J'avoue que la première chose qui m'a attiré vers cette série, c'est la combinaison sexe + Lizzy Caplan la curiosité intellectuelle. Un bon casting, une époque que j'apprécie, et un sujet finalement inédit. Comme d'habitude, difficile de dire après ce pilote si la série sera un bon cru de cette année ou manquera de peps pour tenir toute une saison. En tout cas, je ne m'attendais pas à une telle finesse dans le traitement d'un tel sujet, d'autant plus venant de Showtime...
Un sujet traité de manière très... convaincante !
Autant le dire tout de suite, oui, il y a des scènes de sexe dans cet épisode. Mais contrairement à ce qu'on pourrait imaginer, elles ne sont absolument pas raccoleuses. Bon, il y a de la nudité, mais elle n'est pas gratuite dans le sens où à l'image des deux scientifiques responsables de l'étude, le spectateur constate les différents éléments de leur démonstration. Cette association est d'ailleurs très bien illustrée par la mise en scène lorsque nous apercevons les reflets de William Masters (Michael Sheen) et Virginia Johnson (Lizzy Caplan) à travers la vitre, derrière laquelle les deux sujets de l'expérience font l'amour. Quant aux autres scènes, elle contournent astucieusement les poncifs habituels où le rapport homme/femme est presque à chaque fois le même.
Car peut-être encore plus que Mad Men, dont Masters of Sex se détache des les premières images, la série créée par Michelle Ashford parle avant tout des femmes. Ou plutôt du changement de perception des rapports hommes/femmes qui a lentement opéré au cours des années soixante. En cela, Masters of Sex semble tout de même un peu plus avancé que la série d'AMC où les femmes sont considérées de manière largement inférieure.
Cela fait d'ailleurs partie des peu nombreux reproches que je pourrai faire à ce pilote : on n'a pas vraiment l'impression d'être dans les années soixante. Mis à part le tabou sexuel, qui n'a finalement pas tellement évolué jusqu'à aujourd'hui, la société dépeinte dans ce pilote pourrait quasiment être confondue avec celle de ce début de XXI ème siècle. Certes, cela permet de faire de la série un écho pas si lointain de la société actuelle, mais l'immersion est du coup assez difficile et la série perd le charme des sixties qu'elle aurait pu avoir.
Au lieu de ça, et au final on peut se demander si ce n'est pas plus mal, les relations au sexe qu'ont les différents personnages sont traitées avec une intelligence et une maturité assez rare, même si la série possède aussi un petit côté sentimental.
Une production réussie
Malgré tout, même du côté sentimental, le lien bien présent avec le propos général de la série fait qu'on s'intéresse finalement à tous ses aspects, si tant est bien sûr que le sujet ne nous indiffère pas. Ainsi, les problèmes de couple entre William Masters et sa femme ont cette ironie que ce dernier n'arrive pas à résoudre l'impasse dont il étudie les composants en parallèle. La vie sexuelle et sentimentale de Virginia Johnson, quant à elle, paraît incompréhensible pour les hommes de l'époque.
Enfin, pour un homme en tout cas, car les autres hommes de la série paraissent assez étrangement parfaitement compréhensibles envers la gente féminine et leurs revendications. Cet homme, interprété par Nicholas D'Agosto, est pour le coup assez grossièrement caractérisé, comme si les scénaristes souhaitaient lui mettre sur le dos la totalité de la percpetion masculine sexiste type de l'époque. D'autres personnages de la sorte finiront peut-être par faire leur apparition, mais pour l'instant c'est le seul. Il est néanmoins assez amusant de noter que la dynamique entre ce dernier et Virginia est l'inverse de ce que l'on peut voir dans les intrigues sentimentales de certaines séries.
Mais l'atout principal de la série, et on le remarque assez vite, c'est le duo entre Virginia et William. Les deux acteurs sont d'ailleurs impeccables dans leur rôle, notamment Lizzy Caplan (ah...) lors de la dispute violente entre cette dernière et Ira (Nicholas D'Agosto), probablement la seule scène réellement forte de cet épisode. La dynamique de leur duo, au premier abord, paraît assez simple et se remarque juste dans leur nom, Masters, le « maître », et Virginia, la « vierge », autrement dit la disciple. Mais leur relation est bien évidemment plus complexe, notamment dans leur rapport au sexe qui prend de nombreuses dimensions et en fait la richesse de cette série. Sexe comme plaisir, bien sûr, mais aussi comme compréhension de l'autre, comme travail, et comme mystère scientifique.
Dans cette série, tout tourne donc autour du sexe. Même la mise en scène, qui garde un côté classieux de manière prévisible si j'ose dire, mais qui reprend également dans ses cadrages le rapport plaisir/travail du sexe dans la série. C'est le cas par exemple lors de l'expérience avec les deux volontaires comme je l'ai déjà souligné au-dessus, où la vitre est utilisée comme moyen de contemplation mais aussi d'appropriation, ou encore lorsque William regarde un autre de ses sujets par le trou de la serrure, invoquant ironiquement un certain voyeurisme. Car oui, en plus de cela, la série ne manque franchement pas d'humour, en témoigne l'apparition du premier gode spécialement conçu de l'histoire.
Au final, ce pilote de Masters of Sex ne manque pas d'ambition ni d'intérêt, offrant un trairement intelligent à un sujet inédit mais osé. Il faudra malgré tout que les enjeux de la série se précisent par la suite, car si le ton général est planté, la direction que prendra la série reste encore un peu floue. Mais, il est loin d'être trop tard pour cela, et je ne manquerai pas d'être présent pour la suite.
J'ai aimé :
- La sobriété et l'intelligence du traitement des scènes de sexe
- Un propos bien traité, qui se démarque des autres séries se déroulant dans les années 60
- Des personnages intéressants et non caricaturaux
Je n'ai pas aimé :
- Des décors assez pauvres et des comportements qui empêchent un ancrage concret dans l'époque
Ma note : 13/20.