Critique : Angry Boys 1.07

Le 18 décembre 2011 à 06:36  |  ~ 7 minutes de lecture
Un épisode provocateur et intelligent qui fait évoluer les différents personnages.
Par sephja

Critique : Angry Boys 1.07

~ 7 minutes de lecture
Un épisode provocateur et intelligent qui fait évoluer les différents personnages.
Par sephja

"Fuck off, you fags !" 

Lassée d'entendre Daniel traiter tout et n'importe quoi de "pédale", sa mère décide de lui faire passer une journée avec le seul garçon homosexuel du village. Tim pour sa part remet de plus en plus en cause le "Gay-Style" crée par sa mère et cherche à imposer sa véritable identité sexuelle, mais se heurte au refus de celle-ci. Pendant ce temps, S.Mouse effectue ses travaux d'intérêts généraux, chantant devant des élèves d'école primaire un rap sur le danger que représente les pédophiles.

 

Résumé de la critique

Un épisode très réussi que l'on peut détailler ainsi :

  •  un épisode sur la sexualité et la tolérance avec Nathan 
  •  une histoire d'identité sexuelle intéressante pour Tim 
  •  S.Mouse ou les dangers de perdre contact avec la réalité 
  •  un épisode drôle et grinçant à la fois, intelligemment transgressif 

 

A noter que Angry Boys, série australienne, arrive sur HBO en Janvier. 


 

Redonnez du sens à une injure 

Si le titre vous a choqué, sachez qu'il s'agit d'une catchphrase de Daniel qu'il lance dès que quelque chose l'énerve, traitant tout le monde de "pédale" qu'il soit un être humain ou une brique de lait. Le but de Lilley est de montrer qu'il est possible de vider les mots de leur sens en les répétant à outrance, créant une grande différence entre ce qui est dit et la signification réelle de ces mots. Pour lui infliger une leçon, sa mère invite Henry Keddy, le seul homosexuel de la ville, pour passer l'après-midi avec lui et lui enseigner la tolérance. 

Evidemment, le but de la série n'est pas de jouer les moralisateurs, mais de montrer que Daniel est finalement assez sociable, son problème n'étant pas l'intolérance. Très vite, il intègre Henry à son groupe d'amis et se montre plus tolérant que la moyenne, le mot "pédale" étant seulement celui le plus à même de choquer les adultes. Une façon pour Chris Lilley de montrer que l'homophobie et le refus de l'autre s'exprime plus dans un comportement que dans certains mots, la fixation de Daniel pour le pénis laissant quelques doutes sur son orientation sexuelle. 

Les deux jumeaux se différencie peu à peu, Daniel se montrant plus ouvert et sociable que Nathan, marquant une évolution intéressante de son personnage. En intégrant cet adolescent gay à son groupe, il prend tout le monde par surprise et montre un début de maturité, preuve que son injure préféré n'était finalement que le produit d'un désir inassouvi.

 

Etre homosexuel ... ou pas 

Le cas de Tim va se révéler très différent de celui de Daniel, le jeune champion de skate vivant sous le contrôle d'une mère qui a su imposer le "gay-style" en l'obligeant à revendiquer une identité homosexuelle mensongère. Seulement, le jeune garçon commence à découvrir ses propres aspirations et cherche à s'extraire de l'emprise de sa mère en revendiquant sa propre identité. Pour garder le contrôle sur lui, celle-ci le prive de liberté, lui dérobant son libre arbitre en lui diagnostiquant un état de dépression avancé. 

Sa mère est un monstre, une créature cruelle jouée par un Chris Lilley qui construit une histoire terrible, celle d'une femme aveuglée par l'argent et la gloire qui détruit lentement son fils en l'empêchant de s'exprimer. Cloîtré, cloisonné, le jeune homme reçoit comme cadeau un chiot, geste d'affection qui se vide de son sens lorsqu'elle révèle la stratégie de merchandising qui l'accompagne. Une histoire sombre et tragique qui dresse le portrait d'une femme en train de perdre totalement le sens des réalités, détruisant son fils talentueux à son seul profit. 

