Critique : Angry Boys 1.05

Le 19 septembre 2011 à 06:35  |  ~ 6 minutes de lecture
Une histoire où les frustrations s'accumulent, montrant les signes d'une colère prête à exploser.
Par sephja

Critique : Angry Boys 1.05

~ 6 minutes de lecture
Une histoire où les frustrations s'accumulent, montrant les signes d'une colère prête à exploser.
Par sephja

Piss Funny 

Nathan et Daniel reçoivent la visite d'une famille dont le plus jeune garçon est allé dans une école pour sourd, espérant que cette rencontre puisse motiver Nathan en vue de sa future insertion dans l'école pour sourd. Seulement, Daniel va profiter de l'occasion pour se donner en spectacle et se venger du jeu consistant à lui uriner dessus que Nathan a créé pour lui. Pendant ce temps, Tim continue de souffrir à cause de la présence écrasante de sa mère, S.Mouse ! tente de construire son propre studio, sa maison de disques ayant décidé de se débarrasser de lui. 

 

Résumé de la critique 

Un épisode plutôt réussi que l'on peut détailler ainsi : 

  •  Daniel, Nathan et une certaine vision de la fraternité 
  •  Tim pris au piège d'un monstre maternel 
  •  S. Mouse ou la différence entre provocation et bêtise
  •  l'évolution comme une nécessité 

 

 

Daniel, Nathan et une certaine fraternité 

Personnage récurrent dans l'oeuvre de Chris Lilley, Daniel et Nathan sont l'idéal pour comprendre sa méthode pour créer un effet comique, à savoir prendre un élément vulgaire et tenter de lui donner du sens en l'intégrant dans une situation sérieuse. Le but du jeu est pour Daniel de se venger du jeu de son frère consistant à lui pisser dessus pendant que ses parents reçoivent la visite d'un jeune sourd pour montrer à Nathan que son handicap n'est pas un frein à la communication. Si la vulgarité semble omniprésente dans cette intrigue, elle permet surtout de montrer la difficulté d'exister sans verbe.

Le corps devient le seul moyen d'expression et le fait d'uriner sur son frère la solution pour évacuer toute la rage et la colère contenue par la frustration du silence. Evidemment, les deux frères paraissent être de parfait idiots pour ceux qui viennent de l'extérieur, pourtant leur relation fraternelle existe et il est difficile d'imaginer l'un sans l'autre. Comme deux gamins, ils jouent à s'humilier l'un l'autre pour mieux marquer leur rapport de force, mais surtout cette lutte de pouvoir est le seul moyen de continuer à se supporter sans s'entretuer.

La colère est avant tout pour Lilley liée à la frustration, au besoin de se libérer du poids d'une certaine impuissance, surtout pour le cas de Tim, le skateboardeur, pris dans le plus monstrueux des pièges.

 

L'amour égoïste est un poison

Toujours pris au piège de sa mère et de son Gaystyle, Tim doit faire face à un cruel dilemme entre son amour pour elle et le besoin d'exprimer sa propre identité et de s'extraire de son influence. Personnage le plus passionnant de la série, il subit beaucoup, sa mère essayant de garder le contrôle total sur sa vie, n'ayant strictement aucun moyen d'exprimer toute sa frustration. Privée d'espace de liberté, l'esprit transforme la frustration se transforme en colère, puis en haine envers les symboles d'un univers étouffant.

Le contrôle total qu'elle opère sur lui apparaît comme une faute terrible qu'elle s'apprête à payer, perdant de vue son fils pour ne plus voir que les dividendes qu'il lui rapporte. L'enfant devient un bien qu'il faut rentabiliser et la colère le seul moyen pour Tim d'échapper à ce piège tendu par une mère qui ne mérite plus ce titre. Avec ce personnage assez touchant, Chris Lilley montre que la vulgarité peut venir des adultes et de leur obsession du contrôle, qui cache en fait une frustration et un manque de confiance en soi étonnant.

La provocation devient alors un moyen de dire certaines vérités, de véhiculer un message à la différence de S. Mouse ! qui incarne une colère artificielle et risible, uniquement motivée par le besoin de coller à une certaine image. 


 

 

L'intellectualité de S. Mouse !

Si Chris Lilley possède un goût certain pour la provocation, il aime l'intégrer dans une thématique forte et va exprimer avec son personnage de rappeur un profond mépris pour la vision moderne de la transgression. Entre cliché machiste et bêtise flagrante, son rappeur apparait comme un vulgaire idiot, incapable de se remettre en cause et de voir sa propre misère. Alignant les textes de rap ineptes, la jeune vedette autoproclamée voit son image se fissurer, première étape avant de redevenir lentement lui-même.

La colère est surtout tournée contre ses mauvais choix et son incapacité à prouver son talent qui, de toute façon, n'existe absolument pas. Comme une illusion qui se brise, S.Mouse redevient un petit ringard bourgeois sans talent, produisant un single "Big Black Balls" vraiment drôle, moment de ridicule particulièrement réussi. La provocation devient l'expression d'un néant intérieur, d'un manque d'intelligence qui donne à cette part de l'intrigue un aspect règlement de compte regrettable. Si les personnages de Lilley sont intéressants lorsqu'ils évoluent, ce personnage de rappeur stagne trop et ne sert qu'à véhiculer un message certes intéressant, mais pas à la hauteur du reste de l'épisode. 

 

L'importance de l'évolution 

Proposant une vision assez juste du rapport de l'être humain avec la colère, Chris Lilley compose des personnages qui évoluent lentement vers leur libération et l'expression de leur individualité. Assez humaniste de ce point de vue, il montre un vrai attachement envers ces prisonniers du silence pour Nathan, d'une bulle maternelle pour Tim ou d'une certaine image d'eux-mêmes pour S. Mouse. Tous doivent maintenant évoluer pour retrouver un certain équilibre et expulser cette rage qui trouve ses racines dans leur propre faiblesse.

En conclusion, un épisode plutôt réussi qui permet de voir la façon dont Chris Lilley construit son humour en essayant de donner du sens à ses provocations. Sur un ton toujours aussi réaliste, l'épisode confirme tout le potentiel de l'histoire du skateboardeur, sa mère insupportable étant sans conteste le personnage de comédie le plus remarquable. Moins réussi, les deux autres sketchs restent quand même satisfaisants, offrant deux vrais moments de comédie sans trouver le même niveau de profondeur que cette mère abominable. 

 

J'aime : 

  •  le personnage de la mère de Tim 
  •  les trois storylines assez drôles 
  •  un récit bien construit 
  •  un ton réaliste toujours aussi troublant 

 

Je n'aime pas : 

  •  le personnage de S.Mouse qui se répète 
  •  la famille de visiteurs pas vraiment exploitée dans l'intrigue de Nathan et Daniel

 

Note : 13 / 20 

Un bon épisode qui confirme les talents d'auteur de Chris Lilley et son humour corrosif, surtout dans l'intrigue du jeune skate-boardeur particulièrement réussie. L'étape d'introduction est terminé et il est temps de mettre tout cet univers en mouvement tant le potentiel de certains personnages est indéniable.

L'auteur

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