Mais que fait la France ? #2

Le 24 novembre 2010 à 22:59  |  ~ 9 minutes de lecture
Nous avions conclut le dossier de la semaine dernière sur l'introduction de plus belle la vie. C'est donc par cette vidéo que nous commencerons le deuxième épisode de cette chronique.
Par Scarch

Mais que fait la France ? #2

~ 9 minutes de lecture
Nous avions conclut le dossier de la semaine dernière sur l'introduction de plus belle la vie. C'est donc par cette vidéo que nous commencerons le deuxième épisode de cette chronique.
Par Scarch

La french touch.

La semaine dernière, nous avons comparé différentes introductions de séries et remarqué que si Lost optait pour une entrée en matière entièrement visuelle mais explicite, Dexter était présenté de manière verbale. Nous remarquons de fait que la série télévisée de notre époque se rapproche de ce que nous dit le manuel du scénario américain de Bloch John W. et Fadiman William à savoir : « Tout doit être visuel. Le dialogue est une prothèse; vous n'y aurez recours qu'en cas de besoin. »

Bien entendu, pour les besoins liés au format d'une série, ce manuel ne peut pas s'appliquer à la lettre à la fiction télévisuelle. Le cas de Dexter illustre bien cela car le partie pris de la série est de nous dévoiler le mystère du personnage dés le commencement pour jouer ensuite sur le secret que connait le téléspectateur. Le dialogue est donc capital pour les séries et la suite de Lost nous le rappellera. En attendant, pour nous remettre dans le contexte, je vous remet l'extrait qui avait conclut l'article de la semaine dernière :

 

Lorsque nous observons cet extrait de Plus belle la vie, nous nous apercevons que le code de la série télévisée est respecté. Nous ne sommes pas là pour parler de la réalisation, du thème, de la qualité des dialogues ou de tout ce qui pourrait être critiquable. Nous sommes ici pour constater la construction de l'intrigue dans l'esprit du téléspectateur.

Que voyons nous dans cet extrait ? Une famille qui rentre de vacances. Tous les protagonistes semblent entrer dans notre propre normalité. Comme dans la vie de tous les jours, les personnages parlent de choses courantes et vivent des choses qui pourraient bien faire partie de notre quotidien. Nous pouvons aussi remarquer l'accent marseillais, l'architecture de la ville, l'environnement, la tenue vestimentaire. Tout est normalisé pour permettre au téléspectateur de trouver ses repères instantanément et se concentrer sur la tenue de l'intrigue. Comme au théâtre, l'important ce n'est pas l'image, mais ce qui est raconté. En ceci, Plus belle la vie remplit parfaitement bien son rôle et mérite ses 5 millions de téléspectateurs. Dès lors, nous pouvons nous interroger sur ce qui manque à la série télévisée Française et pourquoi le gouffre entre nos programmes et ceux d'outre manche et outre atlantique semble aussi vaste. Avant de tenter de répondre à cette question, nous pouvons déjà jeter un œil au PAF. Si je vous demande de me citer quelques titres de séries Française dépaysantes, qui sortent du cadre de notre normalité dans ses codes, sans même être surnaturelle, que pouvez-vous me citer ? Il y a bien Kaamelott ou héro corp... Nous pouvons également citer les productions de canal + qui misent sur l'histoire le sexe et le crime pour nous faire sortir des sentiers battus. En poussant le vice, nous pourrions également parler de Joséphine ange gardien qui possède des pouvoirs surnaturels tout en restant humaine. En gardant ces séries à l'esprit, nous pouvons nous poser la question : ou est passé l'audace dans la série télévisée française ?

Je vous propose de garder cette question à l'esprit car nous y reviendrons plus tard. Nous allons pour le moment nous concentrer sur les autres codes de construction des séries américaines à succès pour voir si nous n'avons rien oublié.

 

Plus belle la vie : Des personnages ordinaires, dans des environnements ordinaires.

Repeat ?

Avant tout, regardons la construction de l'intrigue et l'implication du spectateur dans un long métrage. Lorsque le héros nous est présenté, nous savons que nous n'allons pas le suivre sur une longue période et que ses faits et gestes sont au service de l'intrigue. Si le scénario prévoit de nous faire partager son quotidien, ce n'est qu'a la seule fin de guider l'attachement du spectateur au héros. Au cinéma, donc, le personnage principal n'a pas sans arrêt besoin de rappeler au public ce qu'il fait, qui il est et si son histoire d'amour naissante avec l'héroïne va mener a un mariage heureux ou a un divorce vraisemblable. Le scénario n'a pas non plus à créer de nombreux arc narratifs qui alourdiraient l'intrigue principale. Dans une salle obscure, le spectateur prend un billet qui l'emmène dans un film pendant environ une heure et demi, temps pendant lequel tout doit être présent à son esprit pour l'impliquer le plus possible. Il doit connaître le héros pour que les actions de celui-ci influent sur ses émotions. Il doit connaître les tenants de l'intrigue pour en comprendre les aboutissants. Il doit disposer de repères immédiats pour ne pas perdre le fil et sortir ainsi du monde qu'a ainsi créé le film à son intention. En somme, l'objectif du film n'est pas simplement d'être vu, mais d'être vécu.

