Image illustrative de Black Mirror
Image illustrative de Black Mirror

Black Mirror

Les histoires tordues se succèdent dans cette série d'anthologie hallucinante qui révèle les plus grandes innovations de l'humanité, mais aussi ses côtés les plus sombres.

En cours Anglaise, GB Pas de durée
Drame, Drama, Science-Fiction, Thriller, Science-Fiction & Fantastique, Mystere Channel 4, Netflix 2011
13.2

4 avis favorable
0 avis neutre
0 avis défavorable

Image illustrative de l'épisode 7.01 - Des gens ordinaires

Common People

Quand une enseignante se retrouve entre la vie et la mort, son mari dévoué l'inscrit dans un dispositif de haute technologie qui la maintient en vie, mais à un certain prix.

Diffusion originale : 10 avril 2025

Cliquez pour voir plus d'informations sur l'épisode

Diffusion française : 10 avril 2025
Réalisat.eur.rice.s : Ally Pankiw
Scénariste.s : Charlie Brooker
Guest.s : Chris O'Dowd , Rashida Jones , Tracee Ellis Ross , Nicholas Cirillo , Donald Sales , Lucy Turnbull , Milana Wan , Sofia Hodsoni , Sabrina Jalees , Carolyn Taylor , Huxley Fisher , JP McInnis , Peter Hall , Flo Lawrence , Jennifer Khoe , Glynis Davies , Nevin Burkholder , Lisa Gilroy , Luca Chutskoff , Coralee Wood , Nicco Del Rio , Olga Petsa

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Avatar Galax Galax
Administrateur
Avis favorable Déposé le 04 août 2025 à 22:46

L’année dernière, Black Mirror ouvrait par une satire évidente de Netflix dans une histoire fantaisiste, disjonctée et ultimement positive. Cette fois-ci, Brooker continue de tâcler la plateforme qui lui fournit son écran noir, avec un épisode radicalement opposé : fable profondément réaliste, cynique et déprimante. Comme souvent donc, la forme change beaucoup, le fond ne change pas tanat, même s’il s’enrichit ici.

Cet épisode a des allures de Black Mirror old school en ce sens qu’il ne repose pas sur un twist final mais est à la place une longue, longue descente aux enfers. On sait pertinemment dès le pitch absolument abject que ça finira mal.

Là où l’épisode est très fort c’est surtout dans son intersectionalité, puisqu’il évoque à la fois des thèmes anti-capitalistes et classistes évidents, mais avec un spin très moderne sur le monde pharma et sur l’avènement de la tech “par le service”. La formulatisation du moindre service qu’on subit depuis des années de la part des géants de la tech et de la surconsommation est en effet un thème vraiment idéal pour la série. Ainsi, le petit tâcle meta initial sur le service de souscription des plateformes comme Netflix n’est alors plus qu’un postulat, sur lequel le scénario reviendra plusieurs fois (comme avec l’injection de pubs pour la formule la plus abordable toujours payante), mais que l’épisode utilise comme tremplin et transcende largement dans son propos.

L’épisode est donc très riche, puisqu’on peut en effet aussi bien y recouper une démonstration de l’absence d’éthique du capitalisme technologique à travers l’avènement des SaaS, qu’une dénonciation des compagnies pharmaceutiques qui détiennent la vie des “gens communes” entre leurs mains. Cette double-lecture est très parlante et très cohérente, et on ne peut qu’être soulagé de savoir que le médico-tech n’est encore pas assez développé pour que de telles aberrations existent… pour l’instant. Bien sûr, l’emprise de la santé par les sociétés privées motivées par l’argent est une réalité déjà présente, qui empire les conditions de vie de millions de personnes. Mais l’épisode suggère aussi un modèle encore pire où justement le modèle tech très récent et le modèle pharma plus monolithique se rejoignent, dans ce maracérage nauséabond d’un service de souscription forcée comme unique ligne de vie pour une personne malade.

C’est la formule de base de Black Mirror toujours aussi efficace qui opère à fond ici : prendre des briques techniques et éthiques individuellement à peine fantaisistes, de l’ordre de l’atteignable voire carrément déjà existantes aujourd’hui, et les combiner dans un cocktail pervers. Le résultat n’est pas si improbable dans la cause, mais terriblement noir dans l’effet. Par cet aperçu d’un monde juste à 1 innovation, à 1 domino d’écart du nôtre, l’épisode s’illustre donc très bien dans le genre de la “tech-horror” d’anticipation si typique de la série, avec un univers qui reste suggéré, mais dangereusement proche du nôtre.

