Critique : Stella (2012) 1.01

Le 04 février 2012 à 14:50  |  ~ 8 minutes de lecture
Une série galloise qui raconte la destinée à la fois tragique et comique d'une mère de famille qui franchit la barre fatidique de la quarantaine.
Par sephja

Critique : Stella (2012) 1.01

~ 8 minutes de lecture
Une série galloise qui raconte la destinée à la fois tragique et comique d'une mère de famille qui franchit la barre fatidique de la quarantaine.
Par sephja

Pitch MILF or Not

A 42 ans, Stella n'a pas vraiment réussi sa vie, élevant seule ses trois enfants dont un qu'elle va voir fréquemment au parloir de la prison. Sa grande fille tente de quitter l'école à seize ans pour devenir une femme et son plus jeune garçon peine à s'affirmer, se faisant fréquemment brutaliser à cause de son physique maigrelet. Heureusement, elle peut compter sur sa belle-soeur Paula, une croque-mort alcoolique et fêtarde invétérée avec qui elle entretient une amitié forte. 

 

Résumé de la critique 

Un épisode amusant que l'on peut détailler ainsi : 

  •  une comédie douce amère, amusante, au ton très britannique 
  •  des comédiens impeccables dans un univers qui esquive les clichés 
  •  un temps d'adaptation nécessaire pour un show qui a du coeur 
  •  un ton naturaliste pour une comédie qui cède parfois au danger du kitsch

 

 

La quarantaine et ses frustrations 

Pour Stella, le passage de la quarantaine s'annonce difficile avec une vie sentimentale à l'arrêt, un ex-mari sur le point de se remarier, un fils en prison et une fille qui veut quitter l'école dès seize ans sans aucun objectif. Au premier regard, la série aurait tout pour être un show cynique et déprimant, pourtant le ton est plutôt léger en puisant dans un humour très réaliste proposant une galerie de personnages particulièrement allumés. Au centre de l'épisode, il y a Stella, une incorrigible optimiste qui découvre que sa vie est arrivée à un point où les désillusions prennent le pas sur les espoirs. 

Loin de se plaindre, elle garde un vrai enthousiasme, une joie de vivre un peu singulière poussée par la conviction dans un meilleur lendemain, essayant en vain d'être la meilleure mère possible pour ses enfants. Jamais cynique ou moraliste, elle veut l'impossible pour eux, mais ne se montre pas toujours à la hauteur, ses efforts ne parvenant pas à être à atteindre ses espérances. Heureusement, pour lui venir en aide, elle peut compter sur un réseau d'amis fidèles, dont sa belle-soeur Paula, croque-mort fêtarde et inconséquente. 

Ce personnage passablement allumé va être le premier auquel le spectateur peut vraiment s'attacher, offrant quelques scènes particulièrement drôles en alignant les cérémonies d'enterrement malgré un taux d'alcoolémie excessif. La scène du fou rire est particulièrement réussie, à la fois tragique et hilarante, donnant une idée de la nature profondément irresponsable de cette femme sans famille qui vit dans un perpétuel fantasme. Ensemble, elle forme le duo principal d'une série très humaine et amusante, portrait de personnages réalistes et attachants dans un décor d'un petit village du pays de Galles.

 

Des personnages qui esquivent les clichés 

La vraie force de Stella est de parvenir malgré une intrigue assez triste et peu propice à l'humour à faire exister toute une galerie de personnages particulièrement haut en couleurs. Pour cela, la série peut compter sur une identité galloise forte, avec un phrasé qui écorche le moindre mot et un décor particulièrement élégant d'un univers plutôt rural, loin de Cardiff. Mais surtout, elle possède un casting impeccable qui prend un plaisir flagrant à faire exister des personnages originaux en esquivant les clichés habituels de la comédie. 

Pour Stella, c'est l'excellente Ruth Jones qui l'incarne, assurant aussi le poste de scénariste, ranimant le souvenir de l'excellente Gavin et Stacey. Impeccable, elle met en avant un jeu très crédible, montrant tout le désarroi de son personnage principal, mère célibataire confrontée à la difficulté de devoir jeter un regard amer sur toute son existence. Son duo avec Elisabeth Berrington est particulièrement convaincant, les deux femmes proposant deux personnalités assez complémentaires liées par une amitié parfaitement crédible.

