Un épisode un tout petit peu longuet (même si on y retrouve la maestria habituelle du show), mais dont le cliff de fin remonte largement le niveau.

Je pestais il y a quelques mois contre Mr. Robot à cause du manque d'audace du show concernant les questions morales que pose le terrorisme et l'action politique violente (débat verrouillé par la situation actuelle IRL). The Handmaid's Tale n'a pas l'air de s'en inquiéter le moins du monde et les gentils font péter une bombe dans un meeting de dirigeants étasuniens, causant probablement un nombre importants de morts chez la classe politique dominante. Ok ils sont diabolisés tout l'épisode (surtout Waterford), mais c'est assez exceptionnel dans le paysage audiovisuel américain pour être souligné.

Un de mes épisodes préférés de la série, avec le final de la saison 1 et l'épisode 6 qui était lui aussi centré sur Serena.

Il s'agit probablement de mon personnage préféré. J'étais absolument heureux de voir le premier flashback sur son combat que je trouve passionnant. Je me plais à adorer et détester ce personnage en même temps. Quand elle s'occupe de la petite pousse dans son terreau, son désespoir de ne pas pouvoir avoir d'enfants par elle-même crie à travers ses yeux et ça m'a limite fait chialer. Et quand elle jette l'aiguille de tricot par terre, je n'avais qu'une envie : que June la ramasse et la lui plante dans le cou. C'est tellement contradictoire et tellement complexe.

L'épisode est d'une rythmique extraordinaire avec ce relâchement voire cette tendresse entre June et Serena dans un premier temps, qui explose totalement lors de la scène de la chambre du bébé. En 2 répliques et un échange de regards gorgés de larmes des deux côtés, on comprend tout ce que les deux femmes traversent et tout bascule. On comprend la détresse de Serena, qui pensait sincèrement créer du lien avec Offred et pour qui cette demande est la désillusion, tout en comprenant le lien qu'elle peut avoir avec Hannah, et la jalousie qui en écoule. C'est dantesque. Et le "Absolutely not." est déchirant.

Et c'est globalement comme ça à chaque scène. Le premier échange entre Offred et Fred dans la cuisine semble trop calme, presque incomplet. Le second vers la fin de l'épisode quand il lui amène la photo est à nouveau extraordinaire. Entre soulagement et vraies larmes de tristesse pour as fille, remerciements sincères pour le Commandant mais frayeur à l'idée de devoir être redevable au point de répondre à un "tu m'as manqué" qui n'était pas adressé à elle mais à son bébé, effroi quand elle réalise qu'elle s'apprête à se faire violer de nouveau, soulagement quand il quitte enfin la pièce... pffffou c'est juste dingue comment la série par sa réalisation et ses acteurs permet de transmettre autant d'émotions à partir de lignes aussi menues.

Je crois même que j'ai rarement vu une série pouvant aussi bien retranscrire un roman. Sans recourir à la voix-off de June (qui est complètement éteinte depuis sa "mort" spirituelle de l'épisode 4, un constat très intéressant), j'ai toujours l'impression que 90% des informations de la série ne sont jamais situés dans les dialogues. C'est hallucinant.

Et pourtant cela renforce comme jamais l'impact des dialogues de la série. Cette routine qui s'installe ("go on you have a lot to catch up" [...] "we've been sent fine weather") qui s'implante dans notre cerveau. C'est aussi par tous ces mécanismes systématiques dans tous les épisodes que la série rend pour ma part l'univers de Gilead très crédible. On sent le poids de la répétition, de la torture psychologique et du lavage de cerveau permanent de la série (je crois même que c'est ce qui m'a "manqué" avec la fuite de June du début de saison - un brin maso je sais).

La moindre variation des salutations habituelles fait tâche. Dès que quelqu'un dit "Blessed be the fruit", mon cerveau pense "May the Lord open", et me permet donc de repérer instantanément le fait qu'Offred met un peu trop de temps à répondre. Et puis à ce sujet, c'est dingue aussi comment "Blessed day" prend au moins une dizaine de sens différents selon l'état du personnage, selon si Offred le prononce ou Serena.

Vraiment, la série ne dit rien, et montre pourtant tout à travers les détails les plus subtils.

A côté de ça on a des personnages qui apparaissent dans l'épisode pour 2 lignes (Tante Lydia) et qui sont géniales. (bon, c'est peut-être juste car c'est Tante Lydia + Ann Down).

Et puis cette fin, je crois que les mots sont inutiles. La révolution en oeuvre et dans une scène esthétiquement incroyable. C'est absolument fantastique et cela bouleverse tout le cours de la série. Et quelle beauté en effet. Et quelle ironie pour le titre d'ailleurs (oui tout est bien).

Au milieu de tout cela on a l'intrigue B de Nick qui peut paraître hors-propos, tant tout le reste est lié de près ou de loin à la relation June/Serena ou à Serena seulement, mais en vérité tout est interconnecté. D'ailleurs, cette intrigue montre bien la cruauté du régime et de la place des épouses y compris pour les jeunes "recrues" comme Eden, et la perversité des commandants dans tout ceci. Tout est donc méticuleusement construit.

Je suis dithyrambique sur cet épisode, mais c'est car je crois bien que mine de rien il s'agit de mon épisode préféré de la série tout court. C'était fabuleux et à chaque minute j'étais rappelé de pourquoi j'adore cette série.

Et bien moi, dernière scène ou pas, je l'ai trouvé plutôt pas mal foutu, cet épisode.

Alors oui, on pourrait le qualifier de routinier par rapport à "la fugue" de June, mais finalement, il explore la psychologie des personnages de manière plutôt fine. On en apprend davantage sur Serena, sur son passé (le coup de feu reçu dans le bas ventre l'aurait-elle rendue stérile ?), et on a envie d'en comprendre davantage. Ses idées mises de côté, comment est-elle passée d'une porte parole à une maîtresse de maison ? A quel moment son destin lui a échappé ?

Sa relation avec June est très intéressante également, et pas si manichéenne que ça. Preuve en est de sa réaction lorsqu'elle lui demande si elle peut voir sa fille. Certes, Serena se ferme instantanément, mais retenant ses larmes.

Je suis beaucoup moins fan de Nick. C'est un personnage que je n'apprécie pas spécialement depuis le début. Mais il faut reconnaître qu'entre son épouse prête à le trahir et son échange rapide avant la scène finale, son futur a matière à être intéressant.

Les dernières secondes de l'épisode, enfin, nous sortent de la psychologie des personnages pour aller dans le dur, dans l'action. Reste à savoir qui sortira vivant de cette boucherie, quel impact cela aura sur le foyer des Waterford, et plus globalement sur le destin des Servantes.

Un peu plus d'éléments sur Gilead et la montée en puissance du mouvement. ça ne rend pas les choses plus crédibles pour autant et je n'arrive toujours pas à m'attacher à qui que ce soit.

J'aurai mis un petit 10 si la fin de l'épisode n'avait pas su raviver mon impatience vis à vis de la suite !