Plein de choses dans cet épisode qui pose toutes les émotions sur la table et n'essaie pas une seule seconde de les contenir, ce qui est plutôt rare pour une série mainstream à empreinte majoritairement masculine (oh tiens, c'est bizarre que ça change maintenant que la showrunner est une femme !). Personne n'essaie de se dire que ça va aller, personne n'essaie de respirer un bon coup pour rester lucide. Ici, pas de lucidité, mais un combat dans l'urgence et même le désespoir, une question de survie pour l'admirable Hailey qui donne tout comme si sa vie en dépendait (et c'est en partie vrai, tellement elle ne veut pas se confronter au départ de Jay). Une physicalité différente également, des corps qui bougent moins "joliment" (lorsqu'Hailey et Hank veulent ouvrir la grille), un état brut et terriblement humain pour aller au bout et essayer, en sauvant ces jeunes filles, de se sauver soi-même...

Car ce n'est pas pour rien que la dernier plan est une nouvelle fois celui de Hank et Hailey côte à côte à l'hôpital. Combien de fois se sont-ils retrouvés dans cette position dernièrement ? Beaucoup trop. Sauf que là, et c'est ce qui termine l'épisode, il y a une ironie assez noire à l'ensemble. Après tant de fois à regarder des gens mourir ou survivre, souvent en conséquence de leurs propres actions, ils se placent tout à coup en sauveurs... d'un meurtrier. Une occasion du destin de se racheter de leurs actes passés, mais qui étrangement ne semble pas si réconfortante que ça. La seule raison pour laquelle Voight a sauvé Sean est pour Hailey car il ne voulait pas d'une nouvelle situation comme celle qu'ils ont déjà connue. Lui est toujours froid, il se fiche sincèrement que Sean vive ou meurt. En revanche, la froideur d'Hailey n'est pas synonyme de lucidité... Au contraire, elle l'aurait regretté. Hank essaie donc de la sauver, action altruiste qui le remet dans le droit chemin du leadership ; il est celui qui veille à ce que personne ne devienne comme lui. Les choses reprennent leurs cours normal.

Il ne reste à Hailey que se confronter à sa nouvelle solitude, sans son mari, ami et partenaire, dès les prochains épisodes. La conversation avec Sean est très pertinente pour son cas, quand il lui dit qu'elle est "brisée" pas à cause du départ de Jay mais depuis son enfance... Cela la ramène à une vulnérabilité qu'elle arrivait à gérer grâce à Jay mais qu'elle se doit de gérer seule, maintenant. Encore l'idée de se "sauver soi-même". En parallèle, le Chef rappelle à Voight que protéger son fils est le plus important, ce à quoi il peut bien sûr s'identifier mais qui ne suffit plus pour le faire pencher : Justin n'était pas un meurtrier. On voit donc la différence entre Hank qui peut vivre avec qui il est et qui s'en sortira toujours et Hailey qui bataille contre ses démons, lesquels viennent la hanter dans son travail.

J'aurais aimé que le duo Kim/Hailey ressorte, surtout après l'épisode précédent, mais il semblait important pour les scénaristes de mettre en exergue le duo Voight/Upton, seuls depuis le départ de Jay et qui bataillent encore avec les effets de ce qui s'est passé en fin de saison 8. Individuellement, en duo, envers l'équipe, leurs sentiments sont complexes et tortueux. La leçon semble être apprise, cela dit, notamment quand Voight dit à Hailey : "you, me, and the team". L'équipe est de nouveau centrale, c'est le seul moyen de les maintenir dans la moralité, alors qu'Hailey marche sur un fil dangereux, comme une addiction à la simplicité que son statut lui confère : droit de vie ou de mort sur certaines personnes. Bref, je comprends l'importance de les garder en avant, mais j'espère sincèrement que Kim pourra avoir plus de place dans l'équiquier.

Jouant sur de longs dialogues entrecoupés de scènes d'action efficace et une musique particulièrement efficace, l'épisode, très noir une fois de plus, explore les aspects psychologiques et la relation particulière unissant Sean/Hailey (à l'image, peut-être de Yates/Erin), où l'affaire se joue sur l'humanité des personnages (tous) plus que sur les faits concrets qui, s'ils ne suffisent à le faire condamner, suffisent à amener cette fin choquante mais peut-être pas si surprenante : d'ailleurs, le scénario ne s'épanche pas dessus. Bref, un épisode d'une grande qualité qui parvient à lier personnages et enquêtes avec brio et émotion.

Tracy Spiridakos était exemplaire, elle s'est réellement dépassée pour celui-ci et ça s'est ressenti très très fortement.