Lundi 12 aout, 13h :
- Mon cœur, j’ai l’épisode…
- On le regarde ?
- Non attends attends…
17h :
- On regarde Breaking Bad ?
- Non attends attends…
20h :
- Et maintenant ?
- Je sais pas… Putain j’ai peur…
Nous avons finalement regardé l’épisode à 22h. Un an que nous attendions la suite de ça :
Un an pour oublier, il me fallait bien quelques semaines pour me replonger dans l’ambiance et quelques heures pour réfléchir… Et si c’était décevant ?
23h, SMS à Taoby :
Moi : Ah lala… Breaking Bad
Lui : Bordel…
Moi : pffouu
Lui : Dean Norris le genie
Moi : Clairement. Gi-gan-tesque.
Voilà, le petit interlude sur ma vie privé est terminé. Me voilà devant mon clavier pour « critiquer » un épisode sans tâche d’une série dont le nom est désormais gravé dans le marbre du panthéon du 7ème art. Et qu’est-ce que je vais bien pouvoir en dire ? Bien réalisé ? Parfaitement interprété ? Intelligent ? Fun et solennel à la fois ? Vous le savez déjà…
L’épisode est proche de la perfection. Regardez-le dix fois d’affilé et essayez de remarquer une cassure de rythme mal venue, un plan en trop, une interprétation surjouée… Je ne vois pas. Breaking Bad s’est installé avec une douceur impudique dans mon schéma mental et cela soulève bien des questions… Comment fait Vince Gilligan ? A-t-il réellement fait croire à Dean Norris que sa femme était à l’hôpital ? A-t-il payé deux jumeaux mexicains pour lui casser la gueule ? Pourquoi TOUTES les séries ne prennent-elles pas exemple sur Breaking Bad ? Tant d’interrogations qui demeureront à jamais sans réponse… Mais bon, il va bien falloir écrire quelque chose de constructif alors allons-y…
Breakin' Bad
Je ne parlerais pas du pré-générique, il n’est là que pour nous exciter et nous maintenir en tension tout au long de la saison. C’est la seule chose un peu démagogique que je vois dans Breaking Bad. Cette manière de nous donner envie de finir une saison alors qu’on lui fait déjà confiance aveuglément. On sait qu’Heisenberg finira par apparaitre au grand jour et par faire peur à Carol la voisine. Moi je veux apprécier chaque seconde de la série avant d’arriver à ce dénouement inévitable.
Dean Norris est clairement à l’honneur dans ce season premier. La caméra le suit pendant les 6 premières minutes de l’épisode, ce qui est rare dans Breaking Bad. Le montage lui-même est un peu différent de celui que l’on voit habituellement dans Breaking Bad : on reste longtemps sur Hank, puis longtemps sur Walt, puis on revient sur Hank et Jesse n’apparait qu’au bout de 19 minutes. Ces huit derniers épisodes s’annoncent centrés sur le duel final et la trame reste fixée sur trois storylines. Les trois qui se sont construites durant ces cinq dernières saisons et Vince Gilligan a si bien maitrisé son sujet jusque-là qu’il ne reste plus qu’à laisser les « petits oublis » comme la petite fille de Mike et Lydia agir sur la vie de Walt.
Jesse
Commençons par Jesse qui arrive tard dans l’épisode mais encore une fois, exactement au bon moment en fait. Après la tension de Hank et avant celle de Walt, Jesse imprime une conscience et une humanité dans ce début de dénouement. Il souffre et ça nous soulage.
Vraisemblablement, Jesse continue son chemin de croix seul dans son coin et on sent dans son regard tout ce qu’il ne dit pas. Aaron Paul aura fait un sans-faute pendant toute la série, léger en apparence mais d’une profondeur insondable quand il le faut, il ne parle que très peu durant l’épisode mais on sait qu’il sait, on sait qu’il souffre, on sent sa colère. Je crois voir dans la séquence où il « distribue » son argent un début de rejet total et donc une étincelle qui pourrait provoquer une réaction en chaine parallèle à la storyline qui concerne Hank et Walt.
Jesse est clairement écrasé par l’argent. Il cherche à s’en débarrasser chez Saul, avec un clochard, en le jetant dans la rue, en le dépensant dans la drogue. Visiblement, c’est le dernier frein à son explosion.
Cette séquence...
