Critique : Mr. Robot 2.02

Le 04 août 2016 à 17:51  |  ~ 8 minutes de lecture
Deuxième épisode ou deuxième partie, beaucoup de questions restent en suspens. Réalité et illusions continuent à s'entremêler.

Critique : Mr. Robot 2.02

~ 8 minutes de lecture
Deuxième épisode ou deuxième partie, beaucoup de questions restent en suspens. Réalité et illusions continuent à s'entremêler.
Par PuckyPotts

Je ne saurais dire si l'idée d'USA Network de leaker le season premiere, qui fait office de première partie à ce dyptique, est bonne ou mauvaise. Mais après cela j'étais, il faut le reconnaître, impatient de voir ce qu'avait à m'offrir Mr. Robot.

Force est de constater que je ne vais pas pouvoir retirer ma casquette de spectateur méfiant avant un bon petit moment ; la série a définitivement décidé de jouer avec mes nerfs. Fou celui qui peut savoir à coup sûr si ce qui se passe à l'écran est réel ou non.

Les enjeux de confiance et la duperie sont plus que jamais de la partie. À tous les niveaux. D'abord, au niveau diégétique, on peut prendre l'exemple de la FSociety qui dupe E Corp. une nouvelle fois. Au niveau extradiégétique, on l'a vu, il est difficile pour le spectateur de se faire une idée de la réalité, l'illusion n'étant jamais très loin. Et dans un niveau intermédiaire, qui se trouve entre Elliot et le spectateur, les deux parties ne peuvent se faire confiance. C'est ce qui fait tout le charme de Mr. Robot. Lorsque que le quatrième mur est brisé, le spectateur peut généralement faire confiance à ce que le protagoniste lui raconte, même s'il se trompe. Ici, nous sommes constamment manipulés.

 

Elliot pendant un match de basket de rue.

 

 

E Corp. est toujours aux commandes

 

On l'a vu dans la première partie. Plusieurs mois après la supposée révolution, E Corp. est toujours aux commandes. Son CEO Phillip Price n'est pas inquiété le moins du monde. Pourtant, la FSociety n'a pas baissé les bras et nous offre une magnifique ouverture d'épisode. Knowles, le nouveau CTO d'E Corp., avait accepté dans l'épisode précédent de livrer 5,9 millions de dollars à la FSociety. Duperie toujours, cette dernière exige qu'il les brûle aux yeux de tout le monde. Et c'est là que la série nous offre une improbable alliance : Take me home de Phil Collins et un brasier de millions. Je dois vous avouer quelque chose, c'est mon côté un peu kitsch, j'adore Phil Collins (oui, je pouvais rouler des heures durant avec I don't care anymore en boucle dans GTA V, et alors ?). Je me demande si cette chanson, ce n'est pas Elliot qui lance un appel à l'aide à Darlene : aurait-il besoin qu'on le ramène chez lui ? N'oublions pas que notre regard de spectateur est fortement influencé par le prisme de vision d'Elliot !

Et je trouve que cette chanson est un très bon choix : décalée par rapport au moment crucial qui se joue, elle souligne que l'air du temps change, même si la classe dominante détient toujours le pouvoir. L'image est belle, les dominés peuvent se démasquer pendant que les dominants doivent porter le masque que leur tendent les dominés.

Mais la série joue avec nos nerfs. Ce vent de victoire ne peut durer. En sous-main, c'est toujours Phillip Price qui tire les ficelles. Sa réunion avec le gouvernement dans laquelle il peut exiger ce qu'il veut, et surtout refuser sa démission forcée, nous rappelle tristement les crises financières de ces dernières années. Pourquoi chaque victoire contre le système capitaliste semble être une défaite ? Darlene a bien raison de se poser la question. Bref, ce personnage semble avoir de la réserve pour faire face à la FSociety et c'est au besoin de confiance qu'il se réfère pour justifier son maintien au gouvernement. Quand confiance rime avec illusion...

 

Angela au téléphone.

 

Mais la plus grosse défaite, c'est Angela. Dans la première saison, deux axes de combat contre le système nous étaient présentés : l'attaque frontale contre le système, l'axe choisi par la FSociety, et le changement de l'intérieur, l'axe qu'a choisi Angela malgré le fait que son avocate l'ait mise en garde. Il n'aura pas fallu longtemps à Sam Esmail pour nous montrer son avis sur ce moyen de lutte. Angela a déjà abandonné son combat. Les personnes qui travaillent à E Corp. ne sont pas de mauvaise volonté. Et c'est bien là que réside toute la puissance d'E Corp. : humaniser son image pour la rendre moins exposée. Toutes les publicités des grands groupes montrent des collaborateurs au visage souriant, ce n'est pas un hasard. Sam Esmail reste ici fidèle à sa critique anticapitaliste, montrant que pour lui, le moyen efficace est de s'attaquer à E Corp. en tant que structure et non en tant que regroupement de personnalités différentes. Pendant ce temps, véritable symbole des temps modernes, Angela s'abreuve d'émissions d'estime de soi et de bien-être au travail...

