Vrais mensonges et mise en scène
Machado poursuit la piste de la blanchisserie, mais son impuissance à lier Bodawai à toute cette histoire lui fait perdre le contrôle, molestant un tueur à gages présumé en pleine rue devant l'oeil des passants. A sa recherche, Bridget envisage de se rendre pour témoigner contre Macawi, se jugeant responsable par sa lâcheté de la disparition de Malcolm. Pendant ce temps, Henry essaie de convaincre Siobhan d'abandonner son plan pour tuer sa soeur et détruire Martin/Charles.
Résumé de la critique
Un épisode plaisant que l'on peut détailler ainsi :
- la storyline de Machado qui sauve le tout
- un personnage de Catherine qui cristallise les défauts de la série
- Henry et les limites des intrigues à long terme
- la fin d'une certaine exigence
La fabrication d'un mensonge
Pour éviter de ressasser les mêmes éléments dans cette critique que les précédentes, je vais d'abord me débarrasser des lieux communs : l'intrigue de Machado est toujours la meilleure de l'épisode et le show manque toujours autant de crédibilité. Situé à trois épisodes de la fin, cette intrigue est intéressante, car elle est symptomatique du style Ringer, à savoir cette capacité à se trouver toujours à la limite entre la narration et le mensonge. En théorie, raconter une histoire nécessite de se construire une certaine crédibilité fondée sur la relation de confiance avec le spectateur, seul moyen pour le placer dans une posture suffisamment réceptive pour favoriser l'immersion.
L'histoire peut alors nous toucher comme avec Machado qui continue de se battre pour racheter ses fautes, refusant que Bridget mente pour son propre compte, comme si la mémoire de Shaylene la contraignait à conserver une certaine droiture. Seulement, jouer selon les règles et perdre malgré tout devient vite frustrant, poussant l'agent du FBI à perdre le contrôle de ses nerfs et à exprimer sa colère lors d'une scène remarquable. Il propose à Bridget de construire un faux film vidéo de sa mort, subterfuge peu crédible qui relève du simple remplissage, mais trahit la façon dont les scénaristes envisagent le mensonge comme le seul moyen de faire progresser une histoire.
La présence du tueur sur les lieux du tournage est une des nombreuses incohérences de l'épisode, servant uniquement à justifier une séquence d'ouverture de très mauvais goût. A chaque impasse narrative, dès que l'intrigue se heurte à ses propres limites, les scénaristes proposent un nouveau mensonge qui créé la diversion nécessaire et engendre la confusion et le doute concernant la crédibilité de ce qui nous est raconté. Un style d'écriture qui va être parfaitement incarné par le personnage de Catherine, l'ex-femme d'Andrews cristallisant sur elle les nombreux défauts de Ringer.
L'ombre d'un doute
Si la série n'est pas vraiment réputée pour sa gestion subtile des entames d'épisode, l'introduction de celui-ci sur le principe du flash forward est vraiment raté, tentative décevante et un rien méprisante pour capter notre attention. Plutôt que d'organiser une lente montée en puissance en s'appuyant sur la dramatique de l'épisode, les scénaristes jouent la carte du spoiler inutile, tuant au passage bon nombre d'effets de surprise du scénario. Comme tout bon menteur, cette introduction aura le mérite de tenter de cacher les nombreux petits ajustements que les scénaristes vont opérer à force de flashback maladroits avec l'histoire de départ.
Cela fait longtemps que le doute s'est immiscé chez le spectateur concernant le manque de travail de planification des auteurs de Ringer concernant la progression de cette saison. Plusieurs personnages en ont payé le prix de leur crédibilité, comme Juliet par exemple, dont la volonté affichée d'aider son père donne l'impression d'un retournement de veste de plus, servant avant tout à laisser le rôle de la méchante à Catherine. Un costume de vilaine qu'enfile aisément Andrea Roth, tenant à bout de bras une histoire de transaction immobilière aussi peu passionnante que terriblement confuse.
