de finesse qu'un haltérophile sous amphétamines, au traitement du personnage tout en toucher par la suite, Nicole s'impose sans aucun problème dans l'univers de la série et incarne un réel personnage, pas juste le rôle toujours aussi valorisant de "intérêt amoureux de".
On peut rajouter au mix Constance, une nouvelle méchante. Elle aussi complètement délurée – les acteurs/actrices prennent un malin plaisir à interpréter leurs personnages –, elle ne représente pas moins une menace bien plus sérieuse que celle de Bobo, qui est réduit à regarder les choses suivre leur cours sans qu'il puisse réellement y faire quelque chose. Qui plus est, Constance possède un solide lien avec ce cher Doc et sa moustache royale, ce qui rend le personnage tout aussi pertinent quant au déroulement de l'intrigue principale.
Une absence de réelle direction scénaristique
Puisque la série ne peut pas qu’avoir des qualités, elle manque grandement de direction scénaristique. Les épisodes s’enchaînent sans vraiment posséder de liens entre eux, les personnages vont et viennent sans qu’on ait le temps de savoir le pourquoi du comment, et la quête principale est assez souvent noyée dans d’innombrables histoires secondaires. Wynonna Earp s’améliore à partir de l’épisode 6, commençant à relier deux-trois éléments entre eux, de façon à présenter une histoire un peu plus cohérente.
En soi, proposer des intrigues indépendantes n’est pas gênant à mes yeux : j’ai beaucoup aimé la première saison de Justified ainsi que la première de Suits. Mais lorsque l’on regarde Wynonna Earp, on a assez souvent l’impression d’assister à un puzzle qui n’arrête pas de changer de forme. La série n’est pas franchement aidée par l’univers qu’elle a mis en place ; j’ai beau aimer les personnages hauts en couleur, les vilains de la série sont tellement grandiloquents qu’il est difficile de toujours les prendre réellement au sérieux, diminuant dès lors les enjeux narratifs. Là encore, Wynonna Earp s’améliore à partir de l’épisode 6, se montrant bien plus concentrée sur sa narration, tout en proposant quelques intrigues secondaires réussies, car se recentrant sur les personnages principaux.
Si je devais définir Wynonna Earp en deux mots, ce serait "vraiment sympathique". Il y a de l’action, de bons dialogues, un ton féministe sans aucun complexe, une héroïne qui entraîne toute la série avec elle – sérieusement, Melanie Scrofano est géniale – et juste ce qu'il faut de kitsch pour nous faire passer un bon moment sur quarante minutes. Les scénaristes manquent parfois leur cible, mais ils nous offrent globalement un divertissement qui se révèle bien vite plus intelligent qu’il ne le laisse paraître au premier abord. Si vous ne l’aviez pas compris depuis le temps : regardez Wynonna Earp !
Le thème de la série :