Les seconds rôles sont tout aussi réussis, proposant une relation mère - fille qui se place dans le cliché habituel de la confrontation, mais apporte une nuance tragique qui fait le charme de la série. Loin de chercher l'humour facile, Ruth Jones offre une comédie douce - amère, puisant son énergie comique dans le besoin de survivre qui pousse les êtres à positiver même les situations les plus extrêmes. Car, au delà des déceptions de l'existence, c'est avant tout le besoin de désir et d'être désiré qui pousse Stella à continuer, point important de sa personnalité qui définit l'état d'esprit de ce show jamais misérabiliste. 

 

 

Un premier épisode de mise en place

Si Stella affiche de nombreuses qualités prometteuses pour la suite, l'épisode peine à se mettre en place, les scénaristes ne parvenant pas dans un premier temps à donner une vraie lisibilité aux personnages et à leur connexion. On peine à rentrer dans un univers qui commet quelques fautes de goûts, insistant inutilement sur quelques gags décalés pas assez maîtrisés, là où le show gagne à mettre en avant son aspect naturaliste. Il faut donc attendre quelques minutes pour que la narration prenne sa forme définitive, gagnant en qualité au fur et à mesure que la dynamique comique se met en place. 

En effet, Stella nourrit son humour des soucis que vit son héroïne, obligeant les auteurs à installer d'abord une tension dramatique que le final réjouissant vient intelligemment relativiser. Le cliffhanger qui clôt l'épisode, particulièrement bien pensé, lance pour de bon un show exigeant, singulier, aux personnages touchants par leur crédibilité mêlée à un esprit décalé amusant sans sombrer dans l'excès. Une comédie dramatique qui ne se prend pas au sérieux, mais pose les bases pour offrir un show entre comédie et drame social, en espérant que la suite saura équilibrer les deux.

Comme dans un film de Loach, la destinée se montre cruelle envers Stella, la dernière scène marquant une nouvelle étape dans son lent processus de désillusion. Malgré tout, l'esprit reste léger et joyeux, carte d'identité d'un personnage positif par acharnement, là où la vie ne lui fait strictement aucun cadeau.  

 

L'abus de kitsch peut être dangereux pour la santé 

Si la série affiche de belles qualités et un démarrage assez enthousiasmant, c'est avant tout par son style très naturaliste, proposant un mélange entre réalisme et excentricité qui les rend immédiatement attachant. C'est dans cet équilibre que se trouve la force du show, mais aussi son point faible tant quelques scènes montrent une tendance pour le kitsch assez regrettable. Emportée alors par l'excentricité de ses personnages, Stella perd durant quelques secondes sa crédibilité, signe d'un show qui cherche encore ses marques, mais possède de vraies qualités.

En conclusion, un épisode intéressant qui s'impose par son style singulier, utilisant les drames qui touchent la vie de Stella pour fournir une comédie assez réjouissante. Les comédiens impeccables, l'écriture presque naturaliste de Ruth Jones sont autant de qualités en faveur de ce show exigeant et profondément humain. Une comédie qui refuse le misérabilisme et veut croire à tout prix à un avenir meilleur alors que l'entrée dans la quarantaine pousse son  héroïne à jeter un regard difficile sur son existence.

 

J'aime :

  •   un optimisme acharné qui vient équilibrer une intrigue de base assez sombre 
  •  Ruth Jones et les autres comédiens totalement convaincants 
  •  la scène du fou rire devant le cercueil 
  •  le cliffhanger impeccable 

 

Je n'aime pas : 

  •  une tendance au kitsch regrettable 
  •  le démarrage assez poussif 

 

Note : 13 / 20 

Un bon premier épisode qui, malgré un démarrage délicat et assez maladroit, parvient à imposer son univers naturaliste et ses personnages singuliers. Une plongée dans un univers assez sombre et dramatique en apparence où Stella se bat en affichant un optimisme assez inattaquable et une joie de vivre que rien ne pourrait éteindre. 

L'auteur

Commentaires

Avatar Bleak
Bleak
Je me demanderais toujours comment tu parviens à trouver des séries comme celle-là. En tout cas, critique très constructive même si le scénario ne me tente pas du tout. J'ai l'impression qu'avec ce genre de série, c'est souvent du pareil au même, du moins c'est l'impression que ça me donne.

Avatar sephja
sephja
J'ai choisi cette série car je n'en avais évoqué cette année aucune dans ce registre. Par contre, ta remarque n'est pas fausse, même si j'aime bien le côté Ken Loach de l'entreprise.

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