Abandonnant Olivia et Bodawai Macawi, les scénaristes de Ringer font de l'ex-femme d'Andrew un personnage clé, idée étrange qui pousse sur le côté Siobhan, réduite à l'état de simple spectatrice. Son impact dans l'intrigue est maintenant bien faible, se limitant à une confrontation avec Bridget décevante, conclusion pathétique d'une histoire qui a lentement perdu tout son mystère.
Le silence de Siobhan
Si cet épisode peut être l'objet de nombreux reproches, le plus gênant reste le peu d'intérêt accordé par les scénaristes à la jumelle de Bridget qui se retrouve reléguée ici à un rôle subalterne, spectateur passif de la lente déliquescence de son plan. Voir Henry lui voler la vedette paraît vraiment choquant, surtout que l'intrigue avec son beau-père est loin d'être trépidante, les scénaristes donnant l'impression de ne plus savoir quoi faire de cette histoire de chaîne de Ponzi. Refusant une nouvelle fois de jouer le jeu des révélations, Ringer empile les mensonges et les manipulations, ruinant le peu de crédibilité restant du show.
Le silence de Siobhan dans la première partie de saison était une nécessité, donnant tout son mystère à un personnage qui incarnait en elle les espoirs d'un thriller vénéneux et cruel. Gagnant en force et en charisme, la vraie épouse d'Andrew est devenue le centre des toutes les attentions lors de son retour à New-York, s'amusant à utiliser les personnages comme des pion, laissant entrevoir la possibilité d'un plan secret et excitant. Muette, mais pas inactive, elle observait avec patience le bon accomplissement de son oeuvre, guettant la lente destruction d'une vie passée dont elle ne voulait plus.
Seulement, le silence de Siobhan est maintenant devenu pathétique, incapable de reprendre le contrôle d'une histoire où elle ne joue plus vraiment de rôle. De central, son personnage a glissé vers l'anecdotique et perdu tout son potentiel, réduit à imaginer sans agir, laissant entrevoir ce qu'aurait pu être Ringer avec plus de courage de la part des auteurs. Contrainte d'attendre, enfermée dans son mutisme, la jumelle de Bridget disparait peu à peu de l'intrigue principale, ne laissant qu'un scénario pareil à un lapin sans tête, courant dans toutes les directions en se raccrochant à la moindre idée avec l'énergie du désespoir.
Un amas de mensonges ne fait pas une histoire
Si l'épisode ne renoue pas avec le niveau de la mi-saison, il possède un rythme rapide et parvient à se montrer plutôt accrocheur grâce à de bons comédiens et à la mise en péril de Machado. Mais une scène va venir réduire à néant les quelques bonnes idées de cet épisode avec le flashback brutal de quelques secondes où Juliet avoue la vérité à son père. Bâclé, scandaleuse, cette scène est presque injurieuse pour le spectateur, balayant à la va-vite une révélation décisive pour mieux masquer l'incapacité des scénaristes à donner du sens à tout un pan de leur histoire.
En conclusion, un épisode moyen, qui possède certes quelques qualités récurrentes, mais ne parvient plus à masquer les nombreuses failles du scénario. Là où d'autres séries montent en puissance à l'approche de la conclusion, Ringer glisse lentement dans la médiocrité avec une histoire de transaction immobilière sans saveur. Décevant, un épisode qui confirme le goût insupportable des scénaristes pour l'accumulation de mensonges, écrasant une intrigue qui a perdu une bonne part de sa crédibilité.
J'aime :
- la scène où Machado craque devant la blanchisserie
- les comédiens qui font de leur mieux
Je n'aime pas :
- le scénario chaotique
- la passivité de Siobhan
- la séquence de l'aveu de Juliet à son père
- la storyline de Catherine
Note : 11 / 20
Si l'épisode possède des qualités et paraît plutôt plaisant à regarder, la mauvaise impression d'ensemble est telle qu'on peine à apprécier les twists répétés d'un show qui continue à en abuser. Du démarrage raté à la scène catastrophique de l'aveu de Juliet, l'épisode énerve plus qu'il ne séduit et confirme les craintes exprimées lors de l'épisode précédent.