Angry Boys est cruel, sombre, cherche à nous faire aimer ou haïr des personnages, construisant avec Tim une histoire tragique en totale opposition avec celle de S. Mouse. Plus qu'une comédie, Chris Lilley montre l'importance de laisser s'exprimer l'identité sexuelle, Tim souffrant horriblement de ne pas se reconnaître dans l'image médiatique que son image médiatique véhicule. 

 

 

S. Mouse le loser 

Si Tim est un personnage tragique de la série, S. Mouse est incontestablement l'élément comique de l'épisode, sa storyline donnant un parfait exemple de l'utilisation que fait Chris Lilley de la provocation. L'idée de lui faire accomplir ses travaux d'intérêts généraux devant une classe de primaire, offrant l'occasion idéale de s'apercevoir combien le rappeur pour ados a perdu le contact avec la réalité. On rit évidemment lorsqu'il entame sous concert à coup de "motherfucker" devant des enfants de moins de sept ans, avant qu'il ne se lance dans un long rap anti pédophile surréaliste. 

Personnage décalé qui s'est enfermé dans son propre monde, S. Mouse incarne une jeunesse accroc au vedettariat qui a perdu en partie la notion du réel. Chaque scène est une séquence d'humiliation hilarante du rappeur pour ados, la réalité lui infligeant la leçon qu'il mérite. Le voyage au centre commercial va ressembler à un chemin de croix, l'odyssée d'un ringard qui découvre qu'il n'est plus qu'un anonyme comme les autres et sa profonde dépendance à la notoriété. Loser pathétique, S. Mouse incarne la bêtise de ceux qui prônent des valeurs sans réfléchir, preuve que Lilley n'accorde pas vraiment foi au grand discours. 

Une storyline moqueuse qui permet de contempler combien la mécanique comique d'Angry Boys repose sur une certaine cruauté, mais aussi à notre attachement pour ce personnage. Heureusement, il ouvre sur la fin la porte vers un début de rédemption pour ce rappeur qui, en essayant de devenir un artiste, a totalement abandonné son public.

 

Provoquer est un savoir-faire 

Comique adepte de l'humour grinçant, Chris Lilley montre au travers de ses personnages une tendance à chercher l'humiliation de ces créations pour mieux les pousser à évoluer et éviter qu'ils ne s'enferment dans une routine. La moindre insulte devient le symbole d'un désir refoulé, la moindre faute de goût est utilisée pour faire évoluer les personnages. Auteur ingénieux, il montre un vrai attachement pour ses créations qu'il cherche à explorer au maximum en les plaçant devant leur propre contradiction.

En conclusion, un épisode intelligent et férocement drôle qui fait avancer les intrigues, confrontant les trois héros du point de vue des autres. Que ce soit Daniel qui découvre son identité sexuelle, Tim qui ne supporte plus d'être le jouet de sa mère et S. Mouse qui ne parvient même plus à gagner à sa cause un public de jeunes enfants, tous les héros d'Angry Boys se retrouvent confrontés à leur propre faiblesse. Un récit grinçant qui confirme la qualité de ce show venu d'Australie, à l'heure où la HBO s'apprête à le diffuser aux Etats-Unis.

 

J'aime :

  •  le concert de S. Mouse surréaliste 
  •  la storyline de Tim brillante 
  •  l'intrigue de Nathan intéressante
  •  des gags particulièrement bien construits 

 

Je n'aime pas : 

  •  la scène du centre commercial trop prévisible 

 

Note : 14 / 20 

Un très bon épisode qui renoue avec cet humour grinçant qui est la marque de fabrique de la série d'Angry Boys, avec un concert de S. Mouse totalement surréaliste. Un épisode qui pousse les personnages à évoluer, lançant la deuxième moitié de saison vers une conclusion particulièrement intéressante. Spécialiste de l'humour grinçant et l'observation du comportement des ados, Chris Lilley nous offre avec Tim une intrigue passionnante, à la limite de la tragédie. 

L'auteur

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