Critique : Angry Boys 1.02

Le 27 août 2011 à 14:52  |  ~ 6 minutes de lecture
Angry Boys continue à étudier les différentes formes de rébellion au travers du personnage délirant de S. Mouse. Moins trash que le pilote, un épisode qui lance de vraies intrigues tout en gardant un ton particulièrement féroce.
Par sephja

Critique : Angry Boys 1.02

~ 6 minutes de lecture
Angry Boys continue à étudier les différentes formes de rébellion au travers du personnage délirant de S. Mouse. Moins trash que le pilote, un épisode qui lance de vraies intrigues tout en gardant un ton particulièrement féroce.
Par sephja

Poo on you motherfucker 

Influencé par un rappeur pour ados, Nathan se fait attraper en train de déféquer sur la voiture de flic de son village et entraîne l'arrivée des services sociaux. Pendant ce temps, Gran reçoit un nouveau prisonnier mineur, victime d'abus sexuels par son père et condamné pour des pratiques zoophiles répétées. Pendant ce temps, S. Mouse, rappeur minable pour les moins de neuf ans, se fait enfermer chez lui pour incitation à la haine contre les forces de l'ordre.

 

Résumé de la critique

Un épisode sympathique et intelligent que l'on peut détailler comme ceci : 

  •  un portrait au vitriol du milieu du rap grâce au personnage hilarant de S. Mouse 
  •  un parallèle vraiment amusant et  brutal entre la prison pour adolescent et l'univers bourgeois de S. Mouse 
  •  une volonté marquée d'éviter de réutiliser les mêmes gags et de faire avancer l'histoire de Nathan 
  •  une série qui tente le pari complexe de faire rire malgré un background étonnamment sombre 

 

 

S. Mouse, le rappeur pour moins de sept ans 

Pour ce nouvel épisode, Chris Lilley va focaliser une bonne part du récit sur un personnage haut en couleur, le rappeur préféré de Nathan (oui, je sais, il est sourd), un rebelle gangster tendance Mickey Mouse. Devenu une vedette en reprenant une chanson ridicule et idiote dont personne ne voulait, S. Mouse est un pur produit marketing conçu pour récupérer un public d'ados entre huit et douze ans. Devenu une star du hip-hop, il est avant tout le reflet d'une certaine technique de communication, le rappeur rebelle se revendiquant enfant de la banlieue, fils de parent drogué et vecteur d'un message profondément social. 

Seulement, la vérité est que ce rebelle frimeur est un fils de quartier chic, doté de parents chaleureux et équilibrés qui n'apprécient pas les mensonges que les communicants imposent. Crétin pourri gâté confondant rébellion et idiotie, S. Mouse est un profiteur du système, mais va lentement se convaincre tout seul qu'il est un artiste à part entière. S'en donnant à coeur joie dans l'ironie, Chris Lilley compose un personnage totalement ridicule, grande gueule de bac à sable qui pense vivre dans la souffrance, mais profite de tout le luxe pendant qu'il accomplit sa peine de prison "à domicile" 

 

Un univers carcéral au réalisme touchant 

En opposition à S. Mouse et sa prison à domicile, la série continue d'évoquer au travers de courte saynètes la vie de Gran au sein de sa prison pour adolescents. Evidemment, le parallèle entre les deux va faire mouche, montrant l'image d'une jeunesse dorée et protégée qui peut se révolter sans craindre les conséquences là où l'adolescent lambda se retrouve immédiatement enfermé et privé de sa famille. Moins drôle que le pilote, ce volet d'Angry Boys s'essaie à plus de subtilité et atteint son but en parvenant à traiter avec une certaine dignité le cas de ses adolescents prisonniers. 

Pour Chris Lilley, le but est de se moquer du système et des fruits étranges qu'il produit, pas de ces victimes, Gran étant finalement la seule que le spectateur est amené à juger. Les prisonniers conservent une certaine dignité, la série envisageant le cas de ce jeune prisonnier victime d'abus sexuels et zoophile sous un angle assez pudique, sans jamais verser dans la vulgarité gratuite. Très maîtrisé, cette partie de l'intrigue propose une vraie avancée, construisant petit à petit une intrigue digne de ce nom, tout comme dans le cas de Daniel et Nathan qui vont hériter d'une intrigue plutôt sérieuse.

 

 

La surdité abordée entre humour féroce et subtilité

Nathan est arrêté par les flics pour avoir déféqué sur une voiture de flic, suivant les conseils de son idole, le rappeur S. Mouse. Etant donné son handicap, les policiers refusent de l'envoyer en prison, mais poussent les services sociaux à intervenir, arguant que le jeune homme a besoin d'intégrer une école spécialisée pour sourd. La dispute entre Daniel et sa mère va alors porter sur le destin de son frère, l'un voulant qu'il soit considéré comme une personne normale en restant avec eux pendant que l'autre souhaite qu'il intègre un institut spécialisé pour apprendre à vivre avec son handicap. 

Le débat est féroce, mais Daniel n'est pas assez intelligent pour être incapable d'avancer un argument digne de ce nom, donnant à cette storyline un ton sombre et pas du tout parodique. Fini les blagues sur les doigts d'honneur, il s'agit pour les auteurs de parler de la souffrance de Nathan de voir les autres parler en son nom sans pouvoir exprimer son propre avis, ni comprendre ce qu'ils disent. Moins vulgaire que le pilote, Angry Boys développe ici une vraie intrigue, misant sur le côté horriblement égoïste de Daniel pour créer un vrai décalage humoristique dans une histoire particulièrement triste. 

 

Un humour entre parodie et exigence

Si Chris Lilley n'hésite pas à verser dans la parodie pour introduire ces personnages, il sait surtout ne pas se répéter et enclencher des intrigues dures qui, malgré certains aspects volontairement extrêmes, savent faire preuve de subtilité. Toujours à la manière d'un documentaire télévisée, la série nous montre des existences diverses qui expriment leur mal-être par des comportements asociaux comme la zoophilie, le silence renfrogné de Nathan seul sur son toit ou le désir de S. Mouse de transgresser tous les interdits. 

En conclusion, un épisode qui confirme les qualités du show et prouve qu'Angry Boys est bien plus qu'une simple galerie de personnages totalement déjantés. Un humour à la fois triste et impertinent, méchant et enfantin dans un monde où la frustration et la colère sont devenues des sentiments communs. Toujours sur un ton réaliste, la série lance de vrais intrigues et fait l'effort de proposer une certaine variété dans l'humour en refusant de se répéter, montrant que même le comique trash et vulgaire peut faire preuve d'une certaine profondeur. 

 

J'aime : 

  •  le personnage de S. Mouse totalement déjanté 
  •  un humour décalé qui ne fait jamais dans la facilité 
  •  un style visuel toujours aussi réaliste et prenant 
  •  la colère comme un moyen d'expulser sa rancoeur et de survivre dans le monde moderne 

 

Je n'aime pas : 

  •  un manque de cohésion entre les différentes storylines 

 

Note : 14 / 20 

Un épisode moins hilarant que le premier, mais qui installe des intrigues intéressantes tout en essayant de se renouveler dans le registre comique. Fini les doigts d'honneur, bonjour les rappeurs rebelles bourgeois qui appelle à faire ses besoins sur les voitures de flics. Etonnant.

L'auteur

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