Critique : Angry Boys 1.06

Le 17 décembre 2011 à 10:37  |  ~ 7 minutes de lecture
Un épisode plus sombre que réellement drôle, preuve que l'auteur et créateur Chris Lilley peut se montrer très humain et horriblement cynique en même temps.
Par sephja

Critique : Angry Boys 1.06

~ 7 minutes de lecture
Un épisode plus sombre que réellement drôle, preuve que l'auteur et créateur Chris Lilley peut se montrer très humain et horriblement cynique en même temps.
Par sephja

Responsabilité et immaturité 

Les parents de Nathan partent en week-end et laisse son frère jumeau Daniel en charge de la maison, celui-ci profitant de l'occasion pour organiser une grande fête. De son côté, Blake lance une école de surf pour enfant obèse, tentant de les faire dépasser leur problème de poids par la psychologie inversée. De son côté, Gran tente désespérément d'établir un contact avec son nouveau prisonnier qui continue d'être raillé pour ses tendances zoophiles. 

 

Résumé de la critique 

Un épisode convaincant que l'on peut détailler ainsi : 

  •  une intrigue très réussie avec Gran 
  •  Daniel et le refus de la maturité 
  •  Blake et l'incapacité à construire 
  •  des personnages à la recherche d'excuse

 

 

Se protéger des autres 

Toujours gardienne dans sa prison pour mineure, Gran se retrouve confronté au mutisme de son prisonnier zoophile, les autres garçons jouant à se moquer de lui. L'occasion pour Chris Lilley de montrer combien le contact humain est difficile et indispensable pour établir le contact avec un adolescent en détresse. Toujours entre la comédie et le drame, son personnage crée une vraie relation avec ce jeune garçon qui commence à réapprendre les règles du vivre ensemble, offrant une scène poignante finale particulièrement réussie. 

Toujours sur le format du mockumentaire, Chris Lilley contrebalance cette intrigue touchante et difficile avec une storyline plus comique, le centre fermé pour adolescent accueillant un jeune délinquant qu'il faut terroriser. Contre un repas au KFC, Gran obtient de ses jeunes prisonniers qu'il montre un visage terrifiant du centre fermé, avec coups de fouet et promenade dans la cour, attachés à des boulets avec des chaînes. L'occasion de montrer que, même en prison, les adolescents sont adeptes des jeux de rôles, jouant ainsi à se moquer d'une réalité profondément dramatique.

La capacité à comprendre sa responsabilité est avant tout une histoire de prise de conscience qu'aucun centre fermé au monde ne va permettre d'amener. La dissuasion par la peur ne fonctionne que si l'adulte partage une vraie relation avec l'adolescent, permettant de créer une vraie prise de conscience de l'importance d'accepter certaines règles. C'est ce point que Chris Lilley met parfaitement en évidence, montrant encore une fois la pertinence de son regard pertinent sur la jeunesse d'aujourd'hui.

 

La difficulté d'accepter l'immaturité

La seconde storyline va porter sur Daniel qui cherche à mener la vie dure à un beau-père qu'il ne supporte plus, essayant perpétuellement de pousser sa mère à choisir son camp. Provocateur et fréquemment casse-pied, il cherche à s'opposer à chacun des décisions de cet homme , sans pour autant réussir à l'empêcher de gagner le coeur de sa mère. Une jalousie inavouée qui le pousse à chercher à l'humilier, plaçant ce beau-père dans une situation inconfortable, celui de l'impuissance d'un adulte face à la bêtise d'un adolescent. 

Le couple choisit de s'offrir un week-end prolongé loin de lui, lui laissant la responsabilité de surveiller le reste de la famille. Evidemment, cela va vite tourner à la catastrophe, Nathan prenant un malin plaisir à embêter son frère en se plaçant dans des situations impossibles. Placé devant ses propres fautes, Daniel réagit comme un gamin incapable de gérer ses propres sentiments et laisse apparaître un profond sentiment de solitude. Perdant Nathan pour l'école pour sourd et sa mère pour son nouveau mari, il comprend petit à petit que sa vie n'est plus ici, sans avoir le niveau de maturité pour couper le cordon. 

Plus maigre, la partie comique se limitera à Nathan qui va cumuler les bêtises, donnant des scènes trop pathétiques pour amener la dose de légèreté indispensable à la série. Si le portrait de Daniel est étonnant de crédibilité, Chris Lilley peine à équilibrer la dimension tragique de cette histoire avec une approche humoristique suffisamment corrosive.

 

 

Une vie de remplissage, sans but à atteindre

La storyline de Blake va se révéler la moins intéressante des trois, malgré la propension de Lilley à tourner efficacement ce type de personnage en dérision. Le problème est que Blake (à gauche, au-dessus) est un glandeur, un fainéant de première qui refuse obstinément de devenir un adulte. Adepte des mauvaises excuses, il subit perpétuellement tout, incapable de prendre l'initiative, comme si son absence de testicules l'avait privé de ce sentiment de responsabilité en lui offrant la justification parfaite à sa fainéantise. 

Pour pallier aux reproches de sa femme, il crée un club de surf pour garçons obèses, idée totalement farfelue qui aurait dû permettre à Chris Lilley de nous offrir un bon moment de comédie. Seulement, si les tentatives de Blake de redonner un état d'esprit positif aux garçons se révèlent assez ridicule pour prêter à sourire, le rire laisse vite place à la grimace devant l'incompétence de ce personnage. Si l'idée de départ est intéressante, l'impuissance de cet homme à bâtir ses projets font de lui un être qui incarne l'irresponsabilité, thème qui sert le lien entre les différentes storylines.

L'histoire pathétique d'un homme qui remplit son existence n'importe comment pour cacher un vide intérieur dramatique, à la recherche de son identité. Peu attachant et moins drôle que les autres, Blake est clairement le maillon faible d'une série qui ne parvient pas à lui assigner un registre comique spécifique.

 

Une scène superbe 

En dressant le portrait de personnages qui fuient leur responsabilité, Chris Lilley construit le portrait d'une génération passive qui se cherche des excuses pour masquer son manque de maturité. Pourtant, un seul personnage va accepter ses fautes, le détenu zoophile de Gran qui est le seul à montrer des signes de remords lors d'une scène émotionnellement forte, d'un réalisme poignant, donnant une belle conclusion à cet épisode. Un moment d'humanité et d'espoir surprenant, singularité dans l'univers cynique et volontiers railleur d'Angry Boys.

Au final, un épisode intéressant, Lilley possédant une capacité surprenante à composer des personnages à la fois terriblement réaliste et symptomatique de leur époque. Si la storyline de Gran est une belle réussite, les deux autres peinent à trouver le bon équilibre entre drame et comédie, versant fréquemment dans le pathétique en exposant l'irresponsabilité de ces personnages. Une série qui confirme la force de son propos, mais qui semble venir petit à petit à bout de son propre format, même si le final laisse entrevoir une évolution prometteuse pour l'avenir.

 

J'aime : 

  •  la storyline de Gran très réussie 
  •  la scène finale très poignante 
  •  la mise en scène et les comédiens excellents 

 

Je n'aime pas : 

  •  Nathan un peu trop pathétique 
  •  Blake personnage moins intéressant que les autres 

 

Note : 13 / 20 

Un épisode qui pointe du doigt l'irresponsabilité comme une maladie moderne, à l'exception de Gran qui hérite de la storyline la plus passionnante. La jalousie de Daniel et la passivité de Blake se révèle bien moins enthousiasmante, offrant des gags trop pathétiques pour déclencher vraiment l'hilarité. Un épisode ambitieux, mais qui échoue à trouver le bon équilibre entre drame et comédie.

L'auteur

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