Dans une série télévisée, le format impose une implication différente du téléspectateur. Le pilote d'une série agit comme un film, il doit capter l'attention et intriguer le téléspectateur. En revanche, contrairement au long métrage, le premier épisode se doit de marquer des repères sur lesquels les suivants se rattacheront. C'est le rôle, entre autre, des gimmicks.

 

Gimmick gimmick one more tiiime...

Qu'est-ce qu'un gimmick dans une série télévisée ? C'est le code Harry pour Dexter et son procédé d'assassinat. C'est aussi le handicape de John Locke, le snobisme de Bree Hodges (ou Van de kamp), le pouvoir des heroes ou encore le « i am not a number » du numéro 6. Le gimmick, c'est ce qui rappelle au téléspectateur inconsciemment qu'il connait ce personnage et que tel événement tient sa place dans telle intrigue. Le pilote posant les bases, il impose à l'esprit du téléspectateur les gimmicks qui permettront de développer d'autres arcs narratifs à partir de l'intrigue principale du premier épisode dans le cas d'une série télévisée comme Dr House, ou dans le cas d'un feuilleton, de placer des repères dans les épisodes suivants pour que le public se sente guidé.

Ainsi, le gimmick n'est pas propre à la série télévisée car le cinéma en use également, mais il lui est indissociable. Cela nous amène à l'observation suivante : le propre de la série télévisée, c'est la redondance et la répétition. Dans toute bonne série, chaque épisode répète inlassablement au moins un repère par le biais du dialogue ou de l'image. C'est le cas de plus belle la vie, de fais pas ci fais pas ça, d'un gars une fille ou encore de Joséphine ange gardien. En cela, les séries Française n'ont rien à envier aux séries américaines.

 

Argent ?

Sans rentrer dans le détail des budgets d'épisodes sachez que la dernière saison de plus belle la vie à couté 23 millions d'euros. C'est le plus gros budget annuel de la fiction française. A titre de comparaison, deux épisodes de la première saison de 24 coutaient 2,2millions d'euros. Si on fait le calcul, la première saison de 24 avec tous les artifices que l'on connait à la série et la présence d'une star du grand écran comme Kieffer Sutherland, cela revient à un budget annuel d'environ 26 millions de dollars. Certains épisodes de House, une des séries télévisées les plus regardé dans le monde, ont été tourné avec un simple appareil photo en huis clos dans l'hôpital.

On peut donc se poser la question : le succès dépend-il du budget alloué à l'épisode ?

Si c'était le cas, il suffirait de mettre 20 millions de dollars dans chaque épisodes d'une série pour en récolter 200. Nous savons tous que cela ne marche pas comme ça, et que bien d'autres facteurs entrent en ligne de compte. Mais pour nous en tenir exclusivement au budget, sachez que si celui des épisodes augmente au fil des saisons, c'est en grande partie parce que les acteurs ont plus de notoriété et donc exigent un plus gros salaire. Pour illustrer cela prenons la sitcom Friends. Lors des saison 5 et 6, le salaire des acteurs coutait 250 000 $ par épisodes. Ce chiffre augmente à 750 000$ pour les saisons 7 et 8, puis un million pour la saison 9 et enfin 1 250 000 $ pour la dernière saison. A chaque épisode de la dernière saison, 1,25 millions de dollars était dépensé dans le salaire des acteurs. Sans entrer dans des questions d'éthique par rapport à ces chiffres, ce salaire est mérité et justifie l'argent alloué à une série. Même si la série commence avec un petit budget, si le succès est au rendez-vous, celle-ci réinjecte une partie de ses bénéfices dans son capital d'investissement comme toute bonne entreprise.

 

En cinq ans, les acteurs de Friends sont passés de 250 000 $ à se partager, à plus de 200 000$ chacun par épisodes.

En conclusion, ce n'est pas l'argent qui fait le succès d'une série. Mais en ce cas, c'est quoi alors ? Nous continuerons d'apporter des éléments de réponses la semaine prochaine. En attendant, vous pouvez vous exprimer librement sur le sujet dans les commentaires.

L'auteur

Commentaires

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OSS
Il me semble qu'au cours de la dernière saison de Friends, chacun des acteurs touchait entre 1M et 1,2M de $ par épisode.

Avatar Scarch
Scarch
J'ai pas mis ma source: http://www.leblogtvnews.com/article-5616518-6.html Comme il y a marqué friends cast, je pense qu'il s'agit du casting. Sinon, chaque épisode de Friends aurait couté 7,5 millions de $ hors guest et équipe de réalisation.

Avatar OSS
OSS
Je crois que c'est par membre du casting principal. 1 million et quelques chacun. Du moins c'est ce que j'ai toujours entendu. Friends avait du budget de toute façon... Avec une bonne vingtaine de millions de téléspectateurs en moyenne.

Avatar Scarch
Scarch
Tu as raison, après vérification, les salaires que j'ai mentionné pour friends ne sont pas pour tout le casting, mais par acteurs...

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OSS
Ah il me semblait bien. (on vient de bouffer cinq com pour ces conneries...)

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elpiolito
Oui mais ça a servi a bien montré que les acteurs de Friends s'en sont mis pleins les fouilles. Je suis assez d'accord avec les différentes questions et points soulevés dans cette article. Pas de réelle réponse mais un constat important : on peut a les moyens de faire comme les ricains mais voilà, ça prend pas. Un point déjà qui, je pense, peut pas mal influencer c'est que c'est Français, tout simplement. Et les séries comme PBLV rappelle trop que c'est la vie de tous les jours, ce que l'on vit tous les jours. Du coup, c'est pour ça que beaucoup de gens la regarde parce que c'est quelque chose qu'ils comprennent et maitrisent. Et c'est aussi pour ça que moi je n'aime pas du tout parce que je n'aime pas spécialement arrivé chez moi et regardé une série qui me rappelle la journée que je viens de passer. Après, il n'y a pas que ça. Personnellement, j'ai toujours bien aimé Un Gars/Une Fille et pourtant ça parle un peu de la vie de tous les jours. Mais peut-être que justement, c'est le format ici, comme celui de Kaamelott qui fais que ça passe plutôt bien. C'est court, peu de personnages et surtout assez drôle la plupart du temps. On a des Gimmicks mais les arcs scénaristiques sont bien moins étoffés : c'est clairement de la détente pure et je pense que si c'était plus long, ça serait chiant. D'ailleurs, je ne pense pas qu'il y a que le format. Une série comme Sherlock (série anglaise) qui est une série policière dans le monde moderne m'a plu et est vraiment très bien. Pourtant, Julie Lescaut c'est policier et actuel et le format des épisodes est le même (1h30). Pourtant, Julie Lescaut, ça passe moins bien. Peut-être parce qu'il manque un peu de cet exotisme, ce décalage qui fait qu'un personnage est attachant, qu'on s'identifie à lui mais qui reste en même temps un mystère. C'est qu'une idée en l'air, mais en France, je trouve que l'on s'identifie trop au personnage, c'est trop réaliste et trop cliché ce qui fait que l'on a l'impression que ce n'est pas vrai, et au final, pas de magie... C'est juste quelques idées comme ça pour rebondir sur ce que tu disais Scarch, mais l'article est intéressant et je pense qu'au final du devrais réussir à aboutir à une analyse assez intéressante...

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Scarch
Tu mets le doigt sur ce sur quoi je veux aboutir. Je pars simplement sur un raisonnement inverse pour être sur de ne rien avoir oublié. Et au delà de ce que tu dit, ce qui manque à la France, c'est de l'imagination. On y reviendra la semaine prochaine, mais en attendant, on peut s'intéresser à ce que faisaient Gustave Flaubert, Jean de la fontaine ou d'autres auteurs classiques...

Avatar Taoby
Taoby
Pourtant, Julie Lescaut c'est policier et actuel et le format des épisodes est le même (1h30). Pourtant, Julie Lescaut, ça passe moins bien. Peut-être parce qu'il manque un peu de cet exotisme, ce décalage qui fait qu'un personnage est attachant, qu'on s'identifie à lui mais qui reste en même temps un mystère. Non mais Elpioto le vrai problème de Julie lescaut c'est pas la manque d'exotisme, c'est juste que , c'est aussi mal dialogué qu'un épisode de Ken, c'est d'une platitude incroyable dans la mise en scène, tu à l'impression qu'au niveaux des intrigues c'est d'une autre époque(celle de nos grand parents et de tout manière c'est la cible) c'est mal joué, les cascades sont ridicule (mais ou est passé le budget ?) et ça véhicule toujours les même choses. Bref le vrai probleme il est la, ce sont des séries de vieux, pour le vieux qui souhaite très peu évoluer mais qui sont encrée dans la culture télévisuel française, du coup c'est super. En fait je pense que c'est un vrai problème culturel aussi mais on en reparlera plus tard.

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