Dans “Common People”, là où l’intrigue est très forte, c’est qu’à part la partie médico-technique en elle-même lors de l’opération du premier acte, tout le reste est clairement ancré dans un réalisme banal. Je pense notamment à la plateforme de streaming anonyme illégale du mari pour gagner de l’argent : c’est une sous-intrigue clé qui inscrit dans la tech les problématiques de pauvreté, et ajoute une couche supplémentaire de dérive technologique très crédible. Cette intrigue aurait entièrement pu mériter son propre épisode façon Shut Up And Dance, et je ne serai tellement pas choqué d’apprendre que ce genre d’expériences existe déjà en ligne*.

*OK je voulais finir mon avis après avoir regardé un récap de l’épisode et je suis tombé sur la notion de “trash streaming” qui est exactement ce que l’épisode décrit donc yes, ça existe déjà… ben absolument pas surpris du coup ! Vive la vie purée.

L’épisode est donc excellent pour jongler entre le réalisme cynique de notre monde actuel et la SF d’anticipation, notamment quand il brise par petites touches les frontières du réalisme. C’est une chose que chaque épisode de Black Mirror de ce style est amené à faire, pour faire avancer son récit en choquant sur des détails. Ici, ça tient sur l’éthique de la compagnie Riverdream présentée, à travers les réunions “pitchs d’innovation” juste insensées. Donc, tout n’est en effet pas toujours crédible à 100%, mais ce n’est pas le but de l’épisode. Cela fait au contraire tout le sel de la série. Il faut saluer l’actrice absolument insupportablement parfaite dans le rôle de la customer manager, véritable pion et perpétuatrice du système. J’ai écarquillé les yeux à chaque fois qu’elle présente la nouvelle offre de plus en plus ridicule de sa start-up.

Ce sont aussi les rares scènes qui ont des touches d’humour (noir, certes, mais très réussies), ce qui nous sort totalement de la vie morose du couple. Elle tranchent donc totalement avec le reste de la situation bien plus réaliste, et permettent de souligner justement l’absurde de la situation, en plus de s’affranchir de certaines contraintes scénaristiques (comme le fait que nos personnages subissent d’une scène à l’autre des évolutions toujours plus perverses du service). Légalement, ça ne tient en effet pas debout que nos personnages soient aussi peu informés et que l’entreprise ne soit pas plus contrôlée que ça — enfin, c’est ce que je pense d’après nos règles d’aujourd’hui, j’ose espérer qu’on est pas encore tout à fait en train de laisser de telles failles dystopiques dans le droit. Mais qu’importe, avec ce genre de scènes comico-tech-tragiques juxtaposées à un quotidien très banal du couple, le rythme de l’épisode est parfait et sa balance des tons touche en plein dans le mille.

Il y a ausi un aspect très Black Mirror 3.0 (ou 4.0, je sais plus où j’en suis maintenant, ya eu tellement de saisons), au fait que la technologie soit ici vendue et marketée, voire même alléchante. Tandis qu’aux débuts de la série, l’anticipation était plus lointaine, moins publiques, plus expérimentales, de sorte que les éléments technologiques pervers faisaient soit déjà partie du postulat à la première minute (comme dans Nosedive), ou alors étaient anti-systèmes, et imposés à l’audience à la manière d’une punition ou d’un twist (comme Hated in the Nation et ses abeilles, explicitement référencées ici).

Mais depuis quelques saisons, on est passé à la vitesse supérieure et Black Mirror s’est mis à la page des dingueries qui se déroulent IRL. Ici, comme l’épisode de Streamberry l’an dernier avec le gag de CGU, il y a un vrai effet “vous vivez dans un monde où vous avez déjà autorisé tout ça”. L’hôpital propose lui-même le service. Et d’ailleurs le pire, c’est que même dans l’épisode lui-même, la commerciale de Riverdream EXPLIQUE au mari pourquoi c’est d’abord alléchant en termes de prix, et pourquoi ça ne va pas durer. Elle dit clairement que c’est le modèle optimal pour une start-up pareil : proposer son service différenciant et casser les prix au départ, car ils ont besoin de clientèle. Et une fois que la dépendance (physique dans le cas présent) est créée, que les poissons ont mordu, reprendre le pouvoir et générer du profit (sous la forme de jolies features, au détriment des utilisateurs). L’arnaque n’en est même pas une, puisque par ces scènes, l’épisode rappelle que les fondements même de la profitabilité et du capitalisme sont anti-éthiques.

