Diffusé le 8 janvier 1989, The Adventure of the Clapham Cook lance la série Agatha Christie's Poirot, adaptation de la quasi-intégrale des aventures d'Hercule Poirot, interprété avec brio par David Suchet qui y campe clairement, au vu de son CV, le rôle de sa vie. Rôle qui lui vaudra d'être invité à la table de la Reine et de devenir une véritable légende au Royaume Uni.

Ce premier épisode pose le ton de ce que sera la série sous l'ère "Clive Exton", c'est à dire jusqu'en 2001 (la saison 8) : une série conviviale, autant porté sur les énigmes que sur l'humour et l'esprit de groupe. Si Poirot est un excellent détective, il est aussi très bien entouré. L'humour de ce quatuor tient une place importante dans la première ère de la série, que ce soit les exigences extravagantes de Miss Lemon, la bêtise ingénue d'Hastings ou bien la sympathique concurrence qui oppose Japp au détective belge.

Ce premier épisode met surtout à l'honneur la dynamique Poirot/Hastings. Dès le début de l'épisode, leur relation évoque clairement celle de Sherlock et Watson, Hastings lisant à Poirot les nouvelles afin que ce dernier y décèle un mystère à la hauteur de son talent. Agatha Christie s'est assez rapidement débarrassée du personnage d'Hastings dans les romans pour justement éviter la comparaison avec Sherlock Holmes et Watson, mais la série tire le meilleur de ce duo, grâce à notamment l'interprétation très attachante d'Hugh Fraser, dont l'optimisme et la naïveté à toute épreuve offre un contre-point plaisant à la pédanterie et à la malice de Poirot. Les deux personnages apportent beaucoup d'humour à l'épisode, en particulier lors de leur promenade dans la campagne anglaise, qui offre quelques savoureuses répliques à Poirot.

Captain Hastings: Just fill your lungs with that air.

Hercule Poirot: No, my poor friend, this sort of air is intended for birds and little furry things. The lungs of Hercule Poirot demand something more substantial: the good air of the town!

Concernant l'enquête, on retrouve le problème de beaucoup d'épisodes des premières saisons, à savoir qu'adapter une nouvelle de 20 pages en 50 minutes nécessite un certain talent d'écriture. Ici, nous sommes face au pilot, et le spectateur peut donc faire preuve d'indulgence, mais on remarque déjà que l'intrigue est assez simple, et qu'il est aisé d'avoir une longueur d'avance sur Poirot et Hastings (la séquence d'introduction, qui nous montre clairement le coupable, n'est peut être pas une très bonne idée non plus, même si l'identité de ce dernier ne fait aucun doute par la suite).

On en revient donc à une caractéristique des premières saisons : l'intérêt de l'épisode est autant dans les personnages, les relations qui les anime, l'humour qu'ils apportent, que dans l'enquête. La diversité des environnements (campagne, train, quais...) et des personnages dynamise le récit, avec quelques moments très sympathiques (Poirot qui s'énerve lorsqu'il est relevé de ses fonctions, Japp qui se moque du détective ...)

L'enquête est donc secondaire, même si elle tient la route. Cependant, on retrouve certains artifices chers à Agatha qui souffrent du passage de l'écrit à l'écran, et qui seront malheureusement TRES fréquemment utilisés lors des premières saisons de la série.

Mais soit, passons, car ce pilot n'a pas trop vieilli et qu'on y retrouve le ton si particulier de cette série et des premiers écrits d'Agatha Christie, ainsi que David Suchet qui, sans le savoir, s'engage, déjà au sommet, dans un travail d'un quart de siècle.