 

 

Elliot est Mr. Robot

 

Revenons maintenant à Elliot. Les deux parties de ce season premiere fonctionnent de manière opposée. Le côté politique est beaucoup plus présent dans cet épisode. Mais le personnage d'Elliot n'est pas laissé de côté. La scène du match de basket est à mon avis très intéressante. Énormément de choses s'y passent sans faire usage d'artifices. Et surtout, la mise en scène suggère énormément, il y a un vrai travail dessus. Je craignais que Sam Esmail ait fait un choix périlleux en décidant de réaliser tous les épisodes lui-même, mais force est de constater que pour le moment, il maîtrise son sujet. Léon, toujours lui... Mes doutes de spectateur se sont une nouvelle fois amplifiés. Grâce à la mise en scène notamment.

 

Elliot est Mr. Robot.

 

Nous avons le droit à deux matchs de basket différents dans cet épisode. Il est intéressant que cet espace de vie publique soit choisi pour être un lieu aussi important, le lieu de la révélation. Elliot est définitivement Mr. Robot, Mr. Robot est Elliot. La nuit, Mr. Robot reprend le dessus et peut se promener et s'adonner à ses activités. Le rapprochement avec Dr. Jekyll et Mister Hyde est toujours plus fort. Je crains parfois qu'Elliot ne subisse le même sort... J'aime beaucoup le personnage de Ray. Je ne sais pas s'ils vont devenir amis, mais dans un univers où les personnages francs et chaleureux ne sont pas légion, il est le bienvenu. Que la révélation de l'empirement de son état dissociatif vienne de lui doit aider Elliot. Gageons que ce personnage aura une place importante dans la suite.

 

 

Les cartes sont redistribuées

 

Autre personnage franc et chaleureux mais au destin différent. Gideon Goddard, ex-patron d'Allsafe, est lâchement assassiné dans un bar. Permettez-moi encore une fois de reprendre ma casquette de spectateur méfiant. En deux épisodes, c'est la deuxième fois qu'on le voit mourir à l'écran. La première, il semble admis que cela se passait dans la tête d'Elliot. Je ne sais pas ce qu'il en est ici. Les musiques choisies depuis le début s'adressent avant tout au spectateur. Ici encore, c'est une chanson dont les paroles évoquent le rêve. Mon imagination va peut-être trop loin... L'avenir le confirmera.

Un personnage qui ne semble en revanche pas rêver, c'est Joanna Wellick. Elle non plus ne se dévoile pas aisément au spectateur. Son nouvel amant, toujours aussi maso, ne semble être qu'une couverture. Elle a l'air également d'attendre impatiemment le retour de Tyrell, tout comme nous. Elle n'a pas perdu ses habitudes avec son mari et sait instantanément où trouver les informations. Pour l'instant, peu de choses nous sont offertes de ce côté, mais l'intrigue promet d'être explosive.

 

Elliot et Mr. Robot devant le téléphone.

 

C'est certainement Tyrell que Joanna rate au téléphone. Mais il n'est pas très loin. Mr. Robot a entendu l'ultimatum d'Elliot. Lorsque ce dernier s'endort à son groupe de parole, Mr. Robot reprend le dessus. Il laisse cependant le contrôle à Elliot, le téléphone à la main avec Tyrell, ou du moins, sa voix, à l'autre bout du fil. Tyrell se demande si c'est vraiment Elliot. Tout comme nous. « Bonsoir, Elliot. » Lui aussi a également conscience de la duplicité des personnalités d'Elliot. Ici aussi, peu de choses nous sont montrées, mais la relation entre les deux personnages, étrangement complices dans la première saison, sera intéressante.

 

Va-t-on enfin revoir Tyrell ? La grande inconnue de ce début de saison. Tous les indices laissent croire qu'il est bien vivant. Mais je préfère garder ma casquette de spectateur méfiant. Je me sentirai bien plus à l'aise quand Elliot pourra me faire à nouveau confiance. D'ici là, la réalité ne sera jamais ce qu'elle semble être. Cette série assume ses références cinématographiques et ça n'a que du bon ! Hum... cette série devient vraiment baroque. :)

 

J'ai aimé :

 

  • La scène d'introduction avec la musique de Phil Collins. <3
  • Les matchs de basket.
  • Les illusions qui me perturbent.

 

Je n'ai pas aimé :

 

  • J'ai un peu de mal pour le moment avec le jeu de Stephanie Corneliussen (Joanna Wellick).
  • Je ne sais pas où va le personnage d'Angela.

 

Ma note : 13/20.

L'auteur

Commentaires

Avatar Altaïr
Altaïr
Superbes critiques. Et diégétique et extradiégétique, on a du haut niveau sur serie-all ! <3

Avatar nicknackpadiwak
nicknackpadiwak
Toi qui fait gaffe aux musique, la scène où Angela met son casque, la musique entendue est du groupe Sonic Youth et la chanson est Bull in The heather soit. ....un taureau dans les bruyères. Bon ok ça veut rien dire.

Avatar Koss
Koss
"(oui, je pouvais rouler des heures durant avec I don't care anymore en boucle dans GTA V" Mais oui !

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