C’est aussi, ironiquement, ce qui fait le divertissement et le rythme de l’épisode : son curseur poussé toujours plus loin sur les updates de la plateforme, avec son service premium, premium+, ou bien sûr le coup des publicités intrusives forcées et physiologiques, déjà présentes dans la première saison de Black Mirror et toujours autant d’actualité mises au goût du jour ici (le thème de la publicité pourrait mériter un jour sans doute son propre épisode focus et je suis surpris que ça n’a toujours pas été fait !).

Je suis aussi assez fan de la partie très ancrée sur le réel et sur les personnages de l’épisode, parce que ça le rend poignant au premier degré, et dépeint encore plus de choses sur notre société. J’aime donc beaucoup le fait qu’on suive le couple sur une aussi longue période, entre euphorie de jeune couple qui cherche à avoir un enfant, désillusion lorsque le système ne leur permet pas, voir aussi comment le travail et le fait de se tuer à la tâche pour simplement rester en vie et profiter de leurs rituels amoureux impacte leur routine et les entraîne dans une spirale dont ils ne peuvent se sortir. Cela fait vraiment tout le sel de la descente aux enfers déprimante de l’épisode, et l’émotion fonctionne parfaitement tout du long grâce aux deux personnages hyper attachants. Les acteurs étant très potes et ayant accepté les rôles avant même de connaître le script, ils ont une très belle alchimie. C’est en grande partie pour ça qu’on aboutit sur une fin aussi sombre et puissante.

Ce qui est fort aussi, c’est qu’en associant la critique d’un Netflix avec le domaine médical, l’épisode croise les thèmes du divertissement disons “superficiel” avec de vraies conditions de survie. Or les plus mauvaises langues pourraient y voir une démarche un peu vicieuse ou malhonnête d’exagération perverse, ou sans aller jusque là, une diminution du propos de l’épisode pour le distancer de notre réalité : “oui enfin arrêter un abonnement 200€ qui fait vivre une femme ce n’est pas le même chose qu’arrêter ses abonnements de streaming qui sont du luxe”… Oui sauf que l’épisode prend aussi le soin de prouver que sans ce divertissement qui fait aussi toute l’essence d’une relation et permet d’accéder au bonheur, l’être humain se perd totalement, dans une charge de travail pour le système notamment, et qu’une survie ne vaut peut-être pas la peine d’être vécue dans de telles conditions.

D’ailleurs, ce n’est pas un hasard à mon sens si le petit lieu de paradis du couple ne paie pas de mine, voire est même très commun, limite cheap (le chewing-gum au plafond le prouve). Il n’apparaît pas comme tel dans l’épisode car c’est une vraie escapade et un nid douillet, une zone de confort pour nous et pour les personnages, mais il reste pourtant simple. Il ne devient un luxe que parce que la survie devient une lutte. Et ce n’est pas un hasard donc, si ce lieu s’appelle “Juniper”, en référence au premier épisode feel-good de la série San Junipero (même mot en version moins grandiloquente, justement). Cet épisode avait bouleversé un peu tout le monde et possède plusieurs similitudes avec “Common People” : la tech au service du médical, un couple qui s’y retrouvent et dont la vie finit par en dépendre. Pourtant, San Junipero s’affranchissait aussi complètement de toute contrainte financière et était clairement utopique. Common People agit donc presque comme une réponse 10 ans après, là où San Junipero était anti-cyclique à 2016 et à la série, celui-ci va bien plus dans le sens déprimant du monde actuel.

C’est un propos très fort et très cru, surtout si on le prend via le prisme “la vie ne mérite plus la peine d’être vécue ainsi” que j’ai brièvement évoqué — quoique pas non plus explicitement dit ainsi dan sl’épisode. Les personnages n’évoquent quasiment jamais le fait d’avior sauvé la vie de la femme, en tout cas jamais en sous-entendant un regret. Mais, ça finit tout de même par un double suicide après une pause de bonheur uniquement permise en fuyant la réalité, après que le symbole du rêve du couple (le lit pour enfant) ait été cédé pour de l’argent et à des fins purement abstraites et déconnectées de la vraie vie de parents (un clip — un écran, donc).

