Critique : Suits 2.08

Le 12 août 2012 à 17:59  |  ~ 9 minutes de lecture
Un épisode mythologique décisif qui montre toute l'ambition de ce début de saison en proposant un voyage dans le passé pour mieux comprendre les origines des tensions entre Pearson et Hardman.
Par sephja

Critique : Suits 2.08

~ 9 minutes de lecture
Un épisode mythologique décisif qui montre toute l'ambition de ce début de saison en proposant un voyage dans le passé pour mieux comprendre les origines des tensions entre Pearson et Hardman.
Par sephja

Amici Vitia si Feras, Facis Tua 

 

Le vote de confiance se rapproche et Harvey Specter trouve un moyen pour faire pencher la balance en faveur de Jessica en déterrant une vieille histoire. Il demande à Mike d'aller à la rencontre de Monica Eaton, une ancienne employée du cabinet licenciée cinq ans auparavant, au moment où Harvey avait découvert les magouilles financières de Daniel Hardman. Un voyage dans le passé qui va déterrer quelques mauvais souvenirs, rouvrant certaines blessures impossibles à guérir. 

 

Résumé de la critique 

Un épisode très réussi que l'on peut détailler ainsi :

  •  un voyage dans le passé riche en information 
  •  la description d'un point nodal dans la mythologie de Suits 
  •  la question intelligente du bien et du mal 
  •  un duo Donna - Harvey assez irrésistible

 

suits 208 : Harvey, 5 ans en arrière

 

Les cicatrices du passé sont notre fardeau 

 

Après la révélation des intentions de Daniel Hardman d'organiser un vote de confiance contre Jessica Pearson, les auteurs se devaient de nous montrer comment Harvey allait mener sa contre-attaque en sortant des placards du tiroir. L'occasion était parfaite pour l'équipe créative de proposer un épisode mythologique préparé longtemps en amont avec la mise en place du personnage de Zoe entre autre. Les auteurs nous propulsent cinq ans en arrière, pour découvrir les vraies circonstances de la prise de pouvoir de Jessica et de comprendre toutes les implications du vote de confiance à venir. 

Pour marquer la différence entre les époques, les scénaristes utilisent la géométrie des lieux, la taille des bureaux, profitent de la familiarité du spectateur avec l'environnement de Pearson - Hardman. L'occasion de retrouver un Harvey fidèle à lui-même qui guette l'occasion de grimper dans la hiérarchie et met la main sur la preuve du détournement de l'argent des clients de l'agence. Des malversations financières qu'il s'empresse de signaler à Jessica et vont pointer tout droit vers Louis Litt, encore simple associé à l'époque.

L'importance de Louis dans cette affaire est très intéressante, car elle permet à Rick Hoffman de sortir de son rôle d'aboyeur pour devenir la victime inconsciente des magouilles de Daniel. Seulement, pour justifier pleinement ce choix d'un voyage dans le passé, il fallait que ce retour permette d'exposer un élément inconnu et décisif, une pièce manquante de toute cette histoire, à savoir Monica Eaton. La seule victime de ce conflit entre Pearson et Hardman, le cadavre dans le placard dont personne ne veut parler et qui symbolise à la fois la faiblesse de Daniel, mais aussi l'incapacité de Louis à tourner la page.

Un retour en arrière très intéressant qui permet de mettre en avant les causes de la rivalité entre les deux hommes, mais vient aussi éclaircir certains éléments concernant Mike Ross. Une partie moins importante de l'intrigue qui permet de voir la nature de ses relations avec Trevor avant l'affaire du trafic de cocaïne et les conditions de sa rencontre avec Jenny. Une storyline bien moins ambitieuse et qui va tourner surtout autour de la justification morale de son passé de tricheur, montrant les justifications des choix qui les ont menés jusqu'à leurs situations présentes.   

 

Le choix entre égoïsme et compassion 

 

Plutôt que de confronter le bien et le mal, les auteurs de Suits placent leurs personnages entre deux possibilités, soit d'écouter leur coeur, soit de laisser libre cours à leur ambition. Pour Harvey, ce choix oppose la situation de son père avec son ambition personnelle, plaçant Specter dans une situation où la défaite n'est plus acceptable à la vue des sacrifices qu'il a dû faire. Un choix inimaginable au vu du chemin qu'il a choisit de parcourir, expliquant sa détermination et cette colère qu'il ressent envers Daniel, mais qui est en fait tourné contre lui-même.

Faire tomber Daniel Hardman, c'est détruire un homme faible pour le remplacer par une femme forte et capable de tenir la firme à flots, assurant ainsi l'avenir d'Harvey en tant qu'avocat influent. Specter et Pearson s'utilisent mutuellement, surtout que Jessica peut ainsi éviter de se salir les mains et récolter les dividendes, avant de lui rendre la pareille en devenant son homme de confiance, Harvey voyant en elle le pari le plus sûr pour l'avenir du cabinet. Pourtant, elle se montre touchée par la situation de Daniel, mais possède l'intelligence pour savoir mettre sa compassion sous silence pour suivre la direction la plus intéressante pour elle, montrant combien la morale peut se parer des pires intentions.

