Masculin / Féminin
Mia est une meurtrière professionnelle, sa vie se résume à accomplir les contrats avec efficacité et à soigner une apparence physique trompeuse. En effet, Mia est un transsexuel, suivant un traitement hormonal pour empêcher ses caractéristiques masculines de s'exprimer. Seulement, son existence va basculer lorsque Wendy, une ancienne petite-amie morte du cancer, lui révèle par courrier l'existence de son fils Ryan.
Résumé de la critique
Un épisode correct que l'on peut détailler ainsi :
- une série à deux visages qui jouent avec les apparences
- Chloe Sevigny impeccable dans un rôle difficile
- quelques facilités regrettables dans le déroulement de l'intrigue
- un show inégal et étrange
Assumer le mélange des genres
Ce que j'aime avec le début de la période estivale, c'est la possibilité de souffler un peu et de se reconcentrer sur ce que je préfère dans les séries : les programmes décalés, étranges, parfois gênants, mais toujours attachants. Avec Hit and Miss, la télévision anglaise nous offre l'exemple type de ce type divertissement singulier, maladroit, assez inconcevable sur le papier, mais qui parvient à tenir la route par la force de conviction d'une comédienne principale surprenante. Pour résumer l'histoire, Mia est une tueuse à gage transsexuelle qui se découvre une famille au fond de la campagne anglaise, mais va peiner à se faire accepter en son sein.
Si le pitch fait loucher dans un premier temps du côté du Luc Besson, seules les cinq premières minutes laissent le trouble, offrant quelques clins d'oeil du côté de Leon, mais avec une gestion du rythme et de l'espace totalement différente. En effet, les deux séquences où Chloe Sevigny joue les meurtrières sont brèves, froides et loin de la surenchère d'effets dramatiques du réalisateur français de Nikita. Le temps ici s'étire dans un univers immobile où chacun s'observe, laissant l'étrange impression d'un scénario qui ne mène nulle part, s'efforçant de narrer la rencontre difficile entre deux solitudes.
Plus que ses activités de tueur à gages, la série s'intéresse avant tout à son rapport avec la famille de Wendy, composée des quatre enfants issus des nombreuses liaisons de la jeune femme décédée d'un cancer. Vivant dans une ferme au milieu de nulle part, ses enfants forment un groupe solidaire et fermé, une famille qui survit au mieux par des moyens plus ou moins douteux. C'est le décor choisi par les scénaristes pour raconter cette histoire autour de la rencontre entre la solitude d'une femme qui cherche à s'affirmer et une famille qui cherche à garder son unité en l'absence d'un adulte responsable.
Série à l'identité trouble, Hitt and Miss s'accroche à son personnage principal qui reçoit la tache difficile de faire tenir en place cet univers étrange qui pose des problèmes de crédibilité. Heureusement, le show profite dans le rôle principale d'une Chloe Sevigny courageuse et habitée par son personnage, imposant par sa force de conviction cette série singulière et assez déroutante.
Une interprétation surprenante
Dès la première scène, l'idée parait bancale, prête à sourire même tant il semble impossible de faire exister un personnage à la fois sensible et minéral. Il fallait pour cela une actrice dotée d'une volonté telle que rien ne permettrait de remettre en cause la crédibilité de son interprétation, capable d'assimiler les deux aspects de l'identité de ce rôle. Remarquable tout du long, Chloe Sevigny s'impose dès les premières scènes, prenant plaisir à relever le challenge d'un rôle aussi exigeant que complexe, osant explorer au maximum l'identité trouble de Mia.
Evidemment, la capacité du spectateur à croire à cette histoire singulière est au coeur de la difficulté d'appréhension de cet univers tant le personnage ne laisse pas beaucoup paraître ses sentiments. De plus, le scénario n'offre aucun personnage positif sur lequel se raccrocher, si bien que Mia ne va pas réussir à s'intégrer avant d'accepter une place de père réduit à son plus simple stéréotype, à savoir apporter de l'argent au foyer. Bien rythmé, le scénario prend le temps de nous introduire à cet univers singulier, les scènes contemplatives s'appuyant sur une photographie remarquable et une réalisation soignée.