... le montre perdu entre colère et abandon, noyé dans les meurtres, les mensonges et les faux-semblants. Aaron Paul tient sûrement le rôle le plus difficile : celui du mec qui reste humain dans un monde qui n’en a presque plus aucune trace. Et cette manière de le vivre, oscillant entre peur et désir de retrouver une bonne conscience, me parait être la meilleure approche. Il ne veut plus faire de mal mais la vengeance semble le dévorer.
D’une certaine manière, Jesse n’est pas/plus dans le Far West de Breaking Bad. Il a subi les situations pour se retrouver avec un gros paquet de fric dont il ne sait plus quoi faire. Les précédents épisodes l’ont montré subissant la mort du jeune homme sur sa moto et suspectant Walter d’être responsable de le destruction de tout ce qui comptait pour lui. Il ne faut par conséquent pas mettre M. Pinkman sur la touche trop vite. Sa haine semble sans fond.
Walter/Heisenberg
Comme l’avis d’OSS sur l’épisode le fait judicieusement remarquer, Walt est vêtu de blanc pendant tout l’épisode. Le vert, la couleur d’Heisenberg, apparait à chaque fois que celui-ci a une raison de sortir ici :
Et ici :
Skyler semble tenter de maitriser la nouvelle situation et sans la révélation sur le trône de Hank, l’épisode aurait pu continuer sur la happy ending du précédent. Je vais être un peu pointilleux ici : j’ai trouvé Skyler peu crédible face à Lydia. Ou alors c’est la réaction de cette dernière qui ne l’est pas. C’était dans la droite lignée de la série, une confrontation très « Far West », mais je ne conçois pas vraiment pourquoi Lydia a peur de Skyler.
Bref, mis à part l’apparence de la « picture of innocence, just sweatness and light » de la vie de la famille White, je n’ai pas eu l’impression de voir une seule fois Walter White durant tout l’épisode. Ce visage fermé, cette maitrise de toutes les situations, ces émotions intelligemment distillées dans son environnement sont autant de manifestations d’Heisenberg. Et la conclusion n’en est qu’une confirmation… Après un court instant de stress, Walt attrape ses cojones à deux mains et va voir Hank pour une confrontation frontale. Walt ? Non, ce n’est pas sa manière d’agir.
La métamorphose semble donc complète. Walter White est déjà mort et Heisenberg usera de chaque émotion pour manipuler son entourage. Il se ment à lui-même, il ment à Jesse, il ment à Skyler puisqu’il se ment à lui-même (on sait bien qu’il ne pourra pas tourner la page vu les « petits oublis »), il ment à Hank… et quand Hank le lui fait remarquer calmement, il détourne l’émotionnel pour le transformer en menace…
- If you don't know who i am...
...Maybe the best course…. Would be to treat lighly…
Ah la la… Breaking bad et ses punchlines.
Hank
Chaque seconde ou Dean Norris est à l’écran installe une ambiance. L’acteur est habité, on entend presque son cœur battre. Vince Gilligan bichonne son « bon » . La séquence où il cherche sur Wordmule (tête de mule) de Jim White est juste gigantesque et je n’oserais même pas parler de la dernière scène de l’épisode car chaque mot pourrait la salir.
Hank a tout compris et la dernière minute du huitième épisode n’était donc pas un clif de prestidigitateur. Quand Hank sort des toilettes, sa tête fait disparaitre 365 jours d’attente. On est dans l’ambiance immédiatement. Rien ne vient ternir la prestation de Dean Norris ensuite. On voit les idées et les constats s’enchainer dans ses yeux, on subit presque sa crise d’angoisse avec lui, il vient de comprendre ce qu’on lui cache depuis cinq ans !
J’ai du mal à concevoir une suite qui laisse retomber la pression. Il ne reste que sept épisodes et je les vois se dérouler sur quelques jours seulement dans la storyline. Hank et Jesse savent et nous savons Walter intelligent. Il sait que Jesse a compris et qu’il doit le manipuler, tout en continuant d’intimider son beau-frère. Mais si deux jumeaux mexicains et Tuco lui-même n’ont pas réussi a intimider Hank, je ne vois pas comment Heisenberg pourrait utiliser ce levier… La colère d'Hank le rend résistant aux gémissements de Walt, seule son incompréhension envers le personnage d’Heisenberg le fascine. Nul doute qu’il saura reprendre l’avantage quand il l’aura cerner.
Et Jesse va revenir… Qui aura son pistolet chargé ? Rendez-vous la semaine prochaine pour plus d’indices.
Ce que j’ai aimé :
- Pendant et après l’épisode
Ce que je n’ai pas aimé :
- Avant l’épisode
Note : 17/20