Si elle reste un chef charismatique, Pearson est un personnage assez passif, voyant dans la chute de Daniel le prix à payer pour son manquement à l'éthique. Une tendance à la tricherie qui fait écho à l'histoire de Mike, pris au piège par la santé précaire de sa grand-mère et son manque d'argent qui l'empêche de lui donner les soins qu'elle mérite à ses yeux. Une histoire simple qui vient nuancer l'image de tricheur de Ross, sacrifiant sa fierté personnelle pour le bien-être de ses proches, montrant combien la tricherie peut parfois se parer des meilleures intentions.

Pour Louis, ce choix est plus délicat tant sa carrière et sa passion pour Monica Eaton sont tous les deux mis en péril par Daniel Hardman. Il est le seul personnage à ne faire aucun choix et à tout perdre, incapable de percevoir les secrets, de percer derrière la surface des gens pour réussir à les atteindre. Une frustration qui donne un nouveau sens à son comportement dans l'épisode précédent, piégé dans un univers où les portes apparemment transparentes cachent des luttes de pouvoir silencieuses et où la moindre faiblesse devient une arme pour les ambitieux. 

 

suits 208 : Louis sous la pression de Jessica

 

Le bien et le mal n'existent pas 

 

La scène marquante de cet épisode reste clairement celle où Harvey se confronte à Hardman, une séquence brutale et violente où Specter se montre sourd aux tentatives de Daniel pour s'expliquer. S'il se pare de vertu, le personnage de Gabriel Macht reste le méchant tant son subterfuge relève d'une cruauté sans once de justice, n'accordant pas le moindre droit à la défense. Une stratégie récurrente pour cet avocat qui craint les procès et la faiblesse humaine que représente la compassion qui nous permet d'être attentif à l'autre et de pardonner ce que la loi réprime. 

Ce jeu mené depuis le début de l'année pour donner à l'univers de Suits une teinte grisâtre est un des points très importants pour comprendre les intentions des auteurs. La storyline en apparence anecdotique de Mike Ross est décisive, car elle souligne combien la bonté peut pousser vers l'illégalité et la morale entraîner des gestes d'une cruauté extrême. Il en va ainsi de l'univers de Suits, un monde de nuances où les mots sont toujours à double sens et où le principal pouvoir est celui de pouvoir faire le choix entre son coeur et son ambition.

Très risqué, cet épisode prend le risque d'égarer le spectateur avec beaucoup de changements dans la hiérarchie et dans l'organigramme de Pearson - Hardman. Malheureusement, l'ensemble manque d'un petit quelque chose pour convaincre, jouant un peu trop la carte de la prévisibilité avec la rencontre entre Mike et Jenny ou entre Donna et Rachel. Une gourmandise que s'offre le scénariste Rick Muirragui, cédant au plaisir de voir interagir certains personnages clés de la série, en particulier le couple entre Harvey et sa secrétaire, une nouvelle fois particulièrement en verve.

 

Quand l'ambition prend le pas sur les sentiments

 

Cas particulier dans la série, le duo formé par Donna et Harvey est le seul couple qui mêle une ambition commune avec des sentiments d'affection sincère, relation platonique qui craint plus que tout un passage à l'acte qui ruinerait leur efficacité au travail. Deux individus qui cherchent à devenir les meilleurs ensemble, partageant une intimité qui n'est pas de l'amour, mais une alchimie complexe où chacun se comprend à demi-mot et ne tend que vers un seul objectif. Des scènes vraiment formidables qui font partie de l'identité de Suits, série particulièrement brillante dès qu'elle sort du simple cadre juridique pour parler de l'être humain et de ses ambitions. 

En conclusion, un épisode très réussi qui confirme toutes les qualités de la série avec une intrigue mythologique maligne et particulièrement bien construite. Un retour dans le passé qui éclaircit de nombreux points concernant Daniel Hardman et sa relation avec Jessica, mais surtout avec Louis qui apparait comme le pigeon de l'histoire. Un épisode qui confirme toute la force de cette première moitié de saison et le statut à part d'un show qui s'amuse à troubler la frontière entre le bien et le mal, entre la conscience morale et l'application de la loi. 

 

J'aime : 

  •  la scène entre Harvey et Daniel Hardman 
  •  le personnage très intéressant de Monica Eaton 
  •  les dialogues bien écrits, en particulier lors des scènes Donna - Harvey 
  •  le montage impeccable 
  •  la storyline de Mike 

 

Je n'aime pas : 

  •  je passe 

 

Note : 15 / 20 

Plus qu'une simple série judiciaire, Suits parle du conflit à l'intérieur de chaque homme entre l'altruisme et l'égoïsme, montrant l'opposition existante entre les choix d'Harvey et ceux de Mike. Un épisode très bien écrit avec des scènes Specter - Donna très réjouissantes qui place le show dans une situation idéale à deux épisodes de la mi-saison.

L'auteur

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