Critique : Le Bureau des légendes 1.01

Le 27 avril 2015 à 11:28  |  ~ 7 minutes de lecture
La nouvelle série de Canal + nous entraîne dans les secrets des services secrets français.
Par Koss

Critique : Le Bureau des légendes 1.01

~ 7 minutes de lecture
La nouvelle série de Canal + nous entraîne dans les secrets des services secrets français.
Par Koss

Ce papier fait office de critique des deux premiers épisodes de la série.

 

À chaque nouvelle série française, c'est la même histoire. Il y a tellement peu de séries de qualité dans l'Hexagone, que chaque nouveau show est étudié sous le prisme de « la crise de fiction française » . En gros, une nouveauté est mise sous pression pour savoir si oui ou non sa qualité « sauve la France ». Sauf que en réalité, c'est plus compliqué que ça. Effectivement depuis 2-3 ans, les choses bougent. Lentement, mais sûrement. Mine de rien, du temps c'est écoulé entre le moment où Fabrice Gobert, créateur des Revenants, admettait du bout des lèvres être le showrunner de la série et celui où Eric Rochant revendique explicitement ce poste pour Le Bureau des Légendes. Mais, on s'éloigne du sujet. Revenons à la DGSE.

 

 

Rendez-vous avec X

 

 

Le thème de la série est particulièrement intriguant. Il s'agit ici de s'intéresser au fonctionnement interne de la Direction Général de la Sécurité Extérieure (la DGSE donc), le service de renseignement extérieur de la France (qui s'oppose à la DGSI pour toutes les affaires « internes »). Si le sujet avait déjà été traité dans de très bon livres et hebdomadairement dans une excellente émission de radio, il ne l'a que rarement été sur un écran. Et c'est bien dommage, tant ce service surnommé « la piscine » (en raison de sa proximité géographique avec la piscine de Tourelles à Paris) est porteur de fantasmes et de légendes en tout genre.

 

 

Le Bureau des Légendes

 

 

La série prend comme point d'appui ce fameux Bureau des Légendes (un bureau fictif, mais inspiré d'un sous-service existant). Celui-ci forme et dirige à distance "les clandestins". En immersion dans des pays hostiles, ces agents ont pour mission de repérer les personnes susceptibles d'être recrutées comme sources de renseignements. Ils ont tous une « légende », c'est-à-dire une fausse identité fabriquée de toutes pièces par le BDL.

 

Le Transfuge

 

 

Le show débute alors que Guillaume Debailly (interprété par Matthieu Kassovitz) dit « Malotru » rentre en France après 6 ans d'immersion en Syrie. À Paris, il est chargé de former une nouvelle agent en partance pour l'Iran et d'enquêter sur la mystérieuse disparition d'un autre clandestin à Alger.

Autant le dire tout de suite, le premier épisode est raté. Il y a, pourtant, cette volonté intacte de recherche du réalisme à tout prix. Ce sont les vraies locaux de la DGSE qui sont filmés en extérieur (et pour la première fois de l'Histoire). Ce sont les vraies méthodes qui sont montrées à l'écran, avec des procédures s'approchant assez bien de la réalité. On est bien davantage sur une série proche de The Americans que de Homeland ou de MI-5. Sur cet aspect quasi-documentaire, en immersion dans un des endroits les plus secrets de l'administration française, le show est une vraie réussite.

Mais, c'est tout le reste qui pêche et qui fait automatiquement sortir le spectateur de l'écran. Les dialogues sont tartes (mention spéciale aux deux flics qui suivent Malotru) et sur-explicatifs, les situations forcées et surtout le spectateur a bien du mal à ressentir de l'émotion pour Debailly, personnage impassible par excellence. Bref, on sort de ce premier épisode un peu amer devant un tel gâchis.

 

Le Retournement

 

 

Sauf qu'il ne faut jamais juger les séries par leurs premiers épisodes. Ces derniers, chargés d'exposer la situation, essuient souvent les plâtres. Le second épisode sauve grandement la mise : on assiste, en fait, à un curieux tour de passe-passe que très rarement vu avec une série : ce second épisode fait en réalité office de pilot. La série nous introduit le personnage interprétée par Léa Drucker. Elle joue une psychiatre spécialisée en théorie comportementale, chargée d'évaluer psychologiquement les clandestins.

 

 

Le Bureau des Légendes

 

C'est typiquement la ficelle du « nouveau qui découvre un monde inconnu » qui est utilisée ici. Par le biais du Docteur Balmes, le fonctionnement interne du bureau nous est expliqué. Ce véritable épisode d'exposition re-cadre les choses et posent les enjeux. C'est tellement fait de façon fluide qu'on se demande pourquoi cet épisode n'a pas été utilisé comme pilot (c'était scénaristiquement très faisable). Si c'était pour faire original, c'est réussi, mais si c'était pour perdre le spectateur dès le premier épisode, ça l'est tout autant.

 

Secret-Défense

 

 

Tout le niveau de la série remonte comme par magie. Les dialogues prennent une vraie ampleur, portée par une contextualisation pré-établie. Les situations restent encore explicatives, sauf que cette fois, c'est pleinement justifié par le scénario. L'ensemble tend à dresser un thème global qui lisse le propos. Avec presque autant d'acuité que dans The Americans, la thématique du secret et de ce qu'il entraine, est travaillé au corps. Il s'agit pour de nombreux personnages d'endosser une nouvelle identité, de la perdre à tout prix ou de ne surtout pas la quitter.

À ce titre, le personnage passionnant de Léa Drucker apparaît comme essentiel. Par son évaluation clinique des clandestins, puis de l'ensemble des agents, le spectateur découvre petit à petit les failles et les faiblesses de chacun. Car pour mener à bien leur mission (et celle-ci s'annonce d'une extrême importance), chacun devra apprendre à faire confiance à l'autre, se reposer sur lui et faire corps au sein du Bureau. Et, c'est dans cette capacité à égrainer des personnalités au sein d'un collectif presque organique que la série prend véritablement son envol. Alors oui, vivement la suite.

 

Partant d'un bien mauvais pied, le Bureau des Légendes se rattrape avec l'aide d'un personnage féminin assez fort et d'une thématique qui s'annonce passionnante. Tout est là, il ne reste plus qu'à le travailler correctement. J'y crois, en tout cas.

 

 

J'ai aimé :

 

  • Jean Pierre Darroussin, impérial et toujours juste quel que soit son rôle.
  • Léa Drucker, dont la fausse ingénuité et la capacité d'adaptation relance la série vers d'autres sommets.
  • Le réalisme presque drôle de la série. L'armée et les services secrets ont, en effet et depuis toujours l'habitude de donner des noms à leurs missions et agents. Ici, à « Malotru », s'ajoute « Pépé  et Mémé », « Cyclope » et même « Moule à Gauffre ». Tout un programme.
  • Une série qui se refuse à faire du clif' clinquant à tout prix.
  • La garantie d'ors et déjà d'avoir une saison 2 qui est déjà en cours d'écriture (coucou les Revenants !)

 

Je n'ai pas aimé :

 

  • Les deux flics. Un exemple parmi d'autres : en pleine filature, un des deux demande à l'autre : « Et sinon, tu as vu l'Empire des Sens ? ». Pourquoi ? Pour quelle raison ? Je me le demande encore.
  • Quelques situations bien clichées. Comme celle du père ayant sacrifié sa famille pour son métier.
  • Un recours un peu trop systématique à des gros plans un peu moches.

 

 

Notes :

 

- Episode 1 : 11/20.

- Episode 2 : 13/20.

L'auteur

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