En tout cas, je suis vraiment fan du fait que l’épisode peut se permettre avec son pitch d’avoir un tel accent sur des personnes “communes” avec leur service de vie “commun”, leurs travails “communs”, et à quel point tout ça est compromis, puis devient déprimant voire parfois toxique : la comparaison des métiers, la mort à petit feu de leurs rituels matérialisant leur amour, l’abandon de leurs rêves… Le fait que le couple cherchait à avoir un enfant et ne peuvent pas vu les conditions du système par exemple, ça en dit long sur ce qu’il se passe IRL aussi.

L’usage de cartes prépayées avec QR Code permettant d’accéder à des palliers de bonheur temporaire sur une appli façon tech-drogue (encore un concept qui aurait pu mériter à lui tout seul un épisode, mais qui sert ici d’appui à l’histoire), est aussi une idée hyper intéressante qui montre bien les effets addictifs et pervers des services auxquels on s’asservit. Même sans parler de cadre “entre la vie et la mort”, les endorphines procurées par nos écrans évoquent complètement ça. Encore une fois, ça va de pair avec cette spirale négative du reste des idées et du propos.

Je suis en tout cas très satisfait de voir que la série tord vraiment sa règle de “une technologie par épisode” en souhaitant faire un épisode limite universel, décrivant de la façon la plus exhaustive la société par sa lentille fracturée. Après avoir fait souvent des épisodes anthologiques composites (White Christmas, Black Museum…) ou après s’être aventuré sur des nouveaux genres (comme dans la saison précédente que personne n’a apprécié à sa juste valeur — I will die on that hill), ce nouveau format est la reprise idéale pour lancer une nouvelle saison et prouver que la série est toujours plus pertinente que jamais.

Black Mirror revient donc avec une petite claque comme elle sait très bien le faire, dans un épisode incisif et riche qui m’a vraiment pris aux tripes, typiquement dans une des catégories d’épisodes que j’adore le plus dans la série : les tranches de vie réalistes et noires à peine improbables, qui montrent comment des quotidiens normaux peuvent être bouleversés. La saison démarre très très fort.


Avatar Guismo Guismo
Membre
Avis neutre Déposé le 24 avril 2025 à 21:36

Un épisode beaucoup trop classique, je me suis fait un peu chier à vrai dire même si y'a 2-3 bons moments, un peu trop previsible, du déjà vu ! Ça commence moyennement cette nouvelle saison 


Avatar nicknackpadiwak nicknackpadiwak
Rédacteur
Avis neutre Déposé le 19 avril 2025 à 20:05

Cette saison démarre en mode classique BM. On part d’un concept original et bien traité (le forfait « sans pub » n’est-il pas une boutade envers Netflix ?), mais un traitement qui interroge.

Spoiler

En effet, on repart une nouvelle fois pour une déchéance des protagonistes principaux et chaque nouvelle scène est une nouvelle étape de leur calvaire. Est-ce de la paresse scénaristique d’une série incapable d’imaginer autre chose que ce genre de schéma ou une volonté concrète et donc sadique de nous faire "apprécier" cette sorte de torture porn télévisuel ? Je ne sais pas, mais j’adhère modérément à la démarche.


Avatar Jo_ Jo_
Rédacteur
Avis favorable Déposé le 15 avril 2025 à 11:30

Sur le moment, je me suis dit que l'épisode était assez paresseux. On comprend très vite ce qui va se passer, et il n'y a aucune surprise dans le déroulé du scénario.

Mais si ce n'était pas ça le plus important ? Car le voyage qui mène à une fin inéluctable est quand même beau et émouvant. Les acteurs sont super bien castés et on se retrouve vite à être plein d'empathie pour eux (et cette scène de fin avec le sourire du mec... j'y repense pas mal).


Avatar cedric2506 cedric2506
Membre
Avis favorable Déposé le 12 avril 2025 à 18:49

Très bon épisode, presque digne des plus belles heures de la série. En tout cas ça fait bien longtemps qu'ils n'avaient pas fait un si bon épisode. C'etait triste, c'etait grinçant, c'etait même drôle (les 1eres pubs). Bref du tout bon !


14

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04 août 2025
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19 avril 2025
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Jo_ a noté cet épisode - 14
15 avril 2025
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cedric2506 a noté cet épisode - 15
05 août 2025

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