Critique : Dirk Gently 1.01

Le 10 mars 2012 à 06:30  |  ~ 9 minutes de lecture
Le créateur de Misfits s'attaque à l'oeuvre de Douglas Adams, mais la mayonnaise peine à prendre, à cause d'un mauvais mélange entre humour, investigation et huile d'olive.
Par sephja

Critique : Dirk Gently 1.01

~ 9 minutes de lecture
Le créateur de Misfits s'attaque à l'oeuvre de Douglas Adams, mais la mayonnaise peine à prendre, à cause d'un mauvais mélange entre humour, investigation et huile d'olive.
Par sephja

Pourquoi ne pas déclarer la guerre à la Suisse ? 

Détective holistique aux méthodes singulières, Dirk Gently est accompagné de son assistant Mc Duff et enquête sur le décès d'un de ses clients, Mr Edwards, un informaticien convaincu que le pentagone en avait après lui. Enquêtant en marge de la police et de la logique tout court, le détective applique ses méthodes uniques basées sur le chaos, cherchant pour quelles raisons sa victime semblait chercher un moyen pour envahir la Suisse. 

 

Résumé de la critique 

Un épisode moyen que l'on peut détailler ainsi : 

  •  où il sera fait allusion aux personnages, à la soupe de potiron, à Douglas Adams 
  •  où sera évoqué un mauvais démarrage et un pentagone trop régulier pour être honnête 
  •  où il ne sera pas question de la présidentielle et de la culture du chanvre en plein air 
  •  où le destin d'une plante en pot sera évoqué comme une question philosophique

 

 

L'espoir déçu de Mégrathmoilà

Pour parler d'une série qui raconte la vie d'un détective utilisant le chaos comme un moyen d'investigation, je devais me plier aux concepts même de la série en optant pour une description chaotique elle aussi. Si l'épisode est décevant, c'est avant tout à cause d'une intrigue maladroite, inférieur au téléfilm de l'année dernière. Je croyais le projet enterré et voilà qu'au hasard d'un clic, entre un site de femmes aux seins nus et une superbe peinture représentant la montagne Sainte-Victoire, un mot laissé à mon regard pour m'annoncer l'arrivée imminente de ces nouveaux épisodes sur BBC 4. 

Plein d'émotions et peut-être un peu excité par la demoiselle susnommée (ou la montagne, je ne sais pas), je me jetais fébrile sur cet éventuel Saint-Graal pour me retrouver face à une coupe en terre, bon marché. Au lieu de l'aboutissement d'une quête de plusieurs mois de la série parfaite, allant de l'Australie à la Suède, je me suis retrouvé face à un show qui ne fonctionne pas, malgré la présence du créateur de Misfits au scénario et l'oeuvre de Douglas Adams comme référence. Pour résumer, si Dirk Gently était un légume, ce serait un cucurbita pepo, c'est-à-dire une grosse courge appétissante vue de l'extérieur, sur laquelle on fantasme des mois à la regarder pousser avant de redécouvrir le goût fade et amer du potiron.

Rien ne va dans le premier acte alors le critique s'emporte car l'épisode manque cruellement de cette légèreté typique de l'oeuvre d'Adams, donnant à plusieurs reprises l'impression d'un héros prétentieux et agaçant, puis après on se dit "Hé, mais où sont les esprits dans cette histoire ?" et là, c'est la catastrophe : on insulte l'écran, Howard Overman parce que cela ne ressemble pas au livre, on réveille son épouse qui hurle elle aussi à cause qu'il était deux heures du matin bon dieu et on se lance à la figure des vieilles rancoeurs jusqu'à ce qu'une porte claque et on essaie de se calmer en s'apercevant qu'on est en pyjama dehors et qu'il fait froid.

Tremblant devant l'espoir d'un bonheur déchu, Dirk Gently est comme une soupe au potiron sans sel, ni crème, décevante sans être infâme, mais qui aurait pu être tellement meilleur avec d'autres ingrédients. L'histoire n'est pas mauvaise en soi, certains gags sont amusants, mais la dynamique entre Dirk et son assistant peine à prendre, donnant un épisode qui met une bonne vingtaine de minutes à démarrer vraiment. 

 

Le pentagone et les petits cochons roses

Reposant sur le principe du chaos, les aventures de Dirk Gently sont une plongée dans une suite d'éléments sans connexion apparente que l'intrigue doit se charger d'emboîter de la manière la plus absurde possible. Ici, le point de départ parait intéressant, avec une carte de Saint-Valentin en point de départ comique et un secret faisant de son héros la cible du Pentagone. La tâche difficile des scénaristes consiste alors à lier tous ces éléments, chose que le téléfilm de l'année dernière avait bien réussi par le biais d'une amusante histoire de voyage dans le temps. 

Seulement, ici, c'est un ratage indéniable avec l'absence néfaste d'éléments de science-fiction et deux intrigues qui ne s'emboîtent pas vraiment, l'histoire des cartes de Saint-Valentin ne servant finalement à rien. La séquence d'ouverture est sur ce point franchement ratée et de nombreux éléments de comédie sont décevants, comme le running gag autour de la secrétaire qui ne prend jamais ou la dispute avec le livreur de pizzas mal mise en valeur. Au lieu d'utiliser le chaos pour transformer l'enquête en un jeu, les scénaristes s'en servent surtout pour faire passer la pilule de rebondissements trop gros pour être crédible et trop sage pour renouer avec l'humour génial de Douglas Adams. 

Très fauché au niveau de l'image, peu convaincant du point de vue de l'écriture , cet épisode commet surtout l'erreur de vouloir lier dès le début le DOD à toute cette histoire. Une révélation qui ne sera jamais employée par la suite et confirme combien l'ambition du show a été revu à la baisse en cours d'écriture, donnant un résultat qui fonctionne un peu dans le dernier acte, mais s'avère plus que décevant. Loin d'être digne de Douglas Adams, le créateur de Misfits se heurte violemment à son incapacité à retrouver cet état d'esprit particulier à Dirk Gently, produisant un cop show banal et esthétiquement imparfait. 

 

 

Une mise en scène désastreuse 

La principale qualité à la base de Dirk Gently est d'être l'anti-Sherlock Holmes, ne maîtrisant aucun des aspects de son enquête et utilisant des moyens d'investigation absurdes et saugrenus. Que la série soit fauchée par rapport à sa grande-soeur de BBC One n'est donc pas un problème, s'inscrivant parfaitement dans l'esprit humble et parodique des livres. Malheureusement, le réalisateur, loin de miser sur la spontanéité des comédiens et à construire une identité à part, cherche à reprendre des tics visuels de Paul Mc Guigan et se plante lamentablement lors d'un premier acte désastreux. 

Pour fonctionner, la série aurait dû être rapide, imprévisible, donc écrite avec un mélange de précision et une touche de mauvaise foi, proposant des enchaînements sans queue ni tête menant à la résolution de l'affaire. Ici, l'intrigue est clairement trop lente et la mise en scène poussive ne permet pas vraiment de mettre en valeur la progression de l'enquête. Pourtant, l'ensemble possède un certain charme dans le dernier acte, mais la qualité médiocre des décors et le manque d'efficacité de l'acte d'exposition entraine une confusion entre le chaos qui possède toujours une signification et le désordre qui n'est que fainéantise  des auteurs.

L'ensemble manque clairement de soin et l'on n'entre dans l'intrigue que par intermittences, donnant un résultat décevant, sans commune mesure avec l'oeuvre dont les auteurs s'inspirent vaguement. Loin de l'insolence de Misfits, Howard Overman offre un divertissement poussif et décevant, réservant quelques rares bonnes scènes dans le second acte, sans pour autant parvenir à s'approcher du travail de Douglas Adams.

 

La mélancolie du pot de fleurs

Si Dirk Gently n'est pas à la hauteur des attentes, n'utilisant pas le format de 42 minutes qui s'imposait, l'épisode possède pourtant un détail qui évoque Douglas Adams. Il s'agit évidemment du pot de fleurs utilisé par le héros pour casser la vitre, posant la question de la violence contre les plantes en pot dans l'univers de l'auteur de H2G2. Doit-on y voir un message du destin comme quoi l'oeuvre de Adams est vouée à la libération de la nature de sa prison en terre cuite ou est-ce juste l'expression de la fatalité naturelle de la plante en pot ? 

En conclusion, un épisode décevant qui gâche son potentiel de départ et offre un épisode poussif au démarrage calamiteux avant de trouver un peu son rythme dans le dernier acte. Peu inspirée, trop prétentieuse, la série n'a pas grand-chose à voir avec "Un Cheval dans la Salle de Bains", ne parvenant pas à reprendre à son compte le style foisonnant d'Adams. Dommage tant l'association du créateur de Misfits à cette création laissait quelques espoirs, vite douchés par un démarrage particulièrement raté. 

 

J'aime : 

  •  quelques scènes amusantes (dont le gag du fauteuil)
  •  déclarer la guerre à la Suisse

 

Je n'aime pas : 

  •  les personnages mal construits 
  •  l'intrigue trop sage 
  •  le récit pas assez dynamique 
  •  l'histoire des horoscopes qui ne sert à rien 
  •  la non-utilisation du format de 42 minutes qui s'imposait 

 

Note : 08 / 20 

Certes, la note serait plus haute si ce n'était pas une adaptation de l'oeuvre de Douglas Adams tant l'ensemble reste regardable, malgré un début poussif et maladroit. Malheureusement, le choix d'Overman de se placer dans les pas de l'auteur d'H2G2 fait qu'on ne peut que regretter le manque de fantaisie et d'originalité de cet épisode.

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