Critique : Mildred Pierce 1.03

Le 05 avril 2011 à 12:47  |  ~ 5 minutes de lecture
Troisième volet de la mini-série HBO qui va confirmer la qualité du récit en refusant toute facilité. L'histoire avance, de nombreux changements s'opèrent et une femme apprend la vérité sur sa véritable nature.
Par sephja

Critique : Mildred Pierce 1.03

~ 5 minutes de lecture
Troisième volet de la mini-série HBO qui va confirmer la qualité du récit en refusant toute facilité. L'histoire avance, de nombreux changements s'opèrent et une femme apprend la vérité sur sa véritable nature.
Par sephja

Pitch Mildred part 3

Après les évènements tragiques de l'épisode précédent, Mildred va ouvrir finalement son restaurant et connaître un certain succès. L'avenir semble lui sourire tandis que sa liaison avec Monty Beragon devient officielle, le jeune rentier s'entendant particulièrement bien avec sa jeune fille Veda. De simple serveuse, Mildred devient lentement une femme d'affaire efficace, mais perd lentement le sens des réalités pour s'enfermer dans un mensonge. 

 

Le mensonge de l'ascenseur social

 

Après le dramatique tournant de l'acte II, on aurait pu craindre que Todd Haynes ne nous sortent les violons, et propose un épisode entièrement dédié à la tragédie qui avait clôt le second acte. Ce ne sera absolument pas le cas, heureusement, la mini-série faisant preuve encore une fois de sa volonté de bien faire les choses. Femme forte et volontaire, Mildred refuse de se lamenter sur son sort et ouvre enfin le restaurant que l'on avait vu construire petit à petit. Son succès est le fruit de tout son travail, permettant à la série de poursuivre sur son thème favori, celui du rêve américain tandis la jeune femme devient lentement une femme d'affaire aguerrie, l'image idéale de l'ascension sociale par le mérite. 

Poursuivant sa liaison avec Monty Beragon, elle découvre un autre monde, celui des rentiers, de la réussite par le sang, un monde dans lequel elle ne parviendra jamais à s'intégrer, contrairement à sa fille Véda qui va occuper une place importante dans ce troisième acte. Très proche de Monty, elle a depuis toujours eu un style assez maniéré qui trouve pleinement sa place dans ce nouveau milieu qui va exercer sur elle une fascination de plus en plus grande.

Le fossé entre Mildred et sa fille Veda va se creuser lentement jusqu'à une scène superbe où la demoiselle osera tenir tête à sa mère, montrant dans son comportement cette pointe d'arrogance naturelle de ceux qui méprisent une existence vouée au travail. Partagée entre son amour pour sa mère et ce monde d'apparence et de prestige si fascinant, où le travail est vu comme un handicap et non une valeur, Veda perd lentement le lien qu'elle possédait avec sa mère.

Refusant d'accepter la souffrance liée au drame de l'acte II, Mildred comble ce manque par tous les moyens possibles, refusant de voir sa fille s'éloigner lentement, absorbée par un univers dont elle ne pourra jamais faire partie. Le rêve américain se brise, car Mildred, qui a un rapport à l'argent incompatible avec celui des bourgeois comme Monty, est incapable de franchir la barrière de la simple lutte des classes. 

 

Un virage un peu plus politique

Après un épisode entièrement axé sur les sentiments, Todd Haynes choisit de proposer une approche plus politique du récit et de replacer l'histoire dans son cadre historique, celui de la Grande Dépression et de la mort lente d'une bourgeoisie oisive et décadente. Gravissant tranquillement les marches du succès, Mildred se montre plus décidée, son activité apportant beaucoup d'énergie à un scénario très rythmé. Elle s'impose comme une héroïne, symbole d'un rêve américain encore vivant, capable de passer outre un drame abominable par son abnégation et sa seule volonté.

Kate Winslet, toujours remarquable, tient parfaitement son personnage, donnant à Mildred un mélange de rigidité de femme d'affaire et de faiblesse, car elle est terrifiée à l'idée qu'un nouveau drame vienne la frapper. La mini-série ne montre aucun signe de fatigue et de lassitude, le découpage des scènes étant particulièrement bien pensé. En laissant Mildred discourir sur la politique, il confirme l'idée reçue comme quoi la politique n'intéresse que ceux qui n'ont pas besoin de lutter pour vivre. 

Seulement, en oubliant de transmettre les valeurs de travail et de mérite à sa fille, elle laisse Veda se faire séduire par la vie facile de Monty, et perd lentement son estime. La jeune actrice (Morgan Turner) est réellement extraordinaire dans ce troisième acte et la gifle qu'elle donne à Kate Winslet est un vrai moment fort du récit, celui où Mildred comprend enfin une réalité qu'elle refusait de voir. 

 

Une troisième partie plus réfléchie

Pour ce troisième acte, la mini-série HBO maintient son niveau de qualité. La réalisation est vraiment superbe, et l'épisode joue beaucoup sur les nuances de couleur en fonction de l'état d'esprit de Mildred. La musique et les costumes remarquables apportent un véritable plus à une production parfaitement maîtrisée. Difficile de trouver à redire de ce point de vue, Todd Haynes refusant toute facilité scénaristique en prenant des choix très risqués à plusieurs reprises. 

Le thème de la lutte des classes est abordé de manière dépassionné, avec toute la subtilité dont le show a su faire preuve jusque-là. Car avant d'être un manifeste, Mildred Pierce reste l'histoire d'une femme qui doit faire face à la réalité, quitte à en payer le prix. 

Mais n'est-ce pas là la définition d'un mélodrame réussi, entre raison et passion, celui d'une illusion brisée et d'un terrible retour à la réalité.

 

J'ai aimé :

  • la relation mère-fille très réussie
  • le refus du pathos inutile
  • un rythme et une direction artistique splendide
  • un final d'une grande intensité dramatique

Je n'ai pas aimé: 

  • l'audimat décevant et immérité des premiers épisodes

Note: 16 / 20

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Image Mildred Pierce
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