Pitch cambriolage
Jerry part en tournée dans le Minnesota et laisse son appartement à Elaine, qui tente par tous les moyens de fuir sa colocataire. Seulement, durant le week-end, Kramer oublie de refermer la porte et Jerry se fait voler une bonne partie de ses affaires. L'heure est venu pour lui de déménager et de se trouver un nouvel appartement.
Le premier vrai épisode de Seinfeld
Les présentations sont enfin terminées, l'été 1989 touche à sa fin et il est temps pour le "show about nothing" de montrer de quoi il est capable. Cet épisode ne constitue peut-être pas le meilleur des neuf saisons de Seinfeld, il est avant tout le premier où les auteurs font preuve d'une maîtrise totale du récit. Si l'idée du cambriolage ne se révèle pas très brillante (elle a été l'objet de beaucoup d'hésitation de la part de Larry David), la majeure partie partie de l'épisode va tourner autour d'un appartement que Georges propose à Jerry, mais qu'ils vont rapidement convoiter tous les deux.
La jalousie de Georges va être un vrai moteur, lui et Jerry faisant preuve d'une hypocrisie remarquable en refusant d'être le méchant de l'histoire. Les personnages font pour la première fois preuve de cette méchanceté typique de la série, surtout lors d'une tentative de pile ou face où Georges va se révéler être le plus mauvais perdant de l'histoire. Battant l'un après l'autre des records de mauvaise foi, Georges et Jerry ne s'affrontent pas, préférant attendre que l'un des deux fasse le premier geste pour pouvoir l'accabler de reproches.
Cet état d'esprit si particulier constitue indéniablement la force comique de la série, car les trois anti-héros représentent tout ce que l'on déteste chez l'autre, cette volonté de toujours vouloir que les autres aient le mauvais rôle.
La visite de l'appartement
Seinfeld est une série particulière car son humour est minimaliste, ce qui signifie qu'il peut fonctionner même sans aucun autre élément de décor qu'un placard et une cheminée. La scène prend place dans un appartement vide et va s'avérer absolument remarquable, fonctionnant sur le décalage entre l'enthousiasme exagéré de Georges et le scepticisme forcé de Jerry. Les dialogues utilisent à merveille le comique de répétition, Jerry ne cessant de voir dans chaque élément de l'appartement une source de pourboire éventuel, tandis que les acteurs utilisent le comique de situation, Jerry n'hésitant pas à utiliser les éléments de décor pour embêter Elaine.
L'autre atout de la série est l'enregistrement en public dont les comédiens tirent beaucoup profit, Elaine s'amusant beaucoup à imiter les réactions de Jerry, nouvelle expression de leur méchanceté les uns envers les autres. La scène est terriblement drôle et l'absence totale du moindre élément narratif ou du moindre effet de surprise ne constitue à aucun moment un handicap. Tout repose sur la dynamique des comédiens, leur présence, le rythme du dialogue. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cela fonctionne à merveille. Ce principe théâtral de gestion de l'humour se retrouvera à la fin de l'épisode, les acteurs montrant une cohérence remarquable dans leur interprétation.
Affreux, hypocrites et méchants
S'il y a bien une caractéristique particulière et commune à tous les héros de Seinfeld, c'est ce mélange entre l'égoïsme le plus lâche et ce besoin hypocrite de n'avoir jamais le mauvais rôle. La bataille entre Jerry et Georges est l'expression parfaite de cette philosophie du perdant-perdant, les personnages du show ne présentant que rarement les caractères d'un héros.
Voir Georges s'extasier devant un miroir avant de raler contre le menu d'un restaurant est tellement pathétique que cela renforce le caractère méprisable du personnage. Dans Seinfeld, on rit avec les personnages mais surtout malgré eux, tant leur comportement franchit assez régulièrement les limites de la politesse.
C'est finalement là que la série trouve la source inépuisable de son comique, dans la cruauté et la méchanceté de ces New-Yorkais typiques. Seinfeld a trouvé son identité et l'âme qui l'amènera jusqu'au succès que l'on sait.
J'aime:
- l'hypocrisie invraisemblable de Georges et Jerry
- la scène remarquable de l'appartement
- la parfaite homogénéïté du jeu des comédiens
- un humour à plusieurs niveaux de lecture
Je n'aime pas:
- un démarrage assez poussif
- Kramer encore trop gentil par rapport aux autres personnages
Note: 14/20