Alors, cassons tout de suite le suspense : est-ce que ça vaut le coup de regarder le pilot de Wilfred ? Oui : certes, il n’est pas parfait mais il reste tout de même plaisant.
La difficulté majeure d’un pilot de comédie est de réussir à présenter les personnages, à présenter l’histoire et à nous faire rire, le tout en moins de 20 minutes et sans sortir tous les gags de la saison dans cet épisode. Et Wilfred ne s’en sort pas si mal que ça, je dois dire.
On s'en coule une ?
Le pitch
Le pitch est assez simple et rapidement présenté : Ryan est ce que l’on appelle un soumis et il n’est donc pas vraiment heureux. Forcé par son père à faire des études d’avocat qu’il n’aimait pas, c’est maintenant à sa sœur sage-femme et hystérique qu’il doit faire face, ce dont il est incapable. Ce qui le conduit à tenter de se suicider en ingérant une surdose de médicaments. Mais comme Ryan est un looser, la mort passe son tour et il est toujours vivant le lendemain matin.
C’est alors que sa charmante nouvelle voisine vient sonner pour lui demander de garder Wilfred. Wilfred a sept ans, est plutôt grand et barbu, aime Matt Damon, adore bouffer le cul des opossums et se couler des douilles. Le problème, c’est que Wilfred est un chien et non pas un homme déguisé en chien, comme le voit Ryan. Et étrangement, ça n’inquiète pas plus Ryan que ça.
Pour ce pilot, on s’intéresse donc au duo formé par Ryan (Elijah Wood) et Wilfred (Jason Gann). Et il fonctionne plutôt bien. Wood est parfait dans son rôle de dépressif complètement soumis : jouer Frodon dans le Seigneur des Anneaux, ça doit aider. De l’autre côté, Gann est également parfait dans le rôle du chien gros balourd et fumeur de clopes : il incarne à merveille le personnage du « chien humain grossier », dans un style très différent du Didier de Chabat, par exemple. Il faut dire aussi qu’il est le créateur de la série originale dont est adaptée celle-ci et qu’il a donc déjà joué le rôle du chien : il est bien rodé (en témoigne son regard de gros pervers).
Les deux sont en opposition et comme l’on se doute, l’un va pousser l’autre à sortir de sa coquille et une amitié va naître. Le pitch du duo intraverti/extraverti n’est pas nouveau mais celui-ci est clairement décalé par rapport aux autres et au situations que l’on a pu voir maintes fois se révèlent ici sous un jour nouveau. Le duo se révèle être efficace et les échanges assez surprenants, beaucoup plus profonds et subtils que je ne l’aurais pensé. Un bon point donc qui laisse présager que Wilfred en a un peu plus sous le capot que ne le laissait supposer son pitch de départ.
En dehors des deux personnages principaux semblent en graviter deux autres (voir trois). Tout d’abord la voisine, propriétaire de Wilfred, tout à fait charmante et qui sera sûrement un coup de cœur de Ryan par la suite, à n’en pas douter. Pour le moment, elle ne fait que de la figuration, se contentant d’apporter et ramener Wilfred à Ryan. Nous avons ensuite la sœur de Ryan, totalement hystérique et stressée : pas étonnant qu’il veuille se suicider ! Là encore, elle est peu utile à l’histoire et ne sert qu’à renforcer l’atmosphère étouffante dans laquelle vit Ryan. Enfin, on a le motard qui sert ici de déclencheur mais qui, au vue du final, pourra revenir par la suite.
Moi aussi j'aimerais bien pouvoir faire ça des fois.
Les blagues
Présenter l’histoire : fait. Présenter les personnages : en partie fait, mais on a que 20 minutes aussi, faut être indulgent. Reste donc la partie délicate : le pilot est-il drôle ? Plus ou moins je dirai.
L’humour provient principalement du décalage entre l’aspect chien et l’aspect humain de Wilfred. Le voir creuser des trous avec une pelle dans le jardin parce qu’il croit que sa maitresse a eu des problèmes est amusant, de même que le voir tourner sur lui-même avant de s’assoir. Mais ces moments là ne provoquent qu’un sourire tout au plus.
D’un autre côté, le voir pisser la clope au bec le long d’un arbre est beaucoup plus drôle, de même que de le voir partir à l’aventure dans la poitrine de la serveuse. Au final, le décalage est à double sens : on a d’un côté des gags assez drôles (sans pour autant déclencher l’hilarité) et de l’autre, on a des gags qui tombent à plat.
L’exemple typique est celui de la scène ou Ryan et Wilfred se coulent une douille : le voir sortir son bang et fumer est drôle, l’entendre déblatérer sur les particules de « merde » qui restent dans le pantalon de Ryan nettement moins, même si la blague est à prendre au second degré.
Fort heureusement, on ne reste pas à reproduire chez un homme le comportement d’un chien (il aboie, il pisse, il grogne, …) et le personnage de Wilfred a un côté suffisamment humain et décalé pour rester intéressant et pour éviter que l’on reste trop dans le même ton. Mais là encore, les vannes sont à deux niveaux : on a d’un côté des trucs usés jusque la corde et d’un autre des blagues plus recherchées.
Après, il est certain qu’avec un pitch tel que celui que propose la série, il n’est pas forcément évident de trouver le niveau adéquat : doit-on pencher vers le burlesque pur et dur ou proposer quelque chose de plus fin ? Cet épisode a choisit de faire les deux et le résultat est donc mitigé. La suite de la série risque d’être déterminante sur ce point : va-t-elle réussir à nous proposer quelque chose d’innovant et à se renouveler ou va-t-elle au contraire sombrer dans la facilité et nous resservir les mêmes vannes tout au long de la saison ?
Pour ma part, j’ai plutôt bon espoir. J’ai terminé le visionnage de l’épisode de bonne humeur et j’ai passé un bon moment donc je pense que la série va réussir à se maintenir. Après tout, une série comme Community n’a dévoilé son potentiel qu’assez tardivement.
Au final, ce pilot laisse un avis partagé : plutôt positif quant à l’épisode en lui-même, beaucoup moins pour la suite de la série. Il est donc difficile de donner une opinion définitive de la série rien qu’à partir de ce pilot : les épisodes suivants seront déterminants.
J’ai aimé
- Le pitch
- Le duo entre Ryan et Wilfred, au poil
- La bonne humeur qui se dégage de l’épisode
J’ai moins aimé
- De nombreux gags tombent à plat et font trop forcés
- La perspective que la série risque de tourner rapidement en rond
12/20