Réussite esthétique, Hit and Miss l'est sans conteste, même si cela ne suffit pas à donner une âme à une histoire à première vue particulièrement invendable. Si le démarrage est difficile, la qualité du jeu de son héroïne et le rythme maîtrisé de l'intrigue suffit à donner du sens aux tentatives de Ryan et Mia pour s'apprivoiser, trouvant lentement des avantages à vivre ensemble. Il en résulte une série attachante sans être révolutionnaire, dotée d'un bon capital sympathie, histoire de la rencontre de deux solitudes.
Un ensemble inégal et un peu inquiétant
Malheureusement pour cet épisode assez plaisant, le dernier acte va se révéler plus que décevant, cherchant à souligner l'intégration de Mia dans sa nouvelle famille par le biais d'une scène spectaculaire. Trop prévisible, cette séquence montre les limites de ce show particulier, jouant sur une attirance pour la violence des auteurs qui dessert totalement le propos de l'intrigue principale. Trop manichéenne dans sa conclusion, Hit and Miss perd alors sa dimension réaliste et s'écrase dans le cliché du père protecteur qui défend sa famille et montre l'exemple à ses enfants par le biais de la violence.
Trop évidente, cette conclusion laisse apparaître le manque de conviction des auteurs qui n'osent pas aller au bout de son ambition, incapable de convaincre de la justesse de faire de Mia une tueuse. Sur ce point, le show inquiète clairement, la mythologie liée à son emploi se limitant à une succession de clichés et quelques phrases chocs assez creuses. La rencontre entre le transsexuel et son fils est clairement mis en avant pour masquer les faiblesses du récit, privilégiant les scènes intimistes à des scènes d'action efficaces, mais sans le moindre enjeu.
Manquant de cohérence, ce pilot pousse le spectateur à se demander assez vite ce que cette compétence de meurtrière apporte réellement à l'intrigue principale. Surtout que la seule scène qui met en valeur ses talents est sûrement la moins réussie de l'épisode, gâchant par son absence de finesse un thème de départ sur le rôle du père particulièrement intéressant. Manquant d'une mythologie digne de ce nom, Hit and Miss gâche en partie son potentiel, ne parvenant pas à connecter correctement les deux dimensions de son univers.
Un sentiment étrange entre sympathie et agacement
Difficile de tirer un sentiment général de cette nouveauté qui doit beaucoup à une excellente Chloe Sevigny qui tient solidement le pilot sur ses épaules. La question de la virilité et de l'identité paternelle y est bien exploitée dans un premier temps avant que l'épisode ne s'enlise dans un final peu inspiré et prévisible. Le potentiel est présent, mais la mythologie famélique et le développement médiocre de la partie concernant le travail de Mia laisse craindre une suite assez vaine qui risque de peiner à convaincre.
En conclusion, un épisode inégal qui parvient à poser seulement la moitié de l'univers de Hit and Miss concernant la rencontre entre l'héroïne et son fils Ryan. Assez touchante, cette section du scénario pose de manière intéressante la question de la place du père au sein de la famille, s'appuyant sur la performance remarquable d'une actrice principale très impliquée. Hélas, toute la partie concernant son métier de tueuse à gages est beaucoup moins convaincante, laissant paraître le manque de potentiel d'un pitch de départ certes original, mais aussi hautement improbable.
J'aime :
- Chloe Sevigny impeccable
- le rythme très lent qui colle parfaitement au caractère de Mia
- la réalisation soignée
Je n'aime pas :
- la section centrée sur son métier de tueuse à gages
- trop prévisible dans le final
- la mythologie insuffisamment développée
Note : 12 / 20
Sans être décevant, ce pilot se révèle assez inégal, avec une partie centrée sur les retrouvailles entre un fils et son père transsexuel particulièrement réussies. Seulement, l'idée de faire de cette héroïne une tueuse à gages s'avère être plus que discutable, la faute à une mythologie qui ne parvient pas vraiment à convaincre. L'ensemble reste agréable grâce en particulier à une Chloe Sevigny surprenante qui tient